Documentaires judiciaires : vérifiez les amnisties

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Documentaires judiciaires : vérifiez les amnisties

L’Essentiel : L’amnistie d’une personne condamnée ne paralyse pas la liberté d’informer. Dans l’affaire « Faites entrer l’accusé », la prévenue, ayant bénéficié d’une amnistie, n’a pas vu son droit à l’image retenu. Les sociétés France Télévisions et 17 Juin Productions ont été poursuivies sans succès, car la journaliste n’avait pas connaissance de l’amnistie lors de la diffusion de l’émission. La Cour de cassation a également écarté la question de la conformité de l’article 26 de la loi d’amnistie avec la liberté d’expression. Les demandes d’atteinte au droit à l’image, sans lien avec la condamnation amnistiée, ont été déclarées irrecevables.

L’amnistie d’une personne condamnée ne permet pas de paralyser la liberté d’informer et de diffuser des documentaires judiciaires reproduisant son image.[/well]

Affaire « Faites entrer l’accusé »

L’atteinte au droit à l’image d’une prévenue ayant bénéficié d’une amnistie n’a pas été retenue.  Les sociétés France Télévisions et 17 Juin Productions ont été poursuivies sans succès, au visa des articles 7 et 26 de la loi d’amnistie du 20 juillet 1988.

Amnistie et droit à l’image

Avait été rappelée, dans l’émission « Faites entrer l’accusée – Jean-Luc Sebin, le forcené de Versailles » une condamnation amnistiée  dont avait bénéficié la prévenue.  La violation de l’article 26 de la loi d’amnistie du 20 juillet 1988 n’a pas été retenue. En effet, le délit suppose que la personne fautive ait eu connaissance de l’amnistie prononcée :

« Il est interdit à toute personne en ayant eu connaissance de rappeler, sous quelque forme que ce soit, ou de laisser subsister dans tout document quelconque les condamnations pénales, les sanctions disciplinaires ou professionnelles et les déchéances effacées par l’amnistie. Les minutes des jugements, arrêts et décisions échappent toutefois à cette interdiction, mais des expéditions ne pourront en être délivrées qu’à la condition de porter en marge la mention de l’amnistie. Toute référence à une sanction ou à une condamnation amnistiée sera punie d’une amende de 500 F à 15 000 F. L’amnistie ne peut, en aucun cas, mettre obstacle à l’exécution des jugements ou arrêts intervenus en matière de diffamation ou de dénonciation calomnieuse ordonnant la publication desdits jugements ou arrêts ».

Lors de son audition par les services d’enquête à la suite de la plainte pénale, la journaliste avait déclaré qu’elle n’avait pas eu connaissance de cette amnistie au moment de la production et de la diffusion de l’émission incriminée et qu’elle ne l’avait apprise qu’au moment de sa convocation par la police. La faute pouvant engager sa responsabilité civile n’était donc pas caractérisée.

QPC exclue

La question de savoir si l’article 26 de la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie est contraire i) à la liberté d’expression garantie par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen et ii) au droit à un procès équitable, avait déjà été écartée par la Cour de cassation (28 septembre 2016) qui a jugé n’y avoir lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel.

Atteinte au droit à l’image irrecevable

S’agissant des demandes fondées sur une atteinte au droit à l’image, par maladresse, le conseil de la prévenue avait visé dans son assignation, « une émission rediffusée plusieurs fois sans floutage des photographies et des documents filmés la représentant » avant d’ajouter « Madame X. se trouve incontestablement recevable et bien fondée à obtenir réparation du préjudice résultant du rappel d’une condamnation amnistiée ». L’assignation se fondait ainsi principalement sur une atteinte aux dispositions de la loi d’amnistie du 20 juillet 1988. Dans ses conclusions ultérieures, la victime entendait toutefois demander une réparation liée à une atteinte à l’article 9 du code civil. Or, une telle demande, au fondement juridique distinct de celui du rappel de condamnations amnistiées, ne se rattachait pas aux prétentions originaires par un lien suffisant. Aussi, en application de l’article 70 du code de procédure civile, les demandes additionnelles relatives à l’atteinte au droit à l’image, sans lien avec le rappel d’une condamnation amnistiée, ont été déclarées irrecevables.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Qu’est-ce que l’amnistie et comment affecte-t-elle le droit à l’image ?

L’amnistie est un acte juridique qui efface les condamnations pénales d’une personne, lui permettant ainsi de retrouver ses droits civiques. Cependant, l’amnistie ne paralyse pas la liberté d’informer, ce qui signifie que des documentaires judiciaires peuvent continuer à reproduire l’image d’une personne amnistiée.

En effet, la loi d’amnistie du 20 juillet 1988 stipule que toute personne ayant connaissance de l’amnistie ne peut rappeler les condamnations effacées. Toutefois, les médias peuvent diffuser des informations sur des affaires judiciaires, même si les personnes concernées ont bénéficié d’une amnistie, tant qu’ils n’enfreignent pas les dispositions légales.

Quelle a été la décision de la Cour concernant l’affaire « Faites entrer l’accusé » ?

Dans l’affaire « Faites entrer l’accusé », la Cour a décidé que l’atteinte au droit à l’image d’une prévenue amnistiée n’était pas retenue. Les sociétés France Télévisions et 17 Juin Productions ont été poursuivies, mais leur responsabilité n’a pas été engagée.

La Cour a jugé que la violation de l’article 26 de la loi d’amnistie n’était pas applicable, car la journaliste n’avait pas eu connaissance de l’amnistie au moment de la diffusion de l’émission. Cela a conduit à l’absence de faute pouvant engager sa responsabilité civile.

Comment la loi d’amnistie protège-t-elle les personnes condamnées ?

La loi d’amnistie du 20 juillet 1988 protège les personnes condamnées en interdisant à quiconque de rappeler leurs condamnations une fois l’amnistie prononcée. Cela inclut les sanctions pénales et les déchéances effacées par l’amnistie.

Cependant, A noter que les minutes des jugements échappent à cette interdiction, mais doivent mentionner l’amnistie. De plus, l’amnistie ne peut pas empêcher l’exécution de jugements en matière de diffamation ou de dénonciation calomnieuse, ce qui permet aux victimes de faire valoir leurs droits.

Quelles sont les implications de la décision de la Cour de cassation sur la liberté d’expression ?

La Cour de cassation a écarté la question de savoir si l’article 26 de la loi d’amnistie était contraire à la liberté d’expression. Cette décision souligne que la protection des droits individuels, comme le droit à l’image, doit être équilibrée avec la liberté d’informer.

En ne renvoyant pas la question au Conseil constitutionnel, la Cour a affirmé que les dispositions de la loi d’amnistie ne violent pas les droits garantis par la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen. Cela signifie que les médias peuvent continuer à informer le public sur des affaires judiciaires, même si cela implique des personnes amnistiées.

Pourquoi les demandes d’atteinte au droit à l’image ont-elles été déclarées irrecevables ?

Les demandes d’atteinte au droit à l’image ont été déclarées irrecevables car elles ne se rattachaient pas suffisamment aux prétentions originaires concernant le rappel d’une condamnation amnistiée. Le conseil de la prévenue avait initialement fondé son assignation sur la loi d’amnistie, mais a ensuite élargi ses demandes à des atteintes au droit à l’image.

Cette distinction a conduit à l’irrecevabilité des demandes additionnelles, car elles ne respectaient pas les exigences de l’article 70 du code de procédure civile, qui stipule que les demandes doivent être liées par un lien suffisant aux prétentions initiales.


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