Droit du logiciel : 21 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02868

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Droit du logiciel : 21 février 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/02868

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 11

ARRET DU 21 FEVRIER 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02868 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBZ5D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Février 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° 17/00682

APPELANT

Monsieur [U] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Alexandra SIX, avocat au barreau de PARIS, toque : E0006

INTIMEE

S.A. BLUELINK

Immeuble Osmose

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Christophe PETTITI, avocat au barreau de PARIS, toque : D1264

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Catherine VALANTIN, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

– contradictoire

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière présente lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La SA Bluelink, filiale de la société Air France, a pour activité principale la gestion du programme de fidélisation dénommé «’Flying Blue’» des passagers du groupe Air France.

M. [U] [C], né le 17 juillet 1967, a été engagé par la SA Bluelink suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 23 octobre 2000 en qualité d’agent commercial niveau II.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des agences de voyages et de tourisme.

Par lettre en date du 22 février 2016, la société Bluelink a convoqué M. [C] à un entretien préalable en vue d’une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement.

L’entretien a été fixé au 7 mars 2016.

A la suite de l’entretien préalable, la société Bluelink a notifié à M. [C], par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 15 mars 2016, son licenciement pour faute grave motif pris d’avoir émis frauduleusement deux billets d’avion primes en faveur d’une collègue de travail, que 14 billets d’avion ont été émis pour lui-même et les membres de sa famille en ne respectant pas les procédures en vigueur et d’avoir effectué pour le compte de tiers 198 achats de billets d’avion avec sa carte American Express, activités s’apparentant à l’exercice non déclaré de la profession d’agent de voyages.

A la date du licenciement, M. [C] avait une ancienneté de 15 ans et 6 mois et la société Bluelink occupait à titre habituel plus de 10 salariés.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, outre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [C] a saisi le 18 mai 2017, le conseil de prud’hommes de Créteil, qui par jugement rendu le 11 février 2020, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

Dit que le licenciement pour faute grave prononcé à l’encontre de M. [U] [C] est fondé,

Déboute M. [U] [C] de la totalité de ses demandes,

Déboute la SA Bluelink de sa demande reconventionnelle,

Met les éventuels dépens de l’instance à la charge du demandeur.

Par déclaration du 25 mars 2020, M. [C] a interjeté appel du jugement rendu par le conseil de prud’hommes, qui lui a été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception signé le 27 février 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 25 juin 2020, M. [C] demande à la cour’de :

Recevoir M. [U] [C] en son appel, l’en déclarer bien fondé ;

En conséquence, reformer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Créteil du 11 février 2020 en ce qu’il a :

Dit que le licenciement pour faute grave prononcé à l’encontre de M. [U] [C] est fondé ;

Débouté M. [U] [C] de l’ensemble de ses demandes ;

Mis les éventuels dépens de l’instance à la charge du demandeur.

Et statuant à nouveau :

Dire et juger que le licenciement prononcé à l’égard de M. [U] [C] le 15 mars 2016 est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence, condamner la société Bluelink à verser à M. [U] [C] les sommes suivantes :

-Indemnité compensatrice de préavis (2 mois) : 5228,78 €

-Congés payés sur préavis : 522,87 €

-Indemnité conventionnelle de licenciement : 10 893,29 €

-Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 62 000 €.

Enjoindre à la SA Bluelink de communiquer :

Le règlement intérieur de la société ;

Les règles du programme de fidélisation « Flyingblue » ;

Tout document relatif aux procédures internes à la société et attestant notamment :

De l’interdiction, pour un salarié exerçant les fonctions d’expert-produit, de passer par le site Amadeus pour effectuer une réservation s’agissant d’un billet prime à caractère promotionnel ;

De l’interdiction de bénéficier d’un stop-over et des règles prohibant l’octroi de cet avantage par un salarié expert-produit en cas de réservation d’un billet prime à caractère promotionnel ;

De l’interdiction de modifier le parcours d’un billet prime postérieurement au départ ;

De l’interdiction de remboursement les miles dépensés après le départ ;

De l’interdiction de traiter un salarié Bluelink comme n’importe quel autre client, et de le faire bénéficier des mêmes avantages et promotions que n’importe quel client d’AIR FRANCE KLM.

L’entier tableau des dérogations ;

Le tableau des remontées des dérogations ;

Les informations du service « MARKOP », et les « flash infos » qui accompagnent les publications des promotions incriminées ;

Le document intitulé « carnet de voyage » ;

Les consignes opérationnelles communiquées lors des épisodes de grève fin 2015 et début 2016 ;

Le guide « Gratis Passenger ».

Condamner la société Bluelink au paiement de la somme de 3000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux frais et dépens d’appel.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 11 juillet 2022, la société Bluelink demande à la cour de :

Confirmer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Créteil en date du 11 février 2020.

Dire et juger que le licenciement pour faute grave de M. [C] est justifié.

Débouter M. [C] de l’ensemble de ses demandes.

Condamner M. [C] au paiement de la somme de 5.000€ en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Le condamner aux entiers dépens.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 7 décembre 2022 et l’affaire a été fixée à l’audience du 5 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR’:

Sur la demande de production de pièces

L’appelant demande à la cour d’enjoindre à la société intimée la production notamment du règlement intérieur de la société, des règles du programme de fidélisation « Flying Blue » et de tout document relatif aux procédures internes à la société.

Outre que la société Bluelink réplique avoir produit les pièces sollicitées sous les n° 30′, 32 à 34 et 36 à 38) la cour rappelle qu’il sera statué en fonction des éléments produits par les parties et selon les règles de charge de la preuve applicables, toutes conséquences étant tirées du défaut éventuel de certaines pièces. Cette demande sera rejetée.

Sur le licenciement pour faute grave.

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige était ainsi libellée’:

«’Nous avons eu à déplorer de votre part les agissements suivants :

Le service de prévention des fraudes de notre client donneur d’ordre Air France-KLM nous a informés que vous aviez émis 2 billets frauduleux en faveur de votre collègue Madame [L] [X], parle débit non autorisé de deux comptes Flying Blue.

Par ailleurs, 14 billets ont été émis pour vous-même ou des membres de votre famille ne respectant

pas les règles et/ou procédures en vigueur telles que le non-respect du process d’émission des billets d’avion à caractère promotionnel, les règles des «’stopover’», les règles de remboursement de miles et règles de frais de service en cas de modification de parcours.

En qualité d’Expert Produit au sein du service client Air France, vous ne pouviez pas ignorer le caractère frauduleux de ces émissions et les manquements aux règles et process en vigueur.

Enfin, l’analyse de votre compte Flying Blue a mis en évidence un nombre très important de crédits de «’miles’» liés à des transferts American Express. Pour des tiers, vous avez acheté 198 billets d’avion, soit prés de 60 000€ correspondant à plus de 3 fois votre rémunération annuelle nette.

Cette pratique s’apparente à l’exercice non déclaré de la profession d’agent de voyage pendant vos horaires de travail.

Lors de votre entretien le 7 mars 2016 avec Monsieur [A] [V], Responsable des Ressources Humaines et Monsieur [S] [O] qui vous assistait, vous avez nié l’ensemble des faits qui vous sont reprochés et vous lui avez donné les explications suivantes :

Vous lui avez indiqué ne pas connaître le caractère frauduleux des billets émis pour le compte de votre collègue Madame [L] [X] compte tenu que vous émettez plusieurs centaines de billets d’avion par jour.

Concernant le non-respect des règles et process en vigueur, vous lui avez expliqué disposer d’une habilitation de niveau 2 en qualité d’Expert Produit vous permettant d’accorder des dérogations et qu’il est d’usage en interne de pratiquer ainsi.

Monsieur [A] [V] vous a fait remarquer que vous n’étiez pas supposé profiter à titre personnel de cette habilitation à déroger aux règles du programme Flying Blue.

Concernant votre compte personnel Flying Blue, vous lui avez indiqué acheter des billets pour l’ensemble des membres de votre famille (37 frères et s’urs – 217 neveux et nièces) et des collègues de travail et n’avoir jamais eu le sentiment de faire quelque chose de frauduleux.

Au regard de vos compétences techniques, ces faits sont très graves et en aucun point vos explications ne nous ont permis d’en modifier leur appréciation. Nous sommes donc contraints de procéder à votre licenciement pour faute grave.

Le licenciement prend donc effet immédiatement et votre solde de tout compte sera arrêté à la date

de première présentation de cette lettre, sans indemnité de préavis ni de licenciement.

Par ailleurs, aucun salaire ne vous sera payé pour la période de mise à pied à titre conservatoire

nécessaire au déroulement de la procédure qui vous a été notifiée lors de votre convocation.(…)’»

Il en résulte qu’il est reproché trois types de faits à M. [C]’:

-l’émission de billets frauduleux en faveur de Mme [L] [X],

-l’émission de 14 billets pour lui-même et /ou sa famille en ne respectant pas les règles et/ou procédures en vigueur,

-l’achat de 198 billets au profit de tiers en utilisant des crédits de miles.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis.

L’employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Il est constant que le juge a le pouvoir de requalifier la gravité de la faute reprochée au salarié en restituant aux faits leur exacte qualification juridique conformément à l’article’12 du code de procédure civile ; qu’en conséquence, si le juge ne peut ajouter d’autres faits à ceux invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement, lorsque celui-ci intervient pour motif disciplinaire, il doit rechercher si ces faits, à défaut de caractériser une faute grave, comme le prétend l’employeur, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Sur l’émission des billets en faveur de Mme [X]

Au soutien de la réalité des faits reprochés et de la preuve qui lui incombe, l’employeur se rapporte sur ce point au rapport, daté du 18 février 2016 émanant de la direction du contrôle interne et de l’audit interne chargée de la prévention des fraudes d’Air France qui a révélé que lors de l’émission de deux billets en faveur de Mme [X], l’appelant avait débité des miles sur deux comptes clients d’Air France le 18 décembre 2015, seules les taxes aéroportuaires étant facturées à sa collègue.(pièce 13). La société estime que M. [C] ne pouvait ignorer le caractère frauduleux de son opération dans la mesure où il a débité des miles sans être sollicité par les clients eux-mêmes et sans vérifier leur accord quand bien même sa collègue l’avait assuré qu’il s’agissait de membres de sa famille, soulignant par ailleurs que cette dernière a été licenciée pour faute grave en mars 2016 pour détournement de process opérationnels lors d’émission de billets et avoirs fictifs pour sa famille.

Il n’est pas discuté que M. [C] sollicité par sa collègue, a émis deux billets prime en faveur de cette dernière pour des allers-retours [Localité 6]/[Localité 4] le 25 décembre 2015 et qu’il a pour les financer débité deux comptes miles de clients de la société Air France.

Il est constant qu’il relevait de la mission de M. [C], qui se présente par ailleurs comme expert produit, d’émettre des billets prime soit pour les clients d’Air France par contacts téléphoniques (comme le prévoit le programme de fidélisation) soit pour ses collègues conseillers clientèle suivant la règle selon laquelle ceux-ci ne peuvent émettre de tels billets pour eux-mêmes, cette disposition constituant un garde-fou de contrôle lors de ces opérations.

Si M. [C] soutient avoir ignoré le caractère frauduleux de cette opération puisqu’il indique que sa collègue lui avait affirmé qu’il s’agissait de comptes clients de membres de sa famille ainsi qu’elle le confirme dans son attestation produite aux débats, il n’en reste pas moins qu’en débitant, sans y être autorisé, par leurs détenteurs les deux comptes clients distincts et sans vérifier leur accord ou exiger une procuration, M. [C] a incontestablement commis une faute. Ce manquement est par conséquent établi.

Sur l’émission de billets en violation des règles ou procédures en vigueur

La société Bluelink reproche à M. [C] d’avoir fait réserver à son profit des billets promotionnels par des salariés de Bluelink sur le logiciel Amadeus alors qu’il lui appartenait de passer par le site internet d’Air France et sans justifier des dérogations autorisant une telle opération, mais aussi d’avoir fait assortir ces billets promotionnels d’une option «’stopover’» lui permettant de faire une escale de plusieurs jours en route puis de reprendre son voyage sans surcoût, possibilité qui n’est pas ouverte aux billets promotionnels, ainsi qu’un non-respect des règles d’émission des billets avec des remboursements de miles et des frais de modification de parcours. Au soutien de ces affirmations, la société s’appuie sur le rapport du service des fraudes d’Air France et sur différents documents comme les conditions d’utilisation du programme Flying blue et les procédures applicables concernant les billets primes et les primes promos .(pièces 30 à 43).

C’est en vain que le salarié soutient que la mise à pied conservatoire l’a empêché d’accéder à son poste de travail et de préparer sa défense, étant d’ailleurs observé qu’il ne conteste pas la régularité de la procédure.

La cour observe que l’appelant qui critique le rapport de fraude sur lequel se fonde l’employeur se borne à affirmer que celui-ci est dénué d’objectivité et truffé d’inexactitudes voire approximatif et erroné sans développer son propos.

Au-delà de l’erreur portant sur le nombre de billets litigieux émis, qui est en réalité au nombre de 6 et non de 14 comme évoqué dans la lettre de licenciement, l’appelant ne peut soutenir pour se défendre, qu’il n’a jamais émis de billets lui-même mais qu’ils l’ont été par des collègues en leur qualité d’expert produit puisqu’il est constant que c’est M. [C] qui en les sollicitant a ainsi été à l’origine de l’émission des billets litigieux.

Il n’est pas contesté que ceux-ci ont été émis à partir de l’application professionnelle Amadeus, alors que l’employeur justifie que les billets promotionnels sont nécessairement contingentés et qu’il ressort du document (pièce 41) daté du 14 avril 2015 que les primes@promo (billets promotionnels) doivent être réservés exclusivement sur internet (www.airfrance.com notamment) sauf s’agissant des réservations nécessitant un service spécial ou en cas de défaillance du web. Or, la cour observe que M. [C] n’explique pas pourquoi il n’a pas réservé personnellement et directement des billets promotionnels sur le site internet d’Air France pour les vols visés par le rapport, non discutés, étant observé qu’ il s’est pour ce faire adressé en outre à des collègues différents et que rien en l’état ne justifie le recours à l’application Amadeus. C’est vainement que M. [C] fait observer à cet égard que ces derniers auxquels un fait unique pouvait être reproché n’ont pas été licenciés, ce constat n’étant pas de nature à priver l’émission de billets critiquée de leur caractère irrégulier la possibilité du bénéfice d’un «’stopover’» ne résultant pas des offres promotionnelles produites.

Enfin, s’agissant des échanges de réservations de vols avec remboursements de miles et non paiement des frais, il est constant que la modification/remboursement d’un billet prime classique sans frais sont prévus en cas d’erreur de traitement de Flying blue. Il n’est pas discuté que suite à des réservations de vol ensuite modifiées l’appelant a utilisé pour le vol [Localité 5] [Localité 6]/ [Localité 6] [Localité 3] / [Localité 3] [Localité 6] et [Localité 6] [Localité 5] (OE 55630152) 15.000 miles alors qu’il aurait dû utiliser 50.000 miles sans qu’aucune erreur de traitement soit caractérisée et au mépris de l’article 3.2 du programme Flying blue qui prévoit qu’une fois le voyage commencé seule la date peut être modifiée. La cour relève en outre s’agissant du vol OE 54311654 que l’incident sur le site web KLM invoqué le 9 décembre 2015 ne pouvait motiver le remboursement des miles effectué ce jour-là puisqu’en réalité le billet a été modifié le 10 novembre 2015, les mouvements de grève du 19 novembre 2015 et des 2 et 3 décembre 2015 étant à cet égard indifférents.

Ce grief est par conséquent établi.

Sur l’achat de 198 billets au profit de tiers en utilisant des crédits de miles

S’agissant enfin du dernier grief, il n’est pas contesté que le compte personnel Flying Blue de M. [C] a présenté un très important crédit de miles liés à des transferts d’American Express (AMEX) pour près de 60.000 euros correspondants à des billets acquis pour des tiers.

L’employeur soutient qu’il est ainsi démontré qu’en payant les billets de tiers avec sa carte, l’appelant se voyaient attribuer des miles sans qu’il soit passager et de façon très rapide au mépris de l’esprit du programme Flying Blue qui récompense la fidélité du titulaire du compte pour les voyages qu’il effectue lui-même. Il ajoute que M. [C] n’a pas besoin de miles pour voyager gratuitement puisqu’il bénéficiait en tant que salarié des billets GP (gratis passenger) lui octroyant des conditions financières avantageuses mais que les miles lui permettaient d’acquérir des billets au profit de tiers s’apparentant à une activité d’agent de voyage.

C’est à tort que M. [C] invoque que la société Bluelink en utilisant son compte personnel Flying Blue sans son accord a porté atteinte à sa vie privée, puisqu’ aux termes des conditions générales du programme, il a été expressément prévu à l’article 1.6.1 que la société se réserve le droit d’auditer tous les comptes du programme, sans préavis notifié aux membres, afin notamment de s’assurer du respect des règles du programme et des conditions de transport applicables. C’est aussi vainement que M. [C] tente d’expliquer l’importance des opérations apparaissant sur son compte personnel par l’achat de billets au profit de membres sa famille, qui se sont constitués en association pour préserver le maintien de leurs liens, puisqu’il est établi qu’il a également acheté des billets pour des salariées ne faisant pas partie de sa famille et qui ont par ailleurs aussi été licenciées pour des fraudes dans l’émission de billets.

La cour retient qu’il doit être retenu que M. [C] en achetant des billets pour le compte de collègues ou de membres de sa famille avec sa carte AMEX en accumulant de façon rapide des miles ne correspondant pas à des voyages qu’il a effectués et en achetant des billets pour autrui, a de façon fautive dévoyé l’esprit du compte Flying Blue l’exposant en outre à un exercice non déclaré de la profession d’agent de voyage et lui permettant d’accéder à des avantages réservés aux meilleurs clients de sorte que ce grief doit être considéré comme avéré.

Par confirmation du jugement déféré, la cour retient à l’instar des premiers juges que la réalité du comportement fautif de M. [C] de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail est établie et justifiait le licenciement prononcé. Le jugement sera confirmé sur ce point et en ce qu’il a débouté le salarié de l’ensemble de ses demandes indemnitaires.

Sur les autres dispositions

Partie perdante, M. [C] est condamné aux dépens d’instance et d’appel, le jugement est confirmé sur ce point et à verser à la société Bluelink une somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

REJETTE la demande de production de pièces.

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions.

CONDAMNE M. [U] [C] à verser à la SA Bluelink une somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE M. [U] [C] aux dépens d’appel.

La greffière, La présidente.

 


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