ARRET N°112
CL/KP
N° RG 22/01510 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GSB6
Société ING BANK NV
C/
[B]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE POITIERS
2ème Chambre Civile
ARRÊT DU 14 MARS 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/01510 – N° Portalis DBV5-V-B7G-GSB6
Décision déférée à la Cour : jugement du 23 mai 2022 rendu(e) par le Juge de l’exécution de saintes.
APPELANTE :
SOCIETE ING BANK NV (exerçant sous le nom commercial ING)
[Adresse 5]
[Localité 4]
Ayant pour avocat plaidant Me Magalie ROUGIER de la SCP ROUGIER VIENNOIS FERNANDES, avocat au barreau de SAINTES.
INTIME :
Monsieur [H] [B]
né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 1]
Ayant pour avocat plaidant Me Florence CAURAND, avocat au barreau de SAINTES.
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 10 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Claude PASCOT, Président
Monsieur Fabrice VETU, Conseiller
Monsieur Cédric LECLER, Conseiller
GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président, et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*****
Le 31 mars 2014, Monsieur [H] [B] a fait pratiquer une saisie attribution entre les mains de la société de droit néerlandais Ing Bank Nv (la banque) afin d’obtenir paiement de la somme de 65 622,30 euros au préjudice de Monsieur [U] [D].
Le 2 décembre 2020, Monsieur [B] a fait pratiquer une deuxième saisie-attribution entre les mains de la banque pour obtenir paiement de la somme de 39 847,95 euros.
Le 3 février 2021, il a été donné mainlevée de cette deuxième saisie-attribution.
Le 3 février 2021, Monsieur [B] a fait pratiquer une troisième saisie-attribution entre les mains de la banque pour obtenir paiement de la somme de 39 978,09 euros.
Le 4 février 2021, la banque a indiqué bloquer le solde saisissable de 234,91 euros sur le compte de son client Monsieur [D].
Le 17 août 2021, Monsieur [B] a assigné la banque en paiement devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Saintes.
En dernier lieu, Monsieur [B] a demandé la condamnation de la banque à lui payer les sommes de :
– 39 978,09 euros outre les intérêts échus ;
– 3500 euros au titre des frais irrépétibles.
En dernier lieu, la banque a demandé de :
– rejeter l’intégralité des demandes de Monsieur [B] ;
– condamner Monsieur [B] à lui verser la somme de 3500 euros au titre des frais irrépétibles.
Par jugement contradictoire en date du 23 mai 2022, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Sainte a :
– condamné la banque à payer à Monsieur [B] la somme de 39 978,09 euros, en déduisant toutefois les sommes déjà versées à ce dernier dans le cadre de la saisie-attribution fructueuse ;
– condamné la banque à payer à Monsieur [B] la somme de 2500 euros au titre des frais irrépétibles ;
– débouté les parties du surplus de leurs demandes.
Le 14 juin 2022, la société a relevé appel de ce jugement.
Le 12 décembre 2022, la banque a demandé à la cour :
– de débouter Monsieur [B] de toutes ses prétentions;
– de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [B] de sa demande de condamnation aux intérêts échus;
– d’infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée à payer à Monsieur [B] la somme de 39 978,09 euros, outre 2500 euros au titre des frais irrépétibles;
Statuant à nouveau de ces chefs:
– de débouter Monsieur [B] de sa demande de condamnation à son encontre au paiement de la somme de 39 978,09 au titre de la saisie attribution du 31 mars 2014 et de ses suites, et/ou de la saisie-attribution en date du 3 février 2021 et de ses suites;
– de débouter Monsieur [B] de toutes ses autres demandes;
– de condamner Monsieur [B] à lui payer la somme de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles.
Le 25 novembre 2022, Monsieur [B] a demande de:
– confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné la banque à lui verser la somme de 39 978,09 euros, déduction faite des sommes déjà versées;
– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté Monsieur [B] de sa demande de condamnation aux intérêts échus sur la créance et ce faisant;
– condamner la banque à lui payer les intérêts légaux sur la créance et jusqu’à la date de signification de l’arrêt à intervenir;
– condamner la banque à lu payer la somme de 15 000 euros au titre des frais irrépétibles.
– condamner la banque aux dépens, outre les frais d’huissier dont il a dû faire l’avance.
Le 3 janvier 2023, a été ordonnée la clôture de l’instruction de l’affaire.
MOTIVATION:
Sur les demandes du créancier saisissant à l’encontre du tiers saisi sur le fondement des textes spéciaux du code des procédures civiles d’exécution:
Sur l’étendue des obligations de la banque, en tant que tiers saisi:
Selon l’article L. 123-1 du code des procédures civiles d’exécution,
Les tiers ne peuvent faire obstacle aux procédures engagées en vue de l’exécution ou de la conservation des créances. Ils y apportent leur concours lorsqu’ils en sont légalement requis.
Celui qui, sans motif légitime, se soustrait à ces obligations peut être contraint d’y satisfaire, au besoin à peine d’astreinte, sans préjudice de dommages-intérêts.
Dans les mêmes conditions, le tiers entre les mains duquel est pratiquée une saisie peut aussi être condamné au paiement des causes de la saisie, sauf recours contre le débiteur.
Selon l’article R. 211-4 du même code,
Le tiers saisi est tenu de fournir sur-le-champ à l’huissier de justice les renseignements prévus à l’article l. 211-3 et de lui communiquer les pièces justificatives.
Il en est fait mention dans l’acte de saisie.
Par dérogation au premier alinéa, lorsque la saisie est pratiquée entre les mains d’un comptable public ou de la Caisse des dépôts et consignations, celui-ci dispose d’un délai de 24 heures pour fournir à l’huissier de justice les renseignements prévus à l’article L. 211-3 et lui communiquer les pièces justificatives.
Si l’acte de saisie est signifié par voie électronique, le tiers saisi est tenu de communiquer à l’huissier de justice, par la même voie, les renseignements et pièces justificatives mentionnées au premier alinéa. Cette communication doit être effectuée au plus tard le premier jour ouvré suivant la signification, sous réserve des dispositions prévues à l’article 748-7 du code de procédure civile.
Selon l’article R. 211-5 du même code,
Le tiers saisi qui, sans motif légitime, ne fournit pas les renseignements prévus est condamné, à la demande du créancier, à payer les sommes dues à ce dernier sans préjudice de son recours contre le débiteur.
Il peut être condamné à des dommages et intérêts en cas de négligence fautive ou de déclaration inexacte ou mensongère.
Se fondant sur ces textes, Monsieur [B] fait grief à la banque de divers manquements au cours des opérations de saisie-attribution pratiquées entre les mains de cette dernière sur les comptes de Monsieur [D], pour lui réclamer le paiement des causes de la saisie ou d’indemnités.
Mais la banque soutient que ces demandes ne peuvent pas prospérer, puisque toutes des saisies pratiquées entre ses mains seraient caduques.
Il conviendra donc d’examiner au préalable la caducité alléguée des dites saisies.
Sur la caducité des saisies-attributions:
Selon l’article R. 211-3 du code des procédures civiles d’exécution, alinéa 1,
À peine de caducité, la saisie-attribution est dénoncée au débiteur par acte d’huissier de justice dans un délai de 8 jours; l’acte rappelle au débiteur qu’il peut autoriser par écrit le créancier à se faire remettre sans délai par le tiers saisi les sommes qui lui sont dues.
La caducité de la saisie-attribution la privant rétroactivement de tous ses effets, le tiers saisi ne peut être tenu aux obligations qui lui sont imposées par la loi et ne peut donc pas être condamné au paiement des sommes pour lesquelles elle a été pratiquée (Cass. 2e civ, 23 novembre 2000, n°98-22.938, Bull. II, n°155), ni à payer au créancier poursuivant des dommages-intérêts (Cass. 2e civ., 21 décembre 2006, n°04-16.511, Bull. 2006, II, n°372).
Selon l’article R. 211-6 du code des procédures civiles d’exécution, le tiers saisi procède au paiement sur la présentation d’un certificat délivré par le greffe et établi par l’huissier de justice qui a procédé à la saisie attestant qu’aucune contestation n’a été formée dans le mois suivant la dénonciation de la saisie; le paiement peut intervenir avant l’expiration de ce délai si le débiteur a déclaré ne pas contester la saisie; cette déclaration est constatée par écrit.
Selon l’article 410 du code de procédure civile,
L’acquiescement peut être exprès ou implicite.
L’exécution sans réserve d’un jugement exécutoire vaut acquiescement, hors le cas où celui-ci n’est pas permis.
Si l’acquiescement, au sens de ce dernier texte, peut être explicite ou tacite, il doit toujours être certain, c’est à dire résulter d’actes démontrant avec évidence et sans équivoque l’intention de la partie à laquelle on l’oppose d’accepter le bien fondé de l’action.
Selon l’article R. 511-7 du code des procédures civiles d’exécution, si ce n’est dans le cas où la mesure conservatoire a été pratiquée avec un titre exécutoire, le créancier, dans le mois qui suit l’exécution de la mesure, à peine de caducité, introduit une procédure ou accomplit les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire.
Toutefois, en cas de rejet d’une requête en injonction de payer présentée dans le délai imparti au précédent alinéa, le juge du fond peut encore être valablement saisi dans le mois qui suit l’ordonnance de rejet.
Selon l’article R. 511-8 du code des procédures civiles d’exécution, lorsqu’une mesure conservatoire est pratiquée entre les mains d’un tiers, le créancier signifie à ce dernier une copie des actes attestant les diligences requises par l’article R. 511-7 en vue de l’obtention d’un titre exécutoire dans un délai de 8 jours à compter de leur date; à défaut, la mesure conservatoire est caduque.
Cette diligence étant requise en vue d’informer le tiers saisi du maintien de l’obligation qui lui incombe de conserver les biens rendus indisponibles par la saisie conservatoire, la caducité n’est pas encourue, en cas de pluralité de procédures engagées à fin d’obtention d’un tel titre, lorsqu’au moins l’une de ces procédures lui a été notifiée (Cass. 2e civ., 10 janvier 2019, n°17625.719, publié).
Sur les effets attachés au commandement de saisie vente du 17 janvier 2014:
Par jugement du tribunal correctionnel de La Rochelle en date du 29 janvier 2004, Monsieur [U] [D] a été déclaré coupable d’escroquerie et a été condamné à payer à Monsieur [B] la somme de 37 036,27 euros à titre de dommages-intérêts, outre 1000 euros au titre des frais irrépétibles.
Par arrêt en date du 25 février 2005, dont certificat de non-pourvoi, la cour de céans a confirmé ce jugement, et y ajoutant a condamné Monsieur [D] à payer à Monsieur [B] la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
Il en ressort que ces décisions constituent les titres exécutoires fondant les poursuites litigieuses.
Il est constant que le commandement aux fins de saisie vente du 17 janvier 2014 a été valablement signifié à Monsieur [D].
Monsieur [B] soutient que ce commandement aux fins de saisie de vente, valablement signifié à Monsieur [D], devrait avoir pour effet de soustraire les saisies-attributions ultérieurement litigieuses à toute caducité.
Mais dès lors que ce créancier poursuivant disposait ainsi d’un titre exécutoire, de telle sorte que ce premier commandement aux fins de saisie-vente le 17 janvier 2014 ne constituait pas une mesure conservatoire, ce dernier n’a pu avoir aucun effet sur la caducité susceptible d’affecter les saisies-attributions litigieuses, pratiquées les 31 mars 2014, 2 décembre 2020 et 3 février 2021.
S’agissant de la saisie attribution originaire du 31 mars 2014:
Le 31 mars 2014, Monsieur [B] a fait procéder entre les mains de la banque à une première saisie-attribution au nom de Monsieur [D] à hauteur de 65 622,20 euros.
Il est constant entre parties que cette saisie-attribution initiale n’a pas été dénoncée au débiteur, de telle sorte que la caducité de celle-ci aurait été susceptible d’être acquise au 10 avril 2014.
Mais Monsieur [B] soutient que Monsieur [D] aurait acquiescé à cette saisie-attribution originaire, notamment en renonçant à la contester.
De manière liminaire, la simple absence de contestation de cette saisie ne vaut pas manifestation d’une volonté claire et non équivoque de renoncer à la contester.
Monsieur [B] fait ainsi valoir qu’après celle-ci, Monsieur [D] a lui-même contacté l’huissier instrumentaire pour lui indiquer que la saisie était positive, ce qui ressort du courrier de cet officier ministériel en date du 30 mars 2022.
Or, cet écrit n’émane pas du débiteur saisi, mais de l’huissier instrumentaire, et au demeurant il ne peut se déduire de leur teneur des termes généraux du premier qui y sont rapportés par le second un quelconque acquiescement du premier à la saisie originaire.
Et s’il ressort de son mail en date du 16 avril 2020 que Monsieur [D] déclare accepter la dette issue des condamnations pénales irrévocables, il n’en résulte aucune manifestation de volonté claire et non équivoque d’acquiescer à la saisie originaire.
Cette saisie-attribution originaire doit donc être considéréé comme caduque.
S’agissant de la première saisie-attribution du 2 décembre 2020:
Le 2 décembre 2020, Monsieur [B] a fait procéder entre les mains de la banque à une première saisie-attribution au nom de Monsieur [D] à hauteur de 39 847,95 euros.
Il est constant entre parties que cette saisie-attribution initiale n’a pas été dénoncée au débiteur, de telle sorte que la caducité de celle-ci aurait été susceptible d’être acquise au 11 décembre 2020.
La circonstance que le débiteur saisi n’ait formé aucune contestation à l’encontre de cette voie d’exécution n’emporte aucun acquiescement à celle-ci.
Et il sur ce point indifférent que la banque ait communiqué au débiteur saisi copie de la saisie-attribution, cette simple transmission informelle ne pouvant pas équivaloir à la dénonciation par acte d’huissier au débiteur saisi conformément à l’article l’article R. 211-3 du code des procédures civiles d’exécution.
Il sera renvoyé aux observations figurant plus haut, pour en rappeler qu’il ne peut pas être déduit du courrier de l’huissier instrumentaire du 30 mars 2022 un quelconque acquiescement à la saisie pratiquée le 3 février 2021.
Au surplus, il sera rappelé que c’est l’huissier de justice instrumentaire lui-même qui a demandé à la banque de procéder à la mainlevée de la saisie le 3 février 2021.
Cette première saisie-attribution doit être considérée comme caduque.
S’agissant de la deuxième saisie-attribution du 3 février 2021:
Le 3 février 2021, Monsieur [B] a fait procéder entre les mains de la banque à une deuxième saisie-attribution au nom de Monsieur [D] à hauteur de 39 978,09 euros.
Il est constant entre parties que cette saisie-attribution initiale n’a pas été dénoncée au débiteur, de telle sorte que la caducité de celle-ci aurait été susceptible d’être acquise au 15 février 2021.
Monsieur [B] soutient encore que cette troisième saisie ne serait pas caduque, puisqu’ayant conduit à la saisie par l’huissier instrumentaire entre les mains de la banque d’une somme de 234,19 euros sur un compte de Monsieur [D], que ce dernier n’a pas contesté.
Mais là encore, il ne peut pas se déduire de la seule absence de contestation du débiteur à cette voie d’exécution que l’intéressé aurait, de manière claire et non équivoque, acquiescé à cette troisième saisie-attribution.
S’agissant de l’absence d’acquiescement du débiteur saisi à cette deuxième saisie, ainsi que l’absence d’effet des échanges à cet égard entre le débiteur saisi et son établissement bancaire, il pourra être retenu les mêmes conclusions que celles développées plus haut.
Selon Monsieur [B], cette troisième saisie n’est pas caduque, puisque le débiteur saisi aurait déjà acquiescé au commandement de saisie-vente du 17 janvier 2014, puisque Monsieur [D] aurait renoncé à la contester.
Mais il sera renvoyé aux observations figurant plus haut, pour en rappeler que la cour a retenu l’absence de tout effet du commandement de saisie-vente du 17 janvier 2014, sur la caducité des saisies-attribution ultérieures.
Cette dernière saisie-attribution doit être elle aussi considérée comme caduque.
*****
De la caducité de l’ensemble de ces saisies-attributions pratiquées entre les mains de la banque, il se déduira que les demandes en paiement de la cause des saisies et en indemnités, présentées par le créancier poursuivant sur le fondement des textes spéciaux susdits afférents aux procédures civiles d’exécution, sont vouées à l’échec.
Sur la responsabilité délictuelle de droit commun de la banque tierce saisie:
En dehors de conditions d’application des textes spéciaux propres à la procédure civile d’exécution, le tiers saisi, dont la faute dolosive ou intentionnelle a causé un préjudice au créancier saisissant, en rendant infructueuse la saisie pratiquée par ce dernier, est tenu à réparation (cour d’appel de Lyon, 25 octobre 2000, RG 2000/1809, Bicc 2001, n°1078).
En outre, si après avoir satisfait à son obligation d’information mise à sa charge par les dispositions spéciales du code des procédures civiles d’exécution, le tiers saisi fournit ultérieurement des informations complémentaires mensongères ou inexactes, il engage sa responsabilité aux conditions de l’article 1240 du code civil (Cass. 2e civ, 4 février 2021, n°19-12.424, publié).
Au surplus, il résulte de l’article L. 162-1 du livre des procédures civiles d’exécution que dans le délai de 15 jours ouvrables qui suit la saisie et pendant lequel les sommes laissées au compte sont indisponibles, ce solde peut être affecté à l’avantage ou au préjudice du saisissant par les opérations suivant dès lors qu’il est prouvé que leur date est antérieure à la saisie:
1° Au crédit: les remises faites antérieurement, en vue de leur encaissement, de chèques ou d’effet de commerce, non encore portées au compte ;
2°: Au débit :
a) l’imputation de chèques remis à l’encaissement ou portés au crédit du compte antérieurement à la saisie et revenus impayés ;
b) les retraits par billetterie effectués antérieurement à la saisie et les paiements par carte, dès lors que leurs bénéficiaires ont été effectivement crédités antérieurement à la saisie.
Seuls peuvent affecter l’assiette de la saisie-attribution au détriment du saisissant les chèques émis par le saisi qui ont été remis à l’encaissement par leur bénéficiaire antérieurement à la saisie.
La remise des chèques à l’encaissement s’entend de la remise des chèques faits à l’établissement bancaire, et non au bénéficiaire des dits chèques.
Le créancier saisissant fait grief à la banque de sa faute intentionnelle et dolosive, et de lui avoir délivré des informations mensongères ou inexactes, et ce indépendamment du texte spécial objet des procédures civiles d’exécution.
*****
L’appelant ne fait état d’aucune faute délictuelle de droit de commun de la banque s’agissant de la saisie-attribution du 31 mars 2014.
A l’occasion de la saisie du 2 décembre 2020, Monsieur [B] fait grief à la banque de ne pas avoir répondu à celle-ci ni d’avoir donné suite aux relances de l’huissier.
A cet égard, il produit le courrier que l’huissier de justice a adressé à la banque par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 4 février 2021, par lequel l’officier ministériel reproche à la banque de ne pas avoir communiqué la position du compte lors de son passage, avoir déclaré le communiquer ultérieurement, mais n’avoir jamais donné suite aux relances ultérieures.
Mais il ressort du relevé d’écran de son logiciel de gestion des comptes que la banque a bloqué le solde saisissable à réception de la saisie pratiqué le 4 décembre 2020, qui s’élevait alors à 9173,13 euros, dans les 48 heures de la saisie pratiquée entres ces mains, conformément au commandement qui lui avait été délivré.
De plus, il ressort des copies d’écran de son logiciel de gestion des comptes ainsi que des commentaires y apposés par son préposé que la banque, sollicitée par son client aux fins de transmission de l’acte de saisie, n’a pas donné suite à cette demande, et a renvoyé ce dernier directement vers l’huissier instrumentaire.
En outre, cette première saisie est devenue caduque le 11 décembre 2020.
Et au surplus, il sera rappelé que c’est l’huissier de justice instrumentaire lui-même qui a demandé à la banque de procéder à la mainlevée de cette saisie le 3 février 2021; et eu égard à sa caducité, il est inexact d’affirmer que sa mainlevée procède de l’inertie de la banque.
L’ensemble de ces circonstances ne caractérise pas suffisamment une faute intentionnelle de la banque, en ce qu’elle n’a pas donné suite aux relances de l’officier ministériel, ni en ce qu’elle a ultérieurement débloqué le solde saisissable.
Aucune faute lourde n’est donc imputable à la banque en relation avec la saisie pratiquée le 4 décembre 2020.
Et le tiers poursuivant ne vient même alléguer que ce que des informations complémentaires mensongères ou inexactes lui auraient été procurées par la banque lors de la mise en oeuvre de la saisie-attribution du 2 décembre 2020.
*****
A l’occasion de la troisième saisie du 3 février 2021, Monsieur [B] fait grief à la banque de n’avoir pas répondu sur-le-champ et de ne pas lui avoir communiqué de pièce justificative.
Il observe en particulier que selon courrier de l’huissier de justice en date du 30 mars 2022, Monsieur [D] aurait contacté l’officier ministériel, pour l’informer de ce que son compte objet de la saisie aurait été créditeur à hauteur de 11 000 euros.
Par courrier en date du 4 février 2022, la banque a avisé l’huissier de ce que le solde saisissable était de 234,19 euros, et qu’elle procédait au blocage de cette somme.
Mais il ressort du courrier de la banque en date du 26 janvier 2021 adressé à Monsieur [D], que le chèque émis par ce dernier n°1132447 d’un montant de 9650 euros avait été rejeté pour défaut de provision: il s’en déduira que ce chèque avait nécessairement été remis à l’encaissement antérieurement à la troisième saisie pratiquée le 3 février 2021.
Avec le créancier poursuivant, il y aura donc lieu d’acquiescer sur le fait que ce chèque n’avait pas encore été débité du compte courant de Monsieur [D] au moment où la saisie du 3 février 2021 a été pratiquée.
Mais alors qu’il est ainsi prouvé que la remise de ce chèque à l’encaissement était antérieure à la troisième saisie pratiquée par Monsieur [B] entre les mains de la banque, celle-ci était tenue de déduire le montant de ce chèque du solde créditeur du compte de Monsieur [D], et ce par application de L. 162-1 du livre des procédures civiles d’exécution, sus exposé.
Monsieur [B] fait encore grief à la banque d’avoir été en contact avec Monsieur [D] entre la saisie pratiquée le 2 décembre 2020 et celle pratiqué le 3 février 2021.
Mais il ressort de la copie d’écran de son logiciel de gestion du 4 décembre 2020 que sollicitée par son client aux fins de transmission de l’acte de saisie, la banque n’a pas donné suite à cette demande, et a renvoyé ce dernier directement vers l’huissier instrumentaire.
Et la circonstance que la banque adresse le 26 janvier 2021 un courrier à son client pour l’aviser du rejet d’un chèque de 9650 euros pour défaut de provision, alors que son solde créditeur n’était que de 9646,22 euros, et de l’aviser des conséquences de cette situation, ne procède que de ses obligations légales et conventionnelles.
Il ne saurait donc être retenu de la parfaite observation du texte susdit par la banque la commission d’une quelconque faute intentionnelle ou dolosive au préjudice du créancier saisissant dans le traitement afférent à cette troisième saisie.
Et le tiers poursuivant ne vient même alléguer que des informations complémentaires mensongères ou inexactes lui auraient été procurées par la banque lors de la mise en oeuvre de cette dernière saisie-attribution.
A l’issue de cette analyse, il y aura lieu de retenir que Monsieur [B] défaille à démontrer une quelconque faute de la banque.
Monsieur [B] sera donc débouté de l’intégralité de ses prétentions, et le jugement sera infirmé de ce chef.
*****
Le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré.
Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la banque aux dépens de première instance, l’a déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles de première instance, et l’a condamnée à payer à Monsieur [B] une somme au même titre.
Monsieur [B] sera condamné aux entiers dépens des deux instances, ainsi qu’à payer à la banque la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles des deux instances, tout en étant débouté de sa demande au même titre.
PAR CES MOTIFS:
La Cour,
statuant publiquement, contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Déboute Monsieur [H] [B] de l’ensemble de ses demandes ;
Rappelle que le présent arrêt vaudra titre de restitution des sommes allouées en exécution du jugement déféré ;
Condamne Monsieur [H] [B] aux entiers dépens de première instance et d’appel, et à payer à la société de droit néerlandais Ing Bank Nv la somme de 3000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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