7ème Ch Prud’homale
ARRÊT N°238/2023
N° RG 20/02154 – N° Portalis DBVL-V-B7E-QS6N
M. [Z] [M]
C/
S.N.C. ACTUAL 945
Copie exécutoire délivrée
le :01/06/2023
à :Maître VIGNERON
Mme [C] (DS)
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 01 JUIN 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Hervé BALLEREAU, Président de chambre,
Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,
Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,
GREFFIER :
Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 06 Mars 2023
En présence de Monsieur [W] [O], médiateur judiciaire
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 01 Juin 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANT :
Monsieur [Z] [M]
né le 02 Juin 1988 à [Localité 5] (GEORGIE)
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Madame [C], déléguée syndicale
INTIMÉE :
S.N.C. ACTUAL 945
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean-Louis VIGNERON de la SELARL ASKE 3, Postulant, avocat au barreau de NANTES
Représentée par Me DJEBARI, Plaidant, avocat au barreau de LYON
EXPOSÉ DU LITIGE
M. [Z] [M] a été engagé en qualité d’agent de quai par la SNC Actual 945, entreprise de travail temporaire, selon plusieurs contrats de mission du 17 mars 2017 au 07 juillet 2017. Durant cette période, M. [M] était mis à la disposition de la Société Steff transport Châteaubourg, spécialisée en logistique du froid.
Le 04 juillet 2017, le salarié était victime d’un accident de travail et placé en arrêt du 05 juillet au 06 août 2017, prolongé au 17 août 2017.
Parallèlement, le 06 juillet 2017, la société Actual 945 a déclaré l’accident la CPAM et transmis le dossier de prévoyance à la société AG2R Réunica le 17 juillet suivant.
En août 2017, M. [M] réclamait à la SNC Actual 645 les indemnités complémentaires suite à son accident. En réponse, la société l’informait avoir fait le nécessaire auprès de l’organisme de prévoyance.
***
Sollicitant le paiement de diverses sommes et indemnités, M. [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Rennes par requête en date du 25 septembre 2017 afin de voir :
– Constater que la relation de travail entre la SNC Actual Intérim et M. [Z] [M] est sous forme d’un contrat à durée indéterminée
– Dire que la rupture intervenue au mardi 4 juillet 2017 est nulle
– Condamner la SNC Actual Intérim à verser à M. [Z] [M] :
– 18 060 euros à titre d’indemnité pour licenciement nul
– 1 505,05 euros à titre d’indemnité égale à l’indemnité compensatrice de préavis
– 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– Condamner la SNC Actual Intérim aux dépens et notamment aux 600 euros au titre des frais d’expertise.
La SNC Actual 945 a demandé au conseil de prud’hommes de :
– Débouter M. [M] de ses demandes et le condamner au paiement de la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– A titre subsidiaire, ramener à de plus juste proportions le montant des indemnités réclamées par M. [M].
Par jugement en date du 20 février 2020, le conseil de prud’hommes de Rennes a :
– Débouté M. [Z] [M] de sa demande de constater que son contrat de travail est à durée indéterminée.
– Débouté M. [Z] [M] de sa demande de nullité de la rupture de ce contrat.
– Débouté M. [Z] [M] du surplus de ses demandes.
– Débouté la SNC Actual 945 de l’intégralité de ses demandes.
– Dit que chaque partie supportera ses propres dépens.
***
M. [M] a interjeté appel de la décision précitée par déclaration au greffe en date du 09 mars 2020.
En l’état de ses dernières conclusions transmises par son conseil par courrier recommandé avec accusé de réception le 05 juin 2020, M. [M] demande à la cour d’appel de réformer le jugement entrepris, de requalifier la relation de travail en contrat à durée indéterminée, de dire que la rupture intervenue au 04 juillet 2017 est nulle et de condamner la SNC Actual 945 à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
M. [M] fait valoir en substance que :
– La signature portée au contrat de mission temporaire pour la période du 03 au 07 juillet 2017 n’est pas la sienne ; Une experte graphologue inscrite sur les listes de la cour d’appel de Rennes a conclu que la signature du contrat de mission temporaire pour la période du 03 au 07 juillet 2017 n’était pas la sienne ; Il n’a reçu aucun contrat de travail donc il n’a pas pu signer les contrats produits par la SNC Actual 945 ; En l’absence d’écrit, la relation de travail doit être requalifiée en contrat à durée indéterminée ;
– Il bénéficiait d’un arrêt pour accident du travail renouvelé jusqu’au 17 août 2017 ; Or, la SNC Actual 945 a mis fin au contrat en lui délivrant un bulletin de salaire pour la période du 03 au 04 juillet 2017 et une attestation Pôle Emploi mentionnant le dernier jour travaillé au 30 juin 2017 ;
– Il a été licencié parce qu’il était en accident de travail ; La rupture du contrat de travail est donc nulle car discriminatoire et il est recevable à solliciter une indemnité correspondant à 12 mois de salaire.
En l’état de ses dernières conclusions transmises par son conseil sur le RPVA le 03 septembre 2020, la SNC Actual 945 demande à la cour d’appel de :
– Confirmer le jugement rendu entre les parties par le conseil de prud’hommes de Rennes en date du 20 février 2020
Y ajoutant
– Condamner Monsieur [Z] [M] au paiement de la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile
– Condamner le même aux entiers dépens d’appel.
La SNC Actual 945 fait valoir en substance que :
– L’étude comparative de signature ne lie pas la cour qui reste libre de ne pas en tenir compte ; Les risques d’erreurs existent dans toute expertise ; Le rapport d’expertise n’exclut pas le fait que M. [M] ait pu modifier volontairement sa signature dans le but de la désavouer par la suite ;
– M. [M] a reçu les contrats de mission par voie postale, ces derniers étaient également mis à sa disposition sur la plateforme Numen ; M. [M] n’a jamais sollicité la communication des contrats ;
– La rupture de la relation de travail n’est pas intervenue le 04 juillet 2017 mais le 07 juillet 2017, soit au terme du contrat de mission ; Le fait que le bulletin de salaire vise comme période d’emploi la période du 03 au 04 juillet 2017 résulte du logiciel ayant automatiquement arrêté le contrat au dernier jour effectivement travaillé ; Il n’y a pas de volonté de mettre un terme au contrat de mission prématurément ;
Il est produit en appel un nouveau bulletin de salaire et une nouvelle attestation Pôle Emploi mentionnant le 07 juillet 2017 comme date de fin de contrat.
***
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du conseiller de la mise en état le 31 janvier 2023 avec fixation de la présente affaire à l’audience du 06 mars 2023.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs dernières conclusions régulièrement signifiées.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1- Sur la requalification du contrat de travail
M. [M] demande à la cour de « Constater que la relation de travail entre la SNC Actual Intérim et M. [Z] [M] est sous forme d’un contrat de travail à durée indéterminée. » sans formuler la moindre prétention associée à cette demande de constat, alors qu’aux termes de l’article L. 1251-41, alinéa 2, du code du travail, si le conseil de prud’hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité à la charge de l’entreprise utilisatrice, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.
Or, au cas d’espèce, l’entreprise utilisatrice, qui peut donc seule avoir à répondre des conséquences d’une éventuelle requalification d’une série de contrats de mission en contrat de travail à durée indéterminée, n’a pas été appelée à la cause.
Il convient dès lors, par voie de confirmation du jugement entrepris, de débouter M. [M] de sa demande formée à l’encontre de la SNC Actual 945.
2- Sur la rupture du contrat de travail
Le contrat de mission peut être suspendu dans les mêmes conditions qu’un contrat à durée indéterminée.
En vertu de l’article L. 1251-29 du code du travail, la suspension du contrat de mission du salarié ne fait pas obstacle à l’échéance de ce contrat.
Au soutien de sa demande de nullité de la rupture du contrat de travail, M. [M] fait valoir qu’il a fait l’objet d’une discrimination eu égard à son état de santé ; que son arrêt pour accident du travail a été renouvelé jusqu’au 17 août 2017, de sorte que la SNC Actual 945 ne pouvait mettre un terme au contrat de travail en lui délivrant un bulletin de salaire pour la période du 03 au 04 juillet 2017 et une attestation Pôle Emploi mentionnant un dernier jour travaillé au 30 juin 2017.
M. [M] soutient également que la SNC Actual 945 a mis fin à son contrat de travail parce qu’il était en arrêt suite à un accident du travail.
En réplique, la SNC Actual 945 réfute toute intention de rompre le contrat de mission prématurément et verse aux débats l’attestation de Mme [G] [X], responsable applications métiers, affirmant que « le logiciel Anaël TT clôture par défaut le contrat de mission au dernier jour sur lequel ont été saisies des heures de travail. M. [M] ayant uniquement travaillé les 03 et 04 juillet 2017, le contrat de mission n°112805 a donc été fermé automatiquement par le logiciel le 04 juillet 2017 ».
La société Actual 945 produit également un nouveau bulletin de salaire et une nouvelle attestation Pôle Emploi mentionnant la date du 07 juillet 2017 comme date de fin de contrat, telle que prévu au contrat de mission.
En application des articles L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail, lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
En l’espèce, M. [M] fonde sa demande de nullité de la rupture sur le fait unique des dates mentionnées sur le bulletin de salaire de juillet 2017 et sur l’attestation Pôle Emploi.
Encore faudrait-il que soit établie une rupture anticipée du contrat de mission, ce qui ne résulte d’aucun élément objectif puisque la SNC Actual 945 a régulièrement déclaré à la CPAM et à l’organisme de prévoyance AG2R Réunica Prévoyance l’accident du travail de M. [M] et que la seule mention d’un dernier jour travaillé au 7 juillet 2017, erreur purement informatique reconnue et corrigée par la SNC Actual 945, ne peut suffire à caractériser une rupture anticipée du contrat de mission.
De façon générale, M. [M] ne produit aucun élément objectif permettant de considérer qu’il a été victime de discrimination liée à son état de santé.
C’est donc à juste titre que le conseil de prud’hommes a retenu que la société Actual 945 a régulièrement mis fin au contrat de mission de M. [M] à l’échéance prévue.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [M] de sa demande de nullité de la rupture du contrat de travail.
3- Sur les dépens et frais irrépétibles
En application de l’article 696 du code de procédure civile, M. [M], partie perdante, sera condamné aux dépens d’appel.
Il sera en conséquence débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Il n’est pas inéquitable de laisser la SNC Actual 45 supporter la charge de ses frais irrépétibles et il convient donc de la débouter de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Y additant,
Déboute M. [Z] [M] de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la société SNC Actual 45 de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne M. [Z] [M] aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président
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