COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-8
ARRÊT SUR RENVOI DE CASSATION
ARRÊT AU FOND
DU 28 FEVRIER 2023
N°2023/ 209
Rôle N° RG 21/16269 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BINEX
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU VAR
C/
S.A.S. HOPITAL PRIVE [Localité 6] [Localité 3] – [5]
Copie exécutoire délivrée
le : 28/02/2023
à :
– Me Stéphane CECCALDI, avocat au barreau de MARSEILLE
– Me Anne-Sophie MOULIN, avocat au barreau de PARIS
N° RG 21/16269 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BINEX
Arrêt prononcé sur saisine de la Cour suite à l’arrêt rendu par la Cour de Cassation le 12 mai 2021.
DEMANDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU VAR
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Stéphane CECCALDI de la SELASU CECCALDI STÉPHANE, avocat au barreau de MARSEILLE
DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION
HOPITAL PRIVE [Localité 6] [Localité 3] – [5], représenté par la SOCIETE DE GESTION [5] (S.G.M.), demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Anne-Sophie MOULIN, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Mathilde MOULIN, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 Janvier 2023, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre, chargé d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre,
Madame Audrey BOITAUD DERIEUX, Conseiller
Madame Isabelle PERRIN, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Aurore COMBERTON.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Février 2023.
ARRÊT
contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Février 2023
Signé par Madame Dominique PODEVIN, Présidente de chambre et Madame Aurore COMBERTON, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
N° RG 21/16269 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BINEX
L’Hôpital Privé [Localité 6] [Localité 3] [5] a fait l’objet d’une procédure de contrôle portant sur tous les éléments d’ordre médical et réglementaire qui ont commandé le remboursement de l’ensemble des séjours des années 2011 et 2012 pris en charge par l’assurance maladie, procédure organisée par la caisse primaire d’assurance maladie du Var (ci-après CPAM ou la caisse) et la direction régionale du service médical.
Ce contrôle de l’activité, réalisé du 27 au 29 mai 2013 et du 29 juillet au 2 août 2013, a mis en évidence plusieurs anomalies dans les méthodes de facturation de l’établissement, notamment concernant la modification du codage des actes médicaux réalisés par les médecins de l’établissement, engendrant une facturation de GHS (groupe homogène de séjours) indus.
Par courrier recommandé du 11 août 2014, la caisse a notifié à l’établissement de santé un indu total de 122.721,12 euros à ce titre, ainsi qu’une pénalité financière de 245.442,00 euros dès lors que les faits reprochés étaient de nature à être sanctionnés et s’apparentaient aux mêmes anomalies relevées lors de contrôles précédents.
Procédure
Sur l’indu
Par jugement du 18 mai 2018, le tribunal des affaires de sécurité sociale du Var, saisi d’un recours de l’établissement de santé par acte du 13 février 2015, a confirmé le bien-fondé de l’indu déjà validé après voie de recours amiable.
Par acte du 19 juin 2018, l’établissement de santé a interjeté appel de ce jugement.
Sur la pénalité financière
Par jugement du 16 juin 2017, la même juridiction, saisie par l’établissement de santé d’une contestation du bien-fondé de la pénalité financière par requête du 18 octobre 2014, a annulé la procédure de pénalité financière.
Par acte du10 juillet 2017, la caisse a interjeté appel de ce jugement.
Les deux instances ont été jointes, et par arrêt du 16 octobre 2019, la présente cour a confirmé les deux jugements.
Sur pourvoi principal formé par l’établissement de santé et incident formé par la caisse, la Cour de cassation a, par arrêt du 12 mai 2021, cassé et annulé l’arrêt précité, seulement en ce qu’il a annulé la procédure de pénalité financière, aux motifs que l’absence de mention ou la mention erronée dans la notification de l’indu de la voie de recours ouverte, de son délai ou de ses modalités, a pour seul effet de ne pas faire courir le délai de recours et n’en affecte pas la validité.
Par actes adressés le 19 novembre 2021 (RG n° 21/16271 et RG n° 21/16269), procédures jointes par ordonnance du 27 avril 2022 sous le n° RG 21/16269, la caisse a saisi la présente cour désignée comme cour de renvoi.
Par conclusions visées et développées oralement à l’audience du 10 janvier 2023, l’appelante demande à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il a annulé la pénalité financière et de :
– condamner l’établissement à lui payer la somme de 245.442,00 euros au titre de cette pénalité financière, avec intérêts au taux légal à compter du 11 août 2014, date de sa notification,
– débouter l’établissement de toutes ses demandes,
– le condamner à lui payer la somme de 8.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir essentiellement que :
– l’absence de mise en demeure de payer cette pénalité est indifférente puisque cette pénalité a été contestée en justice avant la mise en recouvrement,
– l’indu a été confirmé par le jugement du 18 mai 2018, confirmé par l’arrêt du 16 octobre 2019 puis par l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 mai 2021 qui a rejeté le pourvoi incident de la clinique sur cette question,
– au visa de l’article L .162-1-14-3° du code de la sécurité sociale, les anomalies de facturation, résultant de l’inobservation des règles de facturation justifiaient la pénalité litigieuse, sans qu’une condamnation pénale soit nécessaire.
Par conclusions visées et développées oralement à l’audience, l’intimé demande à la cour de confirmer le jugement, à titre subsidiaire de fixer la pénalité à un montant de 10.000,00 euros, à titre infiniment subsidiaire, à un montant de 61.360,50 euros, en tout état de cause de condamner la caisse à lui payer une somme de 3.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.
Il soutient en substance que :
– la pénalité doit être annulée, au visa de l’article L.162-1-14 car fondée sur des faits reprochés inexacts, invoquant des actes d’instillations vésicales alors qu’aucun dossier dont l’anomalie de facturation n’est concerné par un acte de cette nature,
– au visa des articles L.162-1-14 II° et R.147-11, et du jugement de relaxe dont l’établissement a bénéficié le 16 juin 2016, cette pénalité doit encore être annulée en l’absence de toute preuve de prestations injustifiées, pas plus que d’intention frauduleuse de sa part,
– les remboursements dont elle a bénéficié n’ont causé aucun préjudice à la caisse,
– aucune fraude n’a été commise les actes dont le remboursement a été obtenu ayant bien été réalisés, et les erreurs de facturation résultant du système de traitement informatique du codage,
– la facturation litigieuse ne présente pas de caractère de gravité,
– au visa de l’article L.162-1-14 III°, la pénalité doit être proportionnelle aux sommes concernées dans la limite de 50 % de celles-ci soit au maximum 61.360,50 euros.
Il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé du litige.
MOTIFS DE L’ARRÊT
Il résulte de celles dispositions de l’arrêt du 16 octobre 2019 désormais définitives suite à l’arrêt de la Cour de cassation du 12 mai 2021, qu’un indu de prestations résultant de la facturation de GHS fictifs 4307 4340 sur les années 2011 et 2012 a été établi à l’encontre de la clinique [5], ayant donné lieu à une notification portant sur un montant de122.721,12 euros.
À la suite de cet indu, la caisse a par courrier du 3 juin 2014 informé l’établissement de santé de son intention d’initier à son encontre la procédure de pénalité financière, en retenant l’existence de man’uvres constitutives d’une fraude en bande organisée.
Par courrier du 16 juillet 2014, la caisse a informé l’établissement de santé de sa décision de ne pas retenir la notion aggravante de bande organisée, mais de poursuivre la procédure de sanction engagée sur le motif de la fraude.
Selon l’article L.162-1-14 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige :
I. – Peuvent faire l’objet d’une pénalité prononcée par le directeur de l’organisme local d’assurance maladie, de la caisse mentionnée à l’article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l’organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles :
(…)
3° Les professionnels et établissements de santé, ou toute autre personne physique ou morale autorisée à dispenser des soins, à réaliser une prestation de service ou des analyses de biologie médicale ou à délivrer des produits ou dispositifs médicaux aux bénéficiaires mentionnés au 1°;
4° Tout individu impliqué dans le fonctionnement d’une fraude en bande organisée.
II. – La pénalité mentionnée au I est due pour :
1° Toute inobservation des règles du présent code, du code de la santé publique, du code rural et de la pêche maritime ou du code de l’action sociale et des familles ayant abouti à une demande, une prise en charge ou un versement indu d’une prestation en nature ou en espèces par l’organisme local d’assurance maladie. Il en va de même lorsque l’inobservation de ces règles a pour effet de faire obstacle aux contrôles ou à la bonne gestion de l’organisme ;
(…)
7° Les abus constatés dans les conditions prévues au II de l’article L. 315-1 ;
(…)
10° Le fait d’organiser ou de participer au fonctionnement d’une fraude en bande organisée.
III. – Le montant de la pénalité mentionnée au I est fixé en fonction de la gravité des faits reprochés, soit proportionnellement aux sommes concernées dans la limite de 50 % de celles-ci, soit, à défaut de sommes déterminées ou clairement déterminables, réserve faite de l’application de l’article L. 162-1-14-2, forfaitairement dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale.(…)
IV. – Le directeur de l’organisme local d’assurance maladie, de la caisse mentionnée à l’article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l’organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles notifie les faits reprochés à la personne physique ou morale en cause afin qu’elle puisse présenter ses observations dans un délai fixé par voie réglementaire. A l’expiration de ce délai, le directeur :
1° Décide de ne pas poursuivre la procédure ;
2° Notifie à l’intéressé un avertissement, sauf dans les cas prévus aux 3° et 4° du II ;
3° Ou saisit la commission mentionnée au V. A réception de l’avis de la commission, le directeur:
a) Soit décide de ne pas poursuivre la procédure ;
b) Soit notifie à l’intéressé la pénalité qu’il décide de lui infliger, en indiquant le délai dans lequel il doit s’en acquitter ou les modalités selon lesquelles elle sera récupérée sur les prestations à venir. La pénalité est motivée et peut être contestée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale.
En l’absence de paiement de la pénalité dans le délai prévu, le directeur envoie une mise en demeure à l’intéressé de payer dans un délai fixé par voie réglementaire. Lorsque la mise en demeure est restée sans effet, le directeur peut délivrer une contrainte qui, à défaut d’opposition du débiteur devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, comporte tous les effets d’un jugement et confère notamment le bénéfice de l’hypothèque judiciaire. Une majoration de 10 % est applicable aux pénalités qui n’ont pas été réglées aux dates d’exigibilité mentionnées dans la mise en demeure.
(…)
V. – La pénalité ne peut être prononcée qu’après avis d’une commission composée et constituée au sein du conseil ou du conseil d’administration de l’organisme local d’assurance maladie, de la caisse mentionnée à l’article L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l’organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles. Lorsqu’est en cause une des personnes mentionnées au 3° du I, des représentants de la même profession ou des établissements concernés participent à cette commission.
La commission mentionnée au premier alinéa du présent V apprécie la responsabilité de la personne physique ou morale dans la réalisation des faits reprochés. Si elle l’estime établie, elle propose le prononcé d’une pénalité dont elle évalue le montant.
L’avis de la commission est adressé simultanément au directeur de l’organisme et à l’intéressé.
(…)
VII. – En cas de fraude établie dans des cas définis par voie réglementaire :
1° Le directeur de l’organisme local d’assurance maladie, des caisses mentionnées aux articles L. 215-1 ou L. 215-3 ou de l’organisme local chargé de verser les prestations au titre des assurances obligatoires contre les accidents de travail et les maladies professionnelles des professions agricoles peut prononcer une pénalité sans solliciter l’avis de la commission mentionnée au V ;
2° Les plafonds prévus au premier alinéa du III sont portés respectivement à 200 % et quatre fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Dans le cas particulier de fraude commise en bande organisée, le plafond est porté à 300 % des sommes indûment présentées au remboursement ;
3° La pénalité prononcée ne peut être inférieure au dixième du plafond mensuel de la sécurité sociale s’agissant des personnes mentionnées au 1° du I, à la moitié du plafond s’agissant des personnes physiques mentionnées au 3° du même I et au montant de ce plafond pour les personnes mentionnées au 2° du même I et les personnes morales mentionnées au 3° du même I ;
4° Le délai mentionné au dernier alinéa du III est majoré par voie réglementaire.
VII bis. – Les pénalités prononcées en application du présent article sont notifiées après avis conforme du directeur de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie ou de son représentant désigné à cet effet. Son avis est réputé conforme dans un délai précisé par voie réglementaire.
(…)
En outre, aux termes de l’article R.142-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige:
I.-Lorsqu’il a connaissance de faits susceptibles de faire l’objet de la pénalité financière mentionnée à l’article L. 162-1-14, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles adresse à la personne physique ou morale en cause la notification prévue à cet article par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Lorsque ces faits ont donné lieu à l’engagement de la procédure mentionnée à l’article L. 315-1, la notification ne peut intervenir qu’à l’issue de cette procédure. Cette notification précise les faits reprochés et le montant de la pénalité encourue et indique à la personne en cause qu’elle dispose d’un délai d’un mois à compter de sa réception pour demander à être entendue, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.
(…)
A l’issue du délai d’un mois à compter de la notification ou après audition de la personne en cause, si celle-ci intervient postérieurement à l’expiration de ce délai, le directeur l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut :
1° Soit décider d’abandonner la procédure. Dans ce cas, il en informe ladite personne dans les meilleurs délais ;
2° Soit, dans un délai de quinze jours, prononcer un avertissement, sauf si les faits relèvent des cas prévus aux 3° et 4° du II de l’article L. 162-1-14. L’avertissement précise les voies et délais de recours. Il en informe simultanément la commission prévue à l’article L. 162-1-14 ;
3° Soit, dans un délai de quinze jours, saisir la commission mentionnée au V de l’article L. 162-1-14 et lui communiquer les griefs et, s’ils existent, les observations écrites de la personne en cause ou le procès-verbal de l’audition. Il en informe simultanément cette personne et lui indique qu’elle aura la possibilité, si elle le souhaite, d’être entendue par la commission.
Les informations communiquées à la commission ne doivent comporter aucune mention nominative ou susceptible de permettre l’identification d’une personne dans des conditions de nature à porter atteinte au secret médical.
II.-Après que le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou son représentant, accompagné le cas échéant par un représentant du service du contrôle médical ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles, a présenté ses observations, et après avoir entendu, le cas échéant, la personne en cause, la commission rend un avis motivé, portant notamment sur la matérialité et la gravité des faits reprochés, la responsabilité de la personne et le montant de la pénalité ou de chacune des pénalités susceptible d’être appliquée.
La commission doit adresser son avis au directeur de l’organisme local ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ainsi qu’à la personne en cause dans un délai maximum de deux mois à compter de sa saisine. Ce délai peut être augmenté d’une durée ne pouvant excéder un mois si la commission estime qu’un complément d’information est nécessaire. Si la commission ne s’est pas prononcée au terme du délai qui lui est imparti, l’avis est réputé rendu.
Lors des auditions mentionnées au présent article, la personne en cause peut se faire assister ou se faire représenter par la personne de son choix.
III.-A compter de la réception de l’avis de la commission ou de la date à laquelle celui-ci est réputé avoir été rendu, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles peut :
1° Soit décider d’abandonner la procédure, auquel cas il en informe ladite personne dans les meilleur délais ;
2° Soit décider de poursuivre la procédure, auquel cas il dispose d’un délai de quinze jours pour saisir le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie d’une demande d’avis conforme, par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception, en précisant les éléments prévus dans la notification mentionnée au I et le montant de la pénalité envisagée. A défaut de saisine dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.
Le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie ou son représentant dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de la demande pour formuler son avis. Il le transmet au directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles par tout moyen permettant de rapporter la preuve de sa date de réception. Si le directeur général ne s’est pas prononcé dans ce délai, son avis est réputé favorable.
Si l’avis du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie est défavorable, la procédure est abandonnée. Le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles en informe la personne en cause dans les meilleurs délais.
Si l’avis du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie est favorable, le directeur de l’organisme local d’assurance maladie ou le directeur de la caisse chargée de la prévention et de la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles dispose d’un délai de quinze jours pour notifier la pénalité à la personne en cause par une décision motivée et par tout moyen permettant de rapporter la preuve de la date de réception. Il en adresse une copie à la commission à titre d’information. A défaut de notification dans le délai imparti, la procédure est réputée abandonnée.
Cette notification de payer précise la cause, la nature, le montant des sommes réclamées au titre de la pénalité ou de chacune des pénalités prononcées et mentionne l’existence d’un délai de deux mois, à partir de sa réception, imparti au débiteur pour s’acquitter des sommes réclamées, ainsi que les voies et les délais de recours. Elle mentionne également, le cas échéant, les modalités de recouvrement de la pénalité par retenues sur les prestations ultérieures à verser à l’intéressé.
A défaut de paiement dans ce délai, la mise en demeure prévue au septième alinéa du IV de l’article L. 162-1-14 est adressée, par tout moyen permettant de déterminer la date de réception. Elle comporte les précisions relatives aux sommes réclamées mentionnées à l’alinéa précédent, les voies et délais de recours ainsi que l’existence d’un nouveau délai d’un mois, à partir de sa réception, imparti au débiteur pour s’acquitter des sommes réclamées. Elle indique en outre l’existence et le montant de la majoration de 10 % prévue au même septième alinéa, appliquée en l’absence de paiement dans ce délai.
(…)
La commission des pénalités financières s’est réunie le 30 juillet 2014, en l’absence de tout représentant de l’établissement de santé, pourtant dûment convoqué. Les membres de la commission ont retenu notamment la non pris en compte des préconisations faites lors des précédents contrôles, le non-respect de l’engagement pris par l’établissement de santé pour mettre en place une procédure interne pour garantir la facturation, le dysfonctionnement majeur relevé au niveau de la facturation, et ont émis l’avis majoritaire de l’application d’une pénalité financière d’un montant de 245.442,00 euros.
Selon notification par lettre recommandée avec AR du 11 août 2014, la caisse a informé l’établissement de santé de sa décision, après cet avis, et après avis favorable du directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie, de lui infliger, cette pénalité financière, ainsi déterminée.
L’établissement de santé a saisi la juridiction de première instance le 8 octobre 2014 de son recours à l’encontre de cette notification.
Or il résulte de l’article L.162-1-14 précitée en son paragraphe IV, que la pénalité peut être contestée, dès sa notification, devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, sans exigence de la délivrance d’une mise en demeure préalable.
Il en résulte que le jugement déféré qui a annulé la procédure de pénalité financière en considérant que l’absence d’envoi d’une mise en demeure avait privé l’établissement d’une voie de recours, cette privation lui faisant nécessairement grief, doit être infirmé.
Il résulte en effet du caractère définitif de l’indu précité que le directeur de la caisse était fondé à mettre en ‘uvre la procédure de pénalité financière réglementée par les textes susvisés.
Conformément aux exigences de l’article R.142-2, la notification du 11 août 2014 a précisé :
* la cause de la pénalité, en l’espèce : la constatation de cotations erronées de CS avec DE figurant sur les bordereaux S3404 en lieu et place des actes CCAM JDQ001 et JDQ002 tels que portés sur les RUM, ayant permis à l’établissement de facturer à l’assurance-maladie des GHS indus, lesquels de plus n’apparaissaient pas dans les bases PMSI ( programme de médicalisation des systèmes d’information) de l’ATIH ( agence technique de l’information sur l’hospitalisation ) et ne pouvait donc pas faire l’objet d’un ciblage dans le cadre des contrôles T2A,
* la nature des sommes réclamées, à savoir une pénalité pour fraude, la notification précisant que conformément aux dispositions de l’article R.147-11 du code de la sécurité sociale selon lesquelles sont qualifiées de fraudes pour l’application de l’article L.162-1-14 les faits commis dans le but d’obtenir ou de faire obtenir un avantage ou le bénéfice d’une prestation injustifiée au préjudice d’un organisme d’assurance maladie…. lorsqu’il aura été constaté l’une des circonstances suivantes : 1°) l’établissement ou l’usage de faux caractérisé par toute altération de la vérité sur toutes pièces justificatives, ordonnances, feuilles de soins ou tout autres support de facturation sous forme écrite ou électronique ayant pour objet ou pouvant avoir pour objet de permettre l’obtention de l’avantage ou de la prestation en cause, et ce texte prévoyant en outre qu’est constitutive d’une fraude la facturation répétée d’actes ou de prestations non réalisés, de produits ou matériels non délivrés,
* le montant réclamé au titre de la pénalité, soit en l’espèce, eu égard à la fraude retenue, le montant maximum prévu par le texte par le doublement du montant de l’indu, correspondant à une pénalité de 245.442,00 euros, montant retenu à raison de la fraude votée à la majorité de cinq voix contre trois abstentions,
* le délai imparti au débiteur pour s’acquitter des sommes réclamées,
* les voies et délais de recours,
* les modalités de récupération de la somme sur les prestations à venir.
Était de surcroît annexé à la notification d’indu un tableau identifiant l’ensemble des dossiers litigieux à l’origine de la procédure de recouvrement d’indu avec le détail des actes médicaux en litige, peu important que dans le courrier du 3 juin 2014 relatif à la décision du directeur de l’organisme de sécurité sociale de mettre en ‘uvre la procédure de pénalité financière, il ait été fait état d’actes d’instillation vésicale, seule la répétition de cotation erronée des actes médicaux concernés ayant une incidence, et l’indu ayant un caractère définitif, parfaitement connu dans son étendue, sa nature et son exacte matérialité par l’établissement de santé.
Il en résulte que le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure de pénalité au soutien de la demande d’annulation de cette procédure est en voie de rejet.
De même, c’est en vain que l’intimé soutient que la preuve d’un manquement de sa part n’est pas rapportée, alors que la caractérisation de l’indu, définitif, constitue la preuve du bénéfice d’une prestation injustifiée directement consécutifs consécutif à un manquement par l’établissement de santé aux règles de facturation.
L’établissement de santé soutient encore, s’agissant cette fois de la fraude qui lui est reprochée, que les manquements relevés ont procédé d’un simple problème informatique touchant son logiciel de codage.
Or, dans le courrier qu’il a adressé à la caisse le 16 juin 2014, en réponse à la notification du 3 juin 2014 l’informant de la mise en ‘uvre d’une procédure de pénalité financière, l’établissement de santé a indiqué que l’erreur de cotation était exclusivement liée à une erreur de saisie par ses services administratifs, précisant que bien que cela n’exonère en rien sa responsabilité, l’établissement a rencontré entre 2009 et 2012 de gros problèmes informatiques avec son logiciel de « PMSI -facturation », dont la société éditrice aurait été mise en liquidation judiciaire, et que cela l’a contraint de changer de logiciel en 2012 afin de corriger les nombreux problèmes rencontrés, tant en facturation qu’au niveau du PMSI. Il précisait que le nouveau logiciel ‘LEA’ mis en place en 2012 permettait depuis 2014 une saisie décentralisée des actes par les praticiens (reconnaissance biométrique) sécurisant celle-ci.
Néanmoins, il résulte des éléments soumis à la cour, et notamment de l’ensemble de la présentation des éléments du dossier à la commission des pénalités financières, que d’une part, l’établissement a déjà fait l’objet d’observations de la caisse lors de précédents contrôles, bien antérieurs, et n’a jamais tenu compte des préconisations de l’organisme qui en sont issues.
Le dossier d’indu a porté sur la facturation de deux types de GHS, le 4307 (tumeur des reins et des voies urinaires) et le 4340 (exploration et surveillance pour affections du rein et des voies urinaires) alors que la réglementation ne permet pas la facturation de ces actes corrélativement aux actes CCAM qui ont été réalisés en réalité.
C’est à la suite de divergences entre les bases de facturation à l’assurance-maladie, et les bases PMSI concernant la clinique [4], autre établissement dépendant de la même personne morale, et aux nombreuses anomalies constatées sur cet autre établissement du groupe [5], qu’il a été décidé de contrôler les mêmes GHS d’urologie à la clinique [5].
Ainsi les actes CCAM pour les instillations vésicales ou fibroscopie, bien que pratiqués par les médecins urologues et cotés comme tel sur le RUM, ne sont pas retranscrits sur les bordereaux S3404, mais à la place sont notés des CS+DE permettant la facturation de GHS. De plus, il est apparu que les codes actes portés sur les RUM établis par les médecins étaient bien des actes CCAM, mais que sur les factures adressées à la CPAM ces mêmes actes CCAM avaient été remplacés par des CS permettant ainsi la facturation des GHS.
Ainsi, l’un des actes concernés facturés en CCAM à 38,40 euros et rémunéré normalement à l’établissement sous forme d’un forfait de sécurité environnement d’un montant de 75,89 euros, et l’autre de ces actes, s’agissant d’un acte thérapeutique réalisé en ambulatoire en présence d’un urologue et d’un infirmier dans une salle de consultation étant facturé 21,71 euros et ne pouvant donner lieu à aucune autre rémunération pour l’établissement, ont été facturés respectivement 544,68 euros pour l’un, et 230,71 euros pour l’autre.
La caisse a également rappelé, sans être aucunement contredite par l’établissement de santé, que l’étude réalisée France entière montre, concernant les deux codes GHS en objet associés le même jour à une consultation de spécialistes réalisés en chirurgie urologique, un dénombrement de 1045 GHS, dont 67 à la clinique [5], et 930 à la clinique [4], deux établissements relevant de la même personne morale.
Toujours sans être contredite, la caisse a en outre rappelé qu’en janvier 2011, le directeur de l’établissement lui avait fait part de problèmes de logiciels informatiques de facturation qu’il s’était engagé dès 2011 à résoudre, par la mise en place une procédure de contrôle pour garantir la facturation. Il a pourtant été constaté qu’en 2014 la même logique de facturation a perduré pour permettre la facturation d’actes GHS.
En outre, l’établissement de santé ne conteste pas davantage que dans les bases PMSI, ces séjours ne figuraient plus alors qu’ils étaient présents précédemment, de sorte que cette modification a posteriori de ces bases pouvait compromettre un ciblage ultérieur sur ses GHS et la modification du codage des actes empêchait leur repérage par les bases de remboursement, observation faite que les problèmes de logiciels informatiques évoqués ne peuvent expliciter les constatations opérées, dès lors que l’exportation des bases vers l’ATIH ne se fait que dans un deuxième temps après recueil groupage et saisie de l’information médicale.
Enfin, le médecin DIM ((département d’information médicale), interrogé lors des contrôles n’a pu apporter aucune explication recevable sur les anomalies relevées, alors qu’il relève de ses fonctions de garantir notamment la qualité de la codification, et qui lui revient précisément de ‘traduire’ le dossier médical dans un langage codifié permettant le remboursement par l’assurance-maladie
Il résulte de ces éléments que l’établissement avait nécessairement une parfaite connaissance des anomalies depuis janvier 2011 qu’il attribuait déjà à des problèmes de logiciels informatiques de facturation, et s’était engagé à mettre en place une procédure de contrôle pour garantir cette facturation.
Le contrôle opéré sur 2011 et 2012, ainsi que les constatations postérieures, ont démontré l’absence de tout contrôle utile, et la poursuite de pratiques de codification irrégulières.
L’ampleur des anomalies, ainsi que leur caractère réitéré en dépit des mises en garde et du caractère parfaitement maîtrisé de la mise en ‘uvre d’une facturation que l’établissement de santé savait pertinemment erronée telle qu’elle permettait le versement à son bénéfice de remboursements conséquents indus par l’assurance-maladie, sont de nature à caractériser, par l’élément intentionnel qu’ils démontrent, la fraude telle que prévue par les dispositions de l’article L.162-1-14 du code de la sécurité sociale précité.
À cet égard, il importe peu qu’aux termes d’un jugement au demeurant dépourvu de toute motivation rendu le 13 juin 2016 par le tribunal correctionnel de Toulon, au seul visa des articles 313-1, 313-7 et 313-8 du code pénal réprimant l’escroquerie, le directeur de l’établissement ait été renvoyé des fins de la poursuite au titre d’agissements commis au sein des deux cliniques qu’il dirigeait pour un montant total d’indu supérieur à 545.196,00 euros, dès lors que la procédure pénale répond à une finalité répressive totalement distincte de celle présidant à la procédure de pénalité financière, et se fonde sur des bases légales et des notions juridiques distinctes.
Il en résulte que c’est à bon droit, et en respect des dispositions des textes précités du code de la sécurité sociale, que la caisse a appliqué une pénalité financière correspondant au double de l’indu établi, dont la gravité ainsi caractérisé justifiait pleinement le montant maximum.
L’établissement sera en conséquence condamné à payer ce montant à l’organisme de sécurité sociale, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt, par application de l’article 1231-7 du Code civil.
L’intimé qui succombe supportera la charge des dépens et verra sa demande présentée au titre de ses frais irrépétibles rejetée.
L’équité conduite à allouer à la caisse une somme de 5.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Vu l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 12 mai 2021,
Statuant dans les limites de la cassation,
– Infirme le jugement du 16 juin 2017 en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
– Condamne l’hôpital privé [Localité 6] [Localité 3] – [5] à payer à la caisse primaire d’assurance-maladie du Var la somme de 245.442,00 euros à titre de pénalité financière ensuite de la notification du 11 août 2014.
– Condamne l’hôpital privé [Localité 6] [Localité 3] – [5] aux dépens.
– Condamne l’hôpital privé [Localité 6] [Localité 3] – [5] à payer à la caisse primaire d’assurance-maladie du Var la somme 5.000,00 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– Déboute l’hôpital privé [Localité 6] [Localité 3] – [5] de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles.
Le Greffier Le Président
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