Droit du logiciel : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/05351

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Droit du logiciel : 11 mai 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 20/05351

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 4-4

ARRÊT AU FOND

DU 11 MAI 2023

N°2023/

CM/FP-D

Rôle N° RG 20/05351 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BF4YX

[I] [X]

C/

Association ASSOCIATION AFPJR

Copie exécutoire délivrée

le :

11 MAI 2023

à :

Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE

Me Sylvain JACQUES, avocat au barreau de GRASSE

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de GRASSE en date du 13 Mai 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° F19/00252.

APPELANTE

Madame [I] [X], demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Fabio FERRANTELLI, avocat au barreau de NICE substitué par Me Virginie POULET-CALMET, avocat au barreau de NICE

INTIMEE

Association ASSOCIATION AFPJR, demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Sylvain JACQUES, avocat au barreau de GRASSE substitué par Me Kristel GORAN, avocat au barreau de GRASSE

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 15 Février 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre, et Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller, chargés du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre

Madame Frédérique BEAUSSART, Conseiller

Madame Catherine MAILHES, Conseiller

Greffier lors des débats : Madame Françoise PARADIS-DEISS.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.

ARRÊT

contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 Mai 2023.

Signé par Madame Natacha LAVILLE, Présidente de chambre et Madame Françoise PARADIS-DEISS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

L’association de formation et de promotion pour jeunes et adultes en recherche d’insertion (AFPJR) a pour objet la création et la gestion d’établissements et services en faveur de personnes en difficulté et notamment en situation de handicap. Elle comprend 19 établissements et emploie près de 400 salariés.

La convention collective nationale applicable est celle des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 mise à jour au 15 septembre 1976.

Mme [X] (la salariée) a été embauchée le 22 novembre 2010 par l’association AFPJR selon contrat à durée indéterminée à temps complet en qualité de responsable comptable et financier, statut cadre, au forfait annuel de 202 jours.

Par avenant du 1er février 2012, elle a été promue au poste de directrice administrative et financière.

Une réorganisation des services est intervenue en septembre 2015. Le poste de directeur général adjoint a été ouvert et attribué à Mme [J] qui occupait auparavant le poste de directrice des ressources humaines au sein de l’association.

Mme [X] a été en arrêt de travail à compter du 6 juin 2016.

Le 5 janvier 2017, la salariée a été convoquée à un entretien préalable à éventuel licenciement pour le 19 janvier 2017.

Par courrier recommandé avec accusé de réception du 30 janvier 2017, la salariée a été licenciée pour absence prolongée perturbant le fonctionnement de l’association et rendant nécessaire son remplacement définitif.

Le 30 août 2017, Mme [X], contestant son licenciement, a saisi le conseil de prud’hommes de Grasse aux fins de voir prononcer la nullité et subsidiairement l’inopposabilité du forfait en jours mentionné au contrat de travail, de voir l’association AFPJR condamnée à lui verser un rappel de salaire au titre d’heures supplémentaires pour les années 2014 à 2016 (22.830 euros), les congés payés afférents (2.283 euros), un rappel de salaire au titre du repos compensateur (3.893,85 euros), une indemnité de travail dissimulé (44.153,26 euros), des dommages et intérêts pour harcèlement moral (50.000 euros), de voir déclarer nul et sans cause réelle et sérieuse le licenciement dont elle a fait l’objet, de voir condamner l’association AFPJR à lui verser des dommages et intérêts pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse (80.000 euros), l’indemnité de préavis (39.127,26 euros) et les congés payés afférents (3.912,72 euros) outre une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile (3.000 euros), à lui remettre les bulletins de salaire et documents de fin de contrat rectifiés avec astreinte, au paiement des intérêts au taux légal.

L’association AFPJR a été convoquée devant le bureau de conciliation et d’orientation par courrier recommandé avec accusé de réception signé le 4 septembre 2017.

La salariée a sollicité en outre un rappel de salaire sur maintien de salaire net (4.923,24 euros) et les congés payés afférents (492,32 euros) selon convocation à l’audience de mise en état avec accusé de réception signé de l’association le 2 octobre 2017.

Par jugement du 13 mai 2020, le conseil de prud’hommes de Grasse a :

prononcé l’inopposabilité du forfait en jours,

rejeté le harcèlement moral,

dit que le licenciement de Mme [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

dit que l’association AFPJR n’a pas rempli son obligation de maintien de salaire,

condamné l’association AFPJR à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

33.486,16 euros bruts au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires outre 3.348,62 euros bruts au titre des congés payés afférents,

5.653,33 euros bruts au titre des repos compensateurs outre 565,33 euros pour les congés payés afférents,

4.923,24 euros nets à titre de rappel de salaire sur maintien de salaire net outre 492,32 euros nets de congés payés afférents,

condamné l’association AFPJR à remettre à Mme [X] un bulletin de salaire complémentaire, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi rectifiées sous astreinte de 15 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la mise à disposition de la présente décision, limité à un mois, le conseil se réservant le droit de liquider cette astreinte ;

précisé que les condamnations emportent intérêt au taux légal à compter de la date de réception de la convocation devant le bureau de conciliation pour les sommes de nature salariale ;

condamné l’association AFPJR à payer à Mme [X] la somme de 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné l’association AFPJR aux entiers dépens,

prononcé l’exécution provisoire en la limitant aux éléments de droit,

débouté les parties du surplus de leurs demandes, fins ou prétentions.

Selon déclaration électronique de son avocat remise au greffe de la cour le 11 juin 2020, Mme [X] a interjeté appel dans les formes et délais prescrits de ce jugement qui lui a été notifié le 15 mai 2020, aux fins d’infirmation en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes suivantes : dire et juger qu’elle a fait l’objet d’un harcèlement moral, dire et juger nul ou à tout le moins sans cause réelle et sérieuse le licenciement, condamner l’association AFPJR au paiement des sommes de 39.127,26 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, 3.912,72 euros au titre des congés payés afférents, 44.182,93 euros nets à titre d’indemnité pour travail dissimulé, 50.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, 80.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul et sans cause réelle et sérieuse, 3.000 euros nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Aux termes des dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 11 janvier 2023, Mme [X] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris du chef des demandes critiquées et statuant à nouveau de :

juger que Mme [X] a fait l’objet d’un harcèlement moral,

juger nul et sans cause réelle et sérieuse le licenciement,

condamner l’association AFPJR au paiement des sommes suivantes :

dommages et intérêts pour harcèlement moral 50.000 euros nets

indemnité compensatrice de préavis 39.127,26euros bruts

congés payés afférents 3.912,72 euros bruts

dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse

80.000 euros nets

indemnité de travail dissimulé 44.182,93 euros nets,

ordonner la remise sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir des documents suivants : bulletins de salaire portant mention des rappels de salaires avec le détail par année civile, attestation de salaire des douze derniers mois tenant compte des rappels de salaire ordonnés par le conseil de prud’hommes et confirmés par la cour,

confirmer le jugement pour le surplus,

condamner l’association AFPJR au paiement des intérêts de retard au taux légal avec capitalisation des intérêts en application de l’article 1343-2 du code civil,

condamner l’association AFPJR au paiement de la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel ainsi qu’aux entiers dépens.

Selon les dernières conclusions de son avocat remises au greffe de la cour le 27 novembre 2020, l’association AFPJR, ayant fait appel incident en ce que le jugement l’a condamnée au paiement à Mme [X] des sommes suivantes 33.486,16 euros bruts au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires outre 3.348,62 euros bruts au titre des congés payés afférents, 5.653,33 euros bruts au titre des repos compensateurs outre 565,33 euros pour les congés payés afférents, 4.923,24 euros nets à titre de rappel de salaire sur maintien de salaire net outre 492,32 euros nets de congés payés afférents, demande à la cour d’infirmer partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau de :

débouter Mme [X] de ses moyens et demandes,

subsidiairement, vu l’article 1302-1 du code civil,

condamner Mme [X] à lui restituer la somme de ‘ euros en répétition de l’indu au titre des jours de repos accordés en exécution de la convention,

statuant à nouveau,

condamner Mme [X] aux dépens et à lui verser la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture des débats a été ordonnée le 30 janvier 2023et l’affaire a été évoquée à l’audience du 15 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties il est fait expressément référence au jugement entrepris et aux conclusions des parties sus-visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’exécution du contrat de travail

1- Sur les demandes de rappel de salaire et indemnité de congés payés au titre des heures supplémentaires

L’association conteste le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré inopposable la convention de forfait annuel en jours, au motif que si la cour devait considérer que l’accord d’entreprise est insuffisant pour assurer la protection de la santé et de la sécurité de la salariée, faisant application des dispositions de l’article L.3121-65 du code du travail, elle disposait d’un outil permettant de retracer les jours travaillés, les repos compensateurs et les jours de repos pris lui permettant un contrôle effectif des jours de travail et de la charge de travail de la salariée, que la salariée bénéficiait de 49 jours de repos par an, qu’elle prenait sauf report d’un à sept jours sur l’année suivante, que des entretiens réguliers étaient organisés avec le responsable hiérarchique, que sa charge de travail a été évoquée puisqu’il a été décidé de reporter la date de restitution du projet de réorganisation du service comptable.

Subsidiairement concernant les heures supplémentaires, elle soutient que les relevés de temps établis par la salariée viennent en contradiction avec l’état de présence qu’elle établissait chaque mois et qu’aucune demande de travailler le week-end ne lui avait été formulée, qu’en considération de son niveau de compétence et de responsabilité, il est légitime de penser qu’elle vérifiait le contenu et l’exactitude de ses états de présence.

La salariée conclut à la confirmation de la décision entreprise en ce qu’elle a déclarée inopposable la convention de forfait jours figurant au contrat et en ce que l’association a été condamnée au paiement d’heures supplémentaires, en faisant valoir que :

– les dispositions de l’accord collectif mettant en place le forfait annuel en jours au sein de l’entreprise (en l’absence de dispositions au sein de la convention collective nationale) ne permettent pas de garantir la protection de la santé et de la sécurité du salarié dès lors qu’elles ne prévoient aucune modalité de contrôle et de suivi effectif et régulier de l’organisation et de la charge de travail du salarié ; l’employeur a pour seule obligation sur la base des relevés transmis par la salariée (relevés auto déclaratifs) d’établir des décomptes mensuels et annuels du nombre de jours travaillés et organisation d’un entretien annuel portant sur la charge de travail l’association ne respecte pas les modalités d’application de l’accord d’entreprise portant sur le contrôle de la charge de travail dans le cadre du forfait annuel en jours ; la cour a récemment déclaré inopposable les conventions de forfait jours appliqués au sein de l’association AFPJR ;

– les dispositions de l’article L.3121-65 du code du travail issu de la loi du 8 août 2016 n’ont pas vocation à s’appliquer rétroactivement à une convention de forfait conclue en 2010 et aucune des trois conditions posées par ce texte n’est remplie (absence d’établissement d’un document de contrôle des jours travaillés- les relevés de présence de la salariée ne permettent pas de vérifier l’amplitude horaire de travail et les astreintes dans le cadre de la vérification de la compatibilité de la charge de travail avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires – absence d’entretien annuel sur la charge de travail, l’organisation du travail, l’articulation vie prie-vie professionnelle et la rémunération ;

– elle produit un tableau très précis récapitulant ses horaires de travail, établi à partir de ses relevés hebdomadaires et des attestations prouvant qu’il était fréquent qu’elle travaille le week-end et qu’elle arrive très tôt et parte tard le soir ; elle a effectué 373 heures supplémentaires en 2014 et 177,50 heures supplémentaires en 2015 ; les heures supplémentaires effectuées étaient rendues nécessaires par la charge de travail.

1-1 Sur la convention de forfait annuel en jours

La régularité de la convention de forfait conclue le 22 novembre 2010 doit être examinée au regard des dispositions applicables pendant la période litigieuse portant sur les années 2014 à 2016 inclue.

Les dispositions de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 portant réforme des conventions de forfait sont rentrées en application le 10 août 2016 et ne saurait donc s’appliquer de manière rétroactive à la période antérieure.

Le contrat de travail a été suspendu à compter du 6 juin 2016, antérieurement à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi, en sorte que les dispositions de celle-ci n’ont pas trouver lieu à s’appliquer en l’espèce.

Il résulte des dispositions des articles L.3121-39 et suivants du code du travail relatifs aux conventions de forfait en jours sur l’année que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect de durées raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires

Le contrat de travail stipule une convention de forfait en jours fixée à 202 jours par an, auquel s’ajoute la journée de solidarité instaurée par la loi n°2004-626 du 30 juin 2004 en tenant compte du nombre maximum de jours de congés défini à l’article L.3141-3 du code du travail, fondée sur les dispositions conventionnelles applicables, soit l’avenant du 19 décembre 2000 à l’accord collectif AFPJR relatif à l’aménagement et la réduction du temps de travail du 21 décembre 1999. Il prévoit que la salariée devra veiller à respecter les obligations de repos minimal telles que définies par al loi et les dispositions conventionnelles et qu’il lui appartiendra d’appliquer les règles et procédures mises en place pour déterminer le respect de ces repos ainsi que le nombre de jours travaillés sur l’année.

L’accord d’entreprise prévoit au titre des conditions de contrôle de l’application du forfait que :

Le responsable hiérarchique direct opérera une comptabilisation du nombre de jours de travail effectués pour chaque salarié, mensuellement, à partir des relevés mensuels transmis par les cadres; un relevé annuel récapitulatif du nombre de jours de travail effectués dans l’année sera établi par salarié bénéficiaire à partir des relevés mensuels outre que chaque cadre rédigera un compte rendu hebdomadaire contenant les précisions suivantes : organisation hebdomadaire de son travail ; amplitude des journées de travail concernée ; les modalités de décompte de la charge de travail en résultant.

Cet accord mettant en oeuvre un contrôle fondé sur un système d’auto-déclaration du salarié sans instituer de suivi effectif et régulier permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, n’est pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables, ni à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé et ne répond donc pas à l’exigence de protection de la sécurité et de la santé du salarié.

En outre, la cour note que les états de présence mensuels de la salariée versés aux débats concernent uniquement l’année 2015 et qu’à l’exception de celui du mois de janvier, ils ne sont pas signés du supérieur hiérarchique.

De même, si l’employeur justifie par les attestations versées aux débats que des entretiens étaient prévus pour les directeurs d’établissements portant sur l’amplitude et la charge de travail, il n’en demeure pas moins qu’il ne justifie pas avoir effectué ce contrôle auprès de Mme [X], qui exerçait ses fonctions au sein de la direction générale et qui dépendait directement du directeur général, dans le cadre d’entretiens formalisés à ce sujet. Les rendez-vous notés avec la salariée sur l’agenda du directeur général, sans mention de leur objet, ne sont pas révélateurs de la réalité du contrôle exigé par la loi. En outre, la pièce n°35 de l’association visée ne comporte pas de mail en date du 26 février 2016 mais uniquement du 29 février 2016 et concerne les suites de l’entretien que la salariée a eu le 29 février au matin avec la directrice générale adjointe portant sur l’organisation comptable et plus spécialement le projet de réorganisation comptable. Il en ressort qu’effectivement la charge de travail de la salariée a été évoquée puisqu’il lui a été proposé de recruter immédiatement un salarié en contrat à durée déterminée de six mois renouvelable, qui pourrait venir renforcer la direction générale dans un premier temps. Néanmoins, l’évocation de la charge de travail de la salariée dans le cadre ponctuel de la période d’élaboration du projet de réorganisation comptable, ne peut être considérée comme un contrôle effectif et organisé de l’employeur de l’amplitude et de la charge de travail de la salariée conforme au dispositif légal.

Il s’ensuit que la convention de forfait annuel en jours est dépourvue d’effet.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a déclaré le forfait en jours inopposable.

1-2 Sur la demande de rappel de salarie au titre des heures supplémentaires

En conséquence de la privation d’effet de la convention de forfait annuel en jours, la salariée était soumise à la durée légale du travail.

La durée légale du travail effectif des salariés est fixée à 35 heures par semaine soit 151.67 heures par mois.

Les heures effectuées au-delà sont des heures supplémentaires qui donnent lieu à une majoration de salaire de 25% pour chacune des 8 premières heures (de la 36ème à la 43ème incluse) et de 50% à partir de la 44ème heure.

La durée du travail hebdomadaire s’entend des heures de travail effectif et des temps assimilés.

Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

La salariée affirme avoir accompli :

– 373 heures supplémentaires en 2014, dont 325 majorée de 25% et 48 de 50%,

– 177,50 heures supplémentaires majorées de 25% en 2015 et

– 159 heures supplémentaires majorées à 25% en 2016 ;

Elle verse aux débats:

– des mails envoyés :

à la directrice générale adjointe, faisant mention de son activité professionnelle, à savoir le samedi 12 mars 2016, le matin à la direction et l’après midi chez elle à travailler sur le tableau du dossier de révision,

aux services de comptabilité d’établissements concernant la disponibilité des comptes administratifs sur des logiciels le lundi 21 mars 2016 à 7h19,

à la directrice générale l’informant qu’elle quittait la direction générale et de noter cette intervention sur Octime, le samedi 26 mars 2016 à 12h42, et de bien vouloir noter une journée travaillée entre le samedi et le dimanche le lundi 4 avril 2016;

– un relevé de ses heures d’embauche et de débauche du matin et de l’après midi pour chacun des jours travaillés à compter du 2 janvier 2014 pour l’ensemble des années 2014, 2015 et 2016 portant un total des heures de travail accomplies par jour et un total des heures cumulées au fur et à mesure des jours.

Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.

A ces éléments, l’employeur oppose:

– les états de présence mensuelle de la salariée pour l’année 2015 signés par la salariée et portant mention de ses horaires d’embauche et de débauche du matin et de l’après midi pour chacun des jours travaillés, de ses repos hebdomadaires et de absences (congés payés, repos compensateur, récupération de jours fériés ;

– les demandes de déconnexion pendant les week-ends, congés payés et arrêt de travail adressées à la salariée et la persistance de la salariée à traiter ses courriels de son plein gré pendant les périodes de suspension de son contrat de travail, en contradiction avec les directives qui lui étaient donnée ;

– les heures réalisées par la salariée et non sollicitées par l’employeur qui ne peuvent être qualifiées d’heures supplémentaires.

L’employeur ne verse aucun relevé ou état de présence de la salariée pour les années 2014. En l’absence d’élément produit par l’employeur sur cette période, alors même qu’il n’est pas contesté sur cette période que la réalisation des heures accomplies a été rendue nécessaire par les tâches qui ont été confiées à la salariée, la cour retiendra les décomptes de la salariée faisant apparaître qu’elle a accompli en 2014, 373 heures supplémentaires, dont 325 majorée de 25% et 48 de 50%,

Pour l’année 2015, les horaires mentionnés au sein des décomptes produits par la salariée sont différents de ceux résultant des états de présence mensuel qu’elle a elle-même établis et qui sont d’ailleurs signés de sa main. Ce faisant, la cour retiendra les relevés horaires produits par l’employeur. Il en ressort que la salariée a accompli : 138,5 heures supplémentaires majorées à 25%.

L’examen des bulletins de salaire de l’année 2015 ne fait pas apparaître de jour de récupération, en sorte que le montant des heures supplémentaires impayées est effectivement de 138,5 heures.

Pour l’année 2016, les courriels envoyés par la salariée corroborent les horaires mentionnés pour les journées des 21, 25 mars, 2 et 3 avril 2016 qui seront pris en considération et d’ailleurs, rendus nécessaires au regard de la charge de travail liée à l’élaboration du projet de réorganisation de la comptabilité de l’association à ce moment là.

La directrice générale adjointe, par courriel du 30 janvier 2016de 10h333 en réponse à l’envoi de la salariée du même jour une minute plus tôt fait remarquer à celle-là que c’était samedi en indiquant : ‘repos nécessaire!!!’. Aussi, les heures accomplies le samedi 30 janvier au-delà de la notification de cette injonction et au mépris de celle-ci seront exclues. Par ailleurs le seul envoi du courriel le samedi 30 janvier à 10h32 d’une facture complémentaire à comptabiliser, ne peut être considéré ayant été rendu nécessaire par les tâches confiées à la salariée et les heures mentionnées ce jour seront exclues.

Les heures mentionnées comme accomplies les 3 mai, 2, 3, 13 et 14 juin 2016 pour un total de 22,5 heures, alors que la salariée était en arrêt pour maladie et que l’employeur lui avait demandé par trois fois de se déconnecter de son ordinateur dès le 3 mai 2016, à réception du premier courrier de la salariée, contraires aux directives clairement manifestées par l’employeur ne seront pas prises en considération.

Ainsi, il en résulte que la salariée a accompli 200,5 heures supplémentaires majorées à 25% sur l’année 2016.

L’examen des bulletins de salaire de l’année 2016 révèle que la salariée a bénéficié de 5 jours de récupération en mai 2016, dont le montant horaire correspondant à 35 heures sera déduit.

La salariée a déduit des heures réalisées celles qu’elle avait récupérées sous forme de jours de ‘rtt’ (réduction du temps de travail) pour un montant non contesté de 66,5 heures, en conséquence de quoi, le montant des heures supplémentaires accomplies impayées et non récupérées s’élève à 99 heures majorées à 25%.

Ainsi en fonction du salaire brut horaire applicable selon la période ( 36,95 euros en 2014, 37,60 euros en 2015 et 2016), des majorations applicables, l’association reste devoir la somme de 28.833,83 euros bruts au titre du rappel de salaire concernant les heures supplémentaires outre 2.883,38 euros bruts au titre de l’indemnité de congés payés afférente, et sera condamnée au paiement de ces sommes à la salariée.

Le jugement entrepris qui a condamné l’association au paiement des sommes de 33.486,16 euros au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires et 3.348,62 euros au titre des congés payés afférents sera infirmé sur le quantum.

2- Sur les demandes de rappel de salaire au titre du repos compensateur et indemnité de congés payés afférente

L’association conclut à l’infirmation du jugement des chefs de condamnation au titre des repos compensateur et congés payés afférents, en arguant de l’absence de démonstration de l’effectivité des heures supplémentaires.

La salariée qui conclut à la confirmation du jugement sur ces chefs avance que la convention collective applicable ne fixe pas de contingent annuel d’heures supplémentaires, en sorte que le contingent légal de 220 heures est applicable et que le montant de l’indemnité correspond à 100% au regard des effectifs de l’association comprenant 400 salariés.

La salariée fonde sa demande sur les dispositions de l’article L. 3121-11 du code du travail, lesquelles prévoient dans leur rédaction issue des dispositions de la loi n°2008-789 du 20 août 2008, que :

Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement (…) fixe l’ensemble des conditions d’accomplissement d’heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel, la majoration des heures supplémentaires étant fixée selon les modalités prévues à l’article L 3121-22 (…) A défaut d’accord collectif, un décret détermine ce contingent annuel et les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.

Selon les dispositions de l’article 18-IV de la loi sus visée, la contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent est fixée à 50% pour les entreprises de vingt salariés au plus et à 100% pour les entreprises de plus de vingt salariés.

La convention collective nationale applicable ne fixe pas le contingent annuel d’heures supplémentaires, en sorte que les dispositions légales et réglementaires s’appliquent.

Il n’est pas contesté que l’effectif de l’association est de l’ordre de 400 salariés.

Ainsi la salariée avait ainsi droit à un repos compensateur pour les heures effectuées au delà du contingent annuel de 220 heures. Elle a dépassé ce contingent seulement en 2014, pour un total de 153 heures.

Tout salarié dont le contrat est rompu avant qu’il ait pu bénéficier d’un repos compensateur reçoit une indemnité en espèce correspondant à ses droits acquis comprenant l’indemnité de congés payés.

En considération des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel de 220 heures, du droit à contrepartie obligatoire en repos équivalent à 100% de ces heures et du salaire horaire en fonction des années en cause, la salariée est en droit de bénéficier d’une indemnité de : 6.216,68 euros bruts comprenant l’indemnité de congés payés.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a condamné l’association au paiement des sommes de 5.653,35 euros au titre des repos compensateur et 565,33 euros au titre des congés payés afférents.

3- Sur la restitution des sommes payées au titre des jours de réduction du temps de travail

La demande incidente de l’intimée en restitution des sommes payées au titre des jours de réduction du temps de travail n’a été chiffrée ni dans le corps des conclusions ni dans le dispositif, en sorte que par application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour ne peut que constater qu’il ne s’agit pas d’une prétention sur laquelle la cour doit statuer

4- Sur l’indemnité de travail dissimulé

La salariée conteste le jugement entrepris en ce qu’il l’a déboutée de sa demande d’indemnité de travail dissimulé en faisant valoir que, les premiers juges n’ont pas tiré les conséquences légales de leurs constatations puisque la convention de forfait lui était inopposable et que, l’employeur ne peut se prévaloir de la convention de forfait pour arguer ne pas avoir connaissance de la réalité du temps de travail. Elle ajoute qu’en 2015, ses états de présence mensuels cadre faisaient état de journées ou demi-journées travaillées en sus du forfait jours et qu’elle n’en a récupéré que 3 sur 5, mais que les bulletins de salaire n’ont jamais mentionné le moindre jour de dépassement du forfait ni la moindre récupération, caractérisant l’intention de dissimulation.

L’association qui soutient qu’aucune heure supplémentaire n’a été effectuée, ajoute que le caractère intentionnel du travail dissimulé n’est pas démontré et que le salaire mensuel brut de référence à prendre en considération n’est pas de 7363,82 euros mais de 6.520,97 euros.

Il résulte de l’article L. 8221-5 du code du travail que la dissimulation d’emploi salarié n’est caractérisée que si l’employeur, de manière intentionnelle, soit s’est soustrait à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L. 1221-10 relatif à la déclaration préalable à l’embauche, soit s’est soustrait à la formalité prévue à l’article L. 3243-2 relatif à la délivrance d’un bulletin de paie ou a mentionné sur le bulletin de paye un nombre d’heure de travail inférieur à celui réellement effectué.

Le caractère intentionnel de la dissimulation ne se déduit pas du seul caractère inopposable de la convention de forfait.

Les états des présences mensuelles de l’année 2015 font apparaître un nombre de 210 jours travaillés, supérieur au nombre de 202 jours prévu au forfait. Si les bulletins de salaire de l’année 2015 ne révèlent pas de récupération, la salariée reconnaît qu’elle a récupéré 3 jours dans le courant de l’année 2015 et il ressort des bulletins de salaire de 2016 qu’elle en a également récupéré 5 en mai 2016.

Même si la convention de forfait est privée d’effet, l’omission de l’indication de seulement trois jours de récupération sur les huit jours de récupération acquis en 2015 et liés au dépassement du forfait en jours, ne permet pas d’établir le caractère intentionnel de la dissimulation.

La salariée sera déboutée de sa demande d’indemnité de travail dissimulé et le jugement entrepris sera confirmé sur ce chef.

5- Sur les demandes au titre du maintien de salaire et les congés payés afférents

L’association qui conteste le jugement en ce qu’il l’a condamnée au paiement d’un maintien de salaire, soutient avoir rempli ses obligations à ce titre, conformément aux dispositions conventionnelles pendant une période de six mois, du 6 juin au 17 novembre 2016 déduction faite de deux périodes de suspension pour maladie du 4 au 11 septembre 2015 puis du 2 au 8 mai 2016 et qu’elle a sollicité de la salariée, des documents pour la constitution de son dossier AGRICA par courrier du 10 novembre 2016, que ce dossier a été transmis fin novembre 2016 à l’organisme de prévoyance et qu’elle n’est pas responsable du délai de traitement de ce dernier.

La salariée conclut à la confirmation, en faisant valoir que l’assiette du salaire de base à prendre en compte était un net de 165,50 euros et non de 143,98 euros hors primes et astreintes, puisque le salaire net pris en considération par la convention collective nationale s’entend de celui que le salarié aurait effectivement perçu si le contrat n’avait pas été suspendu et correspond au 1/12ème du total des rémunérations nettes perçues au cours de douze derniers mois précédant l’interruption de travail, que l’employeur a perçu avant le 18 novembre 2016, les indemnités journalières du contrat de prévoyance qui étaient supérieures aux salaires maintenus durant ces six premiers mois et que par ailleurs il a initié le dossier de prévoyance avec 90 jours de retard, le 10 novembre 2016 alors qu’il aurait dû être constitué et transmis dès le 20 août 2016.

La salariée bénéficie d’un maintien conventionnel de salaire dans les conditions définies aux articles 6 de l’annexe n°6 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 et 26 de la convention collective nationale, outre d’une garantie de prévoyance auprès de l’organisme Agrica.

Ainsi les règles applicables sont les suivantes :

article 6 de l’annexe n°6 de la convention collective nationale des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966

Congé de maladie

Sous réserve des dispositions de l’article 26 de la convention collective du 15 mars 1966, en cas d’arrêt de travail résultant de maladie, d’accident du travail, les cadres percevront :

– pendant les 6 premiers mois : le salaire net qu’ils auraient perçu normalement sans interruption d’activité,

– pendant les 6 mois suivants : le demi-salaire net correspondant à leur activité normale.

Viendront en déduction du montant ainsi fixé les indemnités journalières versées par la sécurité sociale, les caisses de cadres ou toute autre institution de prévoyance.

article 26 de la convention collective nationale

En cas d’arrêt de travail dû à la maladie, dûment constatée, les salariés comptant 1 an de présence dans l’entreprise recevront, sous déduction des indemnités journalières perçues au titre de la sécurité sociale et d’un régime complémentaire de prévoyance :

– pendant les 3 premiers mois : le salaire net qu’ils auraient perçu normalement sans interruption d’activité ;

– pendant les 3 mois suivants : le demi-salaire net correspondant à leur activité normale.

Les indemnités journalières de sécurité sociale à prendre en considération sont celles que le salarié doit régulièrement percevoir en dehors de tout abattement pour pénalité qu’il peut être appelé à subir de son chef.

Le bénéfice des dispositions du présent article vise exclusivement les maladies dûment constatées et ne peut être étendu aux cures thermales.

La période de référence pour l’appréciation des droits définis ci-dessus n’est pas l’année civile mais la période de 12 mois consécutifs précédant l’arrêt de travail en cause.

Si, au cours d’une même période de 12 mois, un salarié a obtenu un ou plusieurs congés de maladie avec demi ou plein traitement d’une durée totale de 6 mois, une reprise effective de travail de 6 mois sera nécessaire pour qu’il puisse à nouveau bénéficier des dispositions ci-dessus.

article 2-1-1 des clauses générales de contrat de prévoyance Agrica

La garantie incapacité temporaire de travail est versée à partir du 91ème jour d’interruption totale de travail, continue ou non, et ce tant que le versement des indemnités journalières du régime de base vous est maintenu.

Vous devez être affilié et avoir cotisé au contrat pendant toute la durée du délai de franchise de 90 jours, de manière continue ou discontinue.

Ce délai s’apprécie en décomptant de date à date tous les arrêts de travail intervenus au cours des douze mois consécutifs antérieurs. Les arrêts de travail antérieurs se cumulent dès lors qu’il n’y a pas entre deux arrêts de travail une reprise d’activité supérieure à 12 mois. En cas de reprise d’activité supérieure à 12 mois, un nouveau délai de franchie doit être décompté.

Effectivement, comme le soutient la salariée, le droit à la garantie de prévoyance compte tenu de la franchise, débutait le 21 août 2016.

Il ressort des pièces du dossier que l’employeur n’a déclenché la procédure que par courrier du 10 novembre 2016 en adressant à la salariée un certificat médical à faire compléter et signer par son médecin traitant, soit avec un retard de plus deux mois, peu important soit le fait que la salariée ait adressé directement ledit certificat à l’organisme, sans le renvoyer à son employeur. Ainsi le retard de prise en charge de la prévoyance lui est imputable pour 82 jours et caractérise un manquement à son obligation d’exécution loyale du contrat de travail.

Néanmoins, le manquement de l’employeur à ses obligations ne se résout que par des dommages et intérêts, en sorte que le moyen tiré du retard de mise en oeuvre de la garantie de prévoyance est inopérant au titre de la demande de rappel de salaire.

De même, le débiteur de l’indemnité de prévoyance est l’organisme de prévoyance, en sorte que la salariée ne saurait réclamer à l’employeur le reliquat dû au titre d’une éventuelle erreur de l’employeur portant sur l’assiette des salaires servant de base au calcul de la garantie incapacité temporaire de travail de la prévoyance. Le manquement de ce dernier dans ses obligations au titre de la prévoyance, ne peut que se résoudre par des dommages et intérêts et non par un rappel de salaire.

Le droit conventionnel à maintien salaire s’apprécie sur la période des douze derniers mois consécutif précédant l’arrêt de travail du 6 juin 2016.

Il n’est pas contesté que le maintien de salaire à taux plein s’appliquait sur la période du 6 juin au 17 novembre 2016, compte tenu des arrêts de travail des douze mois précédents.

Le maintien de salaire de moitié portait quant à lui sur la période du 18 novembre 2016 au 17 mai 2017.

Le salaire normalement perçu s’entend de celui que le salarié aurait effectivement perçu si le contrat de travail n’avait pas été suspendu.

Au cours des douze derniers mois précédents l’arrêt de travail à compter du 6 juin 2016, la salariée a perçu un salaire 60.406,36 euros nets avant prélèvement de la cotisation mutuelle, correspondant à un salaire mensuel net de 5.033,86 euros et à une rémunération moyenne journalière pour 365 jours de165,5 euros nets.

Ainsi la salariée aurait dû percevoir un maintien de salaire pendant la période du 6 juin 2016 au 17 novembre 2016 de 26.989,8 euros nets et pendant la période du 18 novembre 2016 au 17 mai 2017 de 15.101,58 euros nets, soit un total de 42.091,38 euros.

L’employeur a versé au titre du maintien de salaire à 100%, déduction faite des indemnités journalières de sécurité sociale, la somme de 27.751,06 euros nets, sachant que pendant cette première période de six mois, la prévoyance n’était pas mise en oeuvre et qu’aucun versement n’a été effectué à ce titre. Ainsi, la salariée a été remplie de ses droits au titre du maintien de salaire à 100%.

A compter du 18 novembre 2016, les versements effectués par l’employeur ne correspondaient plus qu’au reversement des indemnités journalières de l’organisme de sécurité sociale et de l’organisme de prévoyance et se sont montés à la somme de : 19.345,84 euros nets (jusqu’en mai 2017), étant précisé que les indemnités de prévoyance se sont élevées à 12.656,24 euros correspondant aux relevés des règlements de l’organisme Agrica.

Dès lors que le montant des indemnités de sécurité sociale et de prévoyance est supérieur au maintien de demi salaire pour cette période (de15.101,58 euros nets), l’association n’est redevable d’aucun rappel de salaire au titre du maintien de salaire conventionnel et les demandes de la salariée seront rejetées.

En conséquence, le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné l’association au paiement de la somme de 4.923,24 euros nets outre les congés payés afférents pour 492,32 euros.

6- Sur le harcèlement moral

La salariée fait grief au jugement de la débouter de sa demande tendant à reconnaître l’existence d’un harcèlement moral, en ayant fait sienne la position de l’association sans répondre à ses propres éléments factuels et en relevant au sein de ses ‘axes’ des moyens ou faits qu’elle n’avait pas soutenus.

Elle soutient ainsi que le harcèlement moral dont elle a fait l’objet s’est manifesté dans des circonstances délétères liées aux manoeuvres de M. [G] (DG) pour obtenir le soutien de la majorité des membres de la direction dans l’unique but d’organiser son départ de l’association avec des conditions financières avantageuses ; il a ainsi procédé à des augmentations par anticipations de M. [E], directeur de MAS IEPS SESSAD, M. [O], M. [Z], Mme. [D], M. [N], également directeurs de divers établissements ; il a su qu’il ne pourrait pas compter sur elle dans l’organisation de son projet au regard de son intégrité sans faille et de sa pratique de l’expertise judiciaire ; il a souhaité ainsi l’écarter comme suit:

– en lui annonçant au mois de juillet 2015 la nomination de Mme [J] à compter du 1er septembre 2015 au poste de directrice adjointe ,

– en proposant à Mme [X] au cours du même entretien une rupture amiable de son contrat de travail ;

– en organisant son propre départ et mettant à sa place de directeur général Mme [J] à compter du 14 mars 2016 (directrice générale par intérim) tout en continuant à communiquer ses consignes à cette dernière ;

– au mois de décembre 2016, M. [G] a réintégré l’association aux fins d’organiser autrement son départ à la site de l’échec de son stratagème ;

– en organisant la surcharge de travail de la salariée et un harcèlement moral managérial avec l’arrivée d’un nouveau logiciel comptable, la mutation de Mme [Y] qui l’aidait et l’embauche d’une salariée qui n’a pas repris l’ensemble des tâches de cette dernière (2015-2016), de nouvelles tâches comme les tâches d’assistance au commissaire au compte, la mise en place du contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens CPOM, les indicateurs Anap, projets Riou, projet Almandin projet Bastiqe, PPI ; elle a dû également arrêter les comptes au premier semestre 2016 et dans ce cadre notamment revoir et assimiler 23 dossiers de révision, les 23 bilans et comptes de résultats des établissement (9 points détaillés page 30) ; en plus de ces tâches Mme [J] lui a demandé d’exécuter d’autres tâches (demande de documents sur 19 établissements, demande de situation comptable de la DG, étude de financement) outre de gérer des problématiques de gestion de ressources humaines ne rentrant pas dans son champ d’intervention, et également de rédiger en urgence un rapport sur l’organisation comptable de l’association alors que la réorganisation de ce service n’était programmée que pour septembre 2017 ;

– le refus de prendre en considération sa plainte selon laquelle cette dernière demande était irréalisable pour une présentation la première quinzaine de mars 2016 et en exigeant la remise d’un rapport le 16 mai 2016, en ajoutant un point ‘rh’ à intégrer ;

– une pression accrue par des critiques et dénigrements de son travail en public ;

– en tardant à lui donner les informations nécessaires à l’accomplissement de ses missions, à répondre aux demandes de réunions ou d’informations de sa part ;

– en faisant traîner pendant des mois le dossier d’indemnités journalières de sécurité sociale et de prévoyance et en ne respectant pas l’obligation de maintien de salaire ;

– en ne lui versant pas la prime exceptionnelle en décembre 2016.

Elle estime que ces faits ne sont pas justifiés par des éléments exempts de tout harcèlement moral dès lors que cette dernière était le bras droit de M. [G] jusqu’à ce qu’elle ne devienne un frein aux manoeuvres de ce dernier, que l’expérience de Mme [J] dans la gestion d’établissement et son diplôme sont insuffisants pour expliquer sa désignation au poste de directrice générale sans harcèlement moral dès lors que la validation de l’expérience acquise par Mme [X] pour obtenir le diplôme Cafdes lui a toujours été refusée sans explication par l’employeur et que la nouvelle directrice générale a suivi des formations postérieurement à la prise de fonction, dès lors que l’avis du conseil d’administration de l’association n’a pas été sollicité.

Contestant tout harcèlement moral et sollicitant la confirmation du jugement sur ce chef, l’association soutient que :

– les faits allégués ne sont pas réels et mensongers pour ce qui est des prétendues connivences,

– elle disposait d’une équipe comptable sur laquelle elle pouvait s’appuyer, notamment en la personne de Mme [T], et sur l’ensemble des équipes comptables des établissements, que des recrutements de comptables ont été effectués dès le mois d’avril 2015,

– la restructuration des services comptables a été sollicité par Mme [X] elle-même dans le cadre d’une note du 15 mai 2015 ; lors de la réunion du 23 mai 2015 Mme [X] a présenté son projet de réorganisation aux directeurs des établissements mais ce projets remettait en cause le principe de délégation de pouvoir de ceux-ci inscrit au règlement intérieur et engendré leur mécontentement ;

– les faits ne laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral et sont justifiés, dès lors que la salariée n’a tout simplement pas accepté de ne pas avoir été nommée au poste de directrice générale adjointe en lieu et place de Mme [J], que contrairement à ce qu’elle prétend, elle n’était pas le bras droit du directeur général, qu’elle avait effectivement été désignée en 2012 comme référent de la direction générale lors des absences pour congés de M. [G] mais dès le mois de décembre 2013, Mme [J] avait été désignée à cette fonction, car elle était titulaire du Cafdes, au contraire de celle-là.

Aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l’article L. 1154-1 du code du travail, lorsque survient un litige relatif à l’application de ce texte, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement ; il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, il n’est pas contesté que Mme [J] a été nommée en qualité de directrice générale adjointe le 1er septembre 2015 mais la salariée ne justifie pas que la nomination de Mme [J] lui a été annoncée personnellement par M. [G] le directeur général, en juillet 2015, pas plus qu’il lui a alors proposé une rupture conventionnelle. Les éléments du dossier ne permettent pas de considérer que la nomination de Mme [J] comme directrice générale adjointe se serait faite dans des conditions anormales. D’ailleurs, cette dernière était titulaire du certificat d’aptitude aux fonctions de directeur d’établissement ou de service d’intervention sociale, au contraire de Mme [X], légitimant ainsi le choix de l’association.

Lors du comité de direction (codir) du 7 mars 2016, il a été annoncé les décisions du bureau du 3 mars 2016 portant sur la désignation de Mme [J], directrice gérale adjointe, en qualité de directrice générale par intérim, à raison de l’absence pour raisons de santé du directeur général M. [G], sans pour autant que les éléments du dossier et l’attestation de M. [S], insuffisamment précise et circonstanciée sur ses constations personnelles, soient de nature à prouver que le directeur général continuait à administrer en sous mains l’association ou à prouver l’existence de manipulations ou ‘stratagèmes’de ce dernier pour que Mme [J] soit nommée en qualité de directrice générale adjointe puis comme directrice générale par intérim, même s’il a été licencié en janvier 2017, postérieurement à son retour. D’ailleurs, il ressort du jugement du conseil de prud’hommes de Grasse du 12 juin 2019 portant sur le litige opposant l’association et M. [G], que ce dernier critiquait les décisions prises en son absence et le changement de politique opéré par l’abandon de l’austérité budgétaire qu’il préconisait.

En ce qui concerne l’organisation du service et la surcharge de travail alléguée, il est notable que la salariée ne fait aucun état des lieux de ce que représentait sa charge de travail avant 2015, rendant difficile l’appréciation de sa charge de travail.

Néanmoins, elle bénéficiait en sa qualité de directrice administrative et financière de l’association d’une équipe comprenant Mme [Y], directrice comptable à la direction générale et Mme [T] et il n’est pas contesté que chacun des établissements bénéficiaient d’équipes comptables.

Contrairement à ce que prétend la salariée, Mme [T] dont le contrat à durée déterminée avait pris fin le 5 octobre 2014, avait été de nouveau engagée du 26 janvier 2015 au 24 mai 2017 en qualité de comptable responsable paie à temps plein et qu’elle avait au nombre des onze types de missions accomplies depuis le mois de janvier 2015, la comptabilité de la direction générale, la situation et l’assistance à la directrice administrative et financière outre l’aide et réponses aux comptables des établissements. Ainsi le planning concernant les six premiers mois de l’année 2016 concernant les échéances et circuits réglementaires 2015 produit par la salariée comporte également pour partie du travail effectué par Mme [T].

De même, certaines des tâches mentionnées dans le planning des échéances 2016, ne sont pas accomplies par la salariée mais relèvent des services comptables des établissements qui transmettaient à la direction administrative et financière, la salariée n’assurant que le contrôle de la réalisation de la tâche à l’échéance.

Il est établi que la salariée a assumé des tâches supplémentaires pendant l’absence prolongée de la responsable comptable et paie au cours des mois de novembre, décembre 2014 et janvier 2015, et qu’elle est intervenue seule, en accompagnement du commissaire aux comptes au sein des établissements en février et mars 2015 et 2016 alors qu’en 2014, elle intervenait en alternance avec Mme [Y] et qu’ainsi, ses interventions sont passées de 20 à 25 au cours de ces mois.

Concernant l’absence de Mme [Y], la salariée n’étaye pas son assertion selon laquelle cette dernière aurait été mutée et licenciée et le moment de la cessation définitive de son intervention au sein de l’association. L’attestation de Mme [T] n’apporte aucun éclairage sur ce point. Ainsi la salariée ne démontre pas que le départ de cette salariée a été organisé sciemment et la cour considérera que les tâches issues du remplacement de Mme [Y] ont été limitées à quelques mois pour ce qui est des tâches générales et ont été circonscrites, concernant l’ajout de l’accompagnement du commissaire aux comptes, à 5 réunions supplémentaires par an.

Il est établi que dans le courant des premiers et second trimestres 2016, Mme [J] a demandé à la salariée les budgets prévisionnels détaillés des établissements, de même que son avis sur la répartition des tâches comptables entre comptables, aide-comptable, secrétaire pour un complexe d’établissement, qu’elle a vérifié le tableau des honoraires techniques pendant les congés du salarié chargé d’y procéder, qu’elle a apporté sa contribution à la résolution de situations personnelles de salariés, qu’elle a donné son avis sur la viabilité de projets de l’association, qu’elle a pris en charge ponctuellement les virements de salaires de l’Esat les prés et Nature et jardin compte tenu de la panne de serveur du complexe fin avril 2016, qu’il lui a été demandé fin février 2016, de présenter un projet écrit portant sur la réorganisation des services comptables de l’association avec une restitution prévue le 16 mai 2016 pour une mise en oeuvre le 1er janvier 2017, que la salariée a été relancée pour rendre son rapport selon courriel du 30 mai 2016, dès lors que seul un pré-projet non finalisé avait été remis lors du codir du 23 mai 2016.

Ces éléments, au regard même de la teneur des courriels de la directrice générale par intérim qui a proposé à la salariée, compte tenu de la charge de travail inhérente à la reprise du dossier MAS IEPS SESSAD, le recrutement d’un contrat à durée déterminée de 6 mois renouvelables pour un poste de comptable de 24h/semaine à mi-temps et si nécessaire à temps complet pour la direction générale dans un premier temps et à puis à partager, selon courriel du 29 février 2016, démontrent la réalité de l’augmentation de la charge de travail de la directrice administrative et financière au cours de l’année 2016. D’ailleurs, dans son attestation, M. [W], commissaire aux comptes, a alerté le conseil d’administration sur la charge de travail du service de la direction administrative et financière.

La directrice générale adjointe a, par courriels des 20 et du 30 mai 2016, fait ses observations à la salariée sur la teneur de l’avant projet, en lui demandant d’y apporter les corrections qu’elle y avait apportées à la suite de sa relecture et en indiquant les points qui n’étaient pas aboutis, en précisant le calendrier, lui demandant de lui remettre un projet complet au plus tard le 29 août 2016, de mentionner les tâches comptables ou RH qui resteraient aux établissement et celles traitées par le centre de ressources comptables outre et en lui précisant que l’objectif poursuivi n’était pas de remette en cause le ‘DUD’ des directeurs d’établissement, ceux-ci devant conserver leur autonomie et rester maîtres de leur gestion, de leurs budgets et de leurs engagements financiers.

Il est établi par l’attestation de Mme [T] que lors de la réunion du 25 mai 2016 portant sur les dysfonctionnements constatés par la directrice administrative et financière, avec Mme [J], directrice générale par intérim, celle-ci parlait très sèchement à Mme [X], lui coupait régulièrement la parole, éludait les questions de cette dernière et haussait le ton lorsqu’elle s’adressait à elle, et qu’elle a terminé la réunion en lui disant : ‘tu n’es jamais contente!’

Il n’est toutefois pas démontré l’existence de dénigrements en public et la directrice générale adjointe a, contrairement à ce que prétend la salariée, accédé à sa demande de reculer la date de présentation du projet à la mi-mai 2016 puis à la fin août 2016. Il n’est pas plus établi par les mails versés aux débats à Mme [J] et M. [G] de la réalité d’anomalie financières et qu’il lui aurait été demandé de les ignorer.

Il ressort des divers courriels de Mme [X] adressés à la direction générale corroborés par l’attestation de Mme [T], que Mme [J] ne lui a pas transmis en temps le projet de délibérations pour le conseil d’administration du 26 avril 2016 avalisé, s’agissant de l’unique fait établi concernant l’absence de diligence de la direction générale pour permettre à la directrice administrative et financière de remplir son office.

Mme [X] a été en arrêt de travail du 2 au 8 mai 2016 puis à compter du 6 juin 2016 pour un état anxio-dépressif majeur d’intensité sévère.

Il est établi que l’employeur a tardé de près de trois mois, dans la mise en oeuvre de la garantie de prévoyance et qu’il ne lui a pas versé de prime exceptionnelle en décembre 2016 alors qu’elle en bénéficiait précédemment.

Ces faits pris dans leur ensemble, au regard de la concomitance du syndrome anxio-dépressif majeur développé par la salariée, laissent présumer le harcèlement moral.

La charge de travail accrue de la salariée est expliquée objectivement partiellement par le projet de réorganisation des services comptables de l’association, ce d’autant qu’elle avait incité à l’accélération du processus dans son courriel du 11 janvier 2016 à la DGA: ‘Plus que jamais, il devient urgent de revoir notre organisation actuelle, les dernières contraintes réglementaires ne font qu’accroître le travail de tous alors qu’une nouvelle organisation nous permettrait d’être plus serein’, sans pour autant qu’il puisse être affirmé qu’elle en était à l’origine, sa note du 20 mai 2015 étant postérieure au compte rendu de la réunion du comité de direction du 18 mai 2015 aux termes duquel le directeur général avait demandé aux directeurs d’établissement de transmettre pour la fin juin, une analyse de l’organisation actuelle et des pistes de travail pour optimiser le fonctionnement des service comptables,

D’ailleurs, dès le 7 avril 2015, une comptable rattachée à la direction générale avait été recrutée en la personne de Mme [C] à temps partiel de 70% et en contrat à durée déterminée de trois mois, même si le contrat a été rompu au bout de dix jours.

Puis, par courriel du 29 février 2016, la direction générale via Mme [J], avait proposé à la salariée compte tenu de la charge de travail inhérente à la reprise du dossier MA IEPS SESSAD le recrutement d’un contrat à durée déterminée de 6 mois renouvelables de comptable de 24h/semaine à mi-temps et si nécessaire à temps complet pour la direction générale dans un premier temps et à puis à partager.

Le 25 mai 2016, elles avaient d’ailleurs toute deux, validé ensemble l’affectation de la comptable de Prélude à sa disposition à hauteur de 0,40 ETP jusqu’à nouvel ordre et par courriel du 30 mai 2016, la directrice générale adjointe avait confirmé à nouveau à Mme [X] qu’elle avait la possibilité de recruter dès à présent, un comptable technicien supérieur à temps partiel de 0,6 ETP en contrat à durée déterminée de 6 mois renouvelable une fois et l’a invité à initier le processus de recrutement afin que le poste soit pourvu au plus tard début septembre 2016 et s’appuyant sur ‘Alexa’ (la responsable des ressources humaines).

Ensuite, la prise en charge ponctuelle à partir de la direction générale, des virements de salaires de l’Esat les prés et Nature et jardin compte tenu de la panne de serveur du complexe fin avril 2016, est justifiée objectivement par de éléments exempts de tout harcèlement moral, s’agissant de l’assistance par le service idoine, d’une défaillance ponctuelle relevant d’un aléa lié à la gestion de toute une entreprise.

Enfin, les demandes portant sur les budgets prévisionnels détaillés des établissements, de même que son avis sur la répartition des tâches comptables entre comptables, aide-comptable, secrétaire pour un complexe d’établissement, la vérification le tableau des honoraires techniques pendant les congés du salarié chargé d’y procéder, sa contribution à la résolution de situations personnelles de salariés, son avis sur la viabilité de projets de l’association rentrent dans le cadre des tâches inhérentes au directeur administratif et financier et de tâches ponctuelles liées à une absence temporaire d’un personnel inhérent de son rôle général d’assistance aux établissements.

Les remarques effectuées par la directrice générale sur l’avant projet de réorganisation sont neutres sans élément d’humiliation et sont objectivement justifiées par le processus d’élaboration du projet et son envergure, outre par la remise en cause par la salariée du principe de délégation de pouvoir des directeurs d’établissement, inscrit au règlement intérieur et qui avait engendré leur mécontentement.

Le comportement de Mme [J] à l’encontre de la salariée lors de la réunion du 25 mai 2016 qui lui coupait régulièrement la parole, éludait ses questions et haussait le ton lorsqu’elle s’adressait à elle, et qui a terminé la réunion en lui disant : ‘tu n’es jamais contente!’ n’est pas justifié par un élément exempt de tout harcèlement moral, pas plus que l’absence de transmission des informations nécessaires à la salariée pour finaliser le projet de délibérations pour le conseil d’administration du 26 avril 2016, ni le retard de près de trois mois dans la mise en oeuvre de la garantie de prévoyance.

Par ailleurs, l’association n’apporte aucune explication concernant l’absence de règlement de la prime exceptionnelle de décembre 2016.

Ce faisant, la salariée a été victime de harcèlement moral.

Le harcèlement moral dont la salariée a été la victime de la part de son employeur lui a causé un préjudice moral qui sera entièrement réparé par la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts que l’association sera condamnée à lui verser.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a rejeté le harcèlement moral et la demande subséquente de dommages et intérêts.

Sur la rupture du contrat de travail

1/ Sur la demande de licenciement nul

La salariée conclut à la réformation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de nullité du licenciement, en faisant valoir que l’absence prolongée en raison de laquelle elle a été licenciée a été générée par le harcèlement moral dont elle a fait l’objet.

La société conclut à la confirmation du rejet de cette demande en l’absence de harcèlement moral.

Le licenciement procédant d’un harcèlement moral est nul.

L’absence prolongée de la salariée résulte des arrêts de travail justifiés par son état anxio-dépressif majeur.

La concomitance de l’apparition de cette maladie avec la réorganisation délicate du service comptable, l’absence de transmission des informations nécessaires pour finaliser le projet de délibérations pour le conseil d’administration du 26 avril 2016 et la réunion du 25 mai 2016 au cours de laquelle la salariée a été rudoyée par la directrice générale par intérim alors même qu’il ressort des éléments versés aux débats que la salariée faisait preuve d’un investissement et d’un dévouement professionnel considérable, établit que son absence prolongée résulte du harcèlement moral qu’elle a subi de la part de son employeur.

Le licenciement sera en conséquence déclaré nul.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a jugé que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences de la rupture

1/ Sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement nul

La salariée dont le licenciement est nul et qui ne demande pas sa réintégration, subit un préjudice à raison de la perte illicite de son emploi. Elle a droit à des dommages et intérêts en réparation de la perte de l’emploi d’un montant , qui ne peut être inférieur à six mois de salaire, étant précisé que les dispositions issues de l’ordonnance n°2017-1387du 22 septembre 2017 ne sont pas applicables à l’entreprise utilisatrice eu égard à la date du licenciement.

Au cours des six derniers mois de travail, la salariée a bénéficié d’un salaire moyen non pas de 6.666,66 euros comme elle le prétend, mais de 6.520,97 euros, comme reconnu par l’employeur.

Agée de l’ordre de 52 ans au moment du licenciement, étant précisé que l’arrêt de travail de la salariée a été prolongé jusqu’au 5 juin 2019 et qu’elle a fait l’objet d’une reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé de 2de catégorie le 6 juin 2019 par la Maison départementale des personnes handicapées, la salariée a subi un préjudice à raison de la perte illicite de son emploi qui sera entièrement réparé par la somme de 40.000 euros que l’association sera condamnée à lui régler.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de toute demande de dommages et intérêts à ce titre.

2/ Sur l’indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents

La salariée dont le licenciement est nul est en droit de bénéficier d’une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents.

En application de l’article 9 de l’annexe portant sur les dispositions spéciales aux cadres de la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées du 15 mars 1966 mise à jour au 15 septembre 1976, la salariée, directrice administrative et financière, qui comptait plus de deux années d’ancienneté ininterrompue au sein de l’association a droit à un délai-congé de 6 mois.

En considération du salaire mensuel de 6.520,97 euros qu’elle aurait dû percevoir si elle avait continué à travailler, elle a droit à une indemnité compensatrice de préavis de 39.125,82 euros bruts outre une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 3.912,58 euros bruts que l’association sera condamnée à lui verser.

Sur la demande de remise des documents sous astreinte

Il convient d’ordonner la remise par l’association des documents de fin de contrat rectifiés conformément au présent arrêt et d’un bulletin de salaire rectificatif dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu’il y ait lieu à astreinte.

Le jugement entrepris sera infirmé sur ce chef.

Sur la demande d’intérêts au taux légal et de capitalisation

En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du jugement qui y a fait droit pour leur partie confirmée et pour le surplus à compter du présent arrêt.

Les autres sommes octroyées qui constituent des créances salariales, seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’association AFPJR de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 4 septembre 2017.

Les intérêts au taux légal seront capitalisés en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil.

Il sera ajouté au jugement sur ces chefs.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’association succombant principalement sera condamnée aux entiers dépens de l’appel. Elle sera en conséquence, déboutée de sa demande d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité commande de faire bénéfcier la salriée de ces mêmes dispositions et de condamner l’association au paiement d’une indemnité complémentaire de 1.500 euros à ce titre.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a condamné l’association au paiement d’une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et il y sera également ajouté au titre d’une indemnité complémentaire.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile;

Dans la limite de la dévolution,

Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé l’inopposabilité du forfait jours, en ce qu’il a condamné l’association AFPJR au paiement des sommes de 5.653,35 euros au titre des repos compensateurs et 565,33 euros au titre des congés payés afférents, en ce qu’il a débouté Mme [X] de sa demande d’indemnité pour travail dissimulé ;

Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté le harcèlement moral, en ce qu’il a dit que le licenciement de Mme [X] est fondé sur une cause réelle et sérieuse, en ce qu’il a dit que l’association AFPJR n’a pas rempli son obligation de maintien de salaire, condamné l’association AFPJR à payer à Mme [X] les sommes suivantes :

33.486,16 euros bruts au titre du rappel de salaire sur heures supplémentaires outre 3.348,62 euros bruts au titre des congés payés afférents,

4.923,24 euros nets à titre de rappel de salaire sur maintien de salaire net outre 492,32 euros nets de congés payés afférents ;

en ce qu’il a condamné l’association AFPJR à remettre à Mme [X] un bulletin de salaire complémentaire, le certificat de travail et l’attestation Pôle emploi rectifiés sous astreinte de 15 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la mise à disposition de la présente décision, limité à un mois, le conseil se réservant le droit de liquider cette astreinte ; en ce qu’il a débouté Mme [X] de ses demandes de dommages et intérêts pour harcèlement moral, pour licenciement nul et de ses demandes d’indemnité compensatrice de congés payés et d’indemnité compensatrice de congés payés afférente ;

Statuant à nouveau dans cette limite,

Déclare que Mme [X] a été victime de harcèlement moral ;

Déclare nul le licenciement de Mme [X] pour absence prolongée perturbant le fonctionnement de l’entreprise ;

Condamne l’association AFPJR à verser à Mme [X] les sommes suivantes :

28.833,83 euros au titre du rappel de salaire concernant les heures supplémentaires pour les années 2014 à 2016 outre 2.883,38 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente,

5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral ;

40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ;

39.125,82 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis outre une indemnité compensatrice de congés payés afférente de 3.912,58 euros ;

Rappelle que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

Déboute Mme [X] de sa demande de rappel de salaire au titre du maintien de salaire;

Ordonne la remise par l’association AFPJR des documents de fin de contrat et la remise d’un bulletin de salaire rectifiés conformément au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de ce jour, sans qu’il y ait lieu à astreinte ;

Rappelle que les sommes allouées par la cour sont exprimées en brut ;

Y ajoutant,

Rappelle que les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du jugement qui y a fait droit pour leur partie confirmée et pour le surplus à compter du présent arrêt.

Rappelle que les autres sommes octroyées qui constituent des créances salariales, seront assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l’association AFPJR de la convocation devant le bureau de conciliation, soit le 4 septembre 2017 ;

Dit que les intérêts au taux légal seront capitalisés en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil ;

Condamne l’association AFPJR à verser à Mme [X] la somme complémantaire de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne l’association AFPJR aux entiers dépens de l’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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