Droit du logiciel : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/00456

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Droit du logiciel : 25 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/00456

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 25 JANVIER 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 18/00456 – N° Portalis DBVK-V-B7C-NUHB

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 14 MARS 2018

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER N° RG 16/00432

APPELANTE :

Madame [L] [Z]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe SENMARTIN de la SELARL CHABANNES-SENMARTIN ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Représentée par Me Frédéric MORA, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEES :

SAS EUREST SPORTS ET LOISIRS

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me GARREAU LESPES avocat pour Me Sarah GENSOLLEN de la SELARL ARCOLIA, avocat au barreau de MARSEILLE

SAS COMPASS GROUP FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me GARREAU LESPES avocat pour Me Sarah GENSOLLEN de la SELARL ARCOLIA, avocat au barreau de MARSEILLE

Ordonnance de clôture du 03 Novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère, et M.Pascal MATHIS, Conseillerchargé du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller

Greffier lors des débats : M. Philippe CLUZEL

ARRET :

– contradictoire;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par M. Philippe CLUZEL, Greffier.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Selon contrat de travail à durée indéterminée du 6 février 2014 à effet au 10 février 2014, Mme [L] [Z] a été engagée à temps complet par la SARL Eurest Sports & Loisirs en qualité de responsable point de vente, statut agent de maîtrise, affectée à la cafétéria ICM Cafeteria au centre médical [5] à [Localité 4], moyennant une rémunération mensuelle brut de 2.000€.

Par avenant du 25 avril 2014, l’horaire mensuel initialement fixé à 169 heures a été ramené à 151,67 heures sans modification du montant du salaire, étant précisé qu’il était indiqué : « Suite à un problème informatique, il apparaît que la durée mensuelle de travail contractuelle indiquée sur le contrat de travail de [L] [Z] est erronée ».

L’employeur a notifié à la salariée par lettres des 24 novembre 2014, 10 mars 2015 et 6 juillet 2015, respectivement :

– une mise en garde.

– une mise à pied disciplinaire pour une journée,

– un avertissement, contesté en vain.

Par courrier du 17 août 2015, l’employeur a convoqué la salariée à un entretien préalable en vue de son licenciement.

Par lettre du 14 septembre 2015, il lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse avec dispense d’exécution du préavis de deux mois.

Par requête enregistrée le 24 mars 2016, faisant valoir que des heures supplémentaires lui étaient dues et que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse, la salariée a saisi le conseil de prud’hommes de Montpellier à l’encontre des sociétés Eurest Sport et loisirs et Compass Group France.

Selon conclusions déposées au greffe le 26 octobre 2017, elle a sollicité en outre l’annulation de la mise à pied disciplinaire et de l’avertissement.

Par jugement du 14 mars 2018, le conseil de prud’hommes a

– dit et jugé que le licenciement de Mme [L] [Z] est fondé sur une cause réelle et sérieuse, qu’elle n’a pas accompli d’heures supplémentaires, que les sanctions disciplinaires seront maintenues,

– déboute Mme [L] [Z] de l’intégralité de ses demandes y compris celle fondée sur l’article 700 du Code de procédure civile,

– mis les dépens de l’instance à la charge de cette dernière.

Par déclaration enregistrée au RPVA le 25 avril 2018, la salariée a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Par arrêt avant-dire-droit du 24 novembre 2021, la cour a révoqué l’ordonnance de clôture du 7 septembre 2021 et a renvoyé l’affaire au conseiller de la mise en état « à charge pour Mme [Z] dans les deux mois du présent arrêt, de préciser par nouvelles conclusions à l’encontre de quelle société elle entend diriger ses demandes de condamnation et de s’expliquer sur l’identité de la société qui l’employait ».

La salariée a conclu le 18 janvier 2022, précisant que son employeur était la SAS Compass Group et qu’elle dirigeait ses demandes exclusivement contre celle-ci.

Les intimées ont conclu le 7 septembre 2022, reprenant leurs dernières écritures du 17 octobre 2018 et prenant acte de ce que l’appelante ne formulait ses demandes que à l’encontre de la SAS Compass Group.

L’appelante a de nouveau conclu le 30 septembre 2022, ajoutant des développements sur le fond de l’affaire à ses dernières écritures du 18 janvier 2022.

Les intimées ont conclu le 31 octobre 2022 pour demander que les conclusions postérieures à celles du 18 janvier 2022 soient écartées des débats en ce qu’elles ajoutaient des éléments ne concernant pas l’objet du renvoi à la mise en état.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses conclusions enregistrées au RPVA le 18 janvier 2022 septembre 2022, Mme [L] [Z] demande à la Cour, au visa de l’article L 8221-6 du Code du travail, de :

– réformer le jugement en son intégralité ;

– juger que la société Compass Group exerce le lien de subordination à son égard ;

– juger qu’elle a accompli des heures supplémentaires non rémunérées ;

-condamner la société Compass Group à lui verser les sommes suivantes :

* 21.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 66,66 € à titre de rappel de salaires pour mise à pied,

* 6,66 € à titre de congés payés sur rappel de salaire pour mise à pied,

* 5.380 € à titre de rappel de salaires pour heures supplémentaires,

* 538 € à titre de congés payés sur heures supplémentaires,

* 1.345 € à titre de majorations sur heures supplémentaires,

* 134 € à titre de congés payés correspondants,

* 12.000 € à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé,

* 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– condamner la société à la remise des documents sociaux et bulletins de salaire rectifiés sous astreinte de 100 € par jour de retard dans les 15 jours suivant la décision à venir, « le Conseil » se réservant le droit de liquider l’astreinte ;

– condamner la société Compass Group aux entiers dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions enregistrées au RPVA le 31 octobre 2022, les SA Compass Group France Enseignement, santé et services hôteliers et la SAS Eurest Sports et Loisirs demandent à la Cour :

A titre liminaire, de

– rejeter les écritures notifiées en date du 30 septembre 2022 par Mme [Z], en ce qu’elles interviennent hors tout cadre procédural ;

En tout état de cause, de

– prendre acte de ce que l’ensemble des demandes formulées par la salariée devant la Cour sont dirigées contre la société Compass Group France ;

– dire et juger que son licenciement repose bien sur une cause réelle et sérieuse ;

– la débouter de l’ensemble des demandes afférentes à la rupture de son contrat de travail ;

– la débouter de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– les accueillir en leur demande reconventionnelle et condamner Mme [Z] à leur payer la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

– la condamner aux entiers dépens.

Pour l’exposé des prétentions des parties et leurs moyens, il est renvoyé, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 3 novembre 2022.

MOTIFS

Sur la demande tendant à écarter les conclusions enregistrées le 30 septembre 2022.

Alors qu’elle avait été invitée dans le cadre du renvoi à la mise en état prononcé le 24 novembre 2021 à préciser contre laquelle des deux intimées elle dirigeait ses demandes, qu’elle avait répondu, par conclusions du 18 janvier 2022, que ses demandes étaient présentées exclusivement contre la SAS Compass Group et que les intimées ont pris de nouvelles conclusions pour prendre acte de cette précision sans rien ajouter à leurs précédentes écritures, l’appelante a de nouveau conclu le 30 septembre 2022 sur le fond de l’affaire.

Dans la mesure où elle ne devait pas conclure à nouveau au fond mais seulement sur l’identité de son employeur en présence de deux sociétés intimées, il y a lieu d’écarter des débats les conclusions du 30 septembre 2022 et de ne retenir, au titre des dernières conclusions, que les écritures enregistrées le 18 janvier 2022.

Sur le rappel de salaires au titre des heures supplémentaires.

Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du Code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, la salariée fait valoir qu’elle a accompli des heures supplémentaires non payées alors que l’employeur relève notamment qu’il n’a jamais donné d’instructions en ce sens et que les salariés enregistrent eux-mêmes leurs heures de travail sur un logiciel, celles-ci étant ou non validées par leur supérieur hiérarchique. Il en déduit que si des heures supplémentaires avaient été exécutées par la salariée, cela signifierait qu’elle n’aurait pas déclaré l’intégralité de ses heures de travail ; ce qui ne lui paraît pas crédible.

La salariée produit les pièces suivantes :

– un tableau informatisé dont il résulte qu’elle a accompli 261 heures supplémentaires en 2014 et 147,95 en 2015, soit un total de 408,95 €, étant précisé que sont déduits les jours de vacances et jours fériés ainsi que les jours d’arrêt de travail pour maladie,

– ses bulletins de salaire,

– deux attestations régulières de Mmes [I] [F] et [I] [R], lesquelles indiquent que la salariée travaillait de 8h00 à 18h00 du lundi au vendredi matin.

Si les deux témoignages ne sont pas suffisamment précis ‘ ainsi que le relèvent les intimées – en ce qu’ils ne permettent pas de savoir si leurs rédactrices étaient des collègues de travail, en revanche, le tableau produit constitue un élément suffisamment précis permettant à l’employeur de répondre.

Or, celui-ci ne produit aucun élément objectif susceptible de montrer qu’il effectuait un contrôle des heures de travail accomplies par la salariée.

Il y a lieu en conséquence de retenir l’existence d’heures supplémentaires.

Ainsi que le relèvent les intimées, une incohérence apparaît après comparaison entre le tableau produit et le bulletin de salaire du mois de décembre 2014 versé aux débats par les intimées : alors que la salariée était mentionnée en arrêt de travail pour maladie les 2 et 3 décembre 2014, le tableau fait état d’un arrêt de travail les lundi et mardi 1er et 2 décembre 2014.

Par ailleurs, le tableau ne fait pas apparaître les pauses.

En revanche, le moyen tiré de ce que ce document n’aurait pas pris en compte le véritable nombre d’heures de travail (169 heures) exécutée par la salariée du 10 février au 25 avril 2014, date de l’avenant, est inopérant : l’avenant précise que le contrat de travail initial comporte une erreur, la durée du travail mensuelle étant de 157,67 et non de 169 heures ; ce qui est corroboré par le fait qu’aucune modification du montant du salaire n’a été réalisée malgré la baisse du nombre d’heures de travail. Ainsi en réalité, la salariée a toujours travaillé 157,67 heures par mois.

De même, le moyen tiré du fait que la salariée n’ait pas réclamé le paiement de l’intégralité de ses heures de travail pendant la relation contractuelle est tout à fait inopérant.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la somme due au titre des heures supplémentaires accomplies par la salariée du 10 février 2014 au 14 septembre 2015 s’élève à la somme de 3.690,40 €, outre la somme de 369,04 €.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de ce chef de demandes.

Sur le travail dissimulé.

La dissimulation d’emploi salarié prévue à l’article L 8221-5 du Code du travail n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a, de manière intentionnelle, notamment omis d’accomplir la formalité relative à la déclaration préalable à l’embauche.

L’article L 8223-1 du même Code, dans sa version applicable, prévoit qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié concerné par le travail dissimulé a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le volume important d’heures supplémentaires accomplies par la salariée au cours de la période contractuelle établit le caractère intentionnel de l’employeur, en sorte qu’il sera condamné à payer à la salariée la somme de 1.207,20 € à titre d’indemnité forfaitaire.

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de ce chef de demande.

Sur le rappel de salaire lié à la mise à pied disciplinaire.

L’article L 1331-1 du Code du travail dispose que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l’employeur à la suite d’un agissement du salarié considéré par l’employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l’entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

L’article L 1333-1 du même Code prévoit qu’en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.

L’employeur fournit au conseil de prud’hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.

Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l’appui de ses allégations, le conseil de prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l’espèce, dans le corps de ses conclusions, la salariée consacre un paragraphe intitulé « Sur l’annulation des sanctions disciplinaires notifiées » et sollicite l’annulation de l’avertissement du 6 juillet 2015 et de la mise à pied disciplinaire notifiée le 10 mars 2015 aisi que le paiement d’un rappel de salaire et de ses accessoires lié à cette dernière sanction.

Dans le dispositif de ses conclusions, elle ne demande pas à la cour l’annulation de ces deux sanctions mais sollicite le paiement du rappel de salaire et de ses accessoires au titre de la mise à pied disciplinaire.

En conséquence, la cour n’est pas saisie d’une demande d’annulation de l’avertissement mais est saisie de la demande de rappel de salaire au titre de la mise à pied disciplinaire.

Aux termes du courrier du 10 mars 2015, l’employeur reproche à la salariée les faits suivants :

– le non-respect de ses missions administratives, précisant que lors d’une visite sur site le 8 février 2015, malgré les différents rappels oraux et écrits, il a été constaté que les briefings quotidiens n’étaient pas réalisés, que les fiches techniques des nouveaux sandwiches n’étaient pas établies, que les plannings des animations annuelles et des congés payés n’étaient pas faits,

– le non-respect des règles relatives à l’hygiène et la sécurité, précisant que le 11 février 2015 à 10h00, il a été constaté qu’un sandwich triangle en date limite de consommation (DLC) au 10 février 2015 était en vente en vitrine, qu’un autre se trouvait dans le réfrigérateur et que le 19 février 2015, un fromage blanc en DLC au 18 février 2015 était ouvert dans le réfrigérateur depuis le 16 février 2015 et comportait un étiquetage faux.

L’employeur établit les faits reprochés par la production d’un courriel du 2 mars 2015 de M. [M] [C] adressé à Mme [N] [D] ‘ il n’est pas discuté que ces derniers sont les supérieurs hiérarchiques de la salariée – aux termes duquel M. [C] relate précisément les faits visés dans la lettre d’avertissement.

Le moyen tiré du fait que l’employeur n’aurait pas pu infliger à la salariée une mise à pied disciplinaire d’une seule journée au motif que le règlement intérieur ne prévoit que la mise à pied durant trois jours ouvrés ou cinq jours ouvrés selon la gravité de la faute, doit être écarté. En effet, d’une part, la mise à pied disciplinaire fait partie des sanctions possibles et d’autre part, la salariée ne saurait se plaindre de ce que la durée de la sanction était inférieure à trois jours.

Dans la mesure où le point-chaud est situé au sein d’un centre médical, fréquenté par un public fragilisé, la sanction choisie par l’employeur apparaît adaptée et proportionnée à la faute commise par la salariée.

Il y a lieu de rejeter sa demande au titre du rappel de salaire et accessoires.

Sur le licenciement.

L’article L 1232-1 du Code du travail subordonne la légitimité du licenciement pour motif personnel à une cause réelle et sérieuse.

L’article L 1235-1 du même Code prévoit que le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur et forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

En l’espèce, la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, est rédigée comme suit :

« (…) nous entendons par la présente vous faire part de notre décision de rompre votre contrat de travail pour vos manquements professionnels récurrents. Cette décision est motivée par les raisons que nous vous exposons ci-après.

– Insubordination envers vos supérieurs hiérarchiques :

. votre supérieur hiérarchique vous a demandé à plusieurs reprises de ne pas communiquer directement avec le client or dès le lendemain de votre retour de congés soit le 21 juillet 2015, vous avez adressé un mail directement à notre client engendrant un mécontentement de celui-ci.

– Non respect des règles en matière d’hygiène

. le 20 juillet 2015, vous étiez en charge de la réception des marchandises et n’avez pas réalisé les relevés de températures ni respecté le process de réception alors même que les procédures dans ce domaine vous ont été expliquées à de nombreuses reprises et qu’un risque de contamination peut intervenir dans un environnement médical.

– Négligence et manque de réactivité dans l’exercice de la mission

. l’affichage pour l’information de l’utilisation des produits surgelés a été réalisé avec un logo erroné ;

. les difficultés rencontrées le 29 juillet 2015 n’ont pas été traitées par vos soins selon la procédure en vigueur qui requiert la mise en place immédiate d’un document de réactivité et le respect de délai précis ;

. non respect des demandes en matière de gestion d’approvisionnement de la vitrine des produits régionaux impliquant le mécontentement de notre client le 21 juillet 2015 .

L’ensemble de ces éléments met en exergue une volonté non dissimulée de ne pas respecter les consignes de votre hiérarchie et les demandes client allant même jusqu’à mettre en danger la santé des consommateurs.

Pour mémoire vous avez fait l’objet de sanctions disciplinaires pour des faits similaires, soit une mise en garde le 21/11/2013, une mise à pied disciplinaire le 10/03/2015 et un avertissement le 06/07/2015, néanmoins vous vous êtes entêtée à ne pas modifier votre comportement.

En conséquence, nous avons pris la décision de vous licencier pour cause réelle et sérieuse.

Compte tenu des faits exposés, nous entendons vous dispenser de votre préavis qui vous sera intégralement payé. (…) ».

Pour démontrer les trois types de griefs reprochés, l’employeur se contente de présenter les faits sans produire le moindre élément objectif susceptible de les établir.

Dès lors, le licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement qui n’a évoqué que l’absence de preuve du préjudice de la salariée sans vérifier l’existence d’une cause réelle et sérieuse justifiant le licenciement sera infirmé en ce qu’il a dit le licenciement fondée sur une cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences pécuniaires de la rupture.

Compte tenu de l’âge de la salariée (née le 31/10/1978), de son ancienneté à la date du licenciement après déduction des jours d’arrêt de travail pour maladie et prise en compte des deux mois de préavis (1 an et 6 mois), du nombre de salariés habituellement employés (au moins 11 salariés), de sa rémunération mensuelle brut (2.012 €), de l’absence de tout justificatif relatif à sa situation actuelle et des limites des demandes, il convient de fixer à 3.000 € les dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La salariée présente des demandes au titre des « majorations sur heures supplémentaires » et au titre des « congés payés correspondants » sans pour autant expliciter celles-ci.

Ces demande seront rejetées.

Sur la mise hors de cause de la SARL Eurest Sports & Loisirs.

Il convient de mettre hors de cause la SARL Eurest Sports & Loisirs contre laquelle l’appelante ne fait aucune demande.

Sur les demandes accessoires.

L’employeur devra délivrer à la salariée les documents sociaux et un bulletin de salaire rectifiés sans qu’il soit besoin de prononcer une astreinte.

Il sera condamné à payer la somme de 1.500 € à la salariée sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile au titre des frais exposés en première instance et en cause d’appel.

Il sera tenu aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;

ECARTE les conclusions de Mme [L] [Z] enregistrées au RPVA le 30 septembre 2022 ;

MET hors de cause la SARL Eurest Sports & Loisirs ;

CONSTATE que la cour n’est pas saisie d’une demande d’annulation de l’avertissement notifié le 6 juillet 2015 ;

CONFIRME le jugement du 14 mars 2018 du conseil de prud’hommes de Montpellier en ce qu’il a débouté Mme [L] [Z] de ses demandes au titre du rappel de salaire et accessoires relatifs à la mise à pied disciplinaire notifiée le 10 mars 2015 et au titre des majorations sur heures supplémentaires et congés payés correspondants ;

L’INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

DIT que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la SAS Compass Group France à payer à Mme [L] [Z] les sommes suivantes :

– 3.690,40 € brut à titre de rappel de salaire correspondant aux heures supplémentaires,

– 369,04 € brut à titre d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

– 1.207,20 € à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

– 3.000 € les dommages et intérêts au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la SAS Compass Group France à délivrer à Mme [L] [Z] un bulletin de salaire et les documents sociaux rectifiés conformément aux dispositions du présent arrêt ;

DIT n’y avoir lieu de prononcer une astreinte ;

CONDAMNE la SAS Compass Group France à payer à Mme [L] [Z] la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Compass Group France aux entiers dépens de l’instance ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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