Droit d’accès des journalistes aux documents sensibles

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Droit d’accès des journalistes aux documents sensibles

L’Essentiel : Le droit d’accès des journalistes aux documents sensibles est un enjeu crucial pour la transparence politique. Dans l’affaire Médiapart, le Conseil d’État a statué en faveur de l’accès à une convention de prêt entre la First Czech Russian Bank et le Front national, tout en protégeant certaines informations sensibles. La Commission nationale des comptes de campagne a initialement refusé cette communication en raison d’une clause de confidentialité. Cependant, la loi du 11 mars 1988 impose aux partis politiques de tenir une comptabilité transparente, renforçant ainsi le droit des journalistes à accéder à des documents administratifs pertinents.

Un éditeur de presse est en droit d’obtenir les documents sensibles détenus par des partis politiques (convention de prêt …) dès lors qu’ils participent au financement déclaré des campagnes du parti.

Affaire Médiapart

Le Conseil d’Etat a tranché : Médiapart aura bien accès à la Convention de prêt conclue le 11 septembre 2014 entre la First Czech Russian Bank et le Front national.  Devront simplement être occultées les mentions relatives aux coordonnées bancaires du compte courant détenu par le Front national ainsi que celles relatives à la durée et au taux d’intérêt de ce prêt.

Demande de communication à la Commission nationale des comptes de campagne

Médiapart avait demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler pour excès de pouvoir la décision implicite par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a refusé de lui communiquer la convention de prêt conclue entre le Front national et ses prêteurs en 2014.

Clause de confidentialité

La Commission a refusé cette communication en raison de la clause de confidentialité dont était assortie la convention de prêt. Saisie de l’affaire, la commission d’accès aux documents administratifs s’était prononcée en faveur de la communication de cette convention par un avis du 12 mai 2016, sous réserve de l’occultation des coordonnées bancaires du compte courant détenu par l’association Front National.

Loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière

Pour rappel, l’article 11-7 de la loi du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique dispose que les partis ou groupements politiques bénéficiaires de tout ou partie des dispositions des articles 8 et 11-4 ont l’obligation de tenir une comptabilité. Cette comptabilité doit retracer tant les comptes du parti ou groupement politique que ceux de tous les organismes, sociétés ou entreprises dans lesquels le parti ou groupement détient la moitié du capital social ou des sièges de l’organe d’administration ou exerce un pouvoir prépondérant de décision ou de gestion. Les comptes de ces partis ou groupements sont arrêtés chaque année. Ils sont certifiés par deux commissaires aux comptes et déposés dans le premier semestre de l’année suivant celle de l’exercice à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques instituée à l’article L. 52-14 du code électoral, qui assure leur publication sommaire au Journal officiel de la République française. Si la commission constate un manquement à ces obligations, le parti ou groupement politique perd le droit, pour l’année suivante, au bénéfice des dispositions des articles 8 à 10 de la loi et les dons et cotisations à son profit ne peuvent, à compter de l’année suivante, ouvrir droit à la réduction d’impôt prévue au 3 de l’article 200 du code général des impôts. La commission demande, le cas échéant, communication de toutes pièces comptables et de tous justificatifs nécessaires au bon accomplissement de sa mission de contrôle.

Droit à la communication des documents administratifs

Concernant le droit de communication, l’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration considère comme documents administratifs, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission.

Ne sont communicables qu’à l’intéressé les documents administratifs dont la communication porterait atteinte au secret en matière commerciale et industrielle. Lorsqu’une demande porte sur un document comportant des mentions qui ne sont pas communicables mais qu’il est possible d’occulter ou de disjoindre, le document est communiqué au demandeur après occultation ou disjonction de ces mentions.

L’ensemble des documents adressés à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques par les partis et groupements politiques sont reçus par cette commission dans le cadre de la mission de contrôle des comptes annuels de ces partis et groupements politiques qui lui a été confiée par le législateur en vue de garantir la transparence financière de la vie politique. Il s’ensuit que ces pièces comptables constituent des documents administratifs qui sont régis, en l’absence de disposition législative particulière, par la loi du 17 juillet 1978 (L. 300-1 et suivants du code des relations entre le public et l’administration). Ces documents constituent des documents préparatoires, exclus du droit à communication, jusqu’à la publication sommaire des comptes au Journal officiel de la République française prévue à l’article 11-7 précité qui marque l’achèvement de la mission de contrôle dévolue à la commission. Il en va autrement après cette date, à compter de laquelle il appartient seulement à la commission, saisie d’une demande de communication de tels documents, de rechercher si les dispositions qui leur sont applicables permettent d’y faire droit.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le droit d’un éditeur de presse concernant les documents sensibles des partis politiques ?

Un éditeur de presse a le droit d’obtenir des documents sensibles détenus par des partis politiques, tels que des conventions de prêt, à condition que ces documents soient liés au financement déclaré des campagnes du parti.

Cela signifie que si un parti politique reçoit un financement par le biais d’un prêt, les détails de ce prêt peuvent être demandés par un éditeur de presse. Ce droit est fondé sur la nécessité de garantir la transparence financière dans la vie politique, permettant ainsi un contrôle public sur les sources de financement des partis.

Quelle décision a été prise par le Conseil d’Etat concernant Médiapart ?

Le Conseil d’Etat a décidé que Médiapart pouvait accéder à la convention de prêt signée le 11 septembre 2014 entre la First Czech Russian Bank et le Front national.

Cependant, certaines informations sensibles devaient être occultées, notamment les coordonnées bancaires du compte courant du Front national, ainsi que la durée et le taux d’intérêt du prêt. Cette décision souligne l’importance de la transparence tout en protégeant des informations qui pourraient nuire à la vie privée ou à la sécurité financière des parties impliquées.

Pourquoi Médiapart a-t-il demandé l’annulation de la décision de la Commission nationale des comptes de campagne ?

Médiapart a demandé au tribunal administratif de Paris d’annuler la décision implicite de la Commission nationale des comptes de campagne qui avait refusé de lui communiquer la convention de prêt entre le Front national et ses prêteurs en 2014.

Cette demande était motivée par le désir de Médiapart d’accéder à des informations qu’il considérait comme essentielles pour assurer la transparence et la responsabilité des partis politiques, surtout en ce qui concerne le financement de leurs campagnes.

Quelle était la raison du refus de communication par la Commission nationale des comptes de campagne ?

La Commission nationale des comptes de campagne a refusé de communiquer la convention de prêt en raison d’une clause de confidentialité qui y était associée.

Cependant, la commission d’accès aux documents administratifs a recommandé la communication de cette convention, à condition que les informations sensibles, comme les coordonnées bancaires, soient occultées. Cela montre un équilibre entre le droit à l’information et la protection des données sensibles.

Quelles sont les obligations des partis politiques selon la loi du 11 mars 1988 ?

Selon l’article 11-7 de la loi du 11 mars 1988, les partis politiques doivent tenir une comptabilité qui retrace leurs comptes ainsi que ceux des organismes dans lesquels ils détiennent une part significative du capital.

Cette comptabilité doit être certifiée par deux commissaires aux comptes et déposée auprès de la Commission nationale des comptes de campagne chaque année. Si un parti ne respecte pas ces obligations, il peut perdre certains droits, notamment en matière de financement public et de réduction d’impôt sur les dons.

Quels documents sont considérés comme administratifs selon le code des relations entre le public et l’administration ?

L’article L. 300-2 du code des relations entre le public et l’administration définit comme documents administratifs tous les documents produits ou reçus par des entités publiques dans le cadre de leur mission de service public.

Cela inclut les documents des partis politiques soumis à la Commission nationale des comptes de campagne. Toutefois, certains documents peuvent être exclus de la communication si leur divulgation porte atteinte au secret commercial ou industriel.

En cas de demande de communication, les mentions non communicables peuvent être occultées, permettant ainsi un accès partiel à l’information.


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