Démarchage d’annonceur : certaines pratiques sanctionnées

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Démarchage d’annonceur : certaines pratiques sanctionnées

L’Essentiel : Une association, l’Amicale des Sapeurs Pompiers, a obtenu la condamnation de sa régie publicitaire, la SCEP, pour avoir continué à démarcher des annonceurs après la rupture de leur contrat. La SCEP s’est présentée comme le mandataire de l’association, créant ainsi une confusion chez les annonceurs. Ce comportement a été jugé comme un trouble manifestement illicite, selon l’article 835 du code de procédure civile. Le tribunal a ordonné à la SCEP de cesser ces pratiques trompeuses et a imposé une astreinte en cas de non-respect de cette décision.

Une association Amicale des Sapeurs Pompiers a obtenu la condamnation de son ancienne régie publicitaire qui, postérieurement à leur rupture de relations commerciales, a opérer une confusion dans l’esprit des annonceurs. Ce comportement a été qualifié de trouble manifestement illicite au sens de l’article 835 du code de procédure civile.

En dépit de la cessation de leurs relations contractuelles, la SCEP (Régie publicitaire) a démarché les annonceurs pour la revue de l’association en continuant à se faire passer pour le partenaire ou le mandataire de l’Amicale.

Compétence du président du tribunal judiciaire

Selon l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’existence de contestations sérieuses

L’existence de contestations sérieuses est indifférente pour la mise en oeuvre de ce texte, le trouble manifestement illicite se définissant comme toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit à laquelle le juge des référés peut mettre un terme à titre provisoire ; dans ce cas, le dommage est réalisé et il importe d’y mettre un terme.

Les pratiques en cause

En l’espèce, il ressort des nombreuses pièces versées aux débats que nonobstant la rupture du contrat de régie publicitaire liant les parties, la SCEP a continué à démarcher des annonceurs pour l’édition de sa nouvelle revue en se présentant comme le représentant l’association Amicale des Sapeurs Pompiers alors même qu’il n’était plus accrédité par elle ou, à tout le moins, en entretenant une ambiguité sur sa relation avec l’Amicale.

Ces agissements déloyaux, consistant à se revendiquer comme agissant pour le compte de l’Amicale des sapeurs pompiers caractérisent un trouble manifestement illicite qu’il appartient au juge des référés de faire cesser.


COUR D’APPEL DE BORDEAUX

1ère CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU : 26 OCTOBRE 2023

N° RG 23/01196 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NE52

Association AMICALE DES SAPEURS POMPIERS DU SECTEUR D’INTERVENTION DE [Localité 4] METROPOLE

c/

S.A.R.L. SOCIETE DE COMMUNICATION, D’EDITION ET DE PRESSE (SCEP)

Nature de la décision : AU FOND

APPEL D’UNE ORDONNANCE DE REFERE

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance de référé rendue le 16 janvier 2023 par le Président du Tribunal Judiciaire de BORDEAUX (RG : 22/01926) suivant déclaration d’appel du 10 mars 2023

APPELANTE :

Association AMICALE DES SAPEURS POMPIERS DU SECTEUR D’INTERVENTION DE [Localité 4] METROPOLE, association déclarée le 14 mai 1969 et agréée sous le n°8751, régie par la loi du 1er juillet 1901, représentée par son président Monsieur [C] [V], dûment habilité aux fins des présentes par les statuts, domicilié en cette qualité [Adresse 2]

représentée par Maître Hervé DESPUJOL de la SELARL HEXA, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

S.A.R.L. SOCIETE DE COMMUNICATION, D’EDITION ET DE PRESSE (SCEP), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité représentée par son gérant domicilié en cette qualité [Adresse 1]

représentée par Maître Annabel BONNARIC, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 septembre 2023 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Bérengère VALLEE, Conseiller, qui a fait un rapport oral de l’affaire avant les plaidoiries,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Président : Madame Paule POIREL

Conseiller : Mme Bérengère VALLEE

Conseiller : M. Emmanuel BREARD

Greffier : Mme Véronique SAIGE

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Exposé du litige

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCEDURE

L’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole édite depuis 20 ans une revue annuelle qui permet à la fois de diffuser une information sur les sapeurs pompiers de [Localité 4] Métropole et de constituer un support pour les annonceurs souhaitant soutenir financièrement l’association en contrepartie d’encarts publicitaires.

L’association a conclu le 10 juillet 2001 un contrat de régie publicitaire par lequel elle a confié à Mme [G] agissant sous l’enseigne Atlantica, l’édition d’une revue ‘présentant pour partie des publicités dont elle aura seule le choix et le monopole et pour une autre partie les textes, photos ou illustrations bénéficiant à l’Amicale des sapeurs-pompiers du secteur d’intervention de la CUB’.

Selon avenant du 5 septembre 2003, ce contrat de régie a été repris par la société de Communication, d’Edition et de Presse (ci-après SCEP), laquelle a déposé auprès de l’INPI sous le numéro 3236862 une marque verbale ‘[Localité 4]-18’.

Le 15 septembre 2014, un nouveau contrat a été conclu entre l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole et la SCEP, intitulé ‘contrat d’édition et de régie publicitaire pour la revue ‘[Localité 4]-18″, pour une durée de trois ans renouvelables par tacite reconduction avec un préavis de trois mois en cas de résiliation, sans modification du secteur de recherche des annonceurs publicitaires, la communauté urbaine de [Localité 4] devenue à partir de 2015 [Localité 4] Métropole.

Aux termes de ce contrat, l’Amicale des Sapeurs pompiers du secteur d’intervention de la communauté urbaine de [Localité 4] a confié à la SCEP la régie publicitaire, l’édition et la réalisation de sa revue annuelle ‘[Localité 4] 18″ . Il était prévu que la SCEP assure la conception, la réalisation, l’édition et la diffusion de la revue. Pour en financer le coût, la SCEP démarchait les annonceurs, encaissait le prix des annonces et reversait chaque année une somme forfaitaire de 30.000 euros à l’association.

En 2019, à la suite d’une restriction du secteur de recherche des annonceurs publicitaires, l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Metropole a mis en concurrence la SCEP. Le contrat liant les parties, arrivant à expiration le 15 septembre 2020, a été renouvelé mais uniquement pour une année, soit jusqu’au 15 septembre 2021, compte tenu des discussions en cours.

Le 30 juin 2021, la SCEP a déposé auprès de l’INPI sous le n°4781306 le logo accompagnant la marque ‘[Localité 4]-18″ comme marque figurative.

Les discussions n’ayant pas abouti à un accord entre les parties sur la redéfinition du secteur de prospection des annonceurs, l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole a, par courrier recommandé avec accusé de réception du 27 mai 2021, notifié à la SCEP sa décision de mettre un terme à leurs relations contractuelles au terme de l’engagement de prolongation du contrat d’un an, soit au 15 septembre 2021.

Pour l’édition 2022 de sa revue annuelle, l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Metropole a conclu un contrat d’édition avec la société BHM France.

Reprochant à la SCEP d’avoir, postérieurement au 15 septembre 2021, continué à prospecter dans le cadre de la revue [Localité 4]-18 en se présentant comme son mandataire et ce, malgré la cessation de leurs relations contractuelles, l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole a, par acte du 7 octobre 2022 et au visa de l’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, fait assigner la SCEP devant le juge des référés du tribunal judiciaire de [Localité 4] aux fins de lui enjoindre, sous astreinte de 2.000 euros par infraction constatée, à faire cesser :

– toute démarchage en se revendiquant, de quelque manière que ce soit, comme agissant pour le compte de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole,

– toute utilisation de la marque ‘[Localité 4]-18’ déposée auprès de l’INPI le 17 juillet 2003 sous le n°3236862 et le logo déposé auprès de l’INPI le 30 juin 2021 comme marque figurative sous le n°4781306.

Par ordonnance de référé du 16 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– déclaré irrecevable le demande de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole au nom et pour le compte de tout autre organisation représentant les sapeurs pompiers.

– rejeté la demande de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole.

– dit que chaque partie conserve à sa charge les frais engagés non compris dans les dépens.

– laissé les dépens à charge de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole.

Moyens

L’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole a relevé appel de cette ordonnance par déclaration du 10 mars 2023 et par conclusions déposées le 30 août 2023, elle demande à la cour de :

– déclarer son appel recevable et bien fondé ;

– réformer l’ordonnance du président du tribunal judiciaire de Bordeaux du 16 janvier 2023 en ce qu’elle l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes ;

STATUANT À NOUVEAU,

– enjoindre la SCEP, sous astreinte de 2000 euros par infraction constatée, de :

* cesser tout démarchage en se revendiquant de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, comme agissant pour le compte de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole ou même tout simplement pour le compte des sapeurs-pompiers dès lors qu’elle ne serait pas dument accreditée par une autre organisation représentant cette corporation,

* cesser d’utiliser, de quelque manière que ce soit, la marque ‘[Localité 4] 18″ déposée auprès de l’INPI le 17 juillet 2003 sous le numero 3236862 et le logo déposé auprès de l’INPI comme marque figurative le 30 juin 2021 sous le numéro 4781306,

– dire qu’elle se réserve le pouvoir de liquider cette astreinte conformément aux dispositions de l’article l.131-3 du code des procédures civiles d’exécution,

– réformer l’ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation au titre de l’ article 700 du code de procédure civile,

STATUANT À NOUVEAU,

– condamner la SCEP à verser à l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance,

– condamner à nouveau la SCEP à verser à l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

– réformer l’ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux concernant les dépens de première instance ;

STATUANT À NOUVEAU,

– condamner la SCEP aux entiers dépens de première instance et d’appel.

Par ordonnance du 7 juin 2023, le président de la première chambre civile de la cour d’appel de Bordeaux a déclaré les conclusions de la SCEP, du 11 mai 2023, irrecevables au motif que l’empêchement de conclure dans les délais impartis par le code de procédure civile n’était pas constitué.

L’affaire a été fixée à bref délai à l’audience rapporteur du 14 septembre 2023, avec clôture de l’instruction fixée au 31 août 2023.

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, compte tenu de l’irrecevabilité des conclusions de la SCEP, il est rappelé que lorsque la cour n’est pas saisie de conclusions par l’intimé, elle doit néanmoins, pour statuer sur l’appel, examiner les motifs du jugement ayant accueilli les prétentions de cette partie en première instance (Civ. 3ème, 7 juill. 2015, n° 14-13.715).

Sur le trouble manifestement illicite

Au soutien de ses prétentions, l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole invoque le trouble manifestement illicite de l’article 835 du code de procédure civile. Elle affirme qu’en dépit de la cessation de leurs relations contractuelles, la SCEP a démarché les annonceurs pour la revue [Localité 4]-18 en continuant à se faire passer pour le partenaire ou le mandataire de l’Amicale. Elle reproche à la SCEP un comportement déloyal consistant à créer et entretenir une confusion dans l’esprit des annonceurs, d’une part, en utilisant la dénomination [Localité 4]-18 et le logo qui étaient utilisés lors des précédentes éditions et qui évoquent les sapeurs-pompiers, ce qui constitue une appropriation abusive des signes distinctifs de l’association, d’autre part, en mettant en avant auprès des démarcheurs la notion de ‘renouvellement’ de leur engagement, renvoyant de ce fait à la revue pour laquelle ils avaient déjà souscrit. Elle soutient qu’en poursuivant un démarchage pour lequel elle n’est plus accréditée, la SCEP a créé une confusion dans l’esprit des annonceurs, à l’origine d’un préjudice pour l’association qui s’est vue dépossédée du bénéfice de certaines annonces.

Sur ce,

Selon l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Ainsi, l’existence de contestations sérieuses est indifférente pour la mise en oeuvre de ce texte, le trouble manifestement illicite se définissant comme toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit à laquelle le juge des référés peut mettre un terme à titre provisoire ; dans ce cas, le dommage est réalisé et il importe d’y mettre un terme.

En l’espèce, il ressort des nombreuses pièces versées aux débats par l’appelante que nonobstant la rupture du contrat de régie publicitaire liant les parties, la SCEP a continué à démarcher des annonceurs pour l’édition de sa nouvelle revue [Localité 4]-18 en se présentant comme le représentant l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole alors même qu’il n’était plus accrédité par elle ou, à tout le moins, en entretenant une ambiguité sur sa relation avec l’Amicale.

Ainsi :

– dans son courrier du 24 janvier 2022, le président de l’amicale des sapeurs pompiers d'[Localité 3] dénonce les démarchages effectués par le gérant de la SCEP, M. [R], qui affirme ‘prospecter pour l’amicale de [Localité 4] Métropole pour établir la revue annuelle du [Localité 4] 18 comme tous les ans’, (souligné par la cour)

– dans un courrier du 26 janvier 2022, le directeur de l’entrepôt pétrolier de la Gironde a indiqué avoir fait l’objet d’un démarchage par M. [R] pour l’édition de la revue [Localité 4] 18 édition 2022, ‘ce dernier en ayant profité pour déposer la revue 2021 de ladite revue’,(souligné par la cour)

– par courriel du 4 mars 2022, la société Mercure [Localité 4] Aéroport a affirmé avoir reçu deux démarchages pour la publication d’un encart publicitaire dans le magazine [Localité 4]-18, ‘une cause qui nous tient évidemment à coeur et que nous acceptons de renouveler’, (souligné par la cour)

– par courriel du 7 février 2022, M. [R], gérant de la SCEP, a communiqué à la société Delta Construction les éléments concernant la revue [Localité 4]-18, en indiquant ‘vous souhaitant bonne réception, je vous remercie de l’attention portée à ma demande de renouvellement’,(souligné par la cour)

– le 2 mars 2022, M. [R] a adressé un bon de commande pour la revue [Localité 4]-18 à la société Sarpi en qualifiant celle-ci de ‘demande de renouvellement’, (souligné par la cour)

– dans son attestation du 30 août 2023, Mme [I], directrice adjointe de la clinique [5], a certifié avoir signé un engagement avec la SCEP pour un encart publicitaire dans la revue [Localité 4]-18 en pensant avoir participé au soutien de l’Amicale des sapeurs pompiers,

– dans son attestation du 30 août 2023, Mme [S], directrice de la communication de la mairie de [Localité 6], a certifié que ‘comme chaque année au printemps, j’ai été sollicité en juin 2023 par la SCEP pour renouveler l’insertion publicitaire de la Ville de [Localité 6] dans le magazine [Localité 4] 18. L’achat de cet encart publicitaire (…) est budgété chaque année au titre du soutien de la Ville à l’Amicale des sapeurs pompiers. Je n’ai pas été informé par mon interlocuteur d’un quelconque changement et étais donc dans l’ignorance de la rupture de collaboration entre l’amicale des sapeurs pompiers de [Localité 4] Métropole et la régie publicitaire SCEP (…). Je précise que si j’avais été informée de ce changement, je n’aurais pas renouvelé l’insertion publicitaire de la ville dans le magazine puisque ce quart de page publicitaire est acheté chaque année au titre du soutien de la ville à l’Amicale exclusivement.’ (souligné par la cour)

– lors de ces démarchages, M. [R], gérant de la SCEP, fournissait un bon de commande à l’en-tête ‘[Localité 4]-18″ comportant en haut à gauche une image d’un casque de pompier,

– dans plusieurs courriels de juin et juillet 2022, la société BHM France, nouveau prestataire de l’Amicale des sapeurs pompiers du secteur d’intervention de [Localité 4] Métropole, constatait lors de ses interventions que nombre d’annonceurs avaient déjà été démarchés par la SCEP en ayant ‘l’intime convication de le faire pour les sapeurs-pompiers de [Localité 4] Métropole’.

Il résulte de ces éléments que la SCEP a :

– par son discours évoquant notamment ‘le renouvellement’ des engagements passés,

– par la remise lors de ses démarchages d’un bon de commande où figure une image de casque de pompier ainsi que la revue annuelle précédente,

créé et entretenu auprès des annonceurs une confusion entre, d’une part, sa nouvelle revue [Localité 4]-18, qu’il dit désormais consacrée aux métiers de la sécurité et non plus aux sapeurs-pompiers et, d’autre part, la revue de l’Amicale des sapeurs pompiers de [Localité 4] Métropole, la plupart des annonceurs ayant cru réitérer leur engagement auprès de ladite Amicale en soutien à l’action des sapeurs-pompiers.

Ces agissements déloyaux, consistant à se revendiquer comme agissant pour le compte de l’Amicale des sapeurs pompiers de [Localité 4] Métropole, caractérisent un trouble manifestement illicite qu’il appartient au juge des référés de faire cesser immédiatement selon les modalités précisées dans le dispositif ci-après.

En revanche, il n’est pas rapporté la preuve d’une utilisation abusive par la SCEP des marques dont elle est titulaire, à savoir la marque verbale ‘[Localité 4]-18″ par elle déposée le 17 juillet 2003 sous le n°3236862 et la marque figurative déposée par elle le 30 juin 2021 sous le n°4783306, les éléments du dossier ne démontrant avec l’évidence requise devant le juge des référés que la SCEP se serait appropriée les signes distinctifs de l’Amicale et aurait frauduleusement déposé les marques litigieuses dans le but de capter un marché, étant observé que par courrier du 28 avril 2022, l’appelante a écrit au gérant de la SCEP qu’elle abandonnait l’utilisation de la marque et du logo. L’appelante sera en conséquence déboutée de sa demande visant à enjoindre la SCEP de cesser d’utiliser les marques dont celle-ci est titulaire.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. Sur ce fondement, la SCEP supportera les dépens de première instance et d’appel.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

Sur ce fondement, la SCEP sera condamné à payer la somme de 2.500 euros à l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme l’ordonnance déférée sauf en ce qu’elle a déclaré irrecevable la demande de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole au nom et pour le compte de toute autre organisation représentant les sapeurs-pompiers,

Statuant à nouveau dans cette limite,

Enjoint à la société de communication, d’édition et de presse (SCEP) de cesser tout démarchage en se revendiquant de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, comme agissant pour le compte de l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole,

Dit que ces cessations devront intervenir dans les 15 jours de la signification du présent arrêt à peine, passé ce délai, d’une astreinte de 300 € par jour de retard et par fait constaté pendant une durée de 3 mois,

Réserve la liquidation de l’astreinte au juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux,

Condamne la société de communication, d’édition et de presse (SCEP) à payer à l’association Amicale des Sapeurs Pompiers du Secteur d’Intervention de [Localité 4] Métropole la somme de 2.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société de communication, d’édition et de presse (SCEP) aux dépens de première instance et d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte de la condamnation de la SCEP par l’Amicale des Sapeurs Pompiers ?

La condamnation de la SCEP (Société de Communication, d’Édition et de Presse) par l’Amicale des Sapeurs Pompiers découle d’une confusion créée par cette dernière dans l’esprit des annonceurs après la rupture de leurs relations commerciales.

Cette confusion a été qualifiée de trouble manifestement illicite selon l’article 835 du code de procédure civile. En effet, malgré la cessation de leur contrat, la SCEP a continué à démarcher des annonceurs en se présentant comme le partenaire de l’Amicale, ce qui a induit en erreur les annonceurs sur la nature de leur relation.

Quelles sont les implications de l’article 835 du code de procédure civile ?

L’article 835 du code de procédure civile permet au président du tribunal judiciaire de prescrire des mesures conservatoires ou de remise en état en référé, même en présence d’une contestation sérieuse.

Ces mesures peuvent être ordonnées pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans ce contexte, le trouble manifestement illicite est défini comme toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui constitue une violation évidente de la règle de droit. Cela signifie que le juge des référés peut agir rapidement pour protéger les droits des parties concernées.

Comment la SCEP a-t-elle agi après la rupture de contrat ?

Après la rupture de contrat avec l’Amicale des Sapeurs Pompiers, la SCEP a continué à démarcher des annonceurs pour l’édition de la revue [Localité 4]-18.

Elle s’est présentée comme le représentant de l’Amicale, créant ainsi une ambiguïté sur sa relation avec celle-ci. Les actions de la SCEP ont été qualifiées de déloyales, car elles ont induit en erreur les annonceurs, qui pensaient encore soutenir l’Amicale en renouvelant leurs engagements publicitaires.

Quelles preuves ont été présentées pour soutenir les accusations contre la SCEP ?

De nombreuses pièces ont été versées aux débats pour soutenir les accusations contre la SCEP.

Des courriers et des attestations d’annonceurs ont été présentés, indiquant qu’ils avaient été démarchés par la SCEP en pensant agir pour le compte de l’Amicale. Par exemple, des annonceurs ont mentionné avoir reçu des demandes de renouvellement de leurs engagements publicitaires, ce qui a contribué à la confusion sur la continuité de leur relation avec l’Amicale.

Quelle a été la décision de la cour d’appel de Bordeaux ?

La cour d’appel de Bordeaux a infirmé l’ordonnance de référé du tribunal judiciaire, enjoignant à la SCEP de cesser tout démarchage en se revendiquant comme agissant pour le compte de l’Amicale des Sapeurs Pompiers.

La cour a également condamné la SCEP à verser une somme de 2.500 euros à l’Amicale pour couvrir les frais de la procédure, en plus des dépens de première instance et d’appel. Cette décision vise à protéger les droits de l’Amicale et à mettre fin aux pratiques déloyales de la SCEP.


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