COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
21e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 1er JUIN 2023
N° RG 21/01508 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UQRH
AFFAIRE :
[U] [Z]
C/
S.A. QUADIENT FRANCE SA …..
Décision déférée à la cour : Jugement rendu
le 26 Mars 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de NANTERRE
N° Chambre :
N° Section : E
N° RG : F 18/02103
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me David VAN DER BEKEN
Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [U] [Z]
née le 18 Mars 1968 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentée par : Me David VAN DER BEKEN, Plaidant/Constitué avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1857 –
APPELANTE
****************
S.A. QUADIENT FRANCE SA au capital de 10 813 900,00 €,
immatriculée au RCS de NANTERRE sous le n° 378 778 542
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par : Me Stéphanie TERIITEHAU de la SELEURL MINAULT TERIITEHAU, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – représentée par Me Jérôme DANIEL avocat au barreau de PARIS vestiaire G0035
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Avril 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Thomas LE MONNYER, Président,,
Madame Véronique PITE, Conseiller,
Madame Florence SCHARRE, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,
FAITS ET PROCEDURE
Mme [U] [Z] a été engagée par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 29 octobre 2012 en qualité d’ingénieur Commercial Office (ICO), statut cadre, par la société anonyme Neopost France (devenue la société anonyme Quadient France) qui exerce une activité de location et de location-bail de machines de bureau et de matériel informatique, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie.
Par courrier daté du 20 novembre 2017, la société a notifié à Mme [Z] une insuffisance de résultats et l’a informée de la mise en ‘uvre d’un plan d’actions hebdomadaire sur une période de trois mois.
Convoquée le 2 février 2018 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 14 février suivant, Mme [Z] a été licenciée par lettre datée du 21 février 2018 énonçant une insuffisance professionnelle, avec dispense d’exécution du préavis.
Contestant son licenciement, Mme [Z] a saisi, le 6 août 2018, le conseil de prud’hommes de Nanterre aux fins d’entendre juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire, ce à quoi la société s’est opposée.
Par jugement rendu le 26 mars 2021, notifié le 1er avril 2021, le conseil a statué comme suit :
Déboute Mme [Z] de l’ensemble de ses demandes,
Déboute la société de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
Condamne Mme [Z] aux éventuels dépens.
Le 19 mai 2021, Mme [Z] a relevé appel de cette décision par voie électronique.
Selon ses dernières conclusions notifiées le 1er septembre 2022, Mme [Z] demande à la cour d’infirmer la décision déférée en ce qu’elle l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes et l’a condamnée aux éventuels dépens :
Et, statuant à nouveau, de :
Juger son licenciement comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Condamner la société à lui payer une somme de 33 690 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;
Statuer ce que de droit sur l’application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail ;
Condamner la société à lui payer une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ;
Débouter la société de toutes ses demandes, fins et conclusions, plus amples ou contraires ;
Condamner la société aux entiers dépens de l’instance, y compris les éventuels frais d’exécution forcée de la décision à intervenir.
Aux termes de ses dernières conclusions, remises au greffe le 27 octobre 2022, la société Quadient France demande à la cour de :
La recevoir en ses conclusions d’intimée,
La déclarer bien fondée,
Confirmer le jugement ayant jugé fondé sur une cause réelle et sérieuse le licenciement pour insuffisance professionnelle,
Juger que le licenciement pour insuffisance professionnelle est parfaitement fondé,
En conséquence,
Débouter Mme [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
A titre reconventionnel,
Condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’instance dont distraction au profit de la société d’exercice libéral à responsabilité limitée Minault Teriitehau agissant par Maître Stéphanie Teriitehau, avocat, et ce conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.
Par ordonnance rendue le 1er mars 2023, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 4 avril 2023.
MOTIFS
La lettre de licenciement est ainsi libellée :
« Par courrier remis en main propre contre décharge en date du 2 février 2018, nous vous avons convoquée à un entretien préalable en vue de votre éventuel licenciement.
Au cours de cet entretien, qui s’est déroulé le 14 février 2018, et à l’occasion duquel vous étiez assistée de Madame [L] [P], représentante du personnel, nous vous avons exposé les motifs qui nous ont amenés à envisager de mettre un terme à notre collaboration, et nous avons pris bonne note des observations que vous avez formulées.
Pour mémoire, vous avez été embauchée au sein de notre société le 29 octobre 2012, dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée, et occupez à ce jour les fonctions d’ingénieur Commercial Office.
Dans le cadre des attributions que nous vous avons confiées, il vous appartient notamment d’accomplir les missions suivantes :
Gérer et développer un portefeuille de clients actifs et prospects sur un secteur géographique défini.
Gérer un portefeuille de produits entré et moyen de gamme.
Atteindre ses objectifs qualitatifs et quantitatifs dans le respect des valeurs de l’entreprise.
Assurer un reporting régulier de son activité, au travers d’un CRM.
Ainsi nous vous avons confié une mission essentielle au bon fonctionnement de notre Société, nécessitant de votre part des qualités professionnelles et commerciales avérées, ainsi qu’un travail régulier et rigoureux.
Pour mémoire, nous vous rappelons que dans le cadre de votre contrat de travail et plus particulièrement aux termes de votre note d’objectifs, nous vous avons demandée de réaliser les objectifs ci-dessous pour l’année 2017 :
[U] [Z] ICO
Plan Ventes (produits frais + CS)
Plan Ventes (Solutions Saas)
Plan CA MAA
Objectif annuel 2017
124 891
71 650
7 319
Objectif mensuel 2017
11 354
6 514
665
La vente de solutions Saas constitue le principal relais de croissance de Neopost France, dans le contexte du marché postal déclinant.
Or, dès votre entretien annuel du 15 avril 2016 portant sur votre activité de l’année 2015, nous vous avions alertée sur un manque d’investissement sur l’activité Ventes de Solutions Saas.
Ces manquements se traduisaient par des résultats très insuffisants sur cette ligne d’objectifs : 20 % d’atteinte de vos objectifs de vente de Solutions Saas sur l’année 2015 alors même que la moyenne de la Région était de 110,696% (y compris vous) et celle de la France de 102,9 %.
En dépit des alertes de votre management lors des points individuels mensuels, les résultats sur cette ligne d’objectifs se sont dégradés sur l’exercice 2016 avec 23 % d’atteinte de votre objectif de vente de Solutions Saas alors même que la moyenne de la région était de 52,6 % (y compris vous) et celle de la France de 73,5 %.
Nous vous avons, au cours de l’année 2017, rappelé à plusieurs reprises la dimension stratégique de la Vente de Solutions Saas. Vous avez au cours de l’année été mise en garde à plusieurs reprises par mail, notamment en date du 21 septembre 2017 puis par un courrier recommandé en date du 20 novembre 2017.
Force est de constater que non seulement vos résultats ne se sont pas améliorés, mais vous n’avez par ailleurs appliqué que très partiellement le plan d’action demandé.
1. Votre activité
Votre activité se caractérise par un travail insuffisant dans la constitution du portefeuille d’affaires sur la vente de solutions Saas.
Nous vous rappelons que l’objectif de chaque commercial est de se constituer un portefeuille d’affaires (opportunité / Offre) équivalent à 3 fois l’objectif pour le mois M en cours, 2 fois pour le mois M+1, et 1 fois pour le mois M+3.
Pour suivre cette production, le CRM SalesForce mis à votre disposition doit être renseigné des visites accomplies, du parc concurrent décelé et des offres réalisées.
Nous constatons au travers de cet outil que le volume d’affaires généré par votre travail commercial reste inférieur à cet objectif.
Les séances de phoning ne sont pas réalisées selon la consigne donnée et de manière ciblée.
Nous vous avons demandé, par mail du 21 septembre 2017, puis par courrier du 20 novembre 2017, de réaliser à minima 2 demi-journées de prises de rendez-vous au téléphone par semaine, dont le tiers sur la vente de solutions Saas.
Malgré nos demandes réitérées, vous avez persisté à ne pas cibler vos appels, générant, sur la période du 1er novembre 2017 au 31 janvier 2018, seulement 15 rendez-vous sur 9 raisons sociales.
Vous avez sur la période réalisé en moyenne 5 rendez-vous par mois sur la vente de solutions Saas alors que vous deviez en faire un minimum de 5 par semaine. La moyenne de rendez-vous mensuels réalisés par les autres commerciaux de l’agence est de 8 alors que ces derniers ne bénéficiaient de l’accompagnement mis en place dans le cadre du plan d’action et n’étaient pas soumis au même critère de priorisation.
Du 1er novembre 2017 au 31 janvier 2018, vous n’avez signé, sur la vente de solutions Saas, aucun contrat alors que les autres Ingénieurs Commerciaux Office de l’équipe de l’agence IDF1 (y compris vous) en ont en moyenne signé 6 par mois.
Nous ne constatons ainsi aucune amélioration.
Traitement des campagnes
Afin de vous aider dans le traitement de votre secteur, la direction marketing vous transmet des campagnes qu’il vous appartient de traiter. Mais là encore il apparaît que vous continuez à ne pas agir selon les consignes malgré le plan d’action précis attendu et formalisé le 20 novembre 2017.
Ainsi au sujet de la campagne « optimisation postale », qui vous a été transmise en 20 octobre 2017, nous constatons que vous avez pris contact avec 76 % des cibles. Si ce taux est supérieur au taux de l’agence (54%), votre taux de transformation est le plus faible à 0% (alors que les autres ICO ont un taux de transformation moyen de 12,59%).
Il en est de même sur la campagne « RH » avec un taux de prise de contact de 75 % et un taux de transformation à 0 % sur la période du 1er novembre 2017 au 31 janvier 2018. Pour rappel l’objectif notifié dans le plan d’action du 20 novembre 2017 fixait un traitement de 100 % de la campagne avec un taux de transformation attendu de 7%. (Moyenne agence sur la campagne).
Sur la campagne « Facturation », 20 cibles étaient toujours en situation de rappel au 31 janvier 2018.
Le tableau de suivi demandé dans le point 6 du plan d’action et qui concernait l’analyse des 100 contacts mis en « perdu » n’a par ailleurs jamais été formalisé par vos soins.
La gestion de ces campagnes vous avait pourtant été explicitement demandée dans le courrier du 20 novembre 2017.
Le tableau de suivi hebdomadaire demandé dans le point 6 du plan d’action et qui portait sur l’identification des potentiels Neotouch factures et produits vendus sur les clients générant de 100 à 500 plis par jour n’a par ailleurs jamais été remonté par vos soins.
Votre technique commerciale d’investigation de l’offre Neotouch reste déficiente.
La formalisation de relevés d’applications complets demandée au point 4 du plan d’action n’a pas été réalisée.
De plus, compte tenu de la faiblesse de votre activité, le seul rendez-vous Neotouch réalisé depuis le 1er novembre 2018 n’a permis de constater aucun progrès. Ainsi la proposition qui en a découlé témoignait d’un manque d’analyse du besoin du client « GARAC ». La proposition avait dû faire l’objet de plusieurs allers-retours pour finalement ne pas aboutir.
La persistance de ces insuffisances constatées dans votre activité commerciale se traduit naturellement sur vos résultats.
2. Vos résultats
Du 1er novembre 2017 au 31 janvier 2018, vous n’avez réalisé aucun Chiffre d’affaires sur les ventes « Solutions Saas » pour un objectif fixé à 19 542 euros HT, soit 0 % de l’objectif attendu.
Ce constat est réalisé alors que :
L’agence IDF 1 à laquelle vous appartenez réalise collectivement (y compris vous) 73 % de l’objectif fixé sur cette même période (le résultat France étant de 93,43 %)
Les moyens mis à la disposition de l’ensemble des commerciaux sont identiques et que l’environnement économique est comparable à celui de votre affectation.
Ce constat est d’autant plus inadmissible au regard de la solution Neotouch qui constitue le relais de croissance de Neopost France, dans le contexte du marché postal déclinant.
En dépit des nombreuses alertes de votre management, vous ne semblez pas avoir pris conscience de l’importance de ce nouvel axe de développement de l’entreprise.
Vos résultats annuels cumulés sur cet objectif sont de 12 375 euros HT, soit 17,3 % de l’objectif attendu sur la période du 1er février 2017 au 31 janvier 2018. L’agence IDF 1 à laquelle vous appartenez réalise collectivement (y compris vous) 68% (145 K€ HT) de l’objectif fixé sur cette même période (le résultat France étant de 69,7 %).
***
En dépit des moyens matériels mis à votre disposition (outils de gestion de la relation client, fichiers qualifiés mis à votre disposition, Campagnes marketing, actions sur marchés verticaux (notaires, syndics, aide à domicile), liste des opportunités MFI jusqu’a 24 mois…), ainsi que l’accompagnement de votre Directeur d’Agence, et support et des points de suivi réguliers de votre activité, vous n’avez pas été en mesure d’atteindre de manière régulière les objectifs mensuels fixés.
Nous ne comprenons pas comment vous avez pu arriver à une telle situation, alors même que nous avons toujours été à votre écoute et que nous avons tout mis en ‘uvre pour vous accompagner dans le cadre de votre mission d’ingénieur Commercial Office.
Vos explications données au cours de l’entretien préalable du mercredi 14 février 2018 n’ont pas été de nature à modifier notre appréciation de la situation. Par conséquent nous vous notifions par la présente votre licenciement pour insuffisance professionnelle.
[‘] »
Relevant sa performance sur les ventes des deux autres classes de produits et la vacuité de l’accompagnement proposé pour améliorer la vente du produit néotouch dont la durée fut d’ailleurs écourtée, Mme [Z] considère que l’objectif afférent n’était pas réaliste puisqu’il ne fut jamais atteint par personne depuis 2015, et que personne non plus n’atteint les 3 objectifs assignés à chacun.
Elle estime qu’ayant réalisé 2 objectifs sur 3, sans démériter au regard de ses collègues dont un tiers avait de moindres résultats que les siens sur le produit litigieux, l’insuffisance ne peut être objectivement établie. Elle précise s’être vu soustraire un compte client favorable fin 2017, sans modification de son incidence sur ses résultats.
La société Quadient, qui souligne l’ancienneté des difficultés de son contradicteur par manque de rigueur ou de travail dont elle était avisée, et ses précédents plans d’accompagnements, conteste le caractère irréalisable d’objectifs atteints par d’autres, et dans une meilleure mesure que la sienne pour le surplus, la salariée se plaçant 77ème sur 111 salariés classés. Elle soutient les griefs exposés dans la lettre de licenciement sous l’ensemble de leur déclinaison.
En vertu de l’article L.1232-1 du code du travail, tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par un motif réel et sérieux, et l’article L.1235-1 du même code impartit au juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs fondés sur des faits précis et matériellement vérifiables invoqués par l’employeur et imputables au salarié, de former sa conviction en regard des éléments produits par l’une et l’autre partie. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Cela étant, l’insuffisance de résultat ne peut constituer en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement et il convient de rechercher si elle est imputable au salarié, c’est-à-dire au cas d’objectifs fixés au salarié, s’ils étaient réalistes et dans l’affirmative si le fait de ne pas avoir atteint ces objectifs alors qu’il bénéficiait des moyens nécessaires à leur accomplissement, relève d’une faute ou d’une insuffisance professionnelle, laquelle se caractérise par une mauvaise qualité du travail due à une incompétence professionnelle ou une inadaptation à l’emploi, et qui constitue un motif réel et sérieux de licenciement si elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié.
Il ressort des entretiens annuels d’évaluation de l’intéressée, de 2014 à 2016, correspondant aux années 2013 à 2015, inutilement querellés, que d’emblée, étaient mis en exergue son « activité [commerciale] non efficiente », sa problématique de transformation des actions en résultats, son défaut de maîtrise des techniques de vente et son supérieur relevait qu’en dépit de la mise en place d’un plan en décembre, renouvelé en mars il n’y avait de progression sur ces techniques ou sur la connaissance et la présentation des produits ou sur le niveau d’activité (2014), son manque de productivité, sa dispersion, l’insuffisance de son rendement, son délaissement de certaines gammes de produits, son défaut de travail sur le « new business », sa grande difficulté à intégrer les techniques de vente et les questions d’analyse des besoins « malgré les formations prescrites », la mise en place d’un nouveau plan d’aide de mars à juin (2015), son défaut d’amélioration en dépit des axes précédemment ciblés comme des rappels faits sur l’inefficience de son activité, les séances n’étant « pas préparées comme demandé » et ne conduisant pas à la prise de rendez-vous, son absence d’évolution sur le produit Néotouch, et son supérieur concluait « comme en 2014,
les méthodologies ne sont toujours pas mises en place que ce soit en matière d’organisation d’activité anticipée, de séances téléphoniques ou de ciblage » avec pour conséquence, une « activité peu efficiente car pas assez de rendez-vous », entendait voir consolider les techniques de vente et améliorer sa connaissance des produits (2016).
Il synthétisait son avis en ces termes « [U] n’a pas assez consolidé ses axes de progrès comme elle [s’y] était engagée, ce qui la fragilise pour 2016, année de beaucoup de défis notamment sur l’offre Néotouch Stand Alone et Bundle mais aussi sur l’approche OMS. Attention danger », la salariée faisant aveu d’une réussite partielle, sur les ventes, rendant nécessaire de « prendre le virage sur la démat[érialisation] ».
Comme l’a justement relevé le conseil de prud’hommes, les reproches de son inefficience étaient anciens et pérennes, et Mme [Z] concéda la nécessité de sa progression.
Il est constant que lui étaient donnés comme objectifs chiffrés pour l’année 2017, ceux rappelés à la lettre de licenciement, dont Mme [Z] accusait réception le 6 février 2017, sans les contester, ainsi que l’a justement relevé le conseil de prud’hommes.
Par mail du 21 septembre 2017, l’employeur attirait son attention sur la faiblesse de son activité sur l’axe digital avec peu de rendez-vous qualifiés, lui préconisait de s’organiser notamment au moyen de 2 cessions de « phoning » au moins par semaine, devant conduire à 12 à 15 rendez-vous dont 5 sur la partie digitale, lui donnant des cibles prioritaires (syndic et commerce de gros) et soulignait la nécessité de la transformation du métier face aux nouveaux enjeux.
Par lettre recommandée avec avis de réception du 20 novembre suivant, il lui faisait grief de n’avoir pas accompli les cessions de « phoning » selon les règles indiquées d’un ciblage, d’avoir des résultats insuffisants lors du traitement des campagnes en termes de rendez-vous en raison d’un travail superficiel et inadapté aux besoins du client et aux produits vendus, et de résultats globalement en décalage avec l’objectif attendu, son attention étant encore attirée sur le produit Néotouch « qui constitue le relais de croissance » de l’entreprise.
Ainsi, Mme [Z] était de nouveau avisée de l’importance pour la société Néopost du développement du secteur digital, qu’elle concédait au demeurant dans sa réponse du 22 décembre suivant.
L’employeur mettait en place un nouveau plan de novembre 2017 à janvier 2018 contenant : 12 rendez-vous par semaine, 2 demi-journées de prises de rendez-vous téléphoniques par semaine dont un tiers sur les solutions digitales, le traitement en totalité des campagnes facturation et RH avec un objectif de 7% de prise de rendez-vous, etc. avec mise à disposition de fichiers qualifiés, l’accompagnement de l’ingénieur commercial support, deux journées d’accompagnement du directeur d’agence ou de région sur le terrain.
S’il n’est pas contesté que le 20 novembre 2017, la salariée a été placée en arrêt maladie jusqu’au 3 décembre suivant, et qu’elle prit ensuite des congés du 29 décembre au 8 janvier 2018, il n’en reste pas moins que les moyens qui lui furent alloués dépassent cette période, et ont pris date dès 2014, comme le relève la société Quadient France, étant ajouté que l’intéressée ne dispute pas avoir reçu les formations envisagées dans ses entretiens annuels d’évaluation dont son courrier du 22 décembre 2017 se fait en partie l’écho, les dernières portant notamment sur le produit Néotouch, et ce, dans le contexte de griefs pérennes.
Le moyen de Mme [Z] d’un plan insuffisant et écourté par ses absences dès le mois de novembre 2017 n’est donc pas fondé.
Au reste, s’il est vrai qu’un client se plaint de l’attitude « détestable et humiliante » à l’égard de la salariée de sa directrice venue en rendez-vous avec elle, en octobre 2017, cette circonstance ne ruine pas l’ensemble des moyens qui lui furent accordés depuis des années, dont la mise à disposition de fichiers, le support de formations, et l’accompagnement de son précédent directeur.
De même s’il est vrai qu’aucun entretien annuel d’évaluation ne fut organisé en 2017 pour l’année 2016, il n’en reste pas moins que la nature des griefs reprochés par la société Néopost est inchangée depuis l’origine de la relation conventionnelle, rendant cet argument sans portée.
Ce faisant, il est constant qu’à la clôture de l’exercice au 31 janvier 2017, Mme [Z] avait réalisé 130% de l’objectif « ventes », la totalité de l’objectif « CA MAA » et 17,30% de l’objectif digital fixé à 71.650 euros l’an.
Or, si elle estime essentiellement que cet objectif n’était pas atteignable, elle ne nie pas précisément en cause d’appel n’avoir pas adopté la méthode préconisée par son employeur, d’une meilleure préparation de ses dossiers conduisant à leur ciblage efficient, accompagnée d’une meilleure connaissance des produits permettant des offres concrètes adaptées au besoin des clients potentiels.
Ainsi, elle ne prétend pas avoir traité l’ensemble de la campagne « optimisation postale » ou « experts-comptables » comme demandé en novembre 2017, et surtout, y ayant pourvu aux trois quarts, avoir obtenu aucun rendez-vous dans les suites de son activité, ainsi que le montrent les résultats portés sur le logiciel ad hoc, les siens étant nettement sous la moyenne du service.
Elle n’apporte aucun élément pour justifier la réalisation, que lui dénie l’employeur, de ses rendez-vous, de l’analyse des contacts réputés perdus dans le système, ou de l’établissement d’un tableau hebdomadaire identifiant des « potentiels Néotouch factures et produits vendus sur les clients générant de 100 à 500 plis par jour », que lui impartissait le plan d’actions prioritaires.
Par ailleurs, sur le résultat, si à raison elle fait valoir, en produisant les mails des 19 et 20 décembre 2017 et celui du 14 février 2018, la réaffectation subite d’un de ses comptes client à un autre collègue sur des critères de taille de l’entreprise, elle ne justifie d’aucun travail y afférant en 2016 ni en 2017, ainsi que le soutient l’employeur, en sorte que son résultat aurait pu en être modifié, et elle ne démontre pas plus, en tout état de cause, qu’il lui aurait permis de le majorer pour atteindre 70% de l’objectif comme elle le prétend, son mail du 14 février 2018 convenant à l’inverse qu’« il ne change rien sur la partie Saas ».
Ensuite, étant précisé que l’employeur ne produit aucun document sur les performances de ses collaborateurs qu’il compare avec celles de l’appelante en sorte que le document qu’elle verse aux débats sous cet aspect doit être tenu probant, il s’y voit que 5 des 9 ingénieurs Commercial Office de son agence avaient les mêmes objectifs chiffrés qu’elle sur l’offre digitale, et que 3 y parvinrent en les dépassant, ce qui démontre suffisamment qu’ils étaient atteignables, et ainsi réalistes. D’ailleurs, au niveau national, le tableau montre que bien d’autres parvinrent à dépasser ce même chiffre.
Or, il ne peut être prétendu qu’elle aurait accompli son objectif ayant atteint les deux autres performances sollicitées sur trois, alors que la société Néopost l’avait régulièrement avisée de la nécessité de développer ce produit stratégique, et qu’elle y défaillit plus que ses collègues sur l’année, placés dans la même situation sur son tableau et dont elle ne prétend pas que ce ne fut pas le cas. Il ne peut être tiré plus d’argument au reste, que d’autres sur les 12 commerciaux de l’agence n’y parvinrent pas, quoique, au même niveau de classification, dans une moindre mesure (45,1%, 64,8%), les 3 résultats nuls, parfois sur chaque objectif, et qui était de moitié ou moins sur ce produit, n’étant pas expliqués et ainsi non pertinents.
Le résultat, dont elle eut les moyens, étant réaliste, et étant suffisamment établi qu’elle ne parvint pas à s’organiser et à mettre en ‘uvre les préconisations de l’employeur pour l’atteindre, il s’en déduit son insuffisance professionnelle, et ainsi la cause objective, exacte et sérieuse du licenciement.
Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement entrepris dans toutes ses dispositions ;
Y ajoutant ;
Condamne Mme [U] [Z] à payer à la société anonyme Quadient France 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Autorise la société d’exercice libéral à responsabilité limitée Minault Teriitehau agissant par Maître Stéphanie Teriitehau, avocat à recouvrer directement contre Mme [U] [Z] les frais compris dans les dépens dont elle aurait fait l’avance sans en avoir reçu provision ;
Condamne Mme [U] [Z] aux dépens d’appel.
– Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– Signé par Monsieur Thomas LE MONNYER, Président, et par Madame Isabelle FIORE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,
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