Droit du logiciel : 3 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/07934

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Droit du logiciel : 3 mars 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 19/07934

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-2

ARRÊT AU FOND

DU 03 MARS 2023

N° 2023/080

Rôle N° RG 19/07934 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BENNB

[U] [C]

C/

Société SUEZ RVMEDITERRANEE ANCIENNEMENT DENOMMEE SITA SUD

Copie exécutoire délivrée

le : 03 mars 2023

à :

Me Jérôme BRESO, avocat au barreau de MONTPELLIER

Me Isabelle FICI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE

(Vestiaire 361)

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’AIX-EN-PROVENCE en date du 04 Avril 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 15/948.

APPELANT

Monsieur [U] [C], demeurant [Adresse 1]

représenté par Me Jérôme BRESO, avocat au barreau de MONTPELLIER substitué par Me Charlène PICARD, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEE

SAS SUEZ RV MEDITERRANEE anciennement dénommée SITA SUD, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Isabelle FICI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Laetitia LOPEZ, avocat au barreau de LYON

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 11 Janvier 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Florence TREGUIER, Présidente de chambre a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de :

Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre

Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante

Madame Ursula BOURDON-PICQUOIN, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2023.

ARRÊT

Contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 03 Mars 2023,

Signé par Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre et Mme Cyrielle GOUNAUD, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

Selon contrat à durée indéterminé en date du 31 mars 2010 à effet du 6 avril 2010 La SAS SITA SUD , qui exploite sur les Régions Alpes Provence Côte d’Azur et Languedoc Roussillon des activités de collecte, transport, élimination, tri et valorisation de déchets , a embauché M [C] en qualité de technicien de maintenance déchet, rattaché au site du [Localité 2] intégrant un centre de tri, statut maitrise coefficient 150 de la convention collective nationale des activités du dechet, en contrepartie d’une rémunération mensuelle brute de 2034 euros outre un treizième mois pour 151,67 heures de travail et une part variable calculée en fonction d’objectifs.

Au dernier état de sa rémunération, Monsieur [C] percevait un salaire mensuel brut de base de 2 221,50 € outre prime d’ancienneté (88,86 €) et une part variable de rémunération en fonction des objectifs fixés et des résultats obtenus par lui.

Le 6 mai 2015 M [C] a adressé une lettre de démission à son employeur.

Le 9 juin 2015 il lui adressait une seconde lettre dans laquelle il exposait que sa décision était motivée par le fait qu’il occupait un poste de responsable de maintenance sans en avoir la rémunération, assumait des astreintes et une charge de travail telle qu’elle n’était plus tenable ; il indiquait avoir à maintes reprises attiré l’attention de son employeur sur sa situation, sans effet. Il concluait son courrier par cette phrase ‘ ces manquements sont à l’origine de la rupture de mon contrat de travail’.

Le 2 octobre 2015 M [C] saisissait la conseil de prud’hommes d’Aix en Provence aux fins de voir condamner son employeur à des dommages intérêts pour harcèlement moral et voir requalifier sa démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse outre une demande de rappel de salaires.

Par jugement en date du 4 avril 2019 notifié le 23 avril 2019 le conseil de prud’hommes

d ‘Aix en Provence déboutait les parties de l’intégralité de leurs demandes et leur laissait la charge de leurs dépens respectifs.

Par déclaration en date du 7 mai 2019 M [C] a interjeté appel de la décision dans chacun des chefs de son dispositif.

Dans ses ultimes conclusions déposées et notifiées par RPVA le 30 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des ses prétentions et moyens, il demande à la cour de :

‘ Infirmer le jugement déféré en l’ensemble de ses dispositions.

Et statuant à nouveau,

A titre principal

‘ Juger que la société SITA SUD a commis à l’encontre de Monsieur [C] des agissements constitutifs de harcèlement moral.

En conséquence :

‘ CONDAMNER la société SITA SUD à verser à Monsieur [C] la somme de 55.692 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

A titre subsidiaire

‘ JUGER que la société SITA SUD a manqué à son obligation de sécurité de résultat à l’encontre de Monsieur [C].

En conséquence :

‘ CONDAMNER la société SITA SUD à verser à Monsieur [C] la somme de 55.692 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi.

En tout état de cause :

‘ JUGER que la démission de Monsieur [C] a été provoquée par les manquements commis par l’employeur à ses obligations.

‘DIRE ET JUGER que la démission de Monsieur [C] doit produire les effets d’une prise d’acte de la rupture emportant les effets d’un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.

. CONDAMNER la société SITA SUD au paiement des sommes suivantes :

– 825,29 € à titre de rappel de salaire outre 82,53 € de congés payés y afférents.

– 23,43 € à titre de rappel de primes d’ancienneté outre 2,34 € à titre de congés payés y afférents.

– 110,47 € à titre de rappel de 13ème mois outre 11 € de congés payés y afférents.

– 5.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour violation des dispositions conventionnelles encadrant les périodes d’astreintes.

– 74.256 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi pour licenciement sans cause réel et sérieuse ;

– 3.248,70 € à titre d’indemnité légale de licenciement.

– 6.188 € à titre de rappel d’indemnité de préavis outre 618,8 € de congés payés y afférents.

– 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Ainsi que les mesures suivantes :

. AFFICHAGE pendant 6 mois aux portes du siège social de la société SITA SUD du dispositif de l’arrêt à intervenir ;

. COMMUNICATION par RAR par la société SITA SUD à l’intégralité des IRP de la société (DP, DS, CE, CHSCT), des termes de l’arrêt ;

. PUBLICATION sur le site INTERNET de la Société SITA, en page d’accueil au format ¿ de page pendant 6 mois du dispositif de l’arrêt ;

. PUBLICATION dans le journal LE MONDE et dans la Presse quotidienne régionale de chaque lieu de magasin, au format 1/8ème de page, du dispositif de l’arrêt à intervenir ;

Le tout sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter du 15ème jour suivant la signification de l’arrêt à intervenir.

. TRANSMISSION du dossier au Parquet compétent en application de l’article 40 du Code de procédure pénale au vu du caractère généralisé et massive de la fraude en matière d’astreintes.

. INTERETS de droit à compter de la date de la demande.

. CONDAMNER la société SITA SUD aux entiers dépens.

A l’appui de ses prétentions il expose que

‘La cour de cassation admet, depuis un arrêt SNECMA de 2008, que ‘les méthodes de gestion mises en oeuvre par un supérieur hiérarchique (‘) peuvent caractériser un harcèlement moral (‘) dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel’.

Que depuis la loi du 10 aout 2016, applicable en l’espèce en ce que les règles de preuve constituent des garanties de fond, il appartient au salarié d’établir des faits laissant présumer l’existence d’un harcèlement moral et à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs démontrant qu’ils sont étrangers à tout harcèlement moral.

‘Que le salarié victme d’un harcèlement moral peut, en cas de justification de préjudices distincts, obtenir réparation du préjudice moral résultant du harcèlement au titre notamment d’un manquement de l’employeur à son obligation de prévention et du préjudice résultant de la rupture du contrat de travail .

‘Qu’en l’espèce depuis l’année 2011 M [C] a revendiqué auprès de son employeur son passage au statut de responsable de maintenance, coefficient 167 de la convention collective, en raison des fonctions exercées consistant dans la responsabilité de la maintenance de 4 sites distincts ainsi qu’il le démontre par

-sa signature électronique mentionnant la qualité de responsable et la même qualité mentionnée sur les compte rendu de réunion.

-l’établissement par ses soins du budget du service maintenance

-l’établissement par ses soins du calendrier des sessions de formation de son équipe

-la gestion des plannings

– la préparation des contrats de travail des salariés

– le rôle joué en matière de formation à la sécurité

-la gestion des heures supplémentaires qui lui incombait

‘Que l’employeur qui admet lui même l’existence de la fonction de responsable de maintenance dans les évaluations , s’est constamment refusé à lui en attribuer le bénéfice alors qu’il subissait en cette qualité des pressions, des restrictions sur ses congés, des astreintes importantes ayant fortement dégradé ses conditions de travail ce qui s’analyse en un harcèlement moral.

Subsidiairement il considère qu’en le soumettant à une telle pression morale alors qu’il avait attiré maintes fois son attention sur le mal être qui en résultait, l’employeur a manqué à son obligation de sécurité qui s’étend à la santé psychique des salariés.

‘Que son contrat de travail ne définit aucune obligation au titre des astreintes ni n’en définit le cadre et la rémunération alors que l’employeur lui a imposé des astreintes et est allé bien au delà des dispositions de la conventions collective en l’obligeant à des asteintes pouvant aller jusqu’à 8 semaines consécutives ; qu’il n’a pas déféré à l’injontion de communiquer délivrée par le conseil de prud’hommes par ordonnance du 17 novembre 2015.

‘Que la démission intervenue ayant été assortie de griefs à l’encontre de l’employeur doit être requalifiée en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes les conséquences de droit liée à l’indemnisation de la perte de l’emploi, l’indemnité légale de licenciement, le préavis

Par conclusions déposées et notifiées par RPVA le 24 octobre 2019 la société SITA SUD devenue SUEZ RV MEDITERRANEE demande à la cour de:

‘Confirmer le jugement deféré rendu par le Conseil de Prud’hommes d’AIX EN PROVENCE le 4 avril 2019,

Déclarer Monsieur [C] non fondé en son appel,

En conséquence,

Dire et Juger qu’il n’existe aucun fait de harcèlement ni aucun manquement de l’employeur à son obligation de securité et de résultat,

Dire et Juger qu’il n’existe aucun manquement grave de la part de l’employeur susceptible de lui imputer a posteriori la rupture du contrat de travail, alors que Monsieur [C] a librement demissionné de son poste et que ce n’est qu’a posteriori qu’il a imaginé en solliciter la requalification,

Dire et Juger que,

Monsieur [C] a eété rempli de ses droits,

En conséquence, débouter Monsieur [C] de l’integralité de ses demandes qui, très subsidiairement et en tout état de cause, ne sauraient caracteriser un quelconque manquement de la part de l’employeur susceptible d’etre assimilé a un harcelement, à un manquement à l’obligation de sécurité de résultat ou encore aux manquements graves seuls susceptibles d’imputer la rupture à l’employeur.

‘ Condamner Monsieur [C] à verser a la societe SUEZ RV MEDITERRANEE une indemniée de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de procedure civile,

‘ Condamner Monsieur [C] aux entiers depens.

Elle expose en substance que

‘Le coefficient 150 correspond à la realite des fonctions et responsabilités exercées par Monsieur [C] au sein de la societe SITA SUD telles qu’elles ressortent de la fiche de poste et de la convention collective et qu’il relevait du pouvoir d’ appréciation et de direction de l’employeur d’ appliquer un coefficient superieur étant précisé que la fonction de responsable de maintenance n’est pas identifiée en tant que telle par la convention collective.

‘Que des objectifs ont été fixés au salarié en 2014 afin de pouvoir prétendre au coefficient 167 mais n’ont pas été atteints ainsi qu’il ressort de l’évaluation de 2015

‘ Qu’un désaccord sur le coefficient dont le salarié pouvait saisir le conseil de prud’hommes, une situation de tension dans l’entreprise, que ce soit dans le cadre de relations hiérarchiques ou entre collègues de travail, ne peut recevoir la qualification de harcèlement moral.

Qu’en l’espèce l’appelant ne produit pas le moindre certificat médical ou le moindre élément d’alerte de l’Inspection du travail, de la Médecine du travail, des organes représentatifs du Personnel ou encore du CHSCT qui justifierait d’une situation permettant d’évoquer la notion de harcèlement ou de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité de résultat.

‘Que les arguments de l’appelant sont dépourvus de portée car

– il ressort de l’organigramme de l’entreprise que MM [C] et [P] était positionnés sur le même coefficient, seules leurs fonctions étant différentes ; que M [C] n’a jamais procédé d’ailleurs aux entretiens d’évaluation de M [P];

– que bien que participant à l’élaboration des plannings et du budget M [C] n’était pas décisionnaire ainsi qu’il ressort de l’attestation de M [S] et de leurs échanges de courriels.

– que M [C] n’avait aucun accès au logiciel de gestion des dossiers des salariés même si il préparait les contrats.

‘Que M [C] a toujours bénéficié de la récupération de ses heures supplémentaires ou d’astreinte et ne formule d’ailleurs aucune demande de rappel de salaire de ce chef, ce qui démontre bien leur caractère très ponctuel en raison notamment d’un planning des agents par roulement intégrant les astreintes de semaine ou du samedi jusqu’à 13 heures ( aucune astreinte de samedi après midi , de dimanche ou de nuit ) ; que c’est la raison pour laquelle il a lui même demandé à être d’astreinte plusieures semaines consécutives afin de bénéficiér d’une prime d’astreinte qui s’analyse en un véritable complément de salaire.

‘Qu’aucun manquement grave n’est donc suceptible de justifier une requalification de la démision en prise d’acte produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse

‘Que les préjudices ne sont pas justifiés.

L’ordonnance de clôture est en date du 12 décembre 2022.

SUR QUOI

I Sur l’exécution du contrat de travail

A/ Sur le coefficient appliqué aux fonctions exercées.

M [C] a été embauché en qualité de technicien de maintenance au coefficient 150 correspondant à l’emploi de référence de Technicien confirmé, agent de maitrise de la convention collective.

Pour la définition précise des fonctions relevant de cet emploi et confiées au salarié l’intimée ne peut valablement se référer à la fiche de poste figurant en pièce 7 de son dossier dès lors que cette fiche n’a pas été signée par M [C] et annexée à son contrat de travail.

La cour relève néanmoins que les dispositions de la convention collective ( pièce 8 de l’intimé) applicables en l’espèce ne distingue pas les fonctions relevant du coefficient 150 de celles relevant du coefficient 167 et ne définit pas d’élément venant caractériser spécifiquement les fonctions de responsable de maintenance .

Elle fixe en réalité trois échelons s’appliquant aux fonctions de technicien confirmé agent de de maitrise qui , quel que soit le coefficient , comprennent

– l’oganisation des travaux et du planning de travail en liaison avec le responsable d’exploitation.

– l’affectation du personnel ( donc une fonction d’encadrement )

– l’animation et l’organisation de la formation, notamment en maitière de sécurité

– la veille technologique

– la gestion des moyens

– le contrôle préventif et et l’intervention de réparation et d’entretien des équipements.

– la détermination de cout d’entretien et de réparation ( budget)

– la passage des commandes et leur suivi

– l’application des règles de sécurité

– le controle qualité.

de sorte qu’elle instaure une dissociation entre les fonctions exercées et le coefficient applicable.

Ainsi le seul fait que M [C] ait exercé les fonctions de planification et d’encadrement du personnel, de préparation du budget, d’établissement du calendrier des formation, de transmission des fiches de temps de son équipe suite à la mutation de M [O] dans un autre service en 2012 ( pièce 39 de l’appelant ) n’implique pas en lui même une accession au coefficient 167.

Toutefois il convient de souligner que nonobstant le silence de la convention collective sur la qualification de ‘ responsable de maintenance ‘ l’employeur lui même désigne le coefficient 167 sous cette dénomination dans les objectifs fixés à M [C] lors de son évaluation de 2014 ( pièce 13 de l’intimé ‘ perspective d’évolution professionnelle validée par son Manager : responsable de maintenance ‘).

Or la cour note que M [C] apparaissait d’ores et dejà en cette qualité sur des comptes rendus de réunion ( pièce 21 de l’appelant ) ainsi que dans des mails adressés par la direction ( pièce 23 et 23-3 , pièce 24 pour la validation des heures supplémentaires par l’appelant ).

Cette analyse est confirmée par les attestations de MM [P], [R] et [T] qui affirment tous que M [C] les a encadrés en cette qualité.

La convention collective ne mentionne pas que le technicien agent de maitrise accédant au coefficient 167 doit évaluer lui même les agents qu’il encadre ; elle précise au contraire que les fonctions s’exercent en lien avec le responsable d’exploitation.

Le seul fait que l’appelant n’ait pas évalué lui même M [P] et les ouviers encadrés est donc indifférent.

En conséquence nonobstant le positionnement de M [P] dans l’organigramme établi en novembre 2014 soit postérieurement à l’entretien d’évaluation de M [C] en 2014 et écarté de ce fait par la Cour, la Cour considère que c’est à juste titre que M [C] revendique son positionnement au coefficient 167.

Le jugement est donc infirmé de ce chef et la cour fait droit aux demandes de rappel de salaire avec incidence congés payés , rappel de primes d’ancienneté et incidence congés payés ainsi que rappel de 13ème mois et incidence congés payés dont les montant ne sont pas contestés par l’intimé.

B/ Sur les astreintes

Le contrat de travail de l’appelant ne mentionne pas spécifiquement l’obligation d’effectuer des astreintes et leur rémunération , il prevoit néanmoins que le salarié pourra être amené à travailler le samedi, le dimanche les jours fériés et de nuit.

L’intimée ne conteste pas l’existence des astreintes.

La contestation de l’appelant porte en fait sur la durée des astreintes qui ont éxcédé 7 jours consécutifs ou non par période de 4 semaines contrairement aux dispositions de l’article 2-11-2 de la convention collective ;

En effet l’appelant ne conteste pas avoir été régulièrement rémunéré des astreintes effectuées ainsi qu’il ressort de l’examen de ses bulletins de salaires ni même avoir été rempli de ses droits à repos compensateurs, heures supplémentaires ou majorations prévues par la convention collective.

Ainsi l’absence de production du ‘ calcul des astreintes des trois dernières années avant le 31 décembre 2015 ‘ demandé par le conseil de prud’hommes comme l’argumentation de l’employeur sur la récupération ou la rémunération des astreintes est indifférente en l’espèce.

L’argumentation de l’employeur sur le fait que les astreintes ne comprenaient ni les nuits à compter de 0H ni les week-ends est également indifférente dès lors que les dispositions conventionnelles excluent 7 jours d’astreinte consécutifs ou non sur quatre semaines, maximum manifestement dépassés au vu de la pièce 3 de l’appelant

Toutefois la cour relève qu’alors que le temps d’astreinte est par définition un temps pendant lequel le salarié peut vaquer à ses obligations personnelles sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l’employeur. M [C], qui avait la charge de l’établissement des plannings de son équipe et prévoyait de ce fait la présence d’un ouvrier d’astreinte (ainsi que le démontre sa pièce 20-2 à rapprocher de sa pièce 3) tandis que lui même n’intervenait qu’en seconde intention , ne verse aux débats aucun élément démontrant l’existence d’ un préjudice ;

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a débouté l’appelant de sa demande de dommages intérêts à ce titre.

C/ Sur l’existence d’un harcèlement moral

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l’article L. 1154-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016 , applicables en l’espèce dès lors que le mécanisme probatoire touche au fond du droit de sorte que les dispositions la loi de 2016 nepeuvet donc s’appliquer immédiatement aux instances en cours contrairement à ce que soutient l’appelant , le salarié établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement

Défini objectivement par l’article L. 1152-1 du code du travail, le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l’intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel

Peuvent caractériser un harcèlement moral les méthodes de gestion mises en oeuvre par un supérieur hiérarchique dès lors qu’elles se manifestent pour un salarié déterminé par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet d’entraîner une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel

1/ Les éléments invoqués par le salarié

a- les demandes répétées en vue de se voir reconnaitre le coefficient 167 laissées sans réponse par l’employeur

L’appelant verse aux débats des mails adressés à son employeurs à partir de janvier 2012 dans lesquels apparait explicitement sa revendication d’un coefficient en rapport avec l’exercice des fonctions de responsable maintenance .( Pièce 8 mail du 9 janvier 2012; pièce 9 mail du 24 juillet 2012;mail du 29 mai 2013 pièce 10.Mail du 5 juin 2013 pièce 10-2)

En revanche le mail adressé le 20 juin 2013 ( pièce 11 ) pour attirer l’attention de l’employeur sur l’urgence de la situation , ne peut être rapporté à cette seule revendication de coefficient ainsi que le soutient l’appelant , en effet il vise plus généralement le manque de ressources humaines ( 3 personnes au lieu de 5 nécessaires hors responsable ) et l’organisation matérielle de l’activité .Il doit être rapproché de la pièce 23 de l’appelant ayant sollicité un audit sur l’organisation de la maintenance , ce qui élaire la réponse du supérieur le même jour ‘ je suis en attente de la nouvelle organisation ‘

b- les évaluations professionnelles fixant des objectifs en 2014 et faisant état de leur absence de réalisation en 2015 pour refuser le coefficient

c- un rythme de travail insoutenable en raison des astreintes imposées ( voir l’analyse supra )

D-des pressions exercées dans le cadre des fonctions exercées

Le salarié fait référence à

– un mail de refus de validation de congés le 13 décembre 2011( pièce 29)

– un mail du 3 janvier 2013 adressé par le responsable d’exploitation indiquant de laisser la charge du nettoyage au service maintenance suite à une remarque de M [C] au sujet du nettoyage des locaux mal éxécuté.( Pièce 31)

-un mail du 24 juin 2014 ( Pièce 28) adressé 23h 55 sollicitant le planning du service maintenance corrigé pour la semaine en cours à restituer téléphoniquement pour le lendemain 9h30 et pour la semaine suivante à adresser dans la journée suivante.

-un mail du 30 octobre 2014 ( pièce 32 ) signalant son épuisement à la suite d’une demande de rectification sur une demande de véhicule de maintenance.

Après avoir examiné ces éléments pris dans leur ensemble la cour considère qu’ils ne permettent pas en l’espèce de présumer l’existence d’un harcèlement moral.

En effet il ressort des mails versés aux débats pour justifier de pressions que

1/ pour celui relatif au refus de congés ( pièce 29 ) : ce mail est antérieur à l’année 2012 qui est celle du départ de M [O] ( pièce 39 ) et donc étranger à la question de la revendication du coefficient ; il vise par ailleurs expressément le défaut de respect de la procédure de demande de congés ( pas de feuille de congés déposée)

2/ pour celui relatif au nettoyage des locaux : le nettoyage des locaux relève des taches du service maintenance, ce que le mail se contente de rappeler sur un ton certes vif mais qui ne peut constituer un harcèlement

3/ le mail du 24 juin 2014 ( pièce 28) est certes adressé très tardivement pour une réunion d’exploitation du lendemain mais constitue un envoi isolé, le salarié ne démontrant pas que sa direction lui adressait de manière régulière et tardivement des demandes formulées pour le lendemain

4/ le mail du 30 octobre 2014 ( pièce 32) est suivi d’une réponse immédiate du supérieur qui indique prendre en charge la démarche, ce qui manifeste davantage de la bienveillance que du harcèlement.

Par ailleurs le salarié ne verse aux débats aucun élément démontrant que ces comportements ont eu pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail suceptible de provoquer une altération de sa santé. Il ne verse en effet aux débats aucun arrêt maladie ou justificatif de consultation médicale.

En conséquence seule reste en cause la discussion sur le coefficient revendiqué examiné par l’employeur en 2014 et 2015, laquelle s’est conclue en 2014 par la fixation d’objectifs et en 2015 par un refus d’évolution au vu d’éléments objectifs , bien que la cour n’en tienne pas compte puisque les fonctions ont été confiées au salariés dans les faits.

Enfin en l’absence de préjudice démontré l’absence de production du document unique d’évaluation des risques ne peut à elle seule justifier l’allocation de dommages intérêts.

Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a débouté M [C] de sa demande dommages intérêts pour harcèlement moral et manquement à l’obligation de sécurité.

II Sur la rupture du contrat de travail

La démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre un terme à son contrat de travail. Elle ne se présume pas et n’est valide que si la volonté du salarié est libre, réfléchie, personnelle, non viciée, certaine, sérieuse et ferme.

Lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l’annulation de la démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur, le juge doit, s’il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu’à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, l’analyser en une prise d’acte de la rupture qui produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire lui conserver la qualification de démission.

En l’espèce le salarié a adressé à son employeur une lettre de démission en date du 6 mai 2015 suivie un mois et trois jours plus tard d’un second faisant état du lien entre sa démission et le refus de l’employeur de lui reconnaitre le coefficient attaché à l’exercice des fonctions de responsable de maintenance ainsi que sa soumission à des astreintes injustifiées.

La réalité d’un conflit sur le coefficient appliqué au salarié est établi antérieurement et de manière contemporaire à la démission donnée un mois et demi après l’évaluation professionnelle conclue par un refus de l’employeur de positionner le salarié sur le coefficient revendiqué.

En conséquence la démission est équivoque et doit s’analyser en une prise d’acte .

Toutefois au regard de la rémunération effective de l’ensemble des astreintes réalisées ,des conditions de leur exercice , de l’absence de revendication du salarié auprès de son employeur de ce chef antérieurement à la rupture du contrat de travail comme de la faible importance de l’enjeu financier relatif à l’application du coefficient 167 ( représentant une somme totale de 1055,05 euros sur 36 mois soit 29,30 euros par mois , la Cour estime qu’il n’existe en l’espèce aucun manquement suffisamment grave empêchant la poursuite de l’éxécution du contrat de travail.

En conséquence la prise d’acte produira en l’espèce les effets d’une démission et le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté l’appelant de ses demandes indemnitaires au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes d’affichage, de communication au instances représentatives du personnel, ainsi que de publication.

Les sommes allouées à l’appelant produiront intérêts à compter du 17 novembre 2015 date de la comparution des parties devant le bureau de conciliation.

La société SUEZ RV Médtirannée qui succombe sur le coefficient applicable à l’emploi deM [C] , à l’origine du litige, sera condamnée à lui payer la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du CPC et déboutée de ses propres demandes de ce chef.

Elle sera également condamnée aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a débouté M [C] de ses demandes en rappel de salaires, rappel de primes d’ancienneté et congés payés afférents et d’article 700 et lui a laissé la charge de ses dépens,

Statuant à nouveau de ces chefs :

Condamne la société SITA SUD devenue SUEZ RV MÉDITERANNÉE à payer à M [C]

– 825,29 € à titre de rappel de salaire outre 82,53 € de congés payés y afférents.

– 23,43 € à titre de rappel de primes d’ancienneté outre 2,34 € à titre de congés payés y afférents.

– 110,47 € à titre de rappel de 13ème mois outre 11 € de congés payés y afférents.

Avec intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2015

-1500 euros au titre de l’article 700 .

Condamne la société SITA SUD devenue SUEZ RV MÉDITERANNÉE aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier Le président

 


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