3ème Chambre Commerciale
ARRÊT N° 124
N° RG 20/06267 – N° Portalis DBVL-V-B7E-RGBT
S.A. BWH HOTEL GROUP FRANCE
C/
S.A.R.L. HDP
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me RENAUDIN
Me BROUILLET
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 21 MARS 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Alexis CONTAMINE, Président de chambre,
Assesseur : Madame Fabienne CLEMENT, Présidente de chambre, rapporteur
Assesseur : Madame Olivia JEORGER-LE GAC, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Isabelle GESLIN OMNES, lors des débats, et Madame Lydie CHEVREL, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 06 Décembre 2022
ARRÊT :
contradictoire, prononcé publiquement le 21 Mars 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A. BWH HOTEL GROUP FRANCE, anciennement dénommée MAPOTEL société coopérative à capital variable, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 319 641 551, prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège,
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean-Paul RENAUDIN de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Jacques ADAM, plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉE :
S.A.R.L. HDP, immatriculée au RCS de SAINT-NAZAIRE sous le n° 494 634 512, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège,
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Guillaume BROUILLET de la SCP AVOCATS LIBERTÉ GLON-GOBBE-BROUILLET-AUBRY-TESSIER, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Emilie SELLIER substituant Me Guillaume CLOUZARD de la SELAS ORATIO AVOCATS, plaidant, avocats au barreau d’ANGERS
FAITS
La société BWH HOTEL GROUP FRANCE, anciennement dénommée MAPOTEL est une société coopérative, dont les actionnaires sont des hôteliers indépendants, qui anime une chaîne sous la marque Best Western.
Elle met en oeuvre des moyens en vue de faciliter et développer l’activité économique de ses membres hôteliers notamment par la mise à disposition d’enseignes ou de marques, l’élaboration de méthodes et modèles communs d’organisation, la définition de standards de qualité et d’organisation, d’opérations commerciales et la gestion d’une plate-forme de vente en ligne.
La société HDP, propriétaire d’un fonds de commerce d’hôtel sous l’enseigne Hôtel de Pornic, a souscrit une action de la société MAPOTEL le 15 juin 2009 au prix de 762,25 euros et est devenue associée.
A partir de 2012, la société BWH HOTEL GROUP FRANCE ex MAPOTEL a mis en oeuvre un nouveau système de réservation informatique et a sollicité ses associés pour qu’ils fassent l’acquisition de la nouvelle plate-forme de réservation.
Les hôteliers avaient l’obligation de souscrire à cet effet un PMS (système de gestion des activités des établissements hôteliers) certifié à choisir dans une liste de prestataires avant le 31 décembre 2015.
Cette obligation a été notifiée le 5 octobre 2015 puis le 11 décembre 2015.
A cette date la société HDP n’avait pas encore souscrit un PMS.
Dans son courrier du 11 décembre 2015, la société MAPOTEL l’a avisée qu’à défaut de souscription, une procédure pouvant conduire à sa suspension ou son exclusion serait mise en oeuvre.
Le coût de ce changement informatique aux nouvelles normes ‘Best Western’ a été jugé particulièrement élevé par la société HDP qui a décidé de ne pas y souscrire.
La société HDP a été convoquée à une réunion du conseil d’administration le 25 janvier 2016.
La société HDP ne s’étant pas présentée, une nouvelle convocation lui a été adressée pour la réunion du conseil d’administration du 19 février 2016 à laquelle elle n’a pas répondu non plus.
Le conseil d’administration de la société MAPOTEL a prononcé son exclusion avec suspension de l’exercice de ses droits.
Dans le même temps la société MAPOTEL a remis à la société HEP une facture relative aux cotisations dues jusqu’au 31 décembre 2017 pour un montant de 59 908.92 euros.
Considérant que la société HDP ne respectait pas le règlement intérieur, la société MAPOTEL, après mise en demeure, a procédé par assemblée générale à l’éviction de HDP moyennant une indemnité d’exclusion de 59 908.92 euros.
La société HDP a refusé de régler l’indemnité.
La société MAPOTEL a saisi en paiement le tribunal de commerce de Saint- Nazaire le 22 avril 2019.
Par jugement du 21 décembre 2020 le tribunal de commerce de Saint-Nazaire a :
– Débouté la société MAPOTEL de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– Condamné la société MAPOTEL à régler à la société HDP la somme de 762.25 au titre du remboursement de son action au capital de la société MAPOTEL,
– Condamné la société MAPOTEL à payer à la société HDP la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ,
– Débouté la société HDP du surplus de sa demande,
– Condamné la société MAPOTEL aux entiers dépens de l’instance,
– Ordonné l’exécution provisoire du présent jugement,
– Liquidé les frais de greffe du présent jugement à la somme de soixante-trois euros et trente-six centimes dont TVA dix euros et cinquante-six centimes.
Par acte du 21 décembre 2020 la société MAPOTEL devenue la société BWH HOTEL GROUP FRANCE a interjeté appel du jugement
L’ordonnance de clôture est en date du 17 novembre 2022.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dans ses écritures notifiées le 10 novembre 2022 la société BWH HOTEL GROUP FRANCE demande à la cour de :
– Déclarer la société BWH HOTEL GROUP FRANCE recevable et fondée en son appel,
– Infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf celle condamnant la société BWH HOTEL GROUP FRANCE à rembourser la somme de 762.25 euros en remboursement de son action de capital,
– Condamner la société HDP à payer à la société BWH HOTEL GROUP FRANCE :
– La somme de 59 908, 72 euros en principal avec intérêts de droit à compter de la mise en demeure du 23 janvier 2017,
– La somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– Ordonner la capitalisation des intérêts,
– Condamner la société HDP aux dépens d’instance et d’appel dont distraction au profit de la SCP GUILLOU-RENAUDIN, Avocat, dans les conditions de l’article 699 du CPC.
Dans ses écritures notifiées le 15 novembre 2022 la société HDP demande à la cour au visa des articles 1193, 1194 et 1836 du code civil, 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil, 256 et suivants du code général des impôts, de :
– Dire la société BWH HOTEL GROUP FRANCE non fondée en son appel ainsi qu’en ses demandes, fins et conclusions,
– L’en débouter,
En conséquence :
– Confirmer purement et simplement le jugement du tribunal de commerce de Saint Nazaire en date du 18 novembre 2020 en toutes ses dispositions et notamment en ce qu’il a :
– Condamné la société MAPOTEL à payer à la société HDP la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du CPC et aux entiers dépens ;
– Débouté la société MAPOTEL de toutes ses demandes, fins et conclusions, notamment sa demande tendant à obtenir une indemnisation de 59.908,92 euros,
A titre subsidiaire :
– Modérer le montant de l’indemnité d’exclusion à de plus justes proportions en tant que clause pénale insérée au contrat d’adhésion,
En tout état de cause,
– Débouter la société BWH HOTEL GROUP France de l’ensemble de ses demandes, fins et
conclusions,
– Condamner la société BWH HOTEL GROUP FRANCE à régler à la société HDP la somme de 7.000 suros au titre de ses frais irrépétibles en instance d’appel, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– Condamner la société BWH HOTEL GROUP FRANCE aux entiers dépens de l’instance.
Il est renvoyé à la lecture des conclusions précitées pour un plus ample exposé des demandes et moyens développés par les parties.
DISCUSSION
Le règles applicables à l’exclusion de la société HDP
La société HDP fait valoir que les statuts mis à jour le 9 avril 2015 et le règlement intérieur mis à jour le 15 juin 2016 sur lesquels la société MAPOTEL devenue société BWH HOTEL GROUP FRANCE fonde ses demandes, ne lui sont pas opposables en ce qu’ils impliquent une augmentation de ses engagements par rapport aux statuts et aux règlements antérieurs. Elle ajoute qu’il n’est pas établi qu’elle ait consenti à cette modification des statuts.
La société BWH HOTEL GROUP FRANCE réplique que la modification n’entraîne aucune augmentation des engagements des associés et ne constitue qu’une reformulation des clauses précédentes. En tout état de cause elle ne s’oppose pas à l’application des statuts dans leur rédaction de 2006.
L’article 1836 du code civil précise :
Les statuts ne peuvent être modifiés, à défaut de clause contraire, que par accord unanime des associés.
En aucun cas, les engagements d’un associé ne peuvent être augmentés sans le consentement de celui-ci.
Il est acquis que les statuts peuvent prévoir qu’une modification peut intervenir en dehors de l’unanimité des associés mais il y a nécessité de recueillir le consentement individuel de chaque associé pour pouvoir augmenter ses engagements.
L’article 701 TITRE VII RESERVATIONS du règlement intérieur de la SA MAPOTEL version 9 avril 2015 indique :
ART.701 : Chaque associé prendra connaissance des procédures d’utilisation du système de réservation tel qu’indiquées dans le manuel des opérations. II s’oblige à se conformer à l’ensemble des règles, règlements, programmes, politiques, procédures, spécifications de matériels et de logiciels indiqués ainsi qu’à toute modification de ces derniers qui seraient demandée par BEST WESTERN INTERNATIONAL. La formation initiale sera obligatoire, gratuite et dispensée au siège de la SA Mapotel et conditionnera l’ouverture du système à la vente.
Ultérieurement, les interventions et déplacements, notamment pour la formation du personnel, seront facturés.
L’article 702 ajoute :
ART.702 : L’utilisation du logiciel de réservation BEST WESTERN dans les hôtels est obligatoire. Cette utilisation se fera sur un ordinateur PC équipé d’une connexion internet haut débit et d’une imprimante, appartenant à l’hôtel dont la puissance et la configuration, communiquées par BEST WESTERN, permettront un bon fonctionnement du logiciel. La représentation de l’hôtel affilié sur l’ensemble des GDS, sous le code BEST WESTERN, ainsi que sur les sites Internet, internationaux et nationaux développés par BEST WESTERN, est obligatoire. Les associés devront également classer leurs établissements selon le code BEST WESTERN dans tous les systèmes de réservation et sites Web auxquels ils adhèrent.
Ces modalités sont strictement identiques à celles qui étaient en vigueur au moment de l’adhésion de la société HDP au réseau ‘Best Western’ le 15 juin 2009 et qui figurent dans le règlement intérieur version ratifiée par l’assemblée générale ordinaire du 10 avril 2006.
Ces dispositions sont donc opposables à la société HDP.
En refusant d’adhérer au nouveau système de réservation envisagé par la société MAPOTEL la société HDP a donc failli à ses obligations d’autant qu’elle a été mise en demeure par courriers du 5 octobre 2015 puis du 11 décembre 2015 et ne s’est pas rendue aux réunions prévues du conseil d’administration pour statuer sur son exclusion éventuelle.
Elle explique elle même que son refus de souscrire tient au coût du logiciel.
Les statuts mis à jour suite aux délibérations de l’assemblée générale extraordinaire du 9 avril 2015 comportent un article 12 EXCLUSION :
La société n’est pas dissoute par le décès d’un associé ou la dissolution d’une société associée, ceux-ci sont démis d’office de leur qualité d’associé et radiés. Il en va de même en cas de perte de la qualité qui a motivé l’admission de l’associé considéré.
Le conseil d’administration peut également prononcer l’exclusion d’associés pour motifs graves, notamment la violation des statuts ou du règlement intérieur, le non-respect des obligations, délais et procédures prévus et décrits dans la manuel de qualité, le non-paiement des cotisations (dans ce dernier cas, un mois après mise en demeure de payer non suivie d’effet). L’exclusion est prononcée par le conseil d’administration, l’intéressé étant dûment entendu.
Tout associé frappé d’une mesure d’exclusion a la possibilité de faire appel de cette décision devant l’assemblée générale qui statue sur son recours lors de la première réunion ordinaire qui suit la notification de l’exclusion. Celle ci prend alors effet au jour de la notification de son acceptation par l’assemblée générale.
Toutefois, le conseil d’administration peut, lorsque l’intérêt de la société l’exige suspendre des droits que l’associé exclu tient de sa qualité de coopérateur , jusqu’à notification à ce dernier de la décision de l’assemblée générale sans que la durée de cette suspension ne puisse excéder une année.
En cas d’exclusion, l’ancien associé est redevable immédiatement envers la société d’une indemnité dont le montant est égal à celui de l’ensemble des cotisations dont il aurait été redevable au titre de la période prenant fin au 31 décembre suivant le 21ème mois après la date du prononcé de son exclusion par le conseil d’administration ou de sa ratification par l’assemblée générale.
Les statuts du 6 avril 2004 en vigueur au moment de l’adhésion au réseau Best Western de la société HDP comportaient un article 12 EXCLUSION libellé en ces termes :
La société n’est pas dissoute par le décès d’un associé ou la dissolution d’une société associée, ceux-ci sont démis d’office de leur qualité d’associé et radiés. Il en va de même en cas de perte de la qualité qui a motivé l’admission de l’associé considéré.
Le conseil d’administration peut également prononcer l’exclusion d’associés pour motifs graves, notamment la violation des statuts ou du règlement intérieur, non-paiement des cotisations (un mois après mise en demeure d’avoir à payer par lettre recommandée avec avis de réception, demeurée infructueuse)
L’exclusion d’un associé est prononcée par le conseil d’administration , l’intéressé étant dûment entendu.
Tout associé frappé d’une mesure d’exclusion a la possibilité de faire appel de cette décision devant l’assemblée générale ordinaire qui statue sur son recours lors de la première réunion qui suit la notification de l’exclusion par le conseil.
En ce cas l’exclusion prend effet au jour de la notification de son acceptation par l’assemblée générale. Mais le conseil d’administration peut, si l’intérêt de la société l’exige, suspendre l’exercice des droits que l’associé exclu tient de sa qualité de coopérateur , jusqu’à notification à ce dernier de la décision de l’assemblée générale sans que la durée de cette suspension ne puisse excéder une année.
En cas d’exclusion, sauf décision spéciale du conseil d’administration l’ancien associé est redevable immédiatement des cotisations qui auraient été exigibles conformément à l’article 11 RETRAIT dans le cas d’une démission donnée à la même date.
Cet article 11 RETRAIT précisait :
Tout associé à le droit de se retirer de la société dans les conditions prévues au présent article.
Le retrait prendra effet à la fin d’un exercice social de la société.
L’associé devra obligatoirement rester associé de la SA MAPOTEL pendant une période minimum se terminant à la fin du troisième exercice suivant au cours duquel son admission a pris effet, il ne pourra engager une procédure de retrait qu’à l’expiration de cette période en respectant alors les conditions de forme et de délai prévues à l’alinéa suivant.
L’associé qui souhaite se retirer devra notifier sa démission sans réserves ni équivoque par lettre recommandée avec demande d’accusé de réception adressée à la société 21 mois au moins avant la date de clôture de l’exercice à laquelle le retrait prendra effet.
Toute démission effectuée hors délai ou ne respectant pas les formes prescrites ne pourra prendre effet sauf décision spéciale du conseil d’administration.
Les statuts de 2004 ne mentionnent pas de paiement d’indemnité au même titre que celle qui est prévue dans ceux remis à jour en 2015.
Le règlement de cette indemnité en cas d’exclusion constitue donc une augmentation de l’engagement des associés qui doit être soumise à leur consentement individuel.
Or la société BWH HOTEL GROUP FRANCE ne démontre pas qu’elle a recueilli le consentement de la société H DP concernant le paiement de cette indemnité.
Elle renvoie au procès verbal des délibérations de l’assemblée générale mixte ordinaire et extraordinaire du 9 avril 2015 qui précise que l’assemblée prend acte que la modification des articles 11 et 12 constitue une simple reformulation et n’entraine pas de modification substantielles des règles applicables ni ne modifie ni n’aggrave les engagements des associés
Il indique que ces deux résolutions ont été adoptées à 154 voix ( sur 154 votants).
La société BWH HOTEL GROUP FRANCE ne verse pas la feuille de présence des associés participant à ces votes de sorte qu’il n’est pas établi que la société HDP ait été présente à cette assemblée générale.
La société BWH HOTEL GROUP FRANCE ne démontre donc pas que la société HDP a été seulement informée de cette modification des statuts et au plus fort qu’elle y a consenti, aucune pièce ne l’établissant.
Par conséquent l’article 12 des statuts mis à jour en 2015 ne lui est donc pas opposable.
La facture d’un montant de 59 908.92 euros ne repose donc sur aucun fondement.
Le jugement du tribunal de commerce est confirmé de ce chef.
Les demandes annexes
Il n’est pas inéquitable de condamner la société BWH HOTEL GROUP FRANCE à régler à la société HDP la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société BWH HOTEL GROUP FRANCE est condamnée aux dépens d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour
Confirme le jugement du tribunal de commerce
Y ajoutant :
– Condamne la société BWH HOTEL GROUP FRANCE à régler à la société HDP la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamne la société BWH HOTEL GROUP FRANCE aux dépens d’appel;
– Rejette les autres demandes.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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