Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 1 – Chambre 3
ARRET DU 01 FEVRIER 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/15022 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGJ2I
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 25 Août 2022 -Président du TC de [Localité 10] – RG n° 2022040033
APPELANTE
S.A.S. FITNESS PARK DEVELOPMENT prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 1]
[Localité 5]
N° SIRET : 379 81 8 0 32
représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
assistée par Me Sandrine RICHARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0411
INTIMÉS
Monsieur [D] [W]
[Adresse 3]
[Localité 4]
né le 18 Juillet 1969 à VILLEMOMBLE (93)
représenté par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
assisté par Me Hubert BENSOUSSAN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0262
S.A.R.L. GYMNESS-801 prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 834 815 979
représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
assistée par Me Hubert BENSOUSSAN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0262
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant M. Jean-Christophe CHAZALETTE, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre
Jean-Christophe CHAZALETTE, Président
Patricia LEFEVRE, conseillère
Greffier, lors des débats : M. Olivier POIX
ARRÊT :
– CONTRADICTOIRE
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, et par Olivier POIX, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
******
Par acte sous seing privé du 3 juin 2015 à effet du 1er septembre 2015, la société Mov’In, devenue Fitness Park Development, a consenti à la société Gymness (SIREN 810337964) et à M. [W] une licence de la marque et du concept Fitness Park et d’affiliation au réseau Fitness Park pour une durée de 7 ans, se terminant le 31 août 2022, portant sur l’exploitation d’un Club [8] situé [Adresse 2] (92).
Par acte sous seing privé du 2 août 2018 à effet du 1er août 2018, la société Mov’In, devenue Fitness Park Development, a consenti à la société Gymness-801 (SIREN 834815979) et à M. [W] une licence de la marque Fitness Park et d’affiliation au réseau Fitness Park pour une durée de 7 ans, se terminant le 31 juillet 2025, portant sur l’exploitation d’un club Fitness Park situé [Adresse 7] (80).
Affirmant que la société Gymness-801 et M. [W] avaient brusquement résilié le contrat de licence concernant le club d'[Localité 6] par courrier reçu le 27 juillet 2022 à effet du 27 août 2022 sans mise en demeure préalable, la société Fitness Park Development les a fait assigner devant le juge des référés du tribunal de commerce de Paris par actes d’huissier du 17 août 2022 en lui demandant notamment de :
constater le caractère manifestement irrégulier de la résiliation du contrat de licence Fitness Park signé entre la société Fitness Park Development, la société Gymness-801 et M. [W] ;
ordonner la cessation du trouble manifestement illicite constitué par la résiliation irrégulière du contrat de licence Fitness Park signé entre la société Fitness Park Development, la société Gymness-801 et M. [W] ;
en conséquence, suspendre les effets de la lettre de résiliation reçue le 27 juillet 2022 et ordonner la poursuite du contrat de licence signé entre la société Fitness Park Development, la société Gymness-801 et M. [W], sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter de la signification de l’ordonnance.
Par ordonnance du 25 août 2022, le juge des référés du tribunal de commerce de Paris a :
débouté la société Fitness Park Development de l’ensemble de ses demandes ;
dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamné en outre la société Fitness Park Development aux dépens de l’instance ;
rappelé que la décision est de plein droit exécutoire par provision en application de l’article 514 du code de procédure civile.
Par déclaration du 8 septembre 2022, la société Fitness Park Development a interjeté appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif.
Aux termes de ses dernières conclusions en date du 21 novembre 2022 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, elle demande à la cour de :
infirmer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
constater le caractère manifestement irrégulier de la résiliation du contrat de licence consenti à la société Gymness-801 et M. [W] ;
ordonner la cessation du trouble manifestement illicite constitué par la résiliation irrégulière du contrat de licence consenti à la société Gymness-801 et M. [W] ;
en conséquence, suspendre les effets de la lettre de résiliation reçue le 27 juillet 2022 et ordonner l’exécution du contrat de licence signé par la société Gymness-801 et M. [W], sous astreinte de 1 000 euros par jour à compter de la signification de l’ordonnance ;
condamner solidairement société Gymness-801 et M. [W] à lui payer la somme de 15 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
condamner solidairement la société Gymness-801 et M. [W] aux entiers dépens.
La société Gymness-801 et M. [W], aux termes de leurs dernières conclusions en date du 23 novembre 2022 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, demandent à la cour de :
A titre principal,
confirmer l’ordonnance dont appel ;
dire n’y avoir lieu à référé ;
En toute hypothèse,
débouter la société Fitness Park Development de toutes ses demandes, fins et conclusions,
condamner la société Fitness Park Development à leur payer à chacun la somme de 20 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d’appel en application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 novembre 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties susvisées pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
SUR CE,
En vertu de l’alinéa 1 de l’article 873 du code de procédure civile, le président du tribunal de commerce peut, dans les limites de la compétence du tribunal, et même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le dommage imminent s’entend du dommage qui n’est pas encore réalisé mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer et le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d’un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.
En vertu des articles 1224 et 1226 du code civil, en l’absence de clause résolutoire ou d’une résolution judiciaire, la résolution résulte en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur, à ses risques et périls, avec ‘ sauf urgence, mise en demeure préalable du débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable ; la mise en demeure doit mentionner expressément qu’à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.
En l’espèce, par lettre recommandée avec accusé de réception du 27 juillet 2022, M. [W] a notifié à la société Fitness Park Development la résiliation du contrat de licence du 2 août 2018 concernant le club situé à [Localité 6] en évoquant trois motifs :
le refus abusif du renouvellement du contrat de licence concernant le club de [Localité 9], conditionné par une obligation de vendre cette installation ;
l’existence d’un comportement déloyal de la société Fitness Park Development tenant à l’existence d’un logiciel permettant un accès illimité sans autorisation aux activités des clubs d'[Localité 6] et de [Localité 9] ;
l’absence d’assistance pour l’installation du club à [Localité 6] et l’absence de proposition alors que ce club accumulait les pertes.
Il y a lieu de constater d’une part que M. [W] fait état de manquements qui concernent pour certains le contrat de licence concernant le club de [Localité 9], alors que ce contrat n’est pas affecté par la résiliation unilatérale et, d’autre part, que cette résiliation n’a pas été précédée d’une mise en demeure préalable du débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable ; par ailleurs, cette lettre de résiliation n’évoque pas d’urgence.
La société Gymness-801 et M. [W] affirment que l’urgence était constituée par le fait que la fin du contrat d'[Localité 6] devait être calquée sur celle du contrat de Levallois en vertu de l’article 2-6 du contrat. Cette explication est sans pertinence puisque cet article prévoit certes un alignement des dates de fin de contrat en cas de pluralité de contrats, mais en stipulant que « la date de référence retenue sera celle de l’échéance finale du dernier contrat de licence conclu ». Cette disposition claire et précise permettait de considérer que le contrat de licence concernant le club de [Localité 9] devait expirer le 31 juillet 2025, en même temps que celui concernant le club d'[Localité 6] ‘ et non pas l’inverse avec une expiration des deux contrats au 31 août 2022. Cette circonstance ne caractérise donc pas d’urgence et n’est au demeurant pas mentionnée comme une urgence dans la lettre de résiliation critiquée.
Par ailleurs, la société Gymness-801 et M. [W] affirment qu’ils ont bien adressé une lettre de mise en demeure par courrier du 26 avril 2022 par laquelle ils sommaient la société Fitness Park Development de les exonérer « de la clause de non-concurrence contractuelle du contrat d'[Localité 6] pour pouvoir exercer librement une activité sur Levallois », sous peine de résiliation unilatérale du contrat concernant le club d'[Localité 6]. Il y a lieu de constater que cette mise en demeure, d’une part, ne visait aucune inexécution contractuelle de la société Fitness Park Development dans le contrat concernant le club d'[Localité 6], puisque celui ne comporte aucune obligation de lever la clause de non-concurrence ‘ et, d’autre part, articulait un grief qui n’est pas repris dans la lettre de résiliation du 27 juillet 2022. Ce courrier du 26 avril 2022 ne peut donc constituer la mise en demeure prévue à l’article 1226 précité.
Enfin, le moyen de la société Gymness-801 et M. [W] tiré de l’absence de préjudice pour la société Fitness Park Development dans la mesure où les redevances du contrat de licence portant sur le club d'[Localité 6] n’était plus payées, manque en droit et sera rejeté : l’application des articles 1224 et 1226 précités n’est pas subordonnée à la démonstration d’un préjudice du débiteur, sujet de la résiliation unilatérale.
Dans ces conditions, et sans qu’il y ait lieu d’apprécier le bien-fondé des causes de la résiliation qui sont longuement développées par les intimés, il convient de considérer que la résiliation unilatérale par la société Gymness-801 et M. [W] du contrat de licence et d’affiliation au réseau Fitness Park à effet du 1er août 2018 constitue une violation grossière de l’article 1226 du code civil, en l’absence d’urgence et de mise en demeure préalable, s’analysant en un trouble manifestement illicite au sens de l’article 873 précité.
Dès lors, il conviendra de faire droit à la demande de suspension des effets de la lettre de résiliation et d’enjoindre à la société Gymness-801 et M. [W] de poursuivre l’exécution du contrat de licence. Faute pour la société Fitness Park Development de détailler les actes matériels permettant de vérifier la continuité de l’exécution du contrat, il n’y pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte.
L’ordonnance entreprise sera donc infirmée en toutes ses dispositions, y compris quant à la charge des dépens et à l’indemnisation des frais irrépétibles.
La société Gymness-801 et M. [W] seront tenus in solidum aux entiers dépens et condamnés au paiement d’une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
Infirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Suspend les effets de la lettre de résiliation reçue le 27 juillet 2022 et enjoint à la société Gymness-801 et à M. [W] de poursuivre l’exécution du contrat de licence portant sur l’exploitation d’un club Fitness Park situé [Adresse 7] (80) ;
Déboute la société Fitness Park Development du surplus de sa demande ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum la société Gymness-801 et M. [W] à payer à la société Fitness Park Development une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne in solidum la société Gymness-801 et M. [W] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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