9ème Ch Sécurité Sociale
ARRÊT N°
N° RG 21/03166 – N° Portalis DBVL-V-B7F-RVBL
[J] [P]
C/
[7]
CPAM LOIRE ATLANTIQUE
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Copie certifiée conforme délivrée
le:
à:
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 12 AVRIL 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Cécile MORILLON-DEMAY, Présidente de chambre
Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère
Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère
GREFFIER :
Monsieur Philippe LE BOUDEC lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 08 Février 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 12 Avril 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:
Date de la décision attaquée : 07 Mai 2021
Décision attaquée : Jugement
Juridiction : Tribunal Judiciaire de NANTES – Pôle Social
Références : 19/07327
****
APPELANT :
Monsieur [J] [P]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par Me Sandrine PORCHER-MOREAU de la SELARL GILLES RENAUD ASSOCIES, avocat au barreau de NANTES
INTIMÉ :
[6]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Cédric BEUTIER, avocat au barreau de NANTES
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
LA CAISSE PRIMAIRE D ASSURANCE MALADIE DE LOIRE ATLANTIQUE
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Madame [H] [N] en vertu d’un pouvoir spécial
EXPOSÉ DU LITIGE :
Le 7 novembre 2008, l’association [6] (le [7]) a déclaré un accident du travail dont M. [J] [P] a été victime le 6 novembre 2008 à 18 heures ayant entraîné son transport aux urgences du centre hospitalier universitaire de [Localité 2].
Le certificat médical initial, établi le 8 décembre 2008, fait état d’une thrombophlébite du sinus longitudinal associé à un hématome frontal gauche et luxation antérieure de l’épaule gauche suite à une chute.
Le 22 janvier 2009, la caisse primaire d’assurance maladie de Loire-Atlantique (la caisse) a refusé de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l’accident dont il a été victime.
Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Loire-Atlantique, par jugement du 31 janvier 2014 confirmé par arrêt de la cour d’appel de Rennes du 11 février 2015, a dit que l’accident dont a été victime M. [P] le 6 novembre 2008 devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle.
La date de consolidation de l’état de santé de M. [P] a été fixée par la caisse au 7 novembre 2010 et son taux d’incapacité permanente partielle (IPP) évalué par la Cour nationale de l’incapacité et de la tarification de l’assurance des accidents du travail à 37%.
Le 12 septembre 2016, M. [P] a formé une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur auprès de la caisse qui a dressé un procès-verbal de non-conciliation le 21 juillet 2017.
Le 2 janvier 2018, il a porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Loire-Atlantique.
Par jugement du 7 mai 2021, ce tribunal devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Nantes a :
– débouté M. [P] de sa demande tendant à voir dire et juger que l’accident du travail dont il a été victime en date du 6 novembre 2008 est imputable à la faute inexcusable de l’employeur ;
– débouté M. [P] de toutes ses demandes ;
– condamné M. [P] aux dépens de l’instance ;
– dit n’y avoir lieu à condamnation en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– débouté les parties de toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration adressée le 25 mai 2021, M. [P] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 11 mai 2021.
Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 11 octobre 2022, auxquelles s’est référé et qu’a développées son conseil à l’audience, M. [P] demande à la cour, au visa des articles L. 411-1 et L. 452-1 et suivants du code de la sécurité sociale et L. 4121-1 et suivants du code du travail :
– d’infirmer le jugement entrepris ;
– de dire et juger que l’accident du travail dont a été victime M. [P] en date du 6 novembre 2008, est imputable à la faute inexcusable de l’employeur, le [7] ;
– en conséquence, dire et juger y avoir lieu à majoration de rente au bénéfice de M. [P] ;
– en conséquence, reconnaître le droit de M. [P] à réparation de ses préjudices personnels ;
– afin d’évaluation de ceux-ci, ordonner une expertise médicale confiée à l’expert qu’il plaira au tribunal (sic) et avec pour mission de :
* prendre connaissance du dossier médical de M. [P] ;
* procéder à l’examen de M. [P], et, après avoir consulté tous les documents et recueilli toutes les informations utiles, décrire les lésions ou affections l’ayant atteint par l’effet de l’accident en cause ;
* prendre en considération l’état de la victime tant sur la période initiale entre l’accident et la consolidation fixée au 6 novembre 2010 que sur la période de rechute du 22 juin 20017 au 20 juillet 2020 ;
* donner une évaluation des souffrances endurées, physiques et morales ;
* donner une évaluation du préjudice esthétique (temporaire et permanent) ;
* donner une évaluation du déficit fonctionnel temporaire ;
* donner un avis sur le préjudice d’agrément ;
* donner une évaluation du préjudice sexuel ;
* donner un avis sur la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ;
* donner un avis sur les aménagements nécessaires pour permettre à la victime d’adapter son logement et/ou son véhicule à son handicap, les décrire et les chiffrer ;
* dire si l’état de la victime nécessitait, avant la consolidation, l’assistance d’une tierce personne, et, si cette assistance demeure nécessaire depuis la consolidation ;
* dire s’il existe des préjudices permanents exceptionnels correspondant à des préjudices atypiques et/ou à des pathologies évolutives directement liés au handicap permanent ;
* dire que l’expert pourra s’adjoindre tout spécialiste de son choix;
* dire que l’expert présentera un pré rapport aux parties avant le dépôt de son rapport définitif au greffe ;
– dans l’attente du rapport d’expertise, dire et juger que la caisse versera à titre de provision à M. [P] la somme de 7 000 euros à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices à caractère personnel ;
– condamner le [7] à verser à M. [P] la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dire le jugement commun à la caisse, et qu’elle dispose d’une action récursoire contre le [7] ;
– condamner le [7] aux entiers dépens.
Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 28 juin 2022 auxquelles s’est référé et qu’a développées son conseil à l’audience, le [7] demande à la cour, au visa des articles L. 411-1 et suivants du code de la sécurité sociale, de :
– déclarer M. [P] mal fondé en son appel ;
A titre principal,
– confirmer le jugement entrepris ;
– débouter M. [P] de l’ensemble de ses demandes ;
– condamner M. [P] à verser au [7] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
A titre subsidiaire, si par extraordinaire la faute inexcusable était retenue,
– dire et juger que la mission de l’expert judiciaire dans le cadre de l’expertise médicale devra être la suivante :
1. entendre, dans le respect des règles de déontologie médicale ou relative au secret professionnel, contradictoirement les parties, leurs conseils convoqués et entendus ;
2. recueillir toutes informations orales ou écrites des parties ; se faire communiquer puis examiner tous documents utiles, dont le dossier médical et plus généralement tous documents médicaux relatifs à M. [P] ;
3. recueillir, en cas de besoin, les déclarations de toutes personnes informées ; en précisant alors leur nom, prénom et domicile, ainsi que leurs liens de parenté, d’alliance, de subordination, ou de communauté d’intérêts avec l’une ou l’autre des parties ;
4. examiner la victime et décrire les lésions imputables à l’accident vasculaire cérébral dont il a été victime le 6 novembre 2008 ;
5. après s’être fait communiquer tous documents relatifs aux examens, soins et interventions pratiqués indiquant l’évolution desdites lésions, préciser si celles-ci sont bien en relation directe et certaine avec ledit accident ;
6. fixer la date de consolidation des blessures et si celle-ci n’est pas encore acquise, indiquer le délai à l’issue duquel un nouvel examen devra être réalisé et évaluer les seuls chefs de préjudice qui peuvent l’être en l’état ;
7. évaluer les postes de préjudices listés par l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, et ceux admis à la suite des arrêts de la Cour de cassation du 4 avril 2012 à savoir :
– souffrances endurées physiques et morales,
– préjudice esthétique,
– préjudice d’agrément,
– préjudice d’établissement,
– préjudice permanent exceptionnel,
– perte ou diminution des possibilités de promotion professionnelle,
– frais de véhicule/logement adapté,
– déficit fonctionnel temporaire,
– préjudice sexuel,
ou toute autre mission habituelle en pareil cas.
– débouter purement et simplement M. [P] de sa demande de provision ;
– dire et juger que la caisse ne pourra pas demander le remboursement de la majoration de la rente à l’employeur en raison de l’inopposabilité du caractère professionnel de l’arrêt de travail de M. [P] à la suite de la décision de refus de prise en charge notifiée le 22 janvier 2009 ;
– débouter M. [P] en l’état de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ses écritures parvenues au greffe le 27 décembre 2022 auxquelles s’est référé et qu’a développées son représentant à l’audience, la caisse qui s’en rapporte à la cour quant à la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, lui demande :
– en cas de reconnaissance de cette faute, de condamner le [7] à lui rembourser l’intégralité des sommes qu’elle sera amenée à verser à M. [P] en application des dispositions de l’article L. 452-3-1 du code de la sécurité sociale ;
– de ramener à de plus justes proportions la demande relative à la provision à valoir sur les préjudices personnels.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1 – Sur la faute inexcusable :
Le caractère professionnel de l’accident subi par M. [P] n’est pas discuté, celui-ci bénéficiant de la présomption d’imputabilité au travail, l’accident étant intervenu aux temps et lieu du travail, comme jugé irrévocablement par arrêt de la présente cour du 11 février 2015 en présence de l’employeur.
Des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, il résulte que l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs en veillant à éviter les risques, à évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités et à adapter le travail de l’homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production.
Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. (2e Civ., 8 octobre 2020, pourvoi n°18-25.021 ; Soc., 2 mars 2022, pourvoi n° 20-16.683 ; 2e Civ., 22 septembre 2022, pourvoi n° 20-23.725 sur l’évaluation des risques d’accident)
Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié. Il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire, même non exclusive ou indirecte, pour que sa responsabilité soit engagée.
La faute inexcusable ne se présume pas et il appartient à la victime ou ses ayants droit, invoquant la faute inexcusable de l’employeur de rapporter « la preuve que celui-ci… n’a pas pris les mesures nécessaires pour [la] préserver du danger auquel elle était exposée ».
Le juge n’a pas à s’interroger sur la gravité de la négligence de l’employeur et doit seulement contrôler, au regard de la sécurité, la pertinence et l’efficacité de la mesure que l’employeur aurait dû prendre.
Sur la conscience du danger :
M. [P] fait valoir qu’il a été exposé lors de sa collaboration avec le [7] à des facteurs de risques psychosociaux auxquels est imputable son AVC ; qu’en effet, au cours de l’année 2008, il a dû faire face à des situations stressantes et une forte intensité de travail, lesquelles sont ensemble génératrices du risque pour sa santé qui s’est réalisé le 6 novembre 2008 ; que sa mission de consultations juridiques aux adhérents mobilisait plus de 50 heures de travail hebdomadaires ; que les heures supplémentaires réalisées par lui-même n’étaient pas rémunérées bien que régulières et nombreuses ; qu’il avait des journées à forte amplitude horaire ; qu’il participait à des événements à la demande de son employeur, après sa journée de travail voire le samedi ou le dimanche ; qu’il participait aussi à des ‘points rencontre’ organisés à l’attention des adhérents, les lundis soirs entre 18h30 et 21h00 ainsi qu’à des petits déjeuners d’accueil de 08h00 à 10h00 une fois par mois, à l’attention des nouveaux et futurs adhérents ; que le [7] stigmatisait tout cadre qui quittait le premier son poste, incitant ainsi à rester au travail quotidiennement au-delà de 19h00 et plus, ce qui était son cas ; qu’il devait également en 2008 préparer et animer au-delà de ses missions contractuelles, à la demande de son employeur, des réunions publiques d’information à l’attention des adhérents du [7], sur les sujets fournis et complexes de la loi de modernisation du marché du travail les 9 et 30 septembres 2008, et de la loi sur le temps de travail portant rénovation de la démocratie sociale, le 24 octobre 2008, et donc à des dates rapprochées ; qu’il devait largement préparer seul l’intervention du 24 octobre 2008 ; que ces circonstances expliquent la surcharge de travail imposée à cette période contemporaine de l’accident ; que cette mission supplémentaire représentait au moins 50 heures de travail et qu’il s’agissait de véritables formations en droit social ; que lui étaient également confiés les mandats patronaux ; qu’il était en outre mis à disposition de l'[8] ([8]) sur la même année 2008 pour 30 % de son temps de travail (15 % au titre du secrétariat général adjoint et 15 % pour le conseil en droit social), imposant une charge de travail supplémentaire ainsi que des déplacements chronophages et fatigants inhérents aux multiples missions et réunions ; que courant octobre 2008, était envisagée au sein de cette structure une nouvelle organisation de nature à remettre en cause le poste de secrétaire général adjoint ; que cette décision le contrariait et l’affectait beaucoup ; qu’au 1er janvier 2009, l’organigramme de l’UIC l’a rétrogradé au poste de juriste ; que s’ajoutaient enfin des inquiétudes et les tensions causées par les manifestations au siège du [7] ; que les cortèges des manifestations organisées au soutien des droits des salariés stationnaient devant les locaux du [7], scandaient des slogans hostiles, certains manifestants s’en prenant même physiquement aux locaux alors que les salariés y étaient présents et enfermés ; que ces manifestations l’exposaient à une pression manifeste et créaient un climat de travail anxiogène ; qu’exposé au stress au travail, il a résisté, s’est épuisé et a présenté en novembre 2008 un syndrome métabolique manifesté par l’AVC ; que le lien entre l’AVC et les conditions de travail pathogènes l’exposant au stress et à une surcharge de travail est établi ; que la démonstration des conditions de travail pathogènes subies illustre également la conscience du danger de l’employeur ; que le document unique d’évaluation des risques professionnels existant au moment de l’accident ne contient aucune évaluation des risques psychosociaux ; que les facteurs de stress tels que sa mise à disposition d’une autre structure que le [7], la surcharge de travail et les manifestations hostiles étaient connus de l’employeur ; que l’impossibilité pour le salarié de se plaindre est un élément à prendre en considération.
Le [7] réplique que M. [P] était employé sur la base de 169 heures de travail mensuelles et non sur la base d’une convention de forfait jours ;
qu’en aucun cas l’organisation ne prônait une culture du ‘sur engagement’ ; que M. [P] n’établit pas par ses pièces le caractère anormal du nombre de consultations réalisées en 2008 ; que dans le cadre de la procédure de reconnaissance de son accident du travail, M. [P] avait déclaré que son activité de travail était habituelle ; que le fait qu’il ait également réalisé des réunions d’information en septembre et octobre 2008 ne pose pas plus de difficultés ; qu’il ne les a ni préparées, ni animées seul ; que les réunions des 9 et 30 septembre étaient strictement identiques et ne nécessitaient pas une double préparation ; que ces réunions d’une durée de 3h30 ne devaient donner lieu qu’à une information ; qu’il ne s’agissait pas de former les participants sur des points précis au cours de journée entière de formation; qu’il n’a jamais sollicité le paiement d’heures supplémentaires ; qu’au regard de sa personnalité et de ses compétences en droit du travail, il est certain qu’il y aurait procédé s’il avait jugé une telle démarche légitime ; qu’il est contradictoire dans ses affirmations en reprochant d’une part une surcharge de travail liée à ses différentes missions extérieures au [7] tout en déplorant une réduction de ses missions au sein de [8] à compter de janvier 2009 ; qu’il ne rapporte pas la preuve de sa participation à des événements du [7] organisés en dehors de son temps de travail ; que s’agissant des manifestations de salariés, il ne fait état d’aucun événement particulier durant lequel sa sécurité aurait été engagée ; qu’il ne s’est jamais plaint de ses conditions de travail et n’a donc jamais estimé être exposé à des risques psychosociaux.
Sur ce :
M. [P] a été embauché par le [7] suivant contrat à durée indéterminée du 1er mars 1989, en qualité de chargé de mission (cadre), pour assurer les fonctions suivantes, sous la responsabilité du délégué général au sein de l’union patronale :
– le conseil et l’assistance aux entreprises adhérentes,
– les études et la constitutions de dossiers pratiques,
– la rédaction et éventuellement la diffusion d’informations,
– le montage et le suivi des contentieux qui lui seront confiés,
– le suivi des mandats patronaux qui lui seront confiés,
et d’une manière générale de contribuer, par son action, à la réalisation des missions et tâches de l’union patronale.
La fiche de poste qu’il produit détaille comme suit le poste de chargé de mission ‘réglementation du travail’ qui lui était confié :
1 – responsable du conseil et information en réglementation du travail pour les entreprises adhérentes au [7], incluant la rédaction d’articles pour la revue ‘Entreprises 44’
2 – responsable des mandats patronaux confiés ce jour :
‘ conseil de Prud’hommes de Nantes
‘ tribunal des affaires de sécurité sociale
‘ tribunal du contentieux de l’incapacité
‘ agence régionale pour l’amélioration des conditions de travail
‘ [5]
‘ autres mandats en représentation du président du [7] ou du président du [7]
3 – mission générale de défense des intérêts des entreprises et d’expression de positions patronales
4 – responsable du conseil en réglementation du travail pour le compte de l'[8] (pour l’ensemble des entreprises situées dans les Pays de la Loire).
Il sera précisé qu’il a été licencié pour inaptitude à son poste de travail le 6 octobre 2020.
Les pièces versées aux débats par M. [P] confirment la variété de ses tâches, énoncées en détail dans ses écritures.
Pour autant, cette multiplicité de tâches est insuffisante à établir une quelconque surcharge de travail dans les semaines qui ont précédé l’accident.
En effet, si M. [P] indique qu’il a réalisé 732 consultations sur l’année 2008, chiffre non contesté par le [7] car tiré du logiciel de gestion interne, dont 95 au cours du mois d’octobre 2008, il demeure que ce même logiciel évalue ces consultations en heures travaillées à 480,25, soit à environ 48 heures par mois sur 10 mois en tenant compte de ce que l’accident a entraîné un arrêt de travail sur la fin de l’année 2008, à compter du 7 novembre.
L’évaluation de la charge de travail par ce logiciel est très éloignée des 53 heures hebdomadaires qu’il affirme avoir réalisées pour cette seule mission de consultation.
Aucun élément apporté par M. [P] ne remet en cause les données du logiciel, étant relevé qu’il était rémunéré pour l’accomplissement de 169 heures de travail par mois décomposées en 151,67 heures de base, outre 17,33 heures supplémentaires en lien avec le passage aux 35 heures.
Le nombre de consultations réalisées au cours des années suivantes (564 en 2009, 574 en 2010, 622 en 2011, 434 en 2012, 623 en 2013…), significativement inférieur à celui de 2008, ne permet pas d’établir, faute de production des données pour les années antérieures, d’une part qu’au cours de l’année 2008, M. [P] a été confronté à un surcroît de travail, et d’autre part que les chiffres des années suivantes ne constituent pas au contraire une diminution de sa charge de travail initiale.
Il se contente par ailleurs d’affirmer, sans produire aucune pièce, qu’il participait à des événements à la demande de son employeur en dehors de ses heures de travail et que l’amplitude horaire de ses journées était excessive.
Il ne démontre pas avoir effectué ni sollicité le paiement d’heures supplémentaires auprès de son employeur.
La participation aux réunions publiques d’information à l’attention des adhérents du [7] des 9 et 30 septembres 2008 et du 24 octobre 2008 entraient dans ses attributions et il n’est pas justifié qu’elle ait généré un surcroît de travail et un stress important que l’employeur ne pouvait ignorer.
C’est à juste titre que le [7] souligne par ailleurs le caractère contradictoire de l’argumentation de M. [P] s’agissant de sa mise à disposition de l’UIC. Il ne peut soutenir que cette mise à disposition lui imposait une charge de travail supplémentaire tout en déplorant que sa mission de secrétaire général adjoint de l’UIC lui a été retirée à compter du 1er janvier 2009, le confrontant à une incertitude professionnelle et à un manque de reconnaissance du travail accompli au service de cette instance. Il relève même qu’il s’était ouvert de cette atteinte vécue comme une rétrogradation à la déléguée générale sans recevoir de soutien.
M. [P] retranscrit la phrase suivante de son contrat de travail (article 5) pour tenter de faire la preuve de ce que le [7] prônait la culture du ‘sur engagement’ : ‘M. [P] s’engage, en exécution du présent contrat, à consacrer tous ses efforts et son énergie au service de l’UPLA’ (devenue le [7]), sans citer la suite du paragraphe qui se poursuit ainsi : ‘Il renonce notamment à toute action ou relation de travail pour son propre compte ou celui de tiers pendant la durée du présent contrat’.
Cette clause s’analyse simplement en une clause d’exclusivité et c’est à tort que M. [P] l’interprète comme il le fait.
M. [P] ne justifie enfin ni avoir alerté sa hiérarchie d’une quelconque difficulté quant à sa charge de travail, ni d’aucune attestation de tiers sur son état de santé physique et psychologique au travail dans les semaines qui ont précédé son accident.
L’arrêt de la cour d’appel de Rennes du 11 février 2015, statuant sur la question de la reconnaissance de l’accident du travail, a reproduit in extenso le rapport d’expertise médicale du docteur [W] du 19 mars 2018 lequel indique : ‘L’activité de travail était habituelle, d’après les déclarations de M. [P]’.
S’il ressort des documents de presse versés aux débats par M. [P] que des manifestations de salariés ont bien eu lieu, au cours des années précédentes et en 2008 à [Localité 2], pour certaines devant le siège du [7] notamment en février 2008, aucune ne s’est tenue au cours de la seconde partie de l’année 2008, soit dans la période contemporaine de l’accident qui est survenu le 6 novembre 2008. Il ne peut être nié l’existence d’un possible stress en lien avec ces manifestations pour les salariés mais rien ne permet cependant d’affirmer que M. [P] en a été victime, celui-ci ne relatant aucune situation précise de ce type à laquelle il aurait été confronté.
Il est enfin constant que le document unique d’évaluation des risques du [7] dans sa version établie le 6 novembre 2002 (pièce n°8 de M. [P]) détaille les risques incendie, éclairage, ceux liés à l’utilisation d’un écran, chute de plain-pied, routiers, mais ne comporte aucun volet s’agissant des risques psychosociaux ; ce volet a été ajouté en 2016, du reste sous la supervision de M. [P].
Il est admis par les parties que l’accord national interprofessionnel sur le stress au travail a été signé en juillet 2008 ; il a été rendu obligatoire pour tous les employeurs et tous les salariés de son champ d’application à compter de la date de son extension. Le [7] affirme sans être contredit que cet accord a fait l’objet d’un arrêté d’extension le 23 avril 2009, soit postérieurement à l’accident survenu à M. [P].
En tout état de cause, l’absence d’évaluation des risques psychosociaux, alors que rien ne permet de retenir que les conditions de travail de M.[P] étaient dégradées au moment de l’accident, ne saurait à elle seule caractériser la faute inexcusable de l’employeur. Il sera relevé au surplus que M. [P] a repris son poste à l’issue de son arrêt de travail et que son contrat de travail s’est poursuivi jusqu’en 2020.
Au regard de l’ensemble de ces éléments et faute pour M. [P] de démontrer un danger auquel il a été exposé et dont l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience, les premiers juges seront approuvés en ce qu’ils ont rejeté ses demandes, le jugement étant confirmé en toutes ses dispositions.
2 – Sur les frais irrépétibles et les dépens :
Il n’apparaît pas équitable de laisser à la charge du [7] ses frais irrépétibles d’appel.
M. [P] sera en conséquence condamné à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
S’agissant des dépens, l’article R.144-10 du code de la sécurité sociale disposant que la procédure est gratuite et sans frais en matière de sécurité sociale est abrogé depuis le 1er janvier 2019.
Il s’ensuit que l’article R.144-10 précité reste applicable aux procédures en cours jusqu’à la date du 31 décembre 2018 et qu’à partir du 1er janvier 2019 s’appliquent les dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile relatives à la charge des dépens.
En conséquence, les dépens de la présente procédure exposés postérieurement au 31 décembre 2018 seront laissés à la charge de M.[P] qui succombe à l’instance.
PAR CES MOTIFS :
La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions ;
Y ajoutant :
CONDAMNE M. [J] [P] à verser à l’association [6] une indemnité de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles d’appel ;
CONDAMNE M. [J] [P] aux dépens, pour ceux exposés postérieurement au 31 décembre 2018.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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