N° RG 23/02361 – N° Portalis DBVX-V-B7H-O3VA
Nom du ressortissant :
[T] [F]
[F]
C/
PREFET DU RHONE
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 22 MARS 2023
statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers
Nous, Antoine-Pierre D’USSEL, conseiller à la cour d’appel de Lyon, déléguée par ordonnance du premier président de ladite Cour en date du 21 mars 2023 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d’entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d’asile,
Assistée de Jihan TAHIRI, greffière placée,
En l’absence du ministère public,
En audience publique du 22 Mars 2023 dans la procédure suivie entre :
APPELANT :
M. [T] [F]
né le 19 Août 1986 à [Localité 2]
de nationalité Tunisienne
Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [3]
comparant assisté de Maître GUILLAUME substituant Maître Morgan BESCOU, avocats au barreau de LYON, choisi
ET
INTIME :
M. LE PREFET DU RHONE
[Adresse 4]
[Localité 1]
Non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître IRIRIRA NGANGA Dan, avocat au barreau de Lyon, pour la SELARL SERFATY VENUTTI CAMACHO & CORDIER, avocats au barreau de l’AIN
Avons mis l’affaire en délibéré au 22 Mars 2023 à 17 heures 00 et à cette date et heure prononcé l’ordonnance dont la teneur suit :
FAITS ET PROCEDURE
Monsieur [T] [F], né le 19 août 1986 à [Localité 2] (Tunisie), de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative à compter du 18 février 2023 par arrêté de la préfecture du Rhône, et conduit au centre de rétention administrative de [3] afin de permettre l’exécution de la décision du tribunal correctionnel de Saint Etienne du 3 mai 2022 qui l’a notamment condamné à une interdiction définitive du territoire français, décision assortie de l’exécution provisoire sur le fondement de l’article 471 du code de procédure pénale.
Par ordonnance du 20 février 2023, confirmée par la cour le 22 février 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a ordonné la prolongation de la mesure de rétention administrative concernant Monsieur [F] pour une durée de 28 jours.
Saisi par requête du préfet du Rhône tendant à ce que soit prolongée la mesure de rétention mise en ‘uvre, par requête déposée le 19 mars 2023 à 15h06, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, par ordonnance du 20 mars 2023 à 15h54, a notamment rejeté les moyens d’irrecevabilité soulevés, déclaré recevables les requêtes précitées et régulière la décision de placement en rétention administrative prononcée à l’encontre du requérant et ordonné la prolongation de la mesure de rétention administrative pour une durée de 30 jours.
Monsieur [T] [F] a relevé appel de cette ordonnance par courriel reçu au greffe de la présente juridiction le 20 mars 2023 à 20h13, estimant que la requête préfectorale en prolongation n’était pas accompagnée de l’ensemble des pièces justificatives utiles et notamment d’une copie actualisée du registre, en contravention des termes de l’article R 743-2 du CESEDA.
Les parties ont été convoquées à l’audience du 22 mars 2023 à 10h30.
A l’audience, Monsieur [T] [F], assisté de son conseil, sollicite la réformation de l’ordonnance déférée, et sollicite qu’il soit dit n’y avoir lieu à aucune mesure de surveillance, et prononcé sa mise en liberté immédiate.
Le préfet du Rhône, représenté, conclut à la confirmation de l’ordonnance déférée, considérant que les dispositions de l’article L 744-2 ne prévoient pas la mention des éléments relatifs au dépôt des demandes d’asile.
MOTIVATION
Sur la recevabilité :
L’appel de Monsieur [T] [F] a été relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21 et R. 743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Il convient d’en constater la recevabilité.
Sur la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de la requête en prolongation de la rétention:
Aux termes de l’article R 743-2 du CESEDA, « à peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.
Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2 ».
Par ailleurs, aux termes de l’annexe de l’arrêté du 6 mars 2018 portant autorisation du registre de rétention prévu à l’article L. 553-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et d’un traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « logiciel de gestion individualisée des centres de rétention administrative » (LOGICRA), doivent être enregistrées au sein dudit registre, s’agissant des procédures juridictionnelles mises en ‘uvre au cours de la rétention, en ce qui concerne :
Le contentieux administratif : « type de recours, juridiction saisie, date et heure de l’audience, décision, appel » ;
Les demandes d’asile : « date et heure du dépôt de la demande, modalité d’instruction, décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et date de celle-ci, recours auprès de la Cour nationale du droit d’asile ».
Monsieur [F] fait valoir qu’en l’espèce, le préfet du Rhône n’a pas joint à sa requête une copie actualisée de ce registre, puisque la copie produite ne mentionne pas la demande d’asile effectuée par l’intéressé le 23 février 2023, ni la décision de rejet de l’OFPRA du 3 mars 2023, notifiée le 7 mars suivant ; que cette copie ne contient pas davantage la mention de la contestation devant le tribunal administratif, ni de la décision rendue par ce dernier le 9 mars 2023. Or, l’absence de production d’une copie actualisée équivaut à l’absence de production du registre. Au surplus, contrairement à ce qu’a estimé le premier juge, il ne peut être considéré, au vu des dispositions précitées, que les mentions relatives à une demande d’asile et aux décisions de l’OFPRA n’ont pas à figurer sur ce registre ; qu’il ne peut davantage être considéré que l’absence de grief permettrait de déclarer la requête recevable, alors que le moyen développé consiste en une fin de non-recevoir, qui ne suppose la démonstration d’aucun grief.
Il s’ensuit que ce grief est fondé, et sauf à priver de sens les encadrés prévus sur ce registre même, c’est à tort que la préfecture s’en tient aux seules dispositions de l’article L 744-2 du CESEDA, alors que l’arrêté du 6 mars 2018 précité précise les mentions devant être apposées sur ce registre, dont copie actualisée doit, aux termes de l’article R 743-2 précité, être fournie à l’appui de toute requête formée par l’autorité administrative.
Dès lors qu’il est constant que le registre ne comporte pas les mentions relatives à la procédure de demande d’asile et à la procédure devant le tribunal administratif, antérieures à la requête en prolongation de la mesure de rétention du 19 mars 2023, celle-ci doit être considérée comme irrecevable sur le fondement de l’article R 743-2 du CESEDA.
L’ordonnance déférée sera infirmée en ce sens.
PAR CES MOTIFS
Déclarons recevable l’appel formé par Monsieur [T] [F] le 20 mars 2023 ;
Infirmant l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de LYON en date du 20 mars 2023 (n° 23/00882) et statuant à nouveau,
Déclarons irrecevable la requête en prolongation de la mesure de rétention administrative formée le 19 mars 2023 à l’encontre de Monsieur [T] [F] par la préfecture du Rhône ;
Ordonnons en conséquence sa remise en liberté immédiate ;
Rappelons à Monsieur [T] [F] qu’il a l’obligation de quitter le territoire français.
Le greffier, Le conseiller délégué,
Jihan TAHIRI Antoine-Pierre D’USSEL
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