Dignité d’un défunt : un SMS à 5 000 euros 

·

·

Dignité d’un défunt : un SMS à 5 000 euros 

Atteinte à la dignité du défunt

Furieux d’avoir perdu son client au profit d’un concurrent, le gérant d’une société de pompes funèbres a envoyé par erreur un SMS à la veuve du défunt durant les rites funéraires précédant et accompagnant la mise en bière : « Salut Stéphane, pas d’obsèques, le frère a foutu la merde et c’est PDG qui récupère le bébé, qu’ils aillent se faire enculer à Bethleem ».

L’article 1242 du code civil, dispose que chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.  En envoyant ce SMS, à la suite d’une maladresse de manipulation de son téléphone, à la veuve du défunt durant les rites funéraires, l’expéditeur a porté atteinte à la dignité du défunt mais aussi à l’intimité de du deuil de la veuve ainsi qu’à son identité confessionnelle (par le texte dégradant du message « se faire enculer à Bethleem»).

5 000 euros de dommages et intérêts

L’expéditeur indélicat a été condamné à 5 000 euros de dommages et intérêts pour atteinte grave à la dignité du défunt et de celle de sa veuve. A  noter que ces derniers ont  fondé leur demande de réparation sur le terrain de la responsabilité délictuelle de l’article 1383 du code civil, étant observé que celui de la responsabilité contractuelle n’aurait pu être mis en jeu dès lors que la faute reprochée au gérant de la société se situait postérieurement à la révocation du mandat d’organiser les obsèques qui lui avait été confié, sa prestation ayant été limitée au transport du défunt au funérarium.

Régime juridique du SMS

Le régime du droit de la presse n’a pas non plus été appliqué.  La famille du défunt ne visait  pas des injures non publiques, lesquelles auraient été soumises au régime de la loi du 29 juillet 1881 et réprimées par l’article R. 621-2 du code pénal, mais s’est appuyée sur la faute ayant consisté dans l’envoi d’un écrit, sous la forme de SMS, destiné à un tiers et de nature à porter atteinte à la dignité. La réparation du dommage résultant de la faute involontaire reprochée au gérant a donc été examinée dans le cadre de l’article 1241 du code civil.

Violation du secret des correspondances

Dans cette affaire, s’est également posée la question du secret des correspondances. L’article L. 241-1 du code de la sécurité publique dispose que « le secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques est garanti par la loi. Il ne peut être porté atteinte à ce secret que par l’autorité publique, dans les seuls cas de nécessité d’intérêt public prévus par la loi et dans les limites fixées par celle-ci ». L’article 226-15 alinéa 2 du code pénal sanctionne le fait, de mauvaise foi, d’intercepter, de détourner, d’utiliser ou de divulguer des correspondances émises, transmises ou reçues par la voie électronique ou de procéder à l’installation d’appareils conçus pour réaliser de telles interceptions.

Ces textes visent à garantir le secret des correspondances échangées entre un émetteur et un destinataire de toute intrusion de l’autorité publique, hors les cas prévus par la loi, et de tiers ; Or, en l’espèce, la veuve ayant été rendue personnellement destinataire du message litigieux expédié par son auteur sur sa messagerie SMS a pu régulièrement prendre connaissance de son contenu et, n’étant tenue par aucune obligation de confidentialité, en divulguer librement la teneur à sa famille.

Télécharger 

Questions / Réponses juridiques

Quelle a été la réaction du gérant de la société de pompes funèbres après avoir perdu un client ?

Le gérant de la société de pompes funèbres a réagi avec colère après avoir perdu un client au profit d’un concurrent. Dans un moment de frustration, il a envoyé un SMS inapproprié à la veuve du défunt pendant les rites funéraires. Ce message contenait des propos dégradants et insultants, ce qui a non seulement porté atteinte à la dignité du défunt, mais aussi à l’intimité de la veuve en deuil.

Cette maladresse a été causée par une erreur de manipulation de son téléphone, mais elle a eu des conséquences graves. En effet, le contenu du message était non seulement offensant, mais il a également manqué de respect envers la mémoire du défunt et a blessé la veuve dans un moment déjà difficile.

Quels articles du code civil ont été invoqués dans cette affaire ?

Dans cette affaire, plusieurs articles du code civil ont été invoqués pour établir la responsabilité du gérant de la société de pompes funèbres. L’article 1242 stipule que chacun est responsable des dommages causés par son fait, sa négligence ou son imprudence. En envoyant le SMS à la veuve, le gérant a clairement agi de manière imprudente, ce qui a entraîné une atteinte à la dignité du défunt et à l’intimité de la veuve.

De plus, la demande de réparation a été fondée sur l’article 1383, qui traite de la responsabilité délictuelle. Cet article a été pertinent car la faute du gérant est survenue après la révocation de son mandat d’organiser les obsèques, ce qui excluait la possibilité d’invoquer la responsabilité contractuelle. Ainsi, la situation a été examinée sous l’angle de la responsabilité délictuelle.

Quel montant a été accordé en dommages et intérêts et pour quelles raisons ?

Le gérant de la société de pompes funèbres a été condamné à verser 5 000 euros de dommages et intérêts. Cette somme a été accordée en raison de l’atteinte grave à la dignité du défunt et de celle de sa veuve. La décision de la cour a été fondée sur le fait que le SMS envoyé était non seulement inapproprié, mais qu’il avait également causé un préjudice émotionnel significatif à la veuve.

La demande de réparation a été justifiée par le caractère dégradant du message, qui a eu un impact direct sur le processus de deuil de la veuve. En effet, dans des moments aussi sensibles, le respect de la mémoire des défunts et la dignité des proches sont primordiaux, et toute atteinte à ces valeurs peut entraîner des conséquences juridiques.

Comment le régime juridique du SMS a-t-il été analysé dans cette affaire ?

Le régime juridique du SMS a été analysé sous l’angle de la responsabilité civile, plutôt que du droit de la presse. La famille du défunt n’a pas cherché à invoquer des injures non publiques, qui auraient été soumises à la loi du 29 juillet 1881. Au lieu de cela, elle a mis en avant la faute consistant à envoyer un message écrit, sous forme de SMS, qui était de nature à porter atteinte à la dignité.

La réparation du dommage a donc été examinée dans le cadre de l’article 1241 du code civil, qui traite des fautes involontaires. Cela a permis de conclure que le gérant avait agi de manière négligente en envoyant le message, ce qui a justifié la demande de dommages et intérêts.

Quelles sont les implications du secret des correspondances dans cette affaire ?

La question du secret des correspondances a également été soulevée dans cette affaire. Selon l’article L. 241-1 du code de la sécurité publique, le secret des correspondances électroniques est garanti par la loi, et ne peut être violé que par l’autorité publique dans des cas spécifiques. Cependant, dans ce cas, la veuve a reçu le message directement sur sa messagerie SMS, ce qui signifie qu’elle a eu accès au contenu sans qu’il y ait eu violation de son secret.

De plus, l’article 226-15 du code pénal sanctionne les interceptions ou divulgations de correspondances électroniques de mauvaise foi. Toutefois, la veuve n’étant pas soumise à une obligation de confidentialité, elle a pu partager le contenu du message avec sa famille. Cela souligne l’importance de la protection des correspondances, tout en reconnaissant que la divulgation peut se produire dans des circonstances où le destinataire n’est pas lié par des obligations légales.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon