Droit du logiciel : 31 janvier 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/00953

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Droit du logiciel : 31 janvier 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 20/00953

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 31 JANVIER 2023

RP

N° RG 20/00953 – N° Portalis DBVJ-V-B7E-LPC2

[M] [O]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2020/006702 du 18/06/2020 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de BORDEAUX)

[M] [O]

[X] [O]

c/

[T] [Z]

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT

ASSOCIATION SAFED

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 10 janvier 2020 par le Tribunal Judiciaire de BERGERAC (RG : 15/00724) suivant déclaration d’appel du 19 février 2020

APPELANTS :

[M] [O], intervenant en qualité de tuteur de sa soeur [X] [O] désigné à cette fonction par décision du juge des tutelles de [Localité 10]

né le [Date naissance 4] 1963 à [Localité 7] ([Localité 7])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3]

[M] [O] intervenant à titre personnel

né le [Date naissance 4] 1963 à [Localité 7] ([Localité 7])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3]

[X] [O], représentée par son tuteur Monsieur [M] [O] désigné par décision du juge des tutelles de [Localité 10]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 7] ([Localité 7])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 8]

représentés par Maître Bettina GRELLETY, avocat au barreau de BERGERAC

INTIMÉS :

[T] [Z]

né le [Date naissance 2] 1935 à [Localité 9] ([Localité 9])

de nationalité Française

demeurant [Adresse 5]

représenté par Maître Patrick BELAUD de la SCP MONEGER-ASSIER-BELAUD, avocat au barreau de BERGERAC

L’AGENT JUDICIAIRE DE L’ETAT, domicilié en cette qualité [Adresse 11]

représenté par Maître Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

ASSOCIATION SAFED, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualité au siège sis [Adresse 6]

représentée par Maître Thibault BRIDET, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Frédéric PIRAS de la SELARL PIRAS ET ASSOCIES, avocat plaidant au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 06 décembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Véronique SAIGE

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Mme [X] [O], exploitant un hôtel-restaurant à [Localité 10], a été placée sous sauvegarde de justice par le tribunal d’Instance de Sarlat le 1er décembre 2000, puis sous curatelle de son frère M. [M] [O], le 7 mars 2001, en charge également de la gestion de l’activité.

Le 15 mai 2003, le tribunal de Sarlat a aggravé la mesure en tutelle et a désigné M. [T] [Z] en qualité de tuteur. Ce dernier, estimant la situation du fonds de commerce non viable, a obtenu l’autorisation du juge des tutelles le 23 mai 2003, pour céder ce fonds à la SARL Les Affaires Reprennent et le 12 juin 2003, un compromis de location gérance avec promesse de vente du fonds de commerce était signé avec cette société.

Mme [O] et sa soeur, Mme [E] [O] ont fait appel de ces deux décisions.

Par décision avant-dire droit du 12 septembre 2003, le tribunal de grande instance de Bergerac a ordonné une expertise médicale confiée au docteur [R] et demandé la production des documents signés par le tuteur.

Le 21 novembre 2003, le même tribunal a confirmé partiellement l’ordonnance du juge des tutelles du tribunal de Sarlat du 23 mai 2003 et autorisé M. [Z] à vendre le bien à la SARL Les Affaires Reprennent au prix de 503.100 € et dit n’y avoir lieu à paiement du loyer mensuel de 2.600 € de novembre 2003 à mars 2004.

Le 21 janvier 2005, le tribunal de grande instance de Bergerac a placé Mme [X] [O] sous curatelle et désigné la SAFED en lieu et place de M. [Z].

Le 23 mars 2012, le juge des tutelles a transformé la mesure de curatelle en tutelle et désigné la SAFED comme tuteur. Le 13 septembre 2012, M. [M] [O], frère de la majeure protégée, a été désigné comme tuteur.

Par actes des 17 avril et 27 mai 2015, M. [M] [O], agissant en qualité de tuteur de Mme [X] [O], a fait assigner M. [T] [Z] et l’agent judiciaire de l’Etat aux fins notamment d’obtenir la communication du dossier de tutelle de Mme [O] par le juge des tutelles de Sarlat et la condamnation in solidum de M. [Z] et de l’Agent Judiciaire de l’Etat au paiement de la somme de 157.037,22 € en réparation de son préjudice financier et celle de 50.000 € au titre de son préjudice moral et à titre subsidiaire, une expertise comptable ayant pour objet de chiffrer les fautes de gestion et calculer le préjudice de Mme [O].

La SAFED a été assignée en réparation des mêmes préjudices par acte du 4 décembre 2017 et les procédures ont été jointes.

Par jugement du 10 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Bergerac a débouté M. [M] [O] en qualité de tuteur de Mme [X] [O] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné à titre personnel, à payer à M. [T] [Z], à la SAFED et à l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 1.200 € chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Mme [X] [O] et M. [M] [O] agissant à titre personnel et en qualité de tuteur de Mme [X] [O] ont relevé appel de ce jugement le 19 février 2020 et par conclusions déposées le 1er novembre 2020, ils demandent à la cour de :

– réformer intégralement le jugement entrepris.

A titre principal,

– déclarer l’ensemble des demandes reconventionnelles présentées par M. [T] [Z], la SAFED et à L’agent judiciaire de l’Etat, contre Mme [X] [O] seule, irrecevables

– rejeter l’appel incident formé par M. [T] [Z] et les demandes en découlant

– juger n’y avoir lieu à condamner M. [M] [O] à titre personnel

– juger les demandes présentées à l’encontre de M. [Z], de l’agent judiciaire de l’Etat et la SAFED recevables et non prescrites.

– confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré l’action engagée contre le SAFED recevable.

– confirmer le jugement en ce qu’il a rejeté les demandes indemnitaires de M. [Z]

– rejeter l’ensemble des demandes présentées par M. [T] [Z], l’agent judiciaire de l’Etat, et la SAFED.

– se faire communiquer le dossier de tutelle de Mme [X] [O], par le juge des tutelles de Sarlat.

– condamner in solidum l’agent judiciaire de l’Etat et M. [T] [Z] à verser à Mme [X] [O] représentée par son tuteur M. [M] [O]:

*la somme de 157.037,22 € en réparation de son préjudice financier, outre intérêts au taux légal à compter de la délivrance de la présente assignation (sic) jusqu’à parfait paiement, ainsi que celle de 50.000,00 € en réparation de son préjudice moral.

* la somme de 2000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

– subsidiairement, donner acte à Mme [O] de ce qu’elle n’est pas opposée à l’organisation d’une expertise comptable, l’expert ayant pour mission de vérifier les fautes de gestion dénoncées et recalculer le préjudice de Mme [O],

– condamner in solidum l’agent judiciaire de L’Etat et M. [T] [Z] aux entiers dépens.

A titre subsidiaire,

Et si la cour devait déclarer les demandes présentées à l’encontre de M. [Z] prescrites,

– juger que la SAFED a commis une faute de négligence et plus subsidiairement qu’elle a fait perdre une chance à Mme [O] d’être indemnisée d’un préjudice découlant des fautes de gestion de M. [Z] ,

– condamner in solidum l’agent judiciaire de l’Etat et la SAFED pris en la personne de son représentant légal à verser à Mme [X] [O] représentée par son tuteur M. [M] [O] la somme de 157 037,22 € en réparation de son préjudice financier, outre intérêts au taux légal à compter de la délivrance de la présente assignation (sic) jusqu’à parfait paiement, ainsi que celle de 50 000,00 € en réparation de son préjudice moral et la somme de 2000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

– subsidiairement, donner acte à Mme [O] de ce qu’elle n’est pas opposée à l’organisation d’une expertise comptable, l’expert ayant pour mission de vérifier les fautes de gestion dénoncées et recalculer le préjudice de Mme [O].

– condamner in solidum l’agent judiciaire de l’Etat et le SAFED pris en la personne de son représentant légal aux entiers dépens.

– plus subsidiairement encore, et si la cour devait rejeter les demandes présentées à l’encontre de M. [Z] et de la SAFED,

– condamner l’agent judiciaire de l’Etat pris en la personne de son représentant légal à verser à Mme [X] [O] représentée par son tuteur M. [M] [O] la somme de 157.037,22 € en réparation de son préjudice financier, outre intérêts au taux légal à compter de la délivrance de la présente assignation (sic) jusqu’à parfait paiement, ainsi que celle de 50 000,00 € en réparation de son préjudice moral et la somme de 2000,00€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 3 août 2020, M. [T] [Z] demande à la cour de :

– confirmer le jugement du 10 janvier 2020 en ce qu’il a jugé que l’action de Mme [X] [O] à son encontre est prescrite et irrecevable.

– infirmer, dans le cadre de l’appel incident du concluant, le jugement du 10 janvier 2020 en ce qu’il a jugé l’action de Mme [O] recevable sur le fondement de l’article 1137 du code civil pour dol ou fraude et déclarer l’action irrecevable et mal fondée sur ces fondements.

– subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu’il a jugé infondées l’ensemble des demandes de Mme [X] [O] à l’encontre de Mme [Z] et l’en a déboutée.

– rejeter la demande d’expertise comptable.

– infirmer dans le cadre de l’appel incident du concluant, le jugement du 10 janvier 2020 en ce qu’il a débouté M. [Z] de sa demande de dommages et intérêts et condamner Mme [X] [O] à lui verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral.

– infirmer dans le cadre de l’appel incident du concluant, le jugement du 10 janvier 2020 en ce qu’il a débouté M.[Z] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et condamner Mme [X] [O] à verser à M. [T] [Z] la somme de 3.000 euros sur ce fondement au titre de la procédure de première instance et 2.000 euros sur le même fondement au titre de la procédure d’appel outre les dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions déposées le 7 août 2020, l’agent judiciaire de l’Etat prie la cour de :

– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré non prescrite l’action contre la SAFED.

– juger prescrite l’action contre la SAFED,

– confirmer le jugement au surplus.

En conséquence:

– débouter Mme [X] [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions.

– la condamner aux dépens de l’instance, avec distraction au profit de la SELARL Lexavoué et au paiement d’une somme de 1.500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées le 28 juillet 2020, l’association SAFED demande à la cour de :

A titre principal,

– juger que l’action initiée par Mme [O] à son encontre est prescrite, réformant sur ce point le jugement querellé, et rejeter toutes les demandes formées contre l’association tutélaire,

A titre subsidiaire,

– juger que M.et Mme [O] n’apportent pas la preuve d’une faute du SAFED dans ses missions de curatelle et de tutelle,

– rejeter la demande d’expertise sollicitée,

– juger que M.et Mme [O] ne justifient pas plus des préjudices allégués,

– rejeter toutes les demandes formées à l’encontre de la concluante comme étant non fondées, et la mettre purement et simplement hors de cause.

En tout état de cause,

– condamner M. et Mme [O] à payer au SAFED la somme de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance distraits au profit de Maître Bridet, avocat, sur son affirmation de droit.

L’affaire a été fixée à l’audience collégiale du 6 décembre 2022.

L’instruction a été clôturée par ordonnance du 22 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription de l’action en responsabilité du tuteur ou curateur

1- A l’égard de M. [Z]

M. [Z] a été désigné curateur le 13 mars 2003, puis tuteur de [X] [O] par une ordonnance du 15 mai 2003 qui, sur appel de celle ci et de sa s’ur [E], a été infirmée par un jugement du 21 janvier 2005 prononçant le placement sous curatelle de la requérante et désigné la SAFED, en qualité de curateur de sorte qu’il a ainsi été mis fin le 21 janvier 2005 à la mesure de tutelle confiée à M. [Z].

En application des articles 475 et 495 du code civil, alors en vigueur à la fin de la mesure de tutelle, toute action d’un majeur protégé contre le tuteur se prescrit par cinq ans, à compter de la fin de la mesure de protection concernée.

Le délai de prescription applicable à la fin de la mesure de tutelle a donc commencé à courir à compter du 21 janvier 2005 et a pris fin le 21 janvier 2010 de sorte qu’à la date de délivrance de l’assignation à M. [Z] et à l’agent judiciaire du trésor, le 27 mai 2015, l’action en responsabilité dirigée contre l’Etat et contre le mandataire était prescrite.

Le jugement sera en conséquence confirmé par motifs substitués, puisque le délai de prescription de l’article 423 du code civil retenu par le premier juge pour faire droit à la fin de non recevoir n’était pas applicable en l’espèce.

En effet, ce texte (‘L’action en responsabilité se prescrit par cinq ans à compter de la fin de la mesure de protection alors même que la gestion aurait continué au-delà. Toutefois, lorsque la curatelle a cessé par l’ouverture d’une mesure de tutelle, le délai ne court qu’à compter de l’expiration de cette dernière’) est issu de la loi du 5 mars 2007 dont l’article 45-I prescrit une entrée en vigueur au 1er janvier 2009, y compris aux mesures de protection ouvertes antérieurement, sauf application immédiate de certains articles étrangers au présent litige.

En conséquence, comme le fait valoir à bon droit l’agent judiciaire de l’Etat, la mesure critiquée étant terminée avant la date d’application de la réforme de 2007, seules les règles de prescription antérieures s’appliquent en l’espèce.

2- A l’égard de la SAFED

La SAFED a été chargée de la curatelle du 21 janvier 2005 au 23 mars 2012, puis de la tutelle du 23 mars 2012 jusqu’au 13 septembre 2012, date à laquelle M. [O] l’a remplacée.

En vertu des dispositions de l’article 423 du code civil précité, en vigueur à compter du 1er janvier 2009 et applicable à la fin de la mesure de tutelle confiée à la SAFED, le délai de prescription de cinq ans a commencé à courir à compter du 13 septembre 2012 et a expiré le 13 septembre 2017.

En conséquence, compte tenu de la délivrance de l’assignation par la requérante, le 4 décembre 2017, l’action en responsabilité contre la SAFED et par voie de conséquence contre l’Etat est également prescrite.

Le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur l’action fondée sur le dol et la fraude

1- Sur la recevabilité

M. [Z] soulève l’irrecevabilité de l’action engagée contre lui sur le fondement de la fraude et du dol au motif que la protection des majeurs est une charge publique et non une obligation au sens du code civil, que la responsabilité des organes de protection judiciaire est spécifiquement prévue par les articles 421 et 422 du même code et par conséquent, que les dispositions de l’article 1137 relatives aux obligations d’un contractant envers un autre sont inapplicables en l’espèce.

Il suffit cependant de constater que l’article 421 du code civil cité par l’intimé lui même énonce que : ‘Tous les organes de la mesure de protection judiciaire sont responsables du dommage résultant d’une faute quelconque qu’ils commettent dans l’exercice de leur fonction. Toutefois, sauf en cas de curatelle renforcée, le curateur et le subrogé curateur n’engagent leur responsabilité, du fait des actes accomplis avec leur assistance, qu’en cas de dol ou de faute lourde’.

L’action des appelants fondée sur le dol à l’égard de M. [Z] est donc recevable, comme l’a décidé le premier juge, étant observé que la prescription de cette action n’est plus débattue en appel.

2- Sur le fond

Les débats d’appel et les pièces soumises à la cour ne permettent pas de remettre en cause la pertinente motivation du premier juge qui, au terme de l’analyse circonstanciée de chacun des manquements invoqués par les consorts [O], a constaté que, malgré la longue liste de ces manquements, ceux ci sont peu ou pas étayés en l’absence de production d’éléments matériels et ne constituent pas, en tout état de cause, s’ils étaient établis, une faute assimilée au dol ou à la fraude, mais tout au plus une négligence ou un faute de gestion atteinte par la prescription.

A titre d’exemple, les appelants imputent au tuteur une fraude aux droits de la personne protégée en ce qu’il a vendu le fonds de commerce de l’hôtel-restaurant de [Localité 10] à un prix inférieur à celui proposé par d’autres acquéreurs et n’a pas présenté au juge d’autres offres plus avantageuses.

En réalité, cette vente, autorisée par le juge des tutelles, a fait l’objet d’un recours de [X] [O] et de sa soeur et le tribunal de grande instance de Bergerac l’a validée au prix principal de 503.100 € avec un loyer de 2.600 € mensuels par jugement du 21 novembre 2003 et en appel comme en première instance, il n’est versé aux débats qu’une seule offre concurrente du 24 mai 2003, tranmise au juge des tutelles à l’initiative de M. [Z] par M. [C] [J] pour une prix d’achat de 503.082 € et un loyer de 2.287 € mensuels, soit une offre inférieure à celle retenue (pièces 31, 32 et 33 appelants).

Dans un autre registre, les appelants prétendent que M. [Z] n’a pas fait les démarches pour la prise en charge par l’assurance d’un prêt de 500.000 FF contracté pour régler la soulte due à son ex-époux par [X] [O] alors qu’elle était malade et que le délai de carence était écoulé.

Or, outre que si ces faits étaient établis, ils ne pourraient constituer qu’une négligence et non un comportement frauduleux, les seuls éléments produits par les appelants sont un échéancier de prêt sans aucune date ni référence ( pièce 23 ) et une attestation d'[M] [O] établie en 2006, dans un cadre non précisé ( pièce 22 ), dont il résulte que, selon lui, [X] [O] pouvait bénéficier, dès l’an 2000, de la garantie assurance du prêt contracté en juin 2000 auprès de la Banque Populaire de [Localité 10] selon offre acceptée en 1999, sans avoir à respecter le délai de carence de 6 mois.

Il apparaît ainsi que M. [O], curateur de sa soeur du 7 mars 2001 au 15 mai 2003, était en mesure d’effectuer lui même les démarches dont il reproche à M. [Z] de s’être abstenu alors que le mandat de celui ci n’a commencé que le 15 mai 2003.

La cour ajoute que, contrairement à ce que les conclusions des appelants tendent à démontrer, tout acte qui peut préjudicier aux droits de la personne protégée ne constitue pas un dol qui suppose la preuve de manoeuvres frauduleuses que les consorts [O] n’apportent pas pour ce qui concerne les manquements invoqués devant la cour.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a rejeté les demandes de ce chef.

Ces mêmes demandes fondées sur l’existence d’une perte de chance seront aussi rejetées dans la mesure où, en l’absence de faute dolosive, aucun dommage ne peut être indemnisé, que ce soit au titre du préjudice réel invoqué ou d’une perte de chance.

Sur la condamnation de M. [O] à titre personnel

1- Sur la recevabilité de l’appel de M. [O] à titre personnel

Au visa de l’article 546 du code de procédure civile, l’agent judiciaire de l’Etat invoque dans le corps de ses conclusions l’irrecevabilité de l’appel de M. [O] à titre personnel au motif que celui ci n’était partie en première instance qu’en sa qualité de tuteur.

Toutefois, aucune demande d’irrecevabilité de l’appel n’est formalisée dans le dispositif de ses conclusions qui seul lie la cour.

Au demeurant, cette demande se serait heurtée d’une part aux dispositions de l’article 914 du code de procédure civile qui imposent aux parties de saisir le seul conseiller de la mise en état en la matière et d’autre part aux dispositions de l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme puisque, condamné par le premier juge à titre personnel à payer une somme de 1.200 € à chacun des trois défendeurs au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens, M. [O] ne saurait être privé du droit de contester cette condamnation.

2- Sur le fond

Le tribunal a prononcé la condamnation précitée de M. [O] à titre personnel au motif qu’il ne justifiait pas d’une autorisation du juge des tutelles pour engager la procédure.

Ce faisant, il a commis une triple erreur de droit puisque M. [O] n’intervenait qu’en sa qualité de tuteur et non à titre personnel, que les demandes d’indemnités au titre de l’article 700 du code de procédure civile n’étaient pas formées contre lui et en outre, qu’en sa qualité de tuteur, l’article 504 alinéa 2 du code civil lui permet d’agir seul en justice pour faire valoir les droits patrimoniaux de la personne protégée.

Le jugement sera ainsi infirmé de ce chef.

Sur la demande de communication du dossier de tutelle

Sur demande de communication des comptes de gestion de M. [Z], le greffe du tribunal d’instance de Sarlat a répondu au conseil des appelants le 13 juin 2018 que le tribunal n’était plus en leur possession, tous les comptes de gestion ayant été adressés en original au procureur de la république du tribunal de grande instance de Bergerac sur sa demande.

Sur demande de communication du dossier au parquet de Bergerac le 8 novembre 2018, celui ci a répondu que le tribunal s’était dessaisi au profit d’un tribunal non indiqué dans le logiciel et qu’une recherche effectuée sur la cour d’appel de Bordeaux n’avait rien donné.

M. [Z] a indiqué ne disposer d’aucun archive ni souvenir sur la juridiction devant laquelle des poursuites pénales auraient été engagées contre lui.

En l’état de ces réponses, la demande de communication du dossier ne peut pas prospérer et le tribunal qui a rejeté cette demande sera confirmé par motifs substitués.

Sur la demande de dommages et intérêts de M. [Z]

Au regard des affirmations péremptoires et non étayées, voire parfois gratuites accusant M. [Z] de malversations et de manoeuvres frauduleuses destinées à nuire aux intérêts de Mme [O], l’intimé est fondé à obtenir réparation du préjudice moral subi par la mise en cause de son intégrité et de ses qualités professionnelles dans le cadre de la présente procédure où est demandée sa condamnation au paiement d’une somme de plus de 200.000 €.

Ce préjudice sera indemnisé par une somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts.

Sur les demandes annexes

M. [M] [O] en sa qualité de tuteur de Mme [X] [O] supportera les entiers dépens de première instance et d’appel et versera à chacun des intimés les sommes fixées au dispositif du présent arrêt au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a :

– déclaré recevable l’action en responsabilité contre la SAFED;

– condamné M. [M] [O] à titre personnel à payer à M. [T] [Z], à la SAFED età l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 1.200 € chacun sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens;

Statuant à nouveau dans cette limite;

Déclare irrecevable comme precrite l’action en responsabilité contre la SAFED;

Dit n’y avoir lieu à condamnation de M. [M] [O] à titre personnel;

Confirme le jugement pour le surplus et, y ajoutant;

Condamne M. [M] [O], en sa qualité de tuteur de Mme [X] [O] à payer à M.[T] [Z] la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts

Condamne M. [M] [O], en sa qualité de tuteur de Mme [X] [O] à payer, au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

– à M. [T] [Z], la somme de 3.000 €

– à la SAFED la somme de 2.000 €

– à l’agent judiciaire de l’Etat la somme de 1.000 €

Condamne M. [M] [O], en sa qualité de tuteur de Mme [X] [O] aux entiers dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés selon les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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