Droit du logiciel : 27 janvier 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/03451

·

·

Droit du logiciel : 27 janvier 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 21/03451

27/01/2023

ARRÊT N° 2023/47

N° RG 21/03451 – N° Portalis DBVI-V-B7F-OJ6F

SB/KS

Décision déférée du 29 Juin 2021

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE

( 19/02108)

SECTION ENCADREMENT

Gérard MONTAUT

Société SFAAT

C/

[N] [X]

L’UNEDIC délégation AGS-CGEA de [Localité 4]

S.C.P. CBF ASSOCIES Me [R] [B] ès qualités d’Administrateur Judiciaire de la société SFAAT

S.A.R.L. [S] ès qualités de Mandataire Judiciaire de la société SFAAT

INFIRMATION PARTIELLE

Grosses délivrées

le 27/01/2023

à

Me Sonia BRUNET-RICHOU

Me Frédérique VAYSSE-BATTUT

Me Pascal SAINT GENIEST

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANTE

Société SFAAT

[Adresse 8]

[Localité 5]

Représentée par Me Sonia BRUNET-RICHOU de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMÉS

Monsieur [N] [X]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Frédérique VAYSSE-BATTUT, avocat au barreau de TOULOUSE

L’UNEDIC délégation AGS-CGEA de [Localité 4]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Pascal SAINT GENIEST de l’AARPI QUATORZE, avocat au barreau de TOULOUSE

S.C.P. CBF ASSOCIES Me [R] [B] Es qualités d’Administrateur Judiciaire de la société SFAAT

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Sonia BRUNET-RICHOU de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.R.L. [S] ès qualités de Mandataire Judiciaire de la société SFAAT

Mandataire Judiciaire [Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Sonia BRUNET-RICHOU de la SCP CAMILLE ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Novembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés,

devant S. BLUME, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

S. BLUME, présidente

M. DARIES, conseillère

N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles

Greffier, lors des débats : K. SOUIFA

lors du prononcé : C.DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre.

FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [X] a été embauché le 1er août 1988 par la société Française d’Assistance et d’Application Techniques ( ci-après dénommée SFAAT) avant d’être licencié pour motif économique en mai 1992.

Il a été ensuite ré-embauché le 1er février 2000 en qualité de dessinateur projeteur chargé d’affaires (V- échelon 2-coef 335) suivant contrat à durée indéterminée avec reprise d’ancienneté au 1er mai 1995. Les relations contractuelles sont régies par la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la Métallurgie

du 13 mars 1972.

Suivant avenant du 31 janvier 2008 il a été promu au poste de chargé d’affaire statut cadre ( position II-coef 108).Par avance du 24 mai 2019 les parties ont convenu d’une rémunération au forfait pour 218 jours par an, moyennant une rémunération forfaitaire brute annuelle de 51 977,64 euros, soit 4 331,47 euros par mois.

Après avoir été convoqué par courrier du 27 septembre 2019 à un entretien préalable au licenciement fixé au 10 octobre 2019, il a été licencié pour faute grave par courrier du 16 octobre 2019.

Le salarié a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 26 décembre 2019 pour contester son licenciement et demander le versement de diverses sommes.

Le conseil de prud’hommes de Toulouse, section encadrement, par jugement

du 21 juin 2021, a :

– fixé le salaire moyen à 4 331,47 euros,

– jugé que Monsieur [X] a été licencié en l’absence de faute grave avérée mais pour une cause réelle et sérieuse,

– condamné la société Sfaat prise en la personne de son représentant légal ès-qualités, à verser à Monsieur [X] les sommes suivantes :

25 988, 82 euros au titre du préavis,

2.598,88 euros au titre de congés payés afférents,

64 508, 90 euros au titre de l’indemnité de licenciement.

– débouté Monsieur [X] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– condamné la société Sfaat prise en la personne de son représentant légal ès-qualités, à verser à Monsieur [X] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné la société Sfaat, prise en la personne de son représentant légal ès-qualités aux entiers dépens,

– débouté Monsieur [X] de sa demande au titre de l’exécution provisoire sauf pour les éléments pour lesquels elle est de droit,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes.

***

Par déclaration du 28 juillet 2021, la Société Sfaat a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 1er juillet 2022 , dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.

Par jugement du 21 février 2022 le tribunal de commerce de Toulouse a ordonné la liquidation judiciaire de la société SFAAT et désigné Maître [S] en qualité de mandataire liquidateur.

***

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 21 avril 2022, la Sarl [S], mandataire judiciaire de la société Sfaat, assignée en intervention forcée le 13 janvier 2022, demande à la cour :

A titre principal de:

– constater que le licenciement de Monsieur [X] repose sur une faute grave ;

En conséquence :

– réformer le jugement en ce qu’il a considéré que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave ;

– débouter Monsieur [X] de la totalité de ses demandes ;

A titre subsidiaire de :

– constater que le licenciement de Monsieur [X] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

En conséquence :

– confirmer le jugement,

En tout état de cause :

– débouter Monsieur [X] de son appel à titre incident,

– condamner Monsieur [X] au paiement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de Maître [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sfaat ainsi qu’aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 22 avril 2022, M. [X] [N] demande à la cour de :

– confirmer le jugement en toutes ses dispositions à l’exception des dispositions à l’encontre desquelles Monsieur [X] a formé appel incident,

– déclarer Monsieur [X] recevable et bien fondé en son appel incident,

– infirmer le jugement en ce qu’il a dit que Monsieur [X] a été licencié pour une cause réelle et sérieuse et l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts présentée à ce titre,

– juger que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse,

– fixer la créance de Monsieur [X] au passif de la procédure collective de la société Sfaat à:

64 508,90 euros au titre d’indemnité de licenciement

25 988,82 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis

outre 2 598,88 euros au titre des congés payés afférents

75 800,72 euros à titre dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile

et 1 500 euros alloués par le Conseil de Prud’hommes sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi que les dépens qui seront passés en frais privilégiés de la procédure.

– débouter Maître [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Sfaat de l’intégralité de ses demandes

– déclarer la décision opposable à l’AGS-CGEA de [Localité 4].

Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique

le 11 mars 2022, l’Unedic délégation AGS-CGEA de [Localité 4] demande à la cour de:

– infirmer le jugement en ce qu’il a jugé que les faits reprochés à Monsieur [X] n’étaient pas constitutifs d’une faute grave,

– débouter Monsieur [X] de ses demandes et à tout le moins les réduire,

– juger que l’AGS ne devra procéder à l’avance des créances visées aux

articles L 3253-8 et suivants du Code du Travail que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L 3253-19, L 3253-17 et D 3253-5 du Code du Travail, étant précisé que le plafond applicable s’entend pour les salariés toutes sommes et créances avancées confondues et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale ou d’origine conventionnelle imposée par la loi,

– juger que les indemnités réclamées sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile sont exclues de la garantie, les conditions spécifiques de celle-ci n’étant pas remplies,

En tout état de cause :

– juger que l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra

s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement.

– statuer ce que de droit en ce qui concerne les dépens, sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS.

La Scp CBF Associés Maître [R] [B], administrateur judiciaire de la société Sfaat, a constitué avocat le 31 janvier 2022 mais n’a pas conclu.

La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date

du 10 novembre 2022.

***

Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur le licenciement

Selon l’article L. 1235-1 du code du travail, en cas de litige, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et la poursuite du contrat. Il incombe à l’employeur qui l’invoque d’en apporter la preuve.

Aux termes des articles L 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse, dont le juge, en cas de litige, apprécie le caractère réel et sérieux’; il forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et si un doute persiste, il profite au salarié.

Si le licenciement est prononcé à titre disciplinaire, la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l’encontre du salarié et les conséquences que l’employeur entend en tirer quant aux modalités de rupture, mais il appartient au juge de qualifier les faits invoqués.

La lettre de licenciement de M.[X] est ainsi motivée’:

‘…] les manquements qui vous sont reprochés sont les suivants :

– Non-respect de l’approbation des devis par la direction. Les affaires citées ci-dessus sont significatives au regard de notre activité et, pour organiser la charge de travail dans

le temps ou l’aspect financier des approvisionnements, celles-ci auraient dû faire l’objet d’une approbation par la direction.

– Pas de mise à jour du planning de Chargé d’affaires sur la révision des dates de livraison permettant le lancement de la production à la bonne date. En effet, l’absence de la notification des affaires sur le planning chargé d’affaires n’a pas permis à la production d’en prévoir la programmation en fabrication en date et heure et a donc conduit à des demandes d’efforts pour le personnel de production (dont la durée de travail est déjà à 39h/semaine) en termes d’heures supplémentaires à effectuer ou à l’appel à la sous-traitance pour respecter les délais de livraison prévus.

– Revue des exigences client (traduction des exigences client et besoins implicites du client sur l’affaire) entrainant des retards en production qui se traduisent par des retards de livraison. Tous ces manquements se traduisent par un impact négatif sur nos performances, notre image de marque, le mécontentement des clients et nos perspectives économiques futures.

– Lancement de l’approvisionnement matière non réalisé dans les délais excluant toute négociation de prix pour gérer l’urgence impactant directement la marge attendue sur l’affaire. En effet, faute de temps, nous n’avons pu négocier les prix à la baisse lors des commandes grâce à la mise en concurrence des fournisseurs. Généralement, ces négociations font apparaitre des baisses significatives de 10 à 15% sur les prix d’achats.

– Externalisation en sous-traitance de l’affaire pour pallier les capacités temporelles en production impliquant une baisse significative de la marge réalisable.

-L’ensemble de ces manquements entrainent à ce jour, une perte considérable de marge de l’ordre de :

Pour l’affaire n°18162 WINDBLAST d’un montant de 14 K€ ;

Pour l’affaire n°18165 MEDYNA d’un montant de 13 K€ ;

Pour l’affaire n°18148 TRAINNING TOOL d’un montant de 14 K€ ;

Pour l’affaire n°18117 TABLES d’un montant de 14 K€ ;

Pour l’affaire n°17965 MLG d’un montant de 12 K€

Soit une perte de marge totale de 67 K€ pour l’ensemble de ces affaires, influant directement sur l’équilibre économique de notre société.

– Négociation commerciale difficile avec les clients, compte tenu des retards de chantier, qui nous ont fait part de leur mécontentement sur les affaires citées ci-dessus. A titre indicatif, ces derniers nous ont menacés de pénalités de retard de livraison ; pénalités à ce jour évitées par des mesures correctives que nous avons dû mettre en oeuvre. Vos agissements ont également eu un impact considérable sur notre image de marque et sur la perte de confiance de nos clients concernant les commandes qui pourraient nous être confiées dans le futur.

Ces faits totalement inadmissibles ont des répercussions directes sur la bonne marche de l’entreprise et détériorent le climat de celle-ci dans la mesure où vos agissements ont suscité un trouble important auprès de certains salariés concernant l’effort fourni en termes d’heures de travail et dans l’organisation générale de notre société.

Par ailleurs, ces faits sont constitutifs d’un manquement particulièrement grave :

– à la discipline générale de l’entreprise,

– à l’organisation et la santé économique de l’entreprise,

– à vos obligations contractuelles,

– à l’exécution de bonne foi de votre contrat de travail conformément à l’article 1.1222-1 du Code du travail,

– au respect des instructions et consignes données par votre hiérarchie.

Nous considérons que votre comportement constitue une faute préjudiciable à notre société, que ce comportement se caractérise par sa fréquence et sa durée dans le temps et ne constitue

aucunement un acte isolé, malgré notre volonté de toujours vous accompagner.

Compte tenu de la gravité des faits qui vous sont reprochés, votre maintien dans l’entreprise s’avère impossible.

Par conséquent, au regard de tous ces motifs nous vous confirmons que nous ne pouvons pas poursuivre notre collaboration puisque les faits que nous avons constatés constituent une faute grave justifiant ainsi votre licenciement sans indemnités, ni préavis.

La présente lettre constituera alors la notification de votre licenciement […]’

Des termes de cette lettre il ressort que sont principalement reprochés au salarié les griefs suivants:

– non-respect de l’approbation des devis par la direction,

– absence de mise à jour du planning chargé d’affaires sur la révision des dates de livraison délais du lancement de l’approvisionnement matière,

– absence de tenue de la revue des exigences clients.

Ces reproches relèvent globalement d’une mauvaise exécution par le salarié des tâches qui lui sont dévolues et procèdent d’une insuffisance professionnelle qui n’est susceptible de relever du disciplinaire que s’ils procède d’une mauvaise volonté délibérée du salarié.

– sur le non-respect de l’approbation des devis par la direction

Si le salarié en sa qualité de chargé d’affaire était bien tenu, d’après sa fiche de poste, de soumettre les devis à l’approbation de la direction, aucun élément ne vient préciser les modalités de celle-ci. A cet égard le reproche est contesté par le salarié qui établit que ses devis étaient revêtus du tampon de l’entreprise. Il ajoute que la procédure de validation était en tout état de cause difficile à mettre en oeuvre en pratique et que l’ensemble des salariés s’en accommodait faute de temps.

Il n’est produit par l’employeur aucun devis établi par d’autres chargés d’affaires attestant des modalités effectives de la procédure de validation par l’apposition de la signature d’un membre de la direction. Un doute existe donc sur la matérialité de ce grief.

-Sur l’absence de mise à jour du planning chargé d’affaire sur la révision des dates de livraison

Le salarié excipe d’un contexte général de surcharge d’activité entraînant un retard de planification . Il en veut pour preuve une liste de 13 affaires dans lesquelles M.[M] était chargé d’affaire et souffrant d’un retard d’une à quatre semaines dans la date de lancement de fabrication ou de livraison au client initialement prévue entre le 23 mai et le 8 juillet(pièce 21). Il produit également (pièce 22) un courriel de l’employeur évoquant ‘une charge actuelle importante due à de gros retards pris en conception et (au ) manque de personnel en production,’ ainsi que le recours à la soustraitante et à l’interim. L’intimé souligne en outre les difficultés occasionnées par les dysfonctionnements du logiciel dédié aux tableaux de planification, dont la réalité est confortée par des courriels des 10 et 11 avril 2019.

Les courriers de mécontentement de clients dans les dossiers visés dans la lettre de licenciement (Medyna, Windblast) que produit l’employeur sont afférents au non-respect des délais de livraison et à un défaut de conformité. Ces courriers sont en soi insuffisants pour imputer la responsabilité des manquements dénoncés au salarié , en considération des difficultés générales susévoquées auxquelles la société faisait face et dont elle ne remet pas en cause la réalité.

Au delà du doute qui résulte des développements qui précèdent sur la réalité des manquements reprochés au salarié et sur leur imputabilité à celui-ci, les griefs formulés par l’employeur qui relèvent principalement de l’incompétence et d’une mauvaise exécution du contrat de travail, ne sauraient revêtir les caractères de la faute grave qu’à condition que soit démontrée une négligence intentionnelle du salarié dans son travail ou une mauvaise volonté délibérée dans l’exécution de ses missions.

A cet égard aucun élément ne vient démontrer que les convocations du salarié à un entretien préalable à une mise à pied disciplinaire les 5 mai 2015 et 3 août 2018 dont excipe l’employeur, et qui n’ont pas été suivies de sanctions particulières, étaient motivées par des manquements de même nature à défaut de toute précision sur l’objet de l’entretien dans les lettres de convocation. Il ne peut donc être retenu comme l’affirme sans preuve l’employeur, que le salarié avait été alerté sur des manquements répétés dans le respect des procédures en vigueur dans l’entreprise.

Au surplus, les échanges de courriels entre le salarié et l’employeur

entre le 1er et le14 mai 2019, établissent que l’employeur a accordé une augmentation de salaire à M.[X] afin de le maintenir dans son poste, après avoir été informé du projet de départ de ce dernier dans une entreprise concurrente. Ce choix de l’employeur traduit à tout le moins sa satisfaction à l’égard du travail fourni par le salarié

en mai 2019, soit 4 mois environ avant l’engagement de la procédure de licenciement.

Cette circonstance conduit à remettre en cause le bienfondé et le sérieux des griefs articulés contre le salarié.

Le licenciement est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit au paiement des indemnités de rupture au profit du salarié.

Le salarié ayant été privé du préavis par l’employeur en raison d’une faute grave injustifiée, il est fondé à percevoir une indemnité compensatrice de préavis, nonobstant son arrêt maladie du 27 septembre au 14 octobre 2019 .

Le jugement sera donc confirmé en ses dispositions ayant alloué au salarié les sommes suivantes:

– 25 988,82 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

– 2 598,88 € au titre des congés payés afférents

– 64 508,90 € au titre de l’indemnité de licenciement

Il sera en revanche infirmé en ses dispositions ayant débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En application de l’article L 1235-3 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, M.[X] qui bénéficiait d’une ancienneté de 24 ans et d’un salaire mensuel de référence de 4 331,47 euros, est en droit de prétendre à une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse comprise entre et 3 et 17,5 mois de salaire.

Âgé de 55 ans lors de la rupture, il a perçu des indemnités chômage jusqu’au 31décembre 2021. Il est justifié de lui allouer la somme de 34 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Les diverses indemnités de rupture allouées au salarié seront fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société SFAAT.

Le présent arrêt sera déclaré opposable à l’UNEDIC-AGS.

Sur les demandes annexes

La SELARL [S] ès qualités de mandataire liquidateur de la société SFAAT, partie perdante, supportera les entiers dépens de première instance et d’appel

L’équité commande de ne pas faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le jugement entrepris est infirmé en ses dispositions concernant les frais et dépens de première instance.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement , contradictoirement, en dernier ressort

Infirme le jugement en ce qu’il a débouté M.[X] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Statuant à nouveau de ce chef

Fixe la créance de M.[N] [X] au passif de la liquidation judiciaire de la société SFAAT à la somme de 34 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Confirme le jugement déféré pour le surplus sauf à dire que les sommes allouées à M.[N] [X] au titre du préavis, des congés payés correspondants et de l’indemnité de licenciement seront fixées au passif de la liquidation judiciaire de la société Française Assistance Applications Techniques ( société SFAAT)

Dit que la garantie de l’AGS-CGEA de [Localité 4] doit être mise en oeuvre pour les créances sus-visées et ce dans les limites légales et réglementaires,

Rappelle que la garantie du CGEA s’applique dans les conditions, limites et plafonds légaux et réglementaires de la garantie prévue aux articles L 3253-6,

L 3253-8, L 1253-17 et D 3253-5 du Code du Travail,

Rappelle qu’en application des dispositions des articles L 3253-6, L 3253-1

et L 3253-5 du Code du Travail, l’obligation du CGEA de faire l’avance de la somme à laquelle est évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé de créances par le mandataire judiciaire et sur justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles pour procéder à leur paiement en vertu de

l’article L 3253-19 du même code,

Rappelle que le jugement d’ouverture de la procédure collective opère arrêt des intérêts légaux et conventionnels en vertu de l’article L 622-28 du code de commerce,

Condamne la SELARL [S] et associés prise en la personne de Maître [S], ès qualités de mandataire liquidateur de la société SFAAT, aux dépens de première instance et d’appel

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER S.BLUMÉ

.

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon