Droit du logiciel : 1 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00243

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Droit du logiciel : 1 juin 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/00243

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

6e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 1ER JUIN 2023

N° RG 21/00243 –

N° Portalis DBV3-V-B7F-UISV

AFFAIRE :

S.A.S.U. IORGEVAL

C/

[L] [N]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 17 Décembre 2020 par le Conseil de Prud’hommes de POISSY

N° Section : C

N° RG : 19/00170

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Martine DUPUIS

Me Nicolas SANFELLE

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE PREMIER JUIN DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant, devant initialement être rendu le 20 avril 2023 et prorogé au 1er juin 2023, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

S.A.S.U. IORGEVAL ayant pour nom commercial L’IDEAL DES GOURMANDS

Lieu dit [Adresse 5]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentants : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 et Me Christophe CASADO BOLIVAR de la SELEURL CASADO BOLIVAR AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Clément ESTIVIE, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Monsieur [L] [N]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Nicolas SANFELLE de la SARL AVOCATS SC2 SARL, Plaidant/constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 445 substitué par Me Ludivine CHOUCOUTOU, avocat au barreau de Versailles

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 mars 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle CHABAL, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, Président,

Madame Valérie DE LARMINAT, Conseiller,

Madame Isabelle CHABAL, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Domitille GOSSELIN,

La société Iorgeval, qui vient aux droits de la société L’idéal des gourmands, dont le siège social est situé [Adresse 1], dans le département des Yvelines, est un établissement qui réunit au sein d’un même site un restaurant, une épicerie, une boulangerie et une pâtisserie. Elle emploie plus de 10 salariés et applique la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants du 30 avril 1997.

La société L’idéal des gourmands a été créée le 25 janvier 2017 et l’établissement a ouvert au mois d’octobre 2017.

M. [L] [N], né le 26 février 1979, a été engagé par la société L’idéal des gourmands selon contrat de travail à durée indéterminée du 25 septembre 2017 à effet du 27 septembre 2017 en qualité d’employé pâtissier, niveau I échelon 2, moyennant une rémunération mensuelle brute de 2 200 euros, pour une durée de travail de 39 heures par semaine.

Par avenant en date du 5 février 2018, M. [N] a été promu au poste de chef pâtissier, statut agent de maîtrise, niveau IV, échelon I. Sa rémunération mensuelle brute a été portée à 2 500 euros pour la même base mensuelle de travail, à effet du 1er décembre 2017.

Par courrier du 19 octobre 2018, M. [N] a sollicité une rupture conventionnelle de son contrat de travail, au motif qu’il souhaitait démarrer de nouveaux projets professionnels.

La rupture a été signée le 8 novembre 2018 et le dernier jour travaillé a été le 31 décembre 2018.

Par courrier du 15 janvier 2019, M. [N] a réclamé à la société L’idéal des gourmands le paiement d’heures supplémentaires non rémunérées.

La société a contesté devoir des heures supplémentaires et après un rendez-vous entre les parties le 5 février 2019 et examen de ses archives, elle a réglé le 10 avril 2019 à M. [N] 48 heures supplémentaires au titre de l’année 2017 et 22 h 30 au titre de l’année 2018.

Estimant qu’il n’avait pas été rempli de ses droits, par requête reçue au greffe le 27 juin 2019, M. [N] a saisi le conseil de prud’hommes de Poissy aux fins de voir condamner la société L’idéal des gourmands à lui payer les sommes suivantes :

– rappel heures supplémentaires : 17 440,56 euros bruts,

– congés payés afférents : 174,44 euros [sic],

– indemnité de repos compensateur : 2 964,45 euros bruts,

– indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 19 623,66 euros,

– indemnité pour non-respect du repos quotidien : 3 000 euros net,

– préjudice économique et financier : 2 000 euros,

– article 700 du code de procédure civile : 3 000 euros,

– entiers dépens,

– exécution provisoire (article 515 du code de procédure civile).

La société L’idéal des gourmands avait, quant à elle, sollicité le débouté de l’ensemble des demandes de M. [N] et sa condamnation à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement contradictoire rendu le 17 décembre 2020, la section commerce du conseil de prud’hommes de Poissy a :

– condamné la SAS L’idéal des gourmands à verser à M. [L] [N] avec intérêts légaux à compter du 1er juillet 2019, date de réception de la convocation pour le bureau de conciliation et d’orientation par la partie défenderesse, les sommes suivantes :

. 16 069,31 euros au titre du rappel du paiement sur les heures supplémentaires,

. 1 606,93 euros au titre des congés payés afférents,

– rappelé que l’exécution est de droit à titre provisoire sur les créances visées à l’article R. 1454-14 alinéa 2 du code du travail,

– fixé la moyenne mensuelle des salaires en application des dispositions de l’article R. 1454-28 du code du travail à la somme de 3 270,61 euros bruts,

– condamné la SAS L’idéal des gourmands à verser à M. [L] [N] avec intérêts légaux à compter du présent jugement les sommes de :

. 19 623,66 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

. 500 euros nets à titre d’indemnité pour non-respect du repos quotidien,

. 500 euros nets au titre du préjudice économique et financier,

– condamné la SAS L’idéal des gourmands à verser à M. [L] [N] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté M. [L] [N] du surplus de ses demandes,

– débouté la SAS L’idéal des gourmands de sa demande ‘reconventionnelle’,

– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision en application de l’article 515 du code de procédure civile,

– condamné la SAS L’idéal des gourmands aux dépens y compris ceux afférents aux actes et procédure d’exécution éventuels.

La société Iorgeval a interjeté appel de la décision par déclaration du 20 janvier 2021.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 8 octobre 2021, la société Iorgeval (anciennement L’idéal des gourmands) demande à la cour de :

– déclarer recevable et bien fondé l’appel interjeté par la société Iorgeval,

– fixer la rémunération mensuelle moyenne de M. [N] à 2 500 euros,

Sur les heures supplémentaires, infirmer le jugement de première instance,

Et statuant de nouveau,

Juger que :

– l’intimé n’est pas en mesure de fournir préalablement à la cour des éléments de nature à étayer sa demande en paiement d’heures supplémentaires,

– pour l’ensemble des raisons ci-dessus mentionnées, sa demande au titre des rappels des salaires sera rejetée,

Sur le travail dissimulé, infirmer le jugement de première instance,

Et statuant de nouveau :

Juger que :

– le délit de travail dissimulé n’est caractérisé ni en son élément intentionnel ni en son élément matériel,

– débouter l’intimé de sa demande au titre du travail dissimulé,

Sur le repos compensateur, infirmer le jugement de première instance,

– juger que le salarié doit justifier avoir déclaré à son employeur ses heures supplémentaires, ceci afin de démontrer qu’il les a mis dans la capacité de le relancer pour qu’il pose ses demandes de récupération,

En conséquence, infirmant et statuant de nouveau :

– débouter M. [N] de sa demande au titre du repos compensateur,

Sur le repos quotidien, infirmer le jugement de première instance,

– juger que le salarié doit justifier de la violation de cette règle de repos quotidien – en présence de plannings réguliers établis par l’employeur- mais aussi justifier son préjudice en tout état de cause,

En conséquence, infirmant et statuant de nouveau :

– débouter l’intimé s’agissant de sa demande au titre de la violation du repos quotidien,

Sur le préjudice économique et financier, infirmer le jugement de première instance,

– juger que le salarié ne démontre absolument pas le préjudice dont il se prétend victime,

En conséquence, infirmant et statuant de nouveau :

– débouter l’intimé s’agissant de sa demande au titre de la violation du préjudice économique et financier,

En conséquence de tout ce qui précède,

Sur les autres demandes

– juger que M. [N] ne justifie aucunement le bien-fondé de sa demande au titre de l’article

700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

– déclarer mal fondé M. [N] en son appel incident et l’en débouter,

– débouter M. [N] du surplus de ses demandes,

– ordonner au bénéfice (de) la société Iorgeval le remboursement des sommes perçues par l’intimé au titre de l’exécution provisoire (36 940,07 euros),

– ordonner le paiement avec intérêt au taux légal à compter du versement, et avec la capitalisation des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil,

– allouer à la société Iorgeval la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner l’intimé aux entiers dépens y compris les frais d’exécution éventuelle par voie d’huissier, dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Paris-Versailles, agissant par Maître Martine Dupuis.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 juillet 2021, M. [L] [N] demande à la cour de :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Poissy le 17 décembre 2020 en ce qu’il a condamné la société Iorgeval à verser à M. [N] les sommes suivantes :

. 19 623,66 euros nets à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

. 2 964,45 euros bruts au titre de l’indemnité de repos compensateur,

– infirmer sur les montants et statuant à nouveau :

– condamner la société Iorgeval à verser à M. [N] les sommes suivantes :

. 17 440,56 euros bruts au titre de rappel du paiement des heures supplémentaires,

. 1 744,40 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

. 3 000 euros nets à titre d’indemnité pour non-respect du repos quotidien,

. 2 000 euros nets au titre du préjudice économique et financier,

. 5 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Iorgeval aux entiers dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

Par ordonnance rendue le 1er février 2023, le magistrat de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 3 mars 2023.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur les heures supplémentaires et les congés payés afférents

M. [N] a saisi le conseil de prud’hommes en faisant valoir que tout au long de sa relation de travail au sein de la société L’idéal des gourmands, il a réalisé un nombre important d’heures supplémentaires et que le paiement de celles-ci n’a pas été totalement régularisé malgré ses demandes.

Le conseil de prud’hommes a fait droit à sa demande, déduction faite des heures supplémentaires payées par l’employeur.

La société Iorgeval conteste la décision. Elle expose que suite à la réclamation d’heures supplémentaires formée par M. [N] début 2019, elle a examiné ses archives et a payé des heures supplémentaires réalisées en 2017 au moment de la période d’ouverture de l’établissement et des fêtes, ainsi qu’en 2018, et transmis des bulletins de paye rectificatifs.

Elle fait valoir que les heures supplémentaires doivent être effectuées à la demande et pour le compte de l’employeur et non à l’insu de ce dernier ; que l’absence de toute réclamation d’heures supplémentaires durant la relation de travail rend suspecte la réclamation formulée ; que le décompte produit par le salarié doit être précis, ce que n’est pas la seule production des pages d’un agenda rempli par ce dernier, qu’il doit être cohérent et qu’il ne peut être rédigé a posteriori pour les besoins de la cause ; que les attestations produites doivent également être précises.

Elle expose qu’en l’espèce, M. [N] ne démontre pas que les heures ont été sollicitées par son employeur ni qu’elles ont été réalisées et que le caractère aléatoire et imprécis de sa demande traduit une approche forfaitaire qui ne résiste pas à l’examen.

M. [N] répond que la société avait pleinement conscience des nombreuses heures supplémentaires réalisées par ses salariés, en raison de la situation de sous-effectif, et qu’il n’est pas le premier salarié à avoir des difficultés de paiement des heures supplémentaires avec la société Iorgeval.

L’article L. 3121-28 du code du travail dispose que ‘toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.’

L’article L. 3121-29 du même code dispose que ‘les heures supplémentaires se décomptent par semaine.’

Le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies, soit avec l’accord au moins implicite de l’employeur, soit s’il est établi que leur réalisation a été rendue nécessaire par les tâches qui ont été confiées au salarié.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences légales ainsi rappelées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

A titre préalable, il ressort des explications des parties et des pièces versées au débat que la société L’idéal des gourmands avait mis en place, au tout début de son activité, un logiciel Snapshift autodéclaratif des horaires de travail, qui a été utilisé jusqu’en février 2018.

M. [N] prétend que ce logiciel, qui semble répondre aux impératifs du code du travail et de la jurisprudence en matière de contrôle du temps de travail des salariés, permet à l’employeur de contester et commenter les heures enregistrées par les salariés et souligne que la société n’a jamais contesté les horaires qu’il a déclarés et a même accepté de régulariser une partie des heures supplémentaires qui étaient mentionnées dans ce logiciel. Il soutient que la société a délibérément abandonné ce logiciel au moment où un collègue a saisi le conseil de prud’hommes d’une demande de paiement d’heures supplémentaires fondée sur ces données, afin de ne plus permettre aux salariés de discuter et de faire la preuve des horaires réellement accomplis.

La société Iorgeval répond que le logiciel Snapshift a été abandonné car il ne donnait pas satisfaction puisque les horaires étaient souvent portés par un collègue à la place d’un autre, parfois en décalé, ce qui aboutissait à des informations inexactes, qu’il ne prenait en compte que la coupure méridienne et non les pauses prises dans la journée, que les salariés ne reportaient pas nécessairement leurs retards ni la modification de leurs plannings. Elle expose avoir procédé, à l’invitation de l’inspection du travail, à l’affichage de plannings sous forme de tableaux à compter d’août 2018.

Au soutien de sa demande de rappel de salaire, M. [N] produit, outre un tableau récapitulatif des heures supplémentaires qu’il a lui-même établi (pièce 8) :

* s’agissant de la période d’octobre 2017 à février 2018 : des extractions du logiciel Snapshift pour octobre, novembre et décembre 2017 et février 2018 (pièce 9-1), aucune réclamation n’étant faite au titre du mois de janvier 2018, qui montrent que si M. [N] travaillait entre 7 h 30 et 8 heures par jour début octobre 2017, ses journées de travail ont, à de rares exceptions près, dépassé 10 heures à compter du 24 octobre 2017 et jusqu’au 16 février 2018, avec des horaires variables, alors qu’à compter du 16 février 2018 les horaires de travail deviennent constants (6 h – 14h18 avec 30 minutes de pause, soit 7 h 48 par jour).

* s’agissant de la période de mars à décembre 2018, après que la société a cessé d’utiliser le logiciel Snapshift :

– le carnet sur lequel il a noté ses horaires de travail, indiquant qu’il avait pris conscience de la volonté de la société de ne plus payer les heures supplémentaires accomplies (pièce 9-2),

– les plannings affichés dans l’entreprise du 6 août 2018 au 16 décembre 2018 (pièce 9-3), non émargés par les salariés, en précisant qu’ils étaient établis a priori et qu’ils n’attestent pas de l’absence de réalisation d’heures supplémentaires,

– des échanges de sms avec sa compagne (pièce 14), qui ne sont toutefois pas suffisamment probants pour établir ses horaires de travail.

En effet, le fait d’envoyer un message disant ‘je rentre’ ne signifiait pas nécessairement qu’il s’agissait de l’heure de sortie du travail de M. [N], ce que démontre la comparaison des horaires des messages avec les horaires inscrits sur le logiciel Snapshift, sur lequel M. [N] se fonde pour la période antérieure.

Ainsi, le 16 février 2018, il indique qu’il rentre à 19 heures 16 alors que le logiciel mentionne que sa journée, qui comportait déjà 11 h 30 de travail pour avoir débuté à 6 heures, s’est achevée à 14h18. De même le 17 février, il indique ‘je rentre’ à 15 h 49 alors que sa journée s’est achevée à 14h18 selon le logiciel,

– des courriels qu’il envoyait pour passer des commandes professionnelles (pièce 21), qui corroborent certains des horaires inscrits sur Snapshift ou sur son carnet,

– des attestations d’anciens collègues témoignant du non-respect des horaires légaux de travail dans la société, de l’absence de paiement des heures supplémentaires effectuées notamment par M. [N], lequel pouvait avoir de très longues journées de travail (pièces 15 à 19),

– une attestation de sa conjointe, Mme [D] [Z], qui relate que ‘depuis le début, [L] [N] a fait des heures supplémentaires, qu’ils soient 4 pâtissiers durant les fêtes de fin d’année 2017 que 2 pâtissiers [sic] de début 2018 jusque vers septembre-octobre 2018. Pendant une longue période, je le voyais partir vers 5 h 30 du matin et je ne le voyais revenir très rarement avant 17 h – 18 h voire parfois au delà sans parler des jours de congés raccourcis, ou des appels professionnels durant ses jours de repos.’ Elle relate qu’il s’est retrouvé seul en juillet 2018 pendant 3 semaines car son collègue était en congés, alors qu’elle devait accoucher. En tant que médecin, elle témoigne de l’épuisement psychique et physique de son compagnon (pièce 20),

– un jugement rendu le 5 juillet 2018 par le conseil de prud’hommes de Poissy condamnant la société L’Idéal des gourmands à payer la somme revendiquée de 2 185,12 euros à titre de rappel d’heures supplémentaires, outre les congés payés afférents et 500 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect des durées maximales quotidiennes et hebdomadaires de travail à M. [I] [M], pâtissier embauché le 3 octobre 2017, dont la prise d’acte de rupture du contrat de travail a été considérée comme une démission (pièce 25).

Le salarié fournit ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

La société Iorgeval réplique en premier lieu que M. [N] ne démontre pas la volonté de l’employeur de le voir réaliser des heures supplémentaires ni en quoi son poste de travail le conduirait à effectuer des heures supplémentaires au-delà de la durée contractuelle de 39 heures.

Or la société reconnaît elle-même que l’affluence de l’établissement ouvert en octobre 2017 a été beaucoup plus importante qu’escompté, notamment à l’approche des fêtes de fin d’année, ce que confirme le courriel de démission envoyé le 11 décembre 2017 par M. [C] [J], époux de la gérante de la société, qui a rejoint cette dernière dans l’entreprise, qui écrit que ‘ce qui devait gentiment être une ‘épicerie fine avec petite restauration’ est déjà devenu un concept avec des chiffres de supermarché’ (pièce 17 de la société).

Par courrier du 25 janvier 2019, la société a reconnu quelques dépassements de la durée légale de travail pour M. [N] mais a fait valoir que le salarié avait aussitôt bénéficié de jours de repos compensateurs (pièce 11 du salarié).

Par courrier du 10 avril 2019, elle a reconnu, après examen de ses archives, la réalisation d’heures supplémentaires par M. [N] au moment de la période d’ouverture et pendant les fêtes en 2017 ainsi qu’en 2018 (pièce 13 du salarié).

Il se déduit de ces éléments que les heures supplémentaires ont été effectuées pour les besoins de l’entreprise et, soit demandées par cette dernière en période d’affluence, soit à tout le moins réalisées en pleine connaissance de cause de l’employeur et avec son accord implicite.

La société Iorgeval soutient en second lieu que les horaires de travail revendiqués par M. [N] ne sont pas fiables.

Elle fait valoir que les horaires inscrits dans le logiciel Snapshift ne sont pas probants. S’il ressort des échanges de sms produits en pièce 23 par M. [N] que ce dernier a parfois inscrit dans Snapshift les horaires d’un collègue, rien ne démontre que les horaires inscrits étaient erronés et les demandes ont été faites à M. [N] alors qu’il avait la responsabilité des plannings en sa qualité de chef pâtissier. Au surplus, les collègues ont mentionné leurs pauses et le logiciel enregistrait 30 minutes de pause journalière, tout comme le font les plannings produits par l’employeur en pièce 14.

En tout état de cause, alors qu’elle doit assurer le contrôle des heures de travail effectuées, la société Iorgeval ne produit aucune autre pièce relative au temps de travail du salarié d’octobre 2017 à février 2018 et c’est manifestement sur la base des données de Snapshift qu’elle a finalement reconnu la réalisation d’heures supplémentaires par M. [N].

M. [N] ne réclame pas d’heures supplémentaires pour le mois de janvier 2018.

Pour la période de mars à décembre 2018, la société soutient que le récapitulatif des horaires dressé à la main par M. [N] n’est pas sérieux car présenté sous le même format, avec la même écriture, la même épaisseur de trait de stylo et la même couleur, ce qui laisse penser que le document a été établi a posteriori pour les besoins de la cause. Elle estime en outre qu’il est peu fiable dès lors qu’il est contredit par les plannings signés par le salarié.

La cour ne dispose que d’une photocopie du carnet dans lequel M. [N] a noté ses horaires de travail (pièce 9-2). Il est constaté que l’écriture est similaire mais comporte parfois des modifications et ratures. Il s’agit manifestement d’un récapitulatif et non des horaires notés directement sur le carnet au fur et à mesure des jours travaillés puisqu’aucun horaire journalier n’est noté pour les mois de septembre et octobre 2018, pour lesquels seule est portée la mention de la réalisation d’horaires normaux. Ceci n’ôte pas pour autant tout caractère probant au décompte.

Pour la période courant du 5 mars 2018 au 8 juillet 2018, la société verse au débat des plannings signés par M. [N] et M. [O] [K], autre pâtissier (pièce 14).

Ces plannings, bien que signés par les salariés, ne correspondent manifestement pas à la réalité puisque les heures de travail sont constamment 6 h – 14 h 18 avec 30 minutes de pause, alors qu’il existait un sous-effectif puisqu’il n’y avait plus que deux pâtissiers au lieu de quatre. Les horaires constants et exempts d’heures supplémentaires tranchent nettement avec le rythme de travail antérieur de M. [N].

Aucun planning de travail n’est produit pour le mois de juillet 2018 alors que M. [N] affirme sans être contredit qu’il était seul, son collègue étant en congés.

La société ne produit aucun élément concernant les horaires de travail à compter du mois d’août 2018. M. [N] produit en pièce 9-3 les plannings de la pâtisserie affichés dans l’entreprise pour la période du 6 août 2018 au 16 décembre 2018 qui montrent que le service comportait 3 salariés du 6 août au 2 septembre puis 4 salariés du 17 septembre au 16 décembre. Les horaires de M. [N] y sont constants du 20 août au 2 septembre (6 h – 13 h) et variables par la suite. Les plannings ne sont pas signés par les salariés.

La société soutient que les attestations produites par le salarié sont imprécises et excipe des bonnes relations entretenues avec M. [N] et sa compagne pour décrédibiliser les dires de cette dernière. Or, le fait de féliciter le couple pour la naissance de son enfant, d’offrir une boîte de chocolats à cette occasion ou de se montrer compréhensif lorsque M. [N] a été bloqué sur la route pour arriver au travail ne saurait démentir l’existence d’heures supplémentaires.

Le fait que certains salariés qui attestent ont été licenciés, ont démissionné ou ont signé une rupture conventionnelle ne les empêche pas de témoigner de manière probante que M. [N] effectuait des heures supplémentaires de manière générale, quand bien même ils ne sont pas en mesure de préciser les horaires de ce dernier.

Enfin, les attestations produites par la société (pièces 11,15, 16 et 18), de salariés qui relatent avoir travaillé dans une bonne ambiance et avoir été payés en temps et en heure, n’évoquent pas les horaires de travail de M. [N], avec lequel ils ne travaillaient pas directement, s’agissant de salariés du restaurant, de vendeurs ou d’un chef épicerie devenu directeur de magasin.

La société indique enfin que la demande de M. [N] a été évolutive et qu’il ne peut lui être alloué une somme forfaitaire, le jugement devant mentionner le nombre d’heures supplémentaires retenu, le mode de calcul et le raisonnement.

Or la Cour de cassation retient que le juge évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, le montant des heures supplémentaires et fixe les créances salariales s’y rapportant.

Au regard des pièces produites par les parties, il y a lieu de retenir le principe d’heures supplémentaires.

Les heures supplémentaires effectuées d’octobre à décembre 2017 (307,75 heures) et en 2018 (562,49 heures) seront indemnisées, par confirmation de la décision du conseil de prud’hommes qui a déduit de la demande les heures supplémentaires payées par la société, par la somme de 16 069,31 euros, outre celle de 1 606,93 euros au titre des congés payés afférents.

Sur le repos compensateur

M. [N] fait valoir qu’il a largement dépassé le contingent annuel d’heures supplémentaires prévu par la convention collective au titre de l’année 2018 et réclame paiement d’une indemnité pour les repos compensateurs dont il n’a pu bénéficier.

La société Iorgeval répond que le salarié ne justifie pas avoir déclaré ses heures supplémentaires à ses employeurs de sorte qu’il a mis ceux-ci dans l’incapacité de le relancer pour qu’il pose ses demandes de récupération.

L’article L. 3121-30 du code du travail dispose que ‘des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d’un contingent annuel. Les heures effectuées au-delà de ce contingent annuel ouvrent droit à une contrepartie obligatoire sous forme de repos.’

L’article L. 3121-33 du code du travail prévoit notamment que :

‘Une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou accord de branche :

1° Prévoit le ou les taux de majoration des heures supplémentaires accomplies au-delà de la durée légale ou de la durée considérée comme équivalente. Ce taux ne peut être inférieur à 10 % ;

2° Définit le contingent annuel prévu à l’article L. 3121-30 ;

3° Fixe l’ensemble des conditions d’accomplissement d’heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que la durée, les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire sous forme de repos prévue au même article L. 3121-30. Cette contrepartie obligatoire ne peut être inférieure à 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel mentionné audit article L. 3121-30 pour les entreprises de vingt salariés au plus, et à 100 % de ces mêmes heures pour les entreprises de plus de vingt salariés.’

La convention collective des hôtels, cafés et restaurants prévoit un contingent d’heures supplémentaires maximal de 360 heures par an pour les établissements permanents.

L’article D. 3121-23 alinéa 1er du code du travail prévoit que ‘Le salarié dont le contrat de travail prend fin avant qu’il ait pu bénéficier de la contrepartie obligatoire en repos à laquelle il a droit ou avant qu’il ait acquis des droits suffisants pour pouvoir prendre ce repos reçoit une indemnité en espèces dont le montant correspond à ses droits acquis.’

Le salarié qui n’a pas été mis en mesure, du fait de son employeur, de formuler une demande de repos a droit à l’indemnisation du préjudice subi.

En l’espèce, M. [N] justifie avoir effectué 202,49 heures supplémentaires au-delà du contingent annuel de 360 heures qui lui était applicable au titre de l’année 2018.

Sur la base d’un salaire mensuel de 2 220,87 euros pour 151,67 heures de travail, soit un salaire horaire de 14,64 euros, une indemnité de 2 964,45 euros est due.

La décision de première instance a mentionné en page 5 de sa motivation qu’il y avait lieu d’allouer à M. [N] une indemnité d’un tel montant. La condamnation n’a cependant pas été reprise dans le dispositif de la décision.

La cour, statuant à nouveau, condamnera la société Iorgeval à payer cette somme à M. [N].

Sur le travail dissimulé

La société Iorgeval conteste la condamnation qui a été prononcée par le conseil de prud’hommes en faisant valoir que la preuve de son intention de dissimuler l’emploi de M. [N] n’est pas rapportée, invoquant le contexte particulier d’un lancement d’activité, le fait que M. [N] ne démontre pas en quoi le service pâtisserie serait en sous-effectif, la satisfaction des clients témoignant du contraire.

M. [N] soutient que faire sciemment travailler un salarié au-delà de 35 heures sans le rémunérer de l’intégralité de ses heures constitue un travail dissimulé et qu’une indemnité est due même lorsque la rupture de la relation de travail est intervenue d’un commun accord. Il expose que la société ne pouvait ignorer qu’il effectuait des dépassements d’horaires puisque le service pâtisserie était en sous-effectif et qu’il devait réaliser, avec un autre pâtissier, un nombre de desserts élevés pour toutes les activités de la société, notamment la boulangerie et le restaurant ; que la relative satisfaction des clients montre qu’il réalisait des heures supplémentaires pour que le rayon pâtisserie soit opérationnel ; que des clients ont toutefois relevé un manque de personnel et des changements réguliers de personnel.

Il soutient que le caractère frauduleux et volontaire de la dissimulation des heures supplémentaires est caractérisé par l’abandon en février 2018 de l’outil Snapshift.

L’article L. 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L. 8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L. 8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié.

Aux termes de l’article L. 8223-1 du code du travail, le salarié auquel l’employeur a recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L’article L. 8221-5, 2° du code du travail dispose notamment qu’est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle.

En l’espèce, la société Iorgeval reconnaît que l’activité à l’ouverture et durant les fêtes de fin d’année en 2017 a engendré des heures supplémentaires, qu’elle n’a pas immédiatement rémunérées.

Une partie des heures supplémentaires a été compensée par du repos en janvier 2018 et une autre partie a été payée à la suite de la réclamation formée par M. [N] le 15 janvier 2019, après la rupture conventionnelle de son contrat de travail et sans qu’il ressorte des pièces versées au débat qu’il en avait réclamé le paiement durant la relation contractuelle.

Il n’est pas établi que la société Iorgeval a de manière intentionnelle dissimulé une partie des heures de travail accomplies par M. [N].

Il convient d’infirmer la décision de première instance en ce qu’elle a alloué à M. [N] la somme de 19 623,66 euros à titre d’indemnité pour travail dissimulé, correspondant à 6 mois de salaire et, statuant de nouveau, de débouter M. [N] de cette demande.

Sur le repos quotidien

M. [N] fait valoir que pendant sa relation de travail avec la société Iorgeval, il a souvent été privé de son repos quotidien, travaillant régulièrement plus de 12 heures par jour sans bénéficier des 11 heures de repos obligatoires entre chaque jour de travail et plus de 6 jours d’affilée, ce qui l’a conduit à un épuisement.

La société Iorgeval répond qu’elle était respectueuse de la durée minimale de repos et que M. [N] n’a jamais formulé la moindre doléance à ce sujet ; qu’au surplus, il ne démontre pas l’existence d’un préjudice.

Il ressort des articles L. 3131-1 et L. 3132-2 que le repos quotidien doit être en principe d’une durée minimale de 11 heures consécutives et d’une durée hebdomadaire de 24 heures consécutives.

L’article L. 3132-1 du code du travail dispose que « il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine. »

Il ressort des articles L. 3132-5 et R. 3132-1 du code du travail que dans le domaine de la pâtisserie, le repos hebdomadaire des salariés peut être suspendu deux fois au plus par mois, sans que le nombre de ces suspensions dans l’année soit supérieur à six et que les heures de travail accomplies le jour du repos hebdomadaire sont considérées comme des heures supplémentaires.

Il ressort des pièces versées au débat que les journées de travail de M. [N] ont régulièrement dépassé 12 heures et qu’il a ainsi été privé du repos quotidien de 11 heures ; qu’en outre, il a plusieurs fois travaillé plus de 6 jours d’affilée.

Ainsi il a, à tout le moins travaillé, selon le logiciel Snapshift :

– 9 jours d’affilée du lundi 23 au mardi 31 décembre 2017 avec des journées de travail oscillant entre 8 heures et 16 heures 20,

– 8 jours d’affilée du lundi 4 au lundi 11 décembre 2017,

– 12 jours d’affilée du lundi 1er au lundi 12 février 2018.

Il ressort de son carnet qu’il a travaillé 12 jours d’affilée du 12 au 23 mai 2018 et la société Iorgeval ne produit pas, pour le contredire, les plannings signés par le salarié pour la période courant du 1er au 27 mai 2018.

Il ressort encore de son carnet qu’il a travaillé 17 jours d’affilée du 3 au 19 juillet 2018, alors que la société Iorgeval ne produit pas de plannings signés par le salarié au-delà du 8 juillet et que selon le planning qu’elle produit, M. [N] avait déjà travaillé 6 jours d’affilée du 3 au 8 juillet, comme il l’indique.

M. [N] établissant ainsi l’absence de respect de son repos quotidien et justifiant par l’attestation de sa compagne qu’il était épuisé, la décision de première instance sera confirmée en ce qu’elle a alloué une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour indemnité de non-respect du repos quotidien.

Sur le préjudice économique et financier

M. [N] fait valoir que le préjudice économique et financier lié au non-paiement de ses heures supplémentaire est considérable, qu’il n’a pas réclamé paiement de ces heures pendant l’exécution de son contrat de travail car il craignait pour son poste, d’autant qu’il s’apprêtait à devenir père, mais que ce motif l’a contraint à solliciter une rupture conventionnelle en novembre 2018 et qu’il a ensuite réclamé le paiement des heures dues ; qu’il est créancier de la société Iorgeval qui refuse de se soumettre à ses obligations légales. Il expose avoir été profondément éprouvé par sa relation de travail au sein de cette société et, alors qu’il exerçait le métier de pâtissier depuis 23 ans, qu’il a choisi d’effectuer une reconversion professionnelle.

La société Iorgeval répond que M. [N] ne motive pas sa demande, qu’il n’a pas réclamé le paiement d’heures supplémentaires pendant la relation contractuelle mais seulement après sa rupture et qu’il a quitté la société pour se consacrer à ses proches et non en raison de l’absence de paiement de ses heures supplémentaires.

M. [N] ne fonde sa demande sur aucun texte.

Le retard dans le paiement de ses heures supplémentaires, qu’il a réclamées uniquement après la rupture de son contrat de travail, est compensé par les intérêts moratoires et M. [N] ne justifie pas subir un préjudice financier supplémentaire.

S’il était épuisé au terme de sa collaboration avec la société Iorgeval, celle-ci a duré 15 mois sur 23 ans de carrière de pâtissier et il a fondé sa demande de rupture conventionnelle de son contrat de travail sur son souhait de démarrer de nouveaux projets professionnels. Il a obtenu l’examen d’aptitude professionnelle de conducteur VTC le 20 septembre 2019 (pièce 27 du salarié).

Dès lors que n’est pas démontrée l’existence d’un préjudice distinct de celui déjà compensé par les indemnités allouées au titre des heures supplémentaires, des congés payés afférents, du repos compensateur et du non-respect du repos quotidien, M. [N] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts, par infirmation de la décision entreprise.

Sur la demande de remboursement des sommes perçues au titre de l’exécution provisoire

La demande de remboursement des sommes versées par l’employeur au titre de l’exécution provisoire du jugement, avec intérêts au taux légal et capitalisation, est sans objet, dès lors que l’infirmation de cette décision vaut titre exécutoire pour la restitution des sommes versées.

Sur les demandes accessoires

La décision de première instance sera confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

La société Iorgeval sera condamnée aux dépens d’appel et à payer la somme de 1 500 euros à M. [N] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, sa demande formée du même chef étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 17 décembre 2020 par le conseil de prud’hommes de Poissy sauf en ce qu’il a condamné la société L’Idéal des gourmands à payer à M. [L] [N] une somme de 500 euros au titre du préjudice économique et financier et une somme de 19 623,66 euros à titre d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

Statuant de nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne la société Iorgeval à payer à M. [L] [N] la somme de 2 964,45 euros à titre d’indemnité de repos compensateur pour l’année 2018,

Déboute M. [L] [N] de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice économique et financier et de sa demande d’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

Condamne la société Iorgeval aux dépens de l’instance d’appel,

Condamne la société Iorgeval à payer à M. [L] [N] la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la société Iorgeval de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, président, et par Mme Domitille Gosselin, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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