Droit du logiciel : 4 avril 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 20/02662

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Droit du logiciel : 4 avril 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 20/02662

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/02662 – N° Portalis DBVH-V-B7E-H2PB

YRD/JLB

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’ALES

24 septembre 2020

RG:19/00090

S.A.S. TRANSDEV OCCITANIE PAYS NIMOIS

C/

[R]

Grosse délivrée le 04 AVRIL 2023 à :

– Me LANOY

– Me SOULIER

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 04 AVRIL 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ALES en date du 24 Septembre 2020, N°19/00090

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président,

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère,

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Delphine OLLMANN, Greffière, lors des débats et Monsieur Julian LAUNAY BESTOSO, Greffier, lors du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 01 Mars 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 04 Avril 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

S.A.S. TRANSDEV OCCITANIE PAYS NIMOIS

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Patrick LANOY de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Anne laure PERIES de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMÉ :

Monsieur [O] [R]

né le 24 Septembre 1965

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Eve SOULIER de la SELARL EVE SOULIER-JEROME PRIVAT-THOMAS AUTRIC, avocat au barreau D’AVIGNON

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 22 Novembre 2022

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 04 Avril 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

M. [O] [R] est embauché en qualité de conducteur receveur par la société STDG, société de transport interurbain, soumise aux dispositions de la convention collective des transports interurbains.

Par la suite, son contrat de travail était repris par la société Transdev Occitanie Pays Nîmois.

Constatant que la société Transdev ne réglait pas l’indemnité de repas unique eu égard aux dispositions de la convention collective des transports applicables mais également à un accord conclu le 22 novembre 1991, M. [R] saisissait le conseil de prud’hommes d’Alès le 20 septembre 2019 de demandes en rappel d’indemnités, lequel, par jugement contradictoire du 24 septembre 2020, a :

– dit que l’employeur est redevable des primes repas,

– condamné la SAS Transdev Occitanie Pays Nîmois, en la personne de son représentant en exercice, à payer à M. [O] [R] la somme de 2493,20 euros au titre de rappel de prime de repas, correspondant à 271 repas au taux de 9,20 euros,

– dit que le comportement de l’employeur constitue une résistance abusive,

– condamné la SAS Transdev Occitanie Pays Nîmois, en la personne de son représentant en exercice, à payer à M. [O] [R] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

– condamné la SAS Transdev Occitanie Pays Nîmois, en la personne de son représentant en exercice, à payer à M. [O] [R] la somme de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SAS Transdev Occitanie Pays Nîmois, en la personne de son représentant en exercice, aux entiers dépens, y compris ceux éventuellement nécessaires à l’exécution du jugement par huissier de justice,

– dit à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement et qu’en cas

d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par la SAS Transdev Occitanie Pays Nîmois, en la personne de son représentant en exercice, en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties de leurs autres ou plus amples demandes, fins et conclusions.

Par acte du 21 octobre 2020, la société Transdev Occitanie Pays Nîmois a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ordonnance en date du 15 septembre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 22 novembre 2022. L’affaire a été fixée à l’audience du 06 décembre 2022. Elle a été renvoyée à l’audience du 1er mars 2023 à laquelle elle a été retenue.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 21 novembre 2022, la SAS Transdev Occitanie Pays Nîmois demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Alès en ce qu’il a :

* dit qu’il était redevable des primes repas,

* l’a condamné, en la personne de son représentant en exercice, à payer à M. [C] la somme de 2.493,20 euros au titre de rappel de prime de repas, correspondant à 271 repas au

taux de 9,20 euros ;

* dit que son comportement constituait une résistance abusive,

* l’a condamné à payer à M. [R] la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

* l’a condamné à payer à M. [R] la somme de 900 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* l’a condamné à payer à M. [R] aux entiers dépens, y compris ceux éventuellement nécessaires à l’exécution de la décision par huissier de Justice,

* dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire, en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par elle en sus de l’indemnité mise à sa charge sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

* l’a débouté de ses autres ou plus amples demandes, fins et conclusions.

Par conséquent :

A titre principal :

– constater la régularité de ses pratiques ;

– constater l’absence de résistance abusive de sa part ;

– débouter M. [R] de l’ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire :

– ramener les demandes de M. [R] à de plus justes quantum,

En tout état de cause :

– ordonner le rabat de l’ordonnance de clôture du 15 septembre 2022 afin de permettre à M. [R] de se mettre en état ;

– condamner M. [R] à payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [R] aux entiers dépens.

Elle soutient que :

– les taux pratiqués sont plus intéressants pour le salarié que les dispositions auxquelles il se réfère,

– elle verse :

– soit l’indemnité conventionnelle aux salariés qui répondent aux conditions de l’article 8 sus visé, et, allant au-delà, également à un salarié disposant d’une coupure d’une durée supérieure à 1 heure s’il se trouve, pour sa coupure déjeuner, à l’extérieur de son lieu de prise de service ;

– soit une prime forfaitaire de déplacement journalier, correspondant à l’indemnité conventionnelle de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner, lorsque le salarié prend son service sur un lieu différent de son lieu habituel.

– elle considère que l’indemnité de repas de l’article 8 du Protocole du 30 avril 1974 est donc bien versée, mais sous une autre dénomination et selon un montant bien plus favorable.

En l’état de ses dernières écritures en date du 14 avril 2021, M. [O] [R] demande à la cour de :

– recevoir l’appel de la société Transdev Occitanie Pays Nîmois

– le dire mal fondé,

En conséquence,

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Alès

– dire et juger que l’employeur est redevable d’une prime de repas unique, sur la période du 1er aout 2016 au 30 avril 2019,

– condamner la société Transdev au paiement d’une somme de 2493,20 euros à titre de rappel de salaires sur prime de repas unique

– dire et juger que le comportement de la société Transdev est constitutif d’une résistance abusive,

– condamner la société Transdev au paiement d’une somme de 2500 euros à titre de dommages intérêts

– 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner les défendeurs aux entiers dépens.

Il fait valoir que :

– l’argumentation de l’employeur n’est pas conforme aux dispositions de la convention collective, aux accords conclus dans l’entreprise et au droit positif s’agissant de deux primes de nature distinctes et n’ayant pas les mêmes vocations.

– un employeur ne peut s’exonérer du paiement des avantages conventionnels issus d’une convention collective notamment de l’article 8 de la convention collective des transports, en soutenant qu’il règle par ailleurs une indemnité de déplacement plus favorable.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

MOTIFS

Le salarié fonde sa demande sur l’article 8 de la section 2A du protocole du 30 avril 1974 en lien avec l’annexe 1 des ouvriers du 25 juillet 1951, prévoit que :

« 1° Le personnel qui se trouve, en raison d’un déplacement impliqué par le service, obligé de prendre un repas hors de son lieu de travail perçoit une indemnité de repas unique, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, sauf taux plus élevé résultant des usages.

Toutefois, lorsque le personnel n’a pas été averti au moins la veille et au plus tard à midi d’un déplacement effectué en dehors des ses conditions habituelles de travail, l’indemnité de repas unique qui lui est allouée est égale au montant de l’indemnité de repas, dont le taux est également fixé par le tableau joint au présent protocole.

Enfin, dans le cas où, par suite d’un dépassement de l’horaire régulier, la fin de service se situe après 21 h 30, le personnel intéressé reçoit pour son repas du soir une indemnité de repas.

2° Ne peut prétendre à l’indemnité de repas unique :

a) Le personnel dont l’amplitude de la journée de travail ne couvre pas entièrement la période comprise soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures ;

b) Le personnel qui dispose à son lieu de travail d’une coupure ou d’une fraction de coupure, d’une durée ininterrompue d’au moins 1 heure, soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures.

Toutefois, si le personnel dispose à son lieu de travail d’une coupure d’une durée ininterrompue d’au moins 1 heure et dont une fraction au moins égale à 30 minutes est comprise soit entre 11 heures et 14 h 30, soit entre 18 h 30 et 22 heures, une indemnité spéciale, dont le taux est fixé par le tableau joint au présent protocole, lui est attribuée. »

Nul ne discute l’application de ces dispositions en l’espèce.

La société appelante indique qu’elle verse l’indemnité conventionnelle de repas, appelée en interne « prime de panier » ou encore « indemnité de repas unique » (libellé sur le bulletin de salaire).

Elle précise qu’elle a instauré un régime plus favorable d’indemnisation des repas pour les salariés prenant leur service sur un lieu différent de leur lieu habituel de prise de service (lieu différent du lieu d’embauche tel que prévu au contrat) en versant une indemnisation dite « déplacement journalier ».

Ainsi, le protocole de fin de grève du 22 novembre 1991 prévoit que « les déplacements journaliers des conducteurs remplaçants [donc ceux qui prennent leur service depuis un lieu différent du lieu de prise de service habituel et contractuel] seront rémunérés selon les règles de la Convention collective ; la compensation financière étant basée sur l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner à raison d’une par déplacement ».

Par «rémunérés selon les règles de la Convention collective» il faut entendre les conditions d’attribution de la prime, sinon le membre de phrase «la compensation financière étant basée sur l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner» serait vidé de son sens.

La société ajoute que pour les agents prenant leur service sur un lieu différent de leur lieu habituel de prise de service, l’indemnité de repas unique est remplacée depuis 30 ans par une prime forfaitaire de déplacement journalier, qui s’ajoute d’ailleurs aux indemnités kilométriques.

Elle soutient que l’indemnité de déplacement journalier (qui « englobe » dans cette hypothèse l’indemnité de repas de la CCN) correspond à l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner (alors même qu’ils ne découchent pas) selon un montant plus favorable, pour tenir compte de ce changement de lieu de prise de service.

En résumé elle verse :

– soit l’indemnité conventionnelle aux salariés qui répondent aux conditions de l’article 8 sus visé, et, allant au-delà, également à un salarié disposant d’une coupure d’une durée supérieure à 1 heure s’il se trouve, pour sa coupure déjeuner, à l’extérieur de son lieu de prise de service ;

– soit une prime forfaitaire de déplacement journalier, correspondant à l’indemnité conventionnelle de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner, lorsque le salarié prend son service sur un lieu différent de son lieu habituel.

Elle considère que l’indemnité de repas de l’article 8 du Protocole du 30 avril 1974 est donc bien versée, mais sous une autre dénomination et selon un montant bien plus favorable.

Elle en conclut que les primes de repas et de déplacement sont ainsi des primes de même nature, qui ont la même fonction, à savoir celle de compenser la même sujétion, celle résultant du fait pour le salarié de ne pas pouvoir prendre son repas hors de son lieu de travail.  

Prime unique de repas et indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner (indemnité de déplacement journalier) sont des avantages ayant le même objet dont le contenu est identique, même sous des dénominations différentes.

Il ne peut être sérieusement contesté que l’indemnité de chambre et l’indemnité spéciale de petit déjeuner n’ont pas vocation à dédommager le salarié d’un quelconque déplacement, celui-ci pouvant prétendre au paiement d’indemnités kilométriques dans ce cas.

Il n’est pas davantage discuté que l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner (indemnité de déplacement journalier) prévue par l’accord d’entreprise est plus favorable que l’indemnité conventionnelle de repas de l’article 8 du Protocole du 30 avril 1974.

L’employeur précise sans être utilement contredit qu’à titre d’exemple au 1er août 2016, selon la convention collective :

– l’indemnité de repas unique s’élevait à 8,05 euros

– l’indemnité de repas s’élevait à 13,04 euros

– l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner s’élevait à 27,53 euros.

Au demeurant il n’est pas précisé par le salarié quelle sujétion autre que prendre ses repas hors de l’entreprise indemniserait l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner (indemnité de déplacement journalier) alors qu’il n’est en tout état de cause nullement question pour le salarié de coucher à l’hôtel et de prendre son petit déjeuner, ce qu’il ne soutient pas du reste. Cette indemnité couvre les frais inhérents à la prise d’un repas en déplacement.

Il en résulte que c’est à bon droit que l’employeur a versé l’indemnité de chambre et indemnité spéciale de petit déjeuner (indemnité de déplacement journalier) en lieu et place de l’indemnité de repas unique, ces deux indemnités ayant vocation à indemniser le même objet ne peuvent donc se cumuler, le principe de faveur ayant joué au bénéfice du salarié.

Concernant la situation à compter du 1er mai 2019 le compte-rendu de la réunion des délégués du personnel du 30 avril 2019 acte : « afin d’éviter de nouveaux problèmes d’interprétation en cas de déplacements à compter du 1er mai 2019, le logiciel sera paramétré pour que les paniers soient comptabilisés en fonction du lieu d’embauche contractuel ».

Dans un courrier en date du 14 juin 2019 l’employeur précise que « dans une volonté d’apaisement sur ce point précis, la nouvelle Direction a décidé d’attribuer une prime de panier en plus de la prime de déplacement à compter du 1 er mai 2019 par décision unilatérale matérialisée dans le PV de CE du vendredi 26 avril 2019. Il a toutefois bien été précisé qu’aucune rétroactivité ne serait appliquée dans ce cadre ».

S’agissant d’une décision unilatérale de l’employeur destinée à mettre un terme à la discussion, cette décision ne saurait rétroagir et c’est par une interprétation qui lui est toute personnelle que le salarié prétend que l’employeur aurait reconnu que les primes de paniers seraient dues même en cas de paiement de la prime de déplacement unique.

Enfin, nul ne discute que le salarié se trouvait dans les conditions prévues soit par l’article 8 de la section 2A du protocole du 30 avril 1974 en lien avec l’annexe 1 des ouvriers du 25 juillet 1951 soit par le protocole de fin de grève du 22 novembre 1991 .

Le jugement encourt l’infirmation et le salarié sera débouté de l’ensemble de ses prétentions.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner l’intimé à payer à l’appelante la somme de 400,00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

– Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,

– Déboute M. [R] de l’ensemble de ses prétentions,

– Condamne M. [R] à payer la société Transdev Occitanie Pays Nîmois la somme de 4 00,00 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne M. [R] aux dépens de première instance et d’appel.

Arrêt signé par le président et par le greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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