Délai accordé pour relogement en raison de circonstances exceptionnelles

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Délai accordé pour relogement en raison de circonstances exceptionnelles

L’Essentiel : Par un bail daté du 26 septembre 2016, Mme [P] [X] a accordé à M. [Z] [L] et autres un bail à usage d’habitation. Le 19 octobre 2023, le juge a constaté la résiliation du bail et ordonné l’expulsion des locataires, fixant une indemnité d’occupation à 770 €. Un commandement de quitter les lieux a été délivré le 17 septembre 2024, suivi d’une demande de délai de 12 mois par les occupants. Lors de l’audience du 5 décembre 2024, le juge a examiné les arguments des parties et, tenant compte de la situation des occupants, a accordé le délai demandé.

Constitution du bail

Par un bail daté du 26 septembre 2016, Mme [P] [X] épouse [E] a accordé à M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] un bail à usage d’habitation, avec un loyer mensuel de 750 € et 20 € de provisions sur charges.

Résiliation du bail et ordonnance d’expulsion

Le 19 octobre 2023, le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille a constaté la résiliation du bail au 30 septembre 2022, suite à un congé pour vendre signifié le 31 mars 2022. Il a ordonné l’expulsion des locataires et fixé une indemnité d’occupation à 770 €.

Commandement de quitter les lieux

Un commandement de quitter les lieux a été délivré le 17 septembre 2024, entraînant une assignation le 27 septembre 2024 par M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M], sollicitant un délai de 12 mois pour quitter les lieux.

Audience et écritures des parties

Lors de l’audience du 5 décembre 2024, les parties ont décidé de s’en remettre à leurs écritures respectives. M. [Z] [L] et Mme [S] [J] bénéficient de l’aide juridictionnelle.

Motivation du jugement

Le juge a examiné les articles L412-1, L412-3 et L412-4 du code des procédures civiles d’exécution, précisant que le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants, mais ne peut proroger le délai de deux mois suivant le commandement. La demande de prorogation a été rejetée.

Arguments des parties

Mme [P] [X] épouse [E] s’oppose à la demande de délais, arguant de sa volonté de vendre son bien depuis septembre 2022 pour des raisons financières, tout en soulevant la mauvaise foi des demandeurs. En revanche, M. [Z] [L], Mme [S] [J] et Mme [U] [I] justifient de l’impossibilité de se reloger dans des conditions normales, ayant déposé une demande de logement social.

Situation des occupants

Mme [U] [I] veuve [M], âgée de 84 ans, souffre d’un handicap l’empêchant de se déplacer seule. M. [Z] [L] et Mme [S] [J] ont deux enfants mineurs. Les occupants ont toujours payé leur loyer et l’indemnité d’occupation, ce qui témoigne de leur bonne foi.

Décision du juge

En raison de l’impossibilité de relogement, de la bonne foi des occupants et de la présence d’enfants mineurs et d’une personne âgée en situation de handicap, le juge a accordé un délai de 12 mois pour quitter les lieux, assorti d’une clause résolutoire en cas de non-paiement de deux loyers.

Dépens et exécution provisoire

Chaque partie conserve la charge de ses dépens, et il n’y a pas lieu d’appliquer l’article 700 du code de procédure civile. La décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution dans le cadre de la demande de prorogation du délai de quitter les lieux ?

L’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution stipule que :

« Le juge peut, à la demande de l’occupant, supprimer ou réduire le délai de deux mois qui suit le commandement de quitter les lieux. »

Cet article précise que le juge a la possibilité de réduire le délai, mais ne permet pas de proroger ce dernier.

Dans le cas présent, la demande de prorogation formulée par M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] a été rejetée, car la loi ne prévoit pas cette possibilité.

Ainsi, le juge a statué en conformité avec l’article L412-1, en rappelant que la demande de prorogation n’était pas fondée sur les dispositions légales en vigueur.

Quelles sont les conditions d’octroi de délais selon l’article L412-3 du code des procédures civiles d’exécution ?

L’article L412-3 du code des procédures civiles d’exécution énonce que :

« Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. »

Cet article permet donc au juge d’accorder des délais aux occupants lorsque leur relogement est difficile.

Dans l’affaire en question, les demandeurs ont justifié leur impossibilité de se reloger dans des conditions normales, en mettant en avant leur demande de logement social et la situation de Mme [U] [I] veuve [M], qui souffre d’un handicap.

Le juge a pris en compte ces éléments pour accorder un délai de 12 mois, en considérant la bonne foi des occupants et leur situation familiale.

Comment l’article L412-4 du code des procédures civiles d’exécution encadre-t-il la durée des délais accordés ?

L’article L412-4 du code des procédures civiles d’exécution précise que :

« La durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. »

Cet article établit donc un cadre strict concernant la durée des délais accordés par le juge.

Dans le cas présent, le juge a accordé un délai de 12 mois, ce qui est conforme aux dispositions de l’article L412-4.

Il a également pris en compte divers facteurs, tels que la bonne ou mauvaise volonté des occupants, leur situation personnelle, ainsi que le droit à un logement décent.

Ces considérations ont permis de justifier la décision du juge d’accorder un délai maximal, tout en respectant les limites légales.

Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans cette affaire ?

L’article 700 du code de procédure civile stipule que :

« La partie qui perd le procès peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. »

Dans cette affaire, le juge a débouté Mme [P] [X] épouse [E] de sa demande au titre de l’article 700.

Cela signifie que, bien qu’elle ait été la partie demanderesse, elle n’a pas obtenu gain de cause sur ce point.

Le juge a décidé que chaque partie conserverait la charge de ses dépens, ce qui implique que les frais engagés par chaque partie ne seront pas remboursés par l’autre.

Cette décision est conforme à l’esprit de l’article 700, qui vise à éviter des condamnations systématiques et à tenir compte des circonstances de chaque affaire.

Quelle est la nature de l’exécution provisoire selon l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution ?

L’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution dispose que :

« La décision du juge est exécutoire de plein droit par provision. »

Cela signifie que la décision rendue par le juge est immédiatement exécutoire, sans qu’il soit nécessaire d’attendre l’expiration d’un délai ou l’issue d’un éventuel appel.

Dans cette affaire, le juge a rappelé que son jugement bénéficiait de l’exécution provisoire de droit, ce qui permet aux parties de mettre en œuvre immédiatement les dispositions du jugement.

Cette exécution provisoire est particulièrement importante dans les affaires d’expulsion, car elle permet de garantir que les décisions de justice soient appliquées rapidement, tout en respectant les droits des occupants.

Ainsi, les demandeurs doivent quitter les lieux dans le délai imparti, même si des recours peuvent être envisagés.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MARSEILLE
JUGE DE L’EXECUTION

DOSSIER : N° RG 24/10992 – N° Portalis DBW3-W-B7I-5OXL
MINUTE N° : 25/

Copie exécutoire délivrée le 16/01/2025
à Me LEVY
Copie certifiée conforme délivrée le 16/01/2025
à Me GUILLET
Copie aux parties délivrée le 16/01/2025

JUGEMENT DU 16 JANVIER 2025

COMPOSITION DU TRIBUNAL

PRESIDENT : Madame PHILIPS, Vice Présidente
GREFFIER : Madame RAMONDETTI, Greffière

L’affaire a été examinée à l’audience publique du 05 Décembre 2024 du tribunal judiciaire DE MARSEILLE, tenue par Madame PHILIPS, Vice Présidente juge de l’exécution par délégation du président du tribunal judiciaire de Marseille, assistée de Madame RAMONDETTI, Greffière.

L’affaire oppose :

DEMANDEURS

Monsieur [Z] [L]
né le 04 Février 1981 à [Localité 4] (TUNISIE), demeurant [Adresse 3]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-010236 du 14/08/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)

représenté par Maître Sandy LEVY, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [S] [J] épouse [L]
née le 26 Juin 1983 à [Localité 2], demeurant [Adresse 3]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2024-010912 du 09/08/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Marseille)

représentée par Maître Sandy LEVY, avocat au barreau de MARSEILLE

Madame [U] [I] veuve [M]
née le 11 Mai 1940 à ALGERIE (99352), demeurant [Adresse 3]

représentée par Maître Sandy LEVY, avocat au barreau de MARSEILLE

DEFENDERESSE

Madame [P] [X] épouse [E]
née le 18 Février 1947 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Maître Paul GUILLET, avocat au barreau de MARSEILLE

Al’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré. Le président a avisé les parties que le jugement serait prononcé le 16 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe de la juridiction.

NATURE DE LA DECISION : contradictoire et en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Par bail du 26 septembre 2016, Mme [P] [X] épouse [E] a consenti à M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] un bail à usage d’habitation moyennant le paiement d’un loyer de 750 €, outre 20 € de provisions sur charges.

Par ordonnance de référé du 19 octobre 2023, le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille a constaté la résiliation du bail au 30 septembre 2022, suite au congé pour vendre signifié le 31 mars 2022, ordonné l’expulsion des locataires, fixé une indemnité d’occupation à 770 €.

Un commandement de quitter les lieux a été délivré le 17 septembre 2024.

Par assignation du 27 septembre 2024, M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] ont sollicité un délai de 12 mois pour quitter les lieux.

A l’audience du 05 décembre 2024, les parties s’en rapportent à leurs écritures.

Vu l’assignation de M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] ;

Vu les conclusions de Mme [P] [X] épouse [E] ;

M. [Z] [L] et Mme [S] [J] bénéficient de l’aide juridictionnelle.

MOTIVATION

Vu l’article L412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;

Cet article donne la possibilité au juge de supprimer ou réduire le délai de deux mois qui suit le commandement et non pas de proroger ce délai.

La demande en prorogation sera donc rejetée.
L’article L412-3 du code des procédures civiles d’exécution prévoit que « le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de lieux habités ou de locaux à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales. »
L’article L412-4 du même code précise que « La durée des délais prévus à l’article L. 412-3 ne peut, en aucun cas, être inférieure à un mois ni supérieure à un an. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement. Il est également tenu compte du droit à un logement décent et indépendant, des délais liés aux recours engagés selon les modalités prévues aux articles L. 441-2-3 et L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l’habitation et du délai prévisible de relogement des intéressés. »

En l’espèce, Mme [P] [X] épouse [E] s’oppose à la demande de délais. Elle fait valoir qu’elle souhaite vendre son bien depuis septembre 2022, afin de lui assurer des revenus suffisants ; ses revenus actuels étant de 1.600 € par mois. Elle soulève la mauvaise foi des demandeurs, qui se prévalent du handicap de Mme [I] veuve [M], alors qu’ils n’ont pas signalé la présence d’une personne souffrant d’un handicap dans leur demande de logement social. Par ailleurs, elle souligne que les demandeurs ne justifient pas de leurs revenus.

M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] justifient de l’impossibilité de se reloger dans des conditions normales, en ce qu’ils ont déposé une demande de logement social le 13 janvier 2017 et d’un renouvellement de la demande le 29 mai 2024.

Mme [U] [I] veuve [M], âgée de 84 ans, justifie de ce qu’elle est atteinte d’un handicap qui ne lui permet pas de se déplacer, ni de rester dans une position debout ou assise prolongée. En outre, elle ne peut vivre seule.

M. [Z] [L] et Mme [S] [J] ont deux enfants mineurs.

M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] sont de bonne foi en ce qu’ils ont toujours payé leur loyer, puis l’indemnité d’occupation.

En raison de l’impossibilité de relogement dans des conditions normales, de la bonne foi des occupants qui ont toujours payé les loyers et l’indemnité d’occupation, ainsi que de la présence d’enfants mineurs et d’une personne âgée en situation de handicap et de perte d’autonomie, il y a lieu d’accorder un délai de 12 mois aux demandeurs.
Ce délai sera assorti d’une clause résolutoire en cas de non paiement de deux loyers.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Chaque partie conservera la charge de ses dépens.

Il n’y a pas lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur l’exécution provisoire :

En vertu de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution, la décision du juge est exécutoire de plein droit par provision.

PAR CES MOTIFS,

Le juge de l’exécution, statuant par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition du public au greffe,

ACCORDE à M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] un délai de 12 mois pour quitter les lieux ;

DIT que l’indemnité d’occupation devra être payée au plus tard le 10 de chaque mois et que M. [Z] [L], Mme [S] [J] épouse [L] et Mme [U] [I] veuve [M] seront déchus de leur droit à se maintenir dans les lieux en cas de non paiement de deux loyers, consécutifs ou non ;

DÉBOUTE Mme [P] [X] épouse [E] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens ;

REJETTE tous autres chefs de demandes ;

RAPPELLE que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de droit ;

La juge de l’exécution a signé avec le greffier ayant reçu la minute.  

LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION


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