Droit du logiciel : 1 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/07586

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Droit du logiciel : 1 mars 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 20/07586

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRET DU 01 MARS 2023

(n° 2023/ , 18 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/07586 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CCUKJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Octobre 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F 19/01480

APPELANTE

S.A.S. FLODERER

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Nathalie MAIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0007

INTIMÉ

Monsieur [U] [A]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Laurent NOREILS, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 10 janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

– contradictoire,

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société Floderer a employé M. [U] [A], né en 1970, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 18 avril 2017 avec une reprise d’ancienneté au 11 décembre 2011 en qualité de directeur d’exploitation.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des hôtels, cafés et restaurants (HCR).

Sa rémunération mensuelle brute moyenne s’élevait en dernier lieu à la somme de 4 500 €.

Par lettre notifiée le 19 septembre 2018, M. [A] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 2 octobre 2018.

M. [A] a ensuite été licencié pour faute grave par lettre notifiée le 24 octobre 2018 ; la lettre de licenciement mentionne en substance un manque de sérieux flagrant et une désinvolture préjudiciable

a) au niveau commercial :

– une absence de travail quant au démarchage local,

– une entrave au travail de la commerciale dédiée à la brasserie et des négligences coupables,

– une désinvolture dans le travail,

– des initiatives commercialement préjudiciables à l’entreprise,

b) au niveau social :

– un manque de sérieux flagrant dans le traitement administratif,

– un manque d’implication et d’exemplarité et de leadership,

c) au niveau gestion :

– une absence de retours et de réponses aux demandes du service comptable,

– un coût matière statistiquement incompréhensible et inacceptable, avec des problèmes de stocks de vins, d’alcools blancs et de whisky, et de cuisine.

A la date de présentation de la lettre recommandée notifiant le licenciement, M. [A] avait une ancienneté de 6 ans et 10 mois ; la société Floderer occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités consécutivement à la rupture de son contrat de travail, M. [A] a saisi le 20 février 2019 le conseil de prud’hommes de Paris pour former les demandes suivantes :

« – Dire et juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse

– Rappel de salaires mise à pied (du 21 au 30 septembre) : 253,84 €

– Rappel de salaires mise à pied conservatoire (du 1er au 31 octobre 2018) : 4 500,05 €

– Indemnité de licenciement conventionnelle : 8 647,87 €

– Indemnité compensatrice de préavis : 14 540,38 €

– Congés payés afférents : 1 454,03 €

– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 58 000,00 €

– Dommages et intérêts pour licenciement vexatoire : 10 000,00 €

– Dire et juger que M [A] ne relevait pas du statut de cadre dirigeant et que sa rémunération forfaitaire à ce titre doit être annulée

– Rappel de salaires sur heures supplémentaires : 88 640,03 €

– Congés payés afférents : 8 864,00 €

– Indemnité forfaitaire pour travail dissimulé (L.8223-1CT) : 29 080,00 €

– En tout état de cause :

– Dommages et intérêts en réparation au préjudice né du retard à remettre l’attestation destinée à Pôle Emploi : 4 800,00 €

– Article 700 du Code de Procédure Civile : 3 000,00 €

– Exécution provisoire article 515 Code de procédure civile

– Dépens »

Par jugement du 12 octobre 2020, auquel la cour se réfère pour l’exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud’hommes a rendu la décision suivante :

« MET HORS DE CAUSE les sociétés GROUPE FLO et FLO TRADITION,

DIT le licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la société FLODERER à verser à M. [U] [A] les sommes suivantes :

– 1 253,84 euros au titre de rappel de salaires mise à pied (du 21 au 30 septembre 2018),

– 4 500,05 euros au titre de rappel de salaires mise à pied (du 1er au 31 octobre 2018),

– 8 647,87 euros au titre de l’indemnité de licenciement conventionnelle,

– 14 540,38 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis

– 1454,03 euros au titre des congés payés y afférents,

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation.

Rappelle qu’en vertu de l’article R. 1454-28 du Code du Travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire.

– 31 500 euros au titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 10 000 euros au titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

– 1 000 euros au titre de dommages et intérêts en réparation au préjudice né du retard à remettre l’attestation destinée à Pôle Emploi,

Avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement.

– 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la Société FLODERER à verser à POLE EMPLOI six mois de salaire au titre de remboursement des indemnités POLE EMPLOI en application des dispositions de l’article L 1235-4 du Code du travail,

Déboute M. [U] [A] du surplus de ses demandes,

Déboute la Société FLODERER de sa demande reconventionnelle,

Condamne la Société FLODERER au paiement des entiers dépens. »

La société Floderer a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 9 novembre 2020.

La constitution d’intimée de M. [A] a été transmise par voie électronique le 23 novembre 2020.

L’ordonnance de clôture a été rendue à la date du 8 novembre 2022.

L’affaire a été appelée à l’audience du 10 janvier 2023.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 28 juillet 2021, la société Floderer demande à la cour de :

« 1.

INFIRMER le jugement entrepris en tant qu’il a dit que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse et en tant qu’il a condamné la société appelante à verser à Monsieur [U] [A] les sommes suivantes :

‘ 1.253,84 euros au titre de rappel de salaires mise à pied (du 21 au 30 septembre 2018) ;

‘ 4.500,05 euros au titre de rappel de salaires mise à pied (du 1er au 31 octobre 2018) ;

‘ 8.647,87 euros au titre de l’indemnité de licenciement conventionnelle ;

‘ 14.540,38 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

‘ 1.454,03 euros au titre des congés payés y afférents,

‘ 31.500,00 euros au titre de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

‘ 10.000,00 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire

‘ 1.000,00 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du retard à remettre l’attestation Pôle Emploi ;

‘ 1.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

– a condamné la Société FLODERER SAS à verser à Pôle Emploi six mois de salaire au titre de remboursement des indemnités Pôle Emploi en application des dispositions de l’article L 1235-4 du Code du Travail ;

– a débouté la Société FLODERER SAS de sa demande reconventionnelle ;

– a condamné la Société FLODERER SAS au paiement des entiers dépens.

CONFIRMER le jugement entrepris en tant qu’il a débouté Monsieur [U] [A] :

– de sa demande de requalification en tant qu’il ne relevait pas du statut de cadre dirigeant et que sa rémunération forfaitaire à ce titre doit être annulée ;

– de sa demande de rappel de salaires sur heures supplémentaires à hauteur de 88.640,03 euros ;

– de sa demande de congés payés y afférents à hauteur de 8.864,00 euros ;

– de sa demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé à hauteur de 29.080,00 euros

– du surplus de sa demande.

2.

DÉBOUTER l’intimé de l’ensemble de ses demandes.

3.

CONDAMNER Monsieur [U] [A] à un montant de 4.000,00 euros au titre de l’article 700 du CPC.

Le CONDAMNER aux entiers frais et dépens de la procédure y compris l’intégralité des frais, émoluments et honoraires liés à une éventuelle exécution forcée par voie d’huissier. »

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 3 mai 2021, M. [A] demande à la cour de :

« Vu les articles L.1233-1 et suivants du Code du travail,

CONFIRMER le jugement du 12 octobre 2020 qui a jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONFIRMER le jugement du 12 octobre 2020 qui a condamné la société FLODERER à verser à M. [U] [A] les sommes suivantes :

– 1.253,84 € de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire du 21 au 30 septembre 2018 ;

– 4.500,05 € de rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire 1er au 31 octobre 2018 ;

– 8.647,87 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

– 14.540,38 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

– 1.454,03 € de congés payés y afférents ;

– 10.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire ;

– 1.000 € au titre du retard dans la remise de l’attestation Paule Emploi ;

Y ajoutant,

INFIRMER le jugement du 12 octobre 2020 sur le montant de l’indemnisation au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner la société FLODERER à verser à M. [U] [A] la somme de 58.000 € ;

CONDAMNER la société FLODERER à verser à M. [U] [A] au titre des congés payés sur mise à pied les sommes de 125,38 € et de 450 € ;

Vu les articles L.3111-2 et suivants du Code du travail,

INFIRMER le jugement du 12 octobre 2020 au titre des heures supplémentaires ;

JUGER que M. [U] [A] ne relevait pas du statut de cadre dirigeant et que sa rémunération forfaitaire à ce titre doit être annulée ;

Et en conséquence,

CONDAMNER la société FLODERER à verser à M. [U] [A] les sommes suivantes :

– 88.640,03 € à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires ;

– 8.864 € de congés payés y afférents ;

– 29.080 € à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé ;

En tout état de cause,

CONFIRMER le jugement en ce qu’il a condamné la société FLODERER à verser à Pôle Emploi six mois de salaire au titre du remboursement des indemnités en application des dispositions de l’article L. 1232-4 du Code du travail ;

CONFIRMER le jugement en ses autres dispositions ;

DEBOUTER la société FLODERER en ses demandes ;

CONDAMNER la société FLODERER à verser à M. [U] [A] la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

CONDAMNER la société FLODERER aux entiers dépens. »

Lors de l’audience présidée selon la méthode dite de la présidence interactive, le magistrat rapporteur a fait un rapport et les conseils des parties ont ensuite plaidé par observations et s’en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures ; l’affaire a alors été mise en délibéré à la date du 1er mars 2023 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC)

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud’hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties auxquelles il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur le statut de cadre dirigeant

M. [A] demande par infirmation du jugement qu’il soit jugé qu’il ne relevait pas du statut de cadre dirigeant et que sa rémunération forfaitaire à ce titre doit être annulée.

M. [A] fait valoir que :

– il avait contractuellement un statut de cadre dirigeant, niveau V, échelon 3 de la convention collective mais en réalité il n’avait pas des fonctions de cadre dirigeant ;

– il n’avait en réalité que des fonctions bien limitées, ainsi :

– il n’avait aucune vue sur la stratégie de l’entreprise,

– il ne participait pas aux décisions d’orientation stratégique,

– il n’avait absolument aucun élément d’information comptable,

– il n’avait aucun pouvoir de définir la politique commerciale,

– il n’avait pas de pouvoir en termes de relations sociales, comptabilité ou de ressources humaines ;

– il n’était qu’un exécutant ;

– l’employeur ne rapporte pas la preuve que les conditions légales sont réunies.

La société Floderer s’oppose à cette demande et fait valoir que :

– M. [A] est directeur d’exploitation ;

– il ne réfère qu’au directeur des opérations ;

– sa fiche de poste décrit ses fonctions ;

– il est à ce point autonome qu’il a délégué ses fonctions relatives à l’organisation interne, au personnel, aux inventaires, à la programmation du logiciel, au suivi des congés payés, au renouvellement de titres de séjour, au relation avec les écoles hôtelières, au suivi du service paie, au service commercial pour les réservations corporate et les réservations pour les fêtes, aux évaluations des collaborateurs, et au registre du personnel allant même jusqu’à établir un acte de délégation le 15 janvier 2015 à M. [C], directeur-adjoint, pour ce qui concerne le respect de la réglementation du travail, de l’hygiène et de la sécurité, de la coordination des transports routiers, des institutions représentatives du personnel, sur les fraudes et falsifications de produits (loi du 1er août 1905), sur les prix les infractions économiques, et sur les débits de boissons (annexe 60) allant jusqu’au transfert de responsabilité pénale

– il était autonome notamment pour les achats (annexe 69), la gestion des pertes (annexe 70), les cartes et menus (annexe 66), les embauches et les décisions RH (annexes 12 à 12d), les planifications du personnel et des interventions techniques (annexes 71 et 72 et 12d)

L’article L. 3111-2 du code du travail dispose « Les cadres dirigeants ne sont pas soumis aux dispositions des titres Il et III ;

Sont considérés comme ayant la qualité de cadre dirigeant les cadres auxquels sont confiées des responsabilités dont l’importance implique une grande indépendance dans l’organisation de leur emploi du temps, qui sont habilités à prendre des décisions de façon largement autonome et qui perçoivent une rémunération se situant dans les niveaux les plus élevés des systèmes de rémunération pratiqués dans leur entreprise ou établissement. »

Le contrat de travail de M. [A] précise notamment en son emploi et sa qualification :

« Le collaborateur est engagé dans les conditions suivantes :

Qualification: DIRECTEUR EXPLOITATION

Statut: Cadre Dirigeant

Niveau: V

Échelon: 3 »

et

« III – REMUNERATION

La rémunération annuelle brute est de 54000.00 Euros (cinquante-quatre mille euros), soit

4500.00 euros (quatre mille cinq cent euros) mensuel sur douze mois, à laquelle il convient d’ajouter les avantages nourriture dans les conditions définies par la réglementation. 

(…)

Cette rémunération couvre forfaitairement la durée de travail telle que prévue à l’article IV. Elle est indépendante du nombre d’heures de travail réellement effectuées. Elle rémunère l’exercice de la mission confiée dans la limite du nombre de jours travaillés.

IV- DUREE ET HORAIRE DE TRAVAIL

Les fonctions et la nature des responsabilités exercées dont l’importance implique une large indépendance dans l’organisation de son emploi du temps confèrent au collaborateur le statut de cadre dirigeant. A ce titre, la réglementation concernant la durée de travail ne lui est pas applicable. »

Sa fiche de poste de directeur d’exploitation mentionne son rattachement hiérarchique au seul directeur des opérations et la « raison d’être de la fonction » comme suit :

« 1 RAISON D’ETRE DE LA FONCTION

Dans le cadre de la politique et de la stratégie définie de la branche :

– Promouvoir le développement commercial et la création de richesse sur le business de son restaurant

– Animer et coordonner, sur la base de critères commerciaux, techniques, économiques et humains, l’exploitation dont il a la charge

– Garantir les résultats économiques de son restaurant ».

Il ressort de l’article 34 de la convention collective des hôtels, cafés et restaurants (HCR) complété par avenant n°2 du 5 février 2007 que le niveau V échelon 3, que M. [A] a contractuellement, est le niveau le plus élevé des cadres dans la classification des emplois qui mentionnent :

– pour l’activité « Étendue à plusieurs aspects de l’organisation et de la gestion (prévision et élaboration des programmes, réalisation, suivi, contrôle et gestion des écarts) et aux relations internes et extérieures de l’établissement. Remontée systématique des informations utiles aux orientations concernant l’avenir de l’entreprise.

(Et plus spécifiquement pour les cadres échelon 3)

Prend l’initiative des travaux d’élaboration des programmes, coordonne ces travaux, décide de programmes définitifs, contrôle ou fait contrôler l’application de ceux-ci et en gère les écarts. »,

– pour l’autonomie « Directives précisant le cadre des activités, objectifs, moyens et règles de gestion qui s’y rapportent ; pouvoirs de choix et de décision en ce qui concerne l’organisation et la coordination des activités différentes et complémentaires qu’il réalise lui-même ou qu’il fait réaliser par des collaborateurs. Généralement placé sous les ordres d’un hiérarchique direct qui peut être le chef d’entreprise.

(Et plus spécifiquement pour les cadres échelon 3)

A partir des directives et d’orientations générales reçues de la direction, a le pouvoir de susciter la participation de certains collaborateurs, de décider des programmes définitifs, de décider des contrôles de réalisation et des mesures correctives à adopter. »

– et pour les responsabilités « Responsabilité des activités d’organisation, gestion, relations et/ou encadrement, dans les limites de la délégation reçue.

(Et plus spécifiquement pour les cadres échelon 3)

Conformité, efficacité, et opportunité des programmes décidés ; efficacité de la participation obtenue de ses collaborateurs à l’élaboration des programmes. »

A l’examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que M. [A] est mal fondé à contester son statut de cadre dirigeant au motif que dans ses fonctions de directeur d’exploitation, directeur de l’un des établissements de l’entreprise exploitant un restaurant connu à [Localité 3], il exerçait des responsabilités importantes et bénéficiait de ce fait, d’une totale indépendance dans l’organisation de son emploi du temps, d’un pouvoir de décision largement autonome et d’un niveau élevé de rémunération ; qu’en effet, sa rémunération de plus de 54 000 € par an correspondait sans que cela ne soit contredit à l’un des salaires les plus élevés de la société Floderer et au salaire le plus élevé dans l’établissement qu’il dirigeait, qu’il avait ainsi la responsabilité d’un restaurant servant 500 couverts jours, faisant un chiffre d’affaires de près de 3,6 millions d’euros et employant 40 personnes comme cela ressort de la fiche de poste, qu’il bénéficiait d’une large délégation de pouvoir d’ailleurs subdéléguée comme cela sera rappelé plus loin, et d’une totale indépendance dans l’organisation de son emploi du temps comme le montrent les plannings de la brasserie dont il était directeur, qu’il était autonome notamment pour les achats, la gestion des pertes, les cartes et menus, les embauches et les décisions RH, les planifications du personnel et des interventions techniques comme le soutient en le justifiant la société Floderer, ce dont il résulte qu’il participait à la direction de la société Floderer et exerçait effectivement des fonctions de cadre dirigeant au sens de l’article L.3111-2 du code du travail.

C’est donc en vain que M. [A] conteste son statut de cadre dirigeant au motif qu’il ne produit pas d’élément de preuve suffisant pour contredire sa fiche de poste et son contrat de travail et contredire notamment le fait que ses fonctions et l’importance de ses responsabilités impliquaient une totale indépendance dans l’organisation de son emploi du temps, un pouvoir de décision largement autonome et un niveau élevé de rémunération dans l’entreprise et lui conféraient ainsi le statut de cadre dirigeant, étant ajouté que la délégation de pouvoir qu’il a subdélégué à son adjoint contredit le fait qu’il n’était qu’un exécutant.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a dit que M. [A] est cadre dirigeant et par voie de conséquence en ce qu’il a rejeté les demandes qui en découlent formées au titre des heures supplémentaires et du travail dissimulé.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement indique :

« Fort de ces éléments chiffrés et préoccupants pour la survie même de l’exploitation, un examen approfondi de vos pratiques, de votre travail et vos résultats tant sur le plan commercial, social et de gestion a été entrepris. Face à l’ampleur des carences et des problèmes relevés et face aux risques que votre travail fait peser sur l’entreprise, une mise à pied à titre conservatoire vous a été notifiée verbalement le 19 septembre 2018 et confirmée dans la convocation à l’entretien préalable du 19 septembre 2018 entretien que nous avons eu le 02 octobre 2018 et au cours duquel I’ ensemble des points en litige a été évoqué.

Ils sont ici rappelés et constituent à chaque fois des fautes qui vous sont reprochées:

1. Un manque de sérieux flagrant et une désinvolture préjudiciable.

a. Au niveau commercial.

-> Une absence de travail quant au démarchage local.

1. Une politique de démarchage actif des hôtels environnant qui ne travaillent pas avec la brasserie a été mise en place, à votre demande en juin, avec un document spécialement édité, une procédure de mesure des retours. Ce travail n’a tout simplement pas été fait.

2. II en est de même avec les entreprises voisines ou les théâtres.

Aucune démarche commerciale, coordonnée, quantifiable, reportée à la direction n’a été engagée.

L’exemple de l’Hôtel Mademoiselle situé à moins de 5 minutes à pied et propriété de l’ancien directeur général du groupe FLO est d’ailleurs édifiant puisqu’après contrôle les seuls flyers qui s’y trouvent sont des flyers antérieurs à l’année 2018.

Vous avez simplement précisé, pour iIlustrer votre activité, avoir remis un paquet de flyers au fils de l’hôtelier. Comment imaginer que « donner » un paquet de flyers au fils de l’hôtelier puisse être une démarche aboutie et sérieuse’ Mais en tout état de cause qu’en est-il des autres démarches auprès des hôtels ou commerces environnants’ Rien n’a été accompli. Et d’ailleurs un nombre considérable de flyers ; en fait quasiment tous, se trouve toujours dans l’établissement lui-même et qui par définition n’ont donc pas été distribués.

Cet exemple est pour le moins emblématique et démontre que vous ne « commercialisez » pas la brasserie

-> Une entrave au travail de la commerciale dédiée à la brasserie et des négligences coupables.

– Une commerciale dédiée à la brasserie vous a été attribuée dès le mois de février 2018 et remplacée par une autre personne en mai 2018.

Les retours que nous avons, retours documentés par la production des échanges entre vous et elle, font ressortir de nombreuses relances de cette dernière dans le but élémentaire d’obtenir des menus, des informations. En somme, de quoi pouvoir faire simplement et efficacement son travail en répondant aux demandes des clients.

La rapidité de la réponse à une demande de devis d’un client est pourtant connue pour être le meilleur moyen d’avoir un bon taux de « transformation » à une demande.

– Autre exemple précis d’entrave, le cas de cette cliente qui a demandé à la commerciale d’avoir une seule et même table de 26 personnes. Interrogé par la commerciale sur la faisabilité de la chose vous avez répondu par la négative. Information aussitôt transmise au client. Celui-ci lui a rétorqué « ce n’est pas vrai, je l’ai déjà fait, renseignez-vous mieux ». (Un déjeuner du 7 septembre 2018)

Cela était effectivement possible. Confirmation parvenue à la commerciale via un sms d’un maître d’hôtel envoyé la veille à 3h du matin!

– Vous avez à plusieurs reprises demandé à la commerciale de téléphoner au client le jour même de la prestation pour changer les menus car vous n’aviez pas assuré le suivi avec la cuisine et celle-ci ne disposait pas des produits en stock laissant le sentiment au client d’être pris en « otage » à quelques heures de la prestation. Faisant par la même peser d’énormes doutes quant à leur venue pour de futurs dossiers.

-> Une désinvolture dans le travail.

A plusieurs reprises vous avez demandé à la commerciale s’il était vraiment nécessaire d’imprimer les menus pour les clients grandes tables alors même que ceci figurait dans la fiche de fonction comme un engagement de la brasserie pour finir par cette phrase « de toute façon, je n’ai pas le choix »

-> Des initiatives commercialement préjudiciables à l’entreprise.

Vous avez reçu en direct un client cherchant un déjeuner pour un groupe de 100 personnes le samedi 15 septembre 2018 (peu ou prou la capacité totale de la brasserie) en lui proposant le menu le moins cher que nous avons (un produit d’appel pour les individuels. dit menu express). Puis vous avez donné le contact à la commerciale qui a alors logiquement proposé les vrais menus groupes et s’est vue opposer le prix d’appel que vous aviez proposé et avec un commentaire désobligeant du client qui, on ne peut lui en vouloir, n ‘a pas voulu comprendre les autres propositions plus onéreuses. Mais en fait simplement « aux prix normaux ».

Vous avez en somme proposé la privatisation de la brasserie pour une vingtaine d’euros par personne. Avec une marge très faible due à l’utilisation de ce menu « produit d’appel pour individuel », Le cercle est même bouclé quand nous avons découvert que vous aviez de plus embauché plusieurs extras pour assurer le service de ce groupe avec des contrats de 7 heures par personne et ce pour un menu dit « express », ce qui a définitivement anéanti la déjà peu évidente rentabilité de cette opération.

b. Au niveau social.

1. Un manque de sérieux flagrant et une désinvolture préjudiciable dans le traitement administratif

a. Une absence de retours et de réponses fréquentes, récurrentes, aux demandes du service RH empêchant un travail efficace, source de préjudices pour l’entreprise et ses salariés.

-> Ainsi, une nouvelle recrue ne s’étant finalement jamais présentée mais bien inscrite à l’effectif, s’est vue établir une fiche de paye car vous n’aviez pas prévenu de sa non venue (Monsieur [H] Juin 2018)

A notre responsable RH qui vous faisait remarquer ce laxisme vous avez rétorqué que c’était à elle de vérifier la concordance avec les plannings.

RH non informé de l’absence de salariés qui se sont vu rémunérés normalement sans espoir de retrouver les sommes (Monsieur [S] août 2018)

Plannings que vous transmettiez le plus souvent avec retard et après relances. Une sorte de jeu des 7 erreurs avec les yeux bandés en somme. Ou l’entreprise se retrouve toujours perdante et/ou en risque.

-> Des demandes de votre part pour obtenir des documents que vous aviez déjà ceci à plusieurs reprises démontrant le peu de sérieux dans un domaine où les erreurs se payent souvent très cher.

-> Non communication des pièces relatives à l’embauche d’extras. Donc des salariés pas payés en temps et heures car inconnus … Entraînant la reprise de la paye après la clôture et des problèmes évidents vis à vis des collaborateurs oubliés. (Monsieur [L] en mai 2018, Monsieur [W] en Juin 2018. Monsieur [D] en juin 2018)

b. Remise en cause des décisions prises, notamment en matière de sanction disciplinaire alors même que vous en étiez à l’origine.

-> Une demande de sanction pour un salarié déclaré par vous en absence injustifiée puis alors que la procédure était en cours, votre rétractation avec la soudaine et opportune découverte d’une feuille de CP déposée par le concerné (cas Sakho mai 2018)

c. Un manque de responsabilités et de courage : Vous donnez le numéro de téléphone de la responsable RH pour ne pas avoir à répondre vous-même aux légitimes questions soulevées par les points précédents.

2. Un manque d’implication, d’exemplarité et de leadership.

a. Une masse salariale sans rapport avec l’activité de la brasserie.

-> Sous votre gestion, une masse salariale de près de 53% (pour mémoire une masse salariale standard selon les éléments fournis par la chambre des experts comptable de [Localité 3] ressort à 41 % pour des exploitations similaires) est relevée (salariés fixes+ extras). Je vous rappelle à cette occasion et à titre d’exemple votre gestion des extras sur le groupe cité plus haut.

Vos seules initiatives en matière sociale consistaient à demander de nouvelles embauches… Et ce bien évidemment à raison de vos carences dans l’organisation du planning et du turnover

b. La solution de la réorganisation impérative, n’a jamais été mise en place.

Vous n’avez pas eu le courage de mettre en place l’organisation que la situation de l’établissement exigeait.

Vous n’avez personnellement jamais cherché à montrer l’exemple.

Votre statut de cadre dirigeant vous permettant une gestion de vos horaires, vous avez dévoyé cette liberté à votre seul profit sans jamais rechercher l’intérêt de l’entreprise.

Vous aviez organisé votre travail du mardi au samedi du matin à fin d’après-midi. Vous assistiez donc à 5 services sur 14. Qui plus est les plus faibles.

Vous avez « sacralisé » votre dimanche et vos soirées et avez même déclaré à Monsieur [O] (directeur général) que vous ne feriez pas les soirs car vous aviez une famille.

Il est compréhensible que dans ce contexte et fort de votre exemple, il vous était légitimement compliqué d’exiger de vos collaborateurs les modifications nécessaires de plannings.

c. Au niveau gestion.

-> Une absence de retours et de réponses fréquentes, récurrentes aux demandes du service comptabilité empêchant un travail efficace, source de préjudices pour l’entreprise. Des erreurs aux conséquences financières.

Des échanges par dizaines ou il vous est demandé et même redemandé à plusieurs reprises des éléments car la comptabilité est bloquée par vos erreurs et votre inertie.

– Des crédits clients (factures à envoyer) non correctement renseignés donc impossible d’adresser la facture et donc de se faire payer la prestation (un seul exemple mais il y en a plusieurs, caisse du 19 juillet 2018).

– Des erreurs de caisse nombreuses, plusieurs centaines d’euros manquent à date (un seul exemple car il y a eu plusieurs, caisse du 26 juillet 2017).

– Des erreurs CB et Amex pour cause de télécollectes pas correctement vérifiées. Des sommes irrécouvrables car vous avez déclaré ne pas avoir gardé les justificatifs CB ce qui est pourtant une obligation légale et une procédure connue. (un seul exemple car il y en a plusieurs, mail du 29 mai 2018)

– Des caisses avec des justificatifs incomplets.

– Des wonderbox non communiquées, Non recouvrées, Nous avons dû envoyer quelqu’un contrôler vos caisses et retrouver pour plusieurs milliers d’euros de wonderbox, car vous ne répondiez pas aux relances de la comptabilité puis dans un second vous aviez déclaré que vous ne les aviez pas, sûrement pour vous débarrasser de la question. Or, ces wonderbox étaient bel et bien dans vos papiers. (un exemple parmi d’autres une relance par mail du 26 juin 2018)

-> Un coût matière statistiquement incompréhensible et inacceptable.

a. Le coût matière jusqu’à août inclus (achat/vente) ressort à 34,5% (pour mémoire un CM usuel serait de 27%)

1. Des problèmes de stocks vins.

A la découverte des ratios à fin août une étude par sondages a été faite.

Celle-ci est a été menée de manière limitative mais est édifiante.

Des dizaines de bouteilles de champagne manquent en stock.

-> Vous avez justifié ceci par

1. Les offerts: ce qui serait alors contraire aux ordres en la matière et même déplacerait le problème sur une autre catégorie à savoir le crémant d’Alsace dont les achats sont aussi très importants et sans rapport avec les ventes typées par rapport au stock et eux spécifiquement destinés aux offerts.

2. Le fait de ne plus typer en détail les grandes tables. Ce qui est contraire aux ordres et est fiscalement interdit.

a. Ce qui par contre rend un contrôle précis impossible.

b. Le cas des bouteilles d’alcools blancs et Whisky

La lecture en détail des statistiques d’achats sur la période est édifiante.

L’équivalent de moins de deux bouteilles de Poire Williams a été vendu sur la période d’avril à août 2018 ; dans ce même délai 12 bouteilles ont été achetées.

Sur le whisky les mêmes proportions d’écarts sont constatées.

S’agissant de produits notoirement « exceptionnellement vendus », constater que l’équivalent de 3 bouteilles par mois ont été achetés ne peut échapper à un responsable concerné par son exploitation.

Acheter l’équivalent de 5 bouteilles de champagnes par jour ce qui est la moyenne sur la période avril/août ne peut non plus laisser indifférent pour une brasserie de petite taille.

En l’état de nos constatations à minima une négligence préjudiciable est évidente. Nous espérons ne pas découvrir de raisons plus graves dans les semaines à venir. La disparition d’un volume si conséquent de matière première reste inexpliquée. La négligence quant au contrôle est avérée, vous avez sans discernement recomposé en permanence vos stocks sans vous poser la question de ce qui advenait de ces produits manifestement pas vendus car ne se retrouvant pas dans votre chiffre d’affaires.

2. Des problèmes de stocks en cuisine.

a. Un inventaire à fin septembre a été réalisé. De véritables inepties ont été découvertes. A titre d’exemple, mais non limitatif, 34 kg de ravioles de [Localité 4] ont été retrouvées en chambre froide négative. Alors même qu’elles ne figurent plus à la carte depuis mars et qu’elles auraient pu figurer dans des suggestions ou des menus banquets sur la période.

B. des incohérences entre les statistiques de ventes et d’achats sont là aussi relevées de manière flagrante, notamment au niveau des viandes.

C. des attestations au niveau de la non gestion des DLC courtes sont aussi édifiantes. Des produits arrivant en fin de DLC non proposés en entrée ou plat du jour, simplement jetés alors que dans le même temps on achète de la matière première pour faire les plats du jour .. (Tartares et tourteaux, 15 mai 2018 porté à notre connaissance début septembre 2018).

Vous avez également refusé l’accès de l’établissement à la société de contrôle d’hygiène, payée par la société au motif qu’ils n’avaient pas pris rendez-vous. Alors même que ces sociétés ne prennent jamais rendez-vous, c’est même l’utilité et le principe. Votre précédent employeur procédait également ainsi la procédure n’était donc pas nouvelle. Le directeur opérationnel, Monsieur [O] a dû vous écrire pour vous rappeler cette règle.

A votre poste, avec votre statut, votre expérience, vous ne pouviez ignorer que votre gestion était tout simplement en train de précipiter l’établissement, disons le mot à la faillite.

Les résultats économiques sur la période de janvier à août inclus font ressortir une perte de 158.000,00 euros.

Une gestion juste « normale » avec une maîtrise simplement correcte de la masse salariale et des coûts matières sur la même période avec le même CA aurait produit un bénéfice de 76.000 euros.

Vous avez dévoyé votre poste en utilisant les libertés données par votre statut au bénéfice exclusif de votre confort personnel.

Vous n’avez jamais pris la mesure, ni de votre travail ni de l’implication nécessaire ni de l’exemplarité qu’on est en droit d’attendre d’un cadre dirigeant.

Bien évidemment et en complément des descriptifs et listes déjà exposés dans le présent courrier, il vous est rappelé que de manière générale le directeur d’exploitation (vous-même), cadre dirigeant, niveau V échelon 3 avec large indépendance :

– n’a pas su fédérer les équipes ;

– n’a pas eu d’initiatives ;

– n’a pas alerté sur les problèmes rencontrés ;

– a manqué d’exemplarité ;

– a entravé la bonne marche de l’entreprise ;

– a fait courir des risques comptables, sociaux, également en matière de sécurité et d’hygiène.

Aussi avons-nous décidé de vous licencier pour faute grave avec effet immédiat à la première présentation du présent courrier, sans préavis, ni indemnité de licenciement.

La mise à pied à titre conservatoire est confirmée. ».

Il ressort de la lettre de licenciement que M. [A] a été licencié pour faute grave en raison des manquements suivants : un manque de sérieux flagrant et une désinvolture préjudiciable

a) au niveau commercial :

– une absence de travail quant au démarchage local,

– une entrave au travail de la commerciale dédiée à la brasserie et des négligences coupables,

– une désinvolture dans le travail,

– des initiatives commercialement préjudiciables à l’entreprise,

b) au niveau social :

– un manque de sérieux flagrant dans le traitement administratif,

– un manque d’implication et d’exemplarité et de leadership,

c) au niveau gestion :

– une absence de retours et de réponses aux demandes du service comptable,

– un coût matière statistiquement incompréhensible et inacceptable avec des problèmes de stocks de vins, d’alcools blancs et de whisky, et de cuisine.

M. [A] soutient par confirmation du jugement que son licenciement pour faute grave n’est pas justifié ; il fait valoir que :

– le grief tiré de l’absence de travail quant au démarchage local n’est pas prouvé ; une seule attestation est produite (M. [N]) qui ne prouve pas le grief qui est du reste contredit par le fait qu’il n’y avait pas de politique de démarchage strictement définie, qu’il y avait une commerciale dédiée notamment à cette tâche, et qu’il n’est pas resté inactif puisqu’il avait distribué des flyers aux hôtels environnants pour aider la commerciale (pièce salarié n°21) ;

– le grief tiré de l’entrave au travail de la commerciale dédiée à la brasserie et les négligences coupables ; une attestation est produite (celle de l’employeur lui-même) qui est dépourvue de valeur probante ; le courrier électronique de Mme [M] ne prouve pas le grief qui est du reste contredit par l’attestation de Mme [T] (pièce salarié n° 27) ;

– le grief tiré de la désinvolture dans le travail n’est pas prouvée : aucun élément de preuve n’est invoqué ;

– le grief tiré des initiatives commercialement préjudiciables à l’entreprise, manque en fait : négocier un menu à 26,90 € pour 100 couverts un samedi midi était une bonne opération commerciale ; en outre des réservations lui étaient imposées avec des menus offerts par la direction (pièce salarié n°22) et il était apprécié pour son travail par les clients (pièce salarié n°35) ;

– le grief tiré du manque de sérieux flagrant dans le traitement administratif n’est pas prouvé : l’employeur verse aux débats deux attestations de Mme [R] des 18 septembre 2018 et 28 janvier 2019 qui sont dépourvues de valeur probante du fait de leur imprécision ; les autres éléments de preuve sont des courriers électroniques de mars et avril 2018 qui ne peuvent être utilement invoqués à l’appui de son licenciement prononcé en octobre 2018 ;

– le grief tiré du manque d’implication et d’exemplarité et de leadership n’est pas prouvé et il est contredit par l’attestation de M. [F] (pièce salarié n° 39) ;

– le grief tiré de l’absence de retours et de réponses aux demandes du service comptable n’est pas démontré ; en outre il ne lui est pas imputable puisque c’est M. [O] qui récupérait les factures et documents sociaux pour les emporter à [Localité 5] (pièce salarié n° 23) ; enfin il y avait des problèmes récurrents de connexion TPE ou des directives contradictoires (pièces salarié n°28 à 33) ;

– le grief tiré du coût matière statistiquement incompréhensible et inacceptable n’est pas démontré et il est contredit par les attestations de MM. [F] et [B] (pièces salarié n° 39 et 24) ;

– le grief tiré des problèmes de stock n’est pas démontré et il est contredit par l’attestation de M. [B] (pièce salarié n° 24).

La société Floderer soutient par infirmation du jugement que le licenciement pour faute grave de M. [A] est justifié ; elle fait valoir que :

– le grief relatif au désinvestissement de M. [A], à son manque d’implication, d’exemplarité et de leadership est établi par la délégation à M. [C] (pièce employeur n° 11), par l’attestation de ce dernier (pièce employeur n° 13), par les plannings (pièce employeur n° 14) qui montrent que ses horaires de travail se caractérisent par une absence de manière continue du samedi soir au lundi soir et une présence du mardi au samedi, du matin à l’après-midi (16h48), pour seulement 5 services sur 14 ;

– le grief relatif à l’absence d’action commerciale est établi par l’attestation de M. [N] (pièce employeur n° 18) et par la facture d’achat des flyers (pièce employeur n° 20) qui démontrent que M. [A] n’a pas distribué les nouveaux flyers ;

– le grief relatif à l’entrave au travail de la commerciale dédiée à la brasserie et à la désinvolture dans le travail est établi par l’attestation de M. [O] (pièce employeur n° 15), les courriers électroniques de Mme [M] (pièce employeur n° 21) et son attestation (pièce employeur n° 22) ;

– le grief relatif à ses initiatives commercialement préjudiciables à l’entreprise est établi par l’attestation de Mme [M] (pièce employeur n° 22), le planning des réservations (pièce employeur n° 23), le menu « express » de 15 € (pièce employeur n° 24) et la carte des menus dont le moins cher est à 25 € (pièce employeur n° 25) ;

– le grief relatif au manque de sérieux flagrant dans le traitement administratif est établi par les attestations de Mme [R] (pièces employeur n° 26 et 27), et par ses courriers électroniques échangés avec M. [A] (pièces employeur n° 28a à 28t) ;

– le grief relatif au manque d’implication et d’exemplarité et de leadership est établi par les résultats 2018 et 2019 comparés avec les ratios de la profession (pièce employeur n° 31), par l’attestation de l’expert-comptable (pièce employeur n° 30), le courrier électronique de M. [O] du 29 juillet 2018 (pièce employeur n° 32) et son attestation (pièce employeur n° 15)

– les griefs relatifs au manque de sérieux en matière de gestion, à l’absence de retours et de réponses aux demandes du service comptable et au coût matière statistiquement incompréhensible et inacceptable et aux problèmes de stocks de vins, d’alcools blancs et de whisky, et de cuisine, sont établis par le tableau de bord (pièce employeur n° 35), les attestations de Mme [X] (pièces employeur n° 36 et 36a et 60), l’attestation de M. [O] (pièce employeur n° 37), l’attestation de Mme [M] (pièce employeur n° 28) les courriers électroniques échangés par M. [A] et Mme [X] (pièces employeur n° 38 à 56), un récépissé de dépôt (pièce employeur n° 59), un courrier électronique relatif au refus du contrôle de l’hygiène et de la sécurité (pièce employeur n° 61)

– le préjudice économique découlant des manquements de M. [A] est d’environ 150 000 € pour l’exercice 2018 (pièce employeur n° 30).

Il ressort de l’article L. 1235-1 du Code du travail qu’en cas de litige, le juge à qui il appartient d’apprécier le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste il profite au salarié.

Quand le licenciement est prononcé pour faute grave, il incombe à l’employeur de prouver la réalité de la faute grave, c’est à dire de prouver non seulement la réalité de la violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail mais aussi que cette faute est telle qu’elle impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis.

Pour apprécier la gravité de la faute, les juges doivent tenir compte des circonstances qui l’ont entourée et qui peuvent atténuer la faute et la transformer en faute légère.

Si un doute subsiste sur la gravité de la faute reprochée, il doit profiter au salarié.

Il résulte de l’examen des pièces versées aux débats mentionnées plus haut et des moyens débattus que la société Floderer apporte suffisamment d’éléments de preuve pour établir les faits reprochés à M. [A] relativement :

– à son manque d’implication et d’exemplarité et de leadership qui ressort des délégations consenties à son adjoint, de ses horaires de travail qui se caractérisent par une absence de manière continue du samedi soir au lundi soir et une présence seulement du mardi au samedi, et uniquement pour le matin et l’après-midi et donc pour seulement 5 services sur 14,

– à son manque de sérieux flagrant au niveau commercial qui ressort de l’insuffisance de son action commerciale et de sa désinvolture en la matière par rapport au travail de la commerciale dédiée à la brasserie,

– à son manque de sérieux flagrant en matière sociale et dans le traitement administratif des emplois,

– et à son manque de sérieux flagrant en matière de gestion qui ressort de l’absence de retours et de réponses aux demandes du service comptable et des problèmes de stocks de vins et spiritueux et de stocks de cuisine.

C’est donc en vain que M. [A] conteste les faits qui lui sont reprochés au motif que les éléments de preuve qu’il produit ne sont pas suffisants pour contredire les griefs invoqués par la société Floderer que la cour a retenus et les nombreux éléments de preuve produits par la société Floderer, notamment les attestations de MM. [C] et [O], et de Mmes [M], [R] et [X], dont la valeur probante ne peut être sérieusement contestée.

La cour retient que ces faits constituent une faute d’une gravité telle qu’elle impose le départ immédiat du salarié, le contrat ne pouvant se poursuivre même pour la durée limitée du préavis ; en effet en agissant comme il l’a fait, M. [A] a sciemment refusé d’exercer les pouvoirs de direction et les responsabilités qu’il avait pourtant le devoir d’exercer et d’assumer, et ce faisant, il a exposé l’entreprise à des risques sérieux pour sa pérennité, ce qui le place, de fait, en dehors de la relation de travail.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a jugé que le licenciement de M. [A] n’est pas justifié par une faute grave, et statuant à nouveau de ce chef, la cour dit que le licenciement de M. [A] est justifié par une faute grave.

Le jugement déféré est par voie de conséquence infirmé en ce qu’il a condamné la société Floderer à verser à M. [A] diverses sommes relatives à la période de mise à pied conservatoire, à l’indemnité de licenciement conventionnelle, à l’indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents, aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, et aux dommages et intérêts pour licenciement vexatoire, et à rembourser à Pôle emploi des indemnités en application des dispositions de l’article L 1235-4 du Code du travail, et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute M. [A] de ses demandes de ses chefs et dit n’y avoir lieu à l’application des dispositions de l’article L 1235-4 du Code du travail.

Sur les dommages et intérêts pour retard dans la remise de l’attestation Pôle emploi

M. [A] demande par confirmation du jugement la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour retard dans la remise de l’attestation Pôle emploi ; il fait valoir, pour tout moyen, que « Pôle Emploi a refusé ainsi sa prise en charge jusqu’à la réception d’une attestation en bonne et due forme, que le concluant n’a reçu que le 31 novembre 2018, soit 1 mois et demi après son licenciement (pièces salarié n°15, 16, 17, 18, 19 et 20). »

La société Floderer s’oppose à cette demande et soutient que M. [A] ne démontre pas qu’il a subi un préjudice.

En application des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l’existence d’un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d’un lien de causalité entre le préjudice et la faute.

Sans qu’il soit besoin d’examiner le fait générateur de responsabilité, il résulte de l’examen des moyens débattus que M. [A] n’articule dans ses conclusions aucun moyen permettant de caractériser son préjudice ni dans son principe, ni dans son quantum ; dans ces conditions, le moyen de ce chef est donc rejeté.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu’il a condamné la société Floderer à payer à M. [A] la somme de 1 000 € au titre des dommages et intérêts pour retard dans la remise de l’attestation Pôle emploi et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute M. [A] de sa demande de dommages et intérêts pour retard dans la remise de l’attestation Pôle emploi.

Sur les autres demandes

La cour condamne M. [A] aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d’appel en application de l’article 696 du Code de procédure civile.

Le jugement déféré est infirmé en ce qui concerne l’application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il n’apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de la société Floderer les frais irrépétibles de la procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement dans les limites de l’appel sauf en ce qu’il a dit que M. [A] est cadre dirigeant et par voie de conséquence en ce qu’il a rejeté les demandes formées au titre des heures supplémentaires et du travail dissimulé ;

Et statuant à nouveau dans les limites de l’appel sur les chefs infirmés :

DIT que le licenciement de M. [A] est justifié par une faute grave :

DÉBOUTE M. [A] de ses demandes relatives à la période de mise à pied conservatoire, à l’indemnité de licenciement conventionnelle, à l’indemnité compensatrice de préavis et aux congés payés afférents, aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, aux dommages et intérêts pour licenciement vexatoire et aux dommages et intérêts pour retard dans la remise de l’attestation Pôle emploi ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE la société Floderer de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [A] aux dépens de la procédure de première instance et d’appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT

 


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