Délai de décision et mainlevée des soins psychiatriques : un rappel des droits du patient

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Délai de décision et mainlevée des soins psychiatriques : un rappel des droits du patient

L’Essentiel : Depuis le 9 janvier 2025, un bénéficiaire de soins psychiatriques est sous une mesure d’hospitalisation complète au centre hospitalier de [Localité 2], décidée par un représentant de l’État en raison d’un risque grave pour la sûreté des personnes. Le 13 janvier 2025, le préfet a saisi le tribunal judiciaire pour statuer sur cette mesure. Le 21 janvier, un magistrat a ordonné le maintien de l’hospitalisation. L’avocate du bénéficiaire a contesté cette décision, arguant qu’elle était intervenue après le délai légal. Le tribunal a finalement levé la mesure, constatant l’irrégularité de la procédure.

Contexte de l’Affaire

Depuis le 9 janvier 2025, un patient, désigné ici comme un bénéficiaire de soins psychiatriques, est sous une mesure d’hospitalisation complète au centre hospitalier de [Localité 2]. Cette décision a été prise par le représentant de l’État en raison d’un risque grave d’atteinte à la sûreté des personnes ou de troubles à l’ordre public, conformément à l’article L. 3213-1 du code de la santé publique.

Procédure Judiciaire

Le 13 janvier 2025, le préfet du Val d’Oise a saisi le tribunal judiciaire pour qu’il se prononce sur la mesure de soins. Le 21 janvier 2025, le magistrat a ordonné le maintien de l’hospitalisation. Un appel a été interjeté par le patient le 30 janvier 2025, et une audience a eu lieu le 5 février 2025, bien que le préfet et le centre hospitalier n’aient pas comparu.

Arguments de la Défense

L’avocate du patient a demandé la levée de la mesure de soins, arguant que la décision du magistrat était intervenue après le délai légal de 12 jours, qui aurait dû expirer le 20 janvier 2025. Elle a également soulevé des irrégularités concernant l’absence de documents médicaux nécessaires à la procédure.

Déclarations du Patient

Lors de l’audience, le patient a exprimé son souhait de rentrer chez lui, mentionnant qu’il était handicapé depuis un accident de la voie publique. Il a également indiqué qu’il ne se souvenait pas toujours des médicaments qu’il prenait, bien qu’il ait reçu des soins appropriés à l’hôpital.

Décision du Tribunal

Le tribunal a déclaré l’appel recevable et a constaté que la mesure d’hospitalisation complète du patient devait être levée, car la décision du magistrat était intervenue après le délai légal. Par conséquent, la mainlevée de l’hospitalisation a été ordonnée, et les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel interjeté par le patient a été effectué dans les délais légaux, ce qui le rend recevable.

En effet, selon l’article 901 du code de procédure civile, « l’appel est formé dans un délai de un mois à compter de la notification de la décision ».

Dans cette affaire, le patient a interjeté appel le 30 janvier 2025, ce qui est conforme aux exigences légales.

Ainsi, l’appel doit être déclaré recevable.

Sur la demande de levée de la mesure de soins sans consentement

La demande de levée de la mesure de soins sans consentement repose sur les dispositions de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique.

Cet article stipule que :

« I.-L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire… ait statué sur cette mesure :

1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission… »

Dans le cas présent, le patient a été admis le 9 janvier 2025, et le magistrat a rendu sa décision le 21 janvier 2025, soit après le délai de 12 jours.

Ainsi, conformément à l’article L. 3211-12-1 V, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète est acquise à l’issue de ce délai, soit le 20 janvier 2025.

Par conséquent, la demande de levée de la mesure de soins sans consentement doit être accueillie.

Sur les irrégularités soulevées par le conseil du patient

Le conseil du patient a soulevé plusieurs irrégularités, dont l’absence de jonction du certificat médical initial à l’arrêté d’admission et l’absence de recueil des observations du patient dans le certificat médical des 72 heures.

L’article L. 3211-12-1 II du code de la santé publique précise que :

« La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement d’accueil… »

L’absence de ces documents peut constituer une irrégularité dans la procédure.

Cependant, dans le cadre de la décision rendue, il n’est pas nécessaire d’examiner ces irrégularités, car la mainlevée de l’hospitalisation complète est acquise en raison du non-respect des délais.

Ainsi, bien que ces irrégularités soient notables, elles n’affectent pas la décision de levée de la mesure.

COUR D’APPEL

DE VERSAILLES

Chambre civile 1-7

Code nac : 14C

N° RG 25/00630 – N° Portalis DBV3-V-B7J-W7NJ

( Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)

Copies délivrées le :

à :

[B] [K]

Me Delphine BOURREE

CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 2]

ARS DU VAL D’OISE

Ministère Public

ORDONNANCE

Le 05 Février 2025

prononcé par mise à disposition au greffe,

Nous Monsieur David ALLONSIUS, Président, à la cour d’appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d’hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du 18 juillet 2011), assisté de Madame Maëva VEFOUR, Greffier, avons rendu l’ordonnance suivante :

ENTRE :

Monsieur [B] [K]

Actuellement au centre hospitalier De [Localité 2]

[Localité 2]

comparant, assisté de

Me Delphine BOURREE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 582, commis d’office

APPELANT

ET :

M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE

[Localité 2]

[Adresse 1]

[Localité 2]

non représenté

ARS DU VAL D’OISE

non représenté

INTIMES

ET COMME PARTIE JOINTE :

M. LE PROCUREUR GENERAL DE LA COUR D’APPEL DE VERSAILLES

non représenté à l’audience, ayant rendu un avis écrit

A l’audience publique du 05 Février 2025 où nous étions Monsieur David ALLONSIUS, Président, assisté de Madame Maëva VEFOUR, Greffier, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour;

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

[B] [K], né le 21 novembre 1975 à [Localité 3], fait l’objet depuis le 9 janvier 2025 d’une mesure de soins psychiatriques, sous la forme d’une hospitalisation complète, au centre hospitalier de [Localité 2], sur décision du représentant de l’Etat, en application de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique, pour risque grave d’atteinte à la sûreté des personnes ou de troubles grave à l’ordre public.

Le 13 janvier 2025, Monsieur le préfet du Val d’Oise a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire afin qu’il soit saisi conformément aux dispositions des articles L. 3211-12-1 et suivants du code de la santé publique.

Par ordonnance du 21 janvier 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de PONTOISE a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète.

Appel a été interjeté le 30 janvier 2025 par [B] [K].

Le 31 janvier 2025, [B] [K], le préfet du Val d’Oise et le centre hospitalier de [Localité 2] ont été convoqués en vue de l’audience.

Le procureur général représenté par Corinne MOREAU, avocate générale, a visé cette procédure par écrit le 31 janvier 2025, avis versé aux débats.

L’audience s’est tenue le 5 février 2025 en audience publique.

A l’audience, bien que régulièrement convoqués, le préfet du Val d’Oise et le centre hospitalier de [Localité 2] n’ont pas comparu.

Maître Delphine BOURREE, conseil de [B] [K], a fait parvenir ses conclusions au greffe qu’elle développe oralement.

Elle demande à titre principal la levée d’office de la mesure de soins sans consentement à l’expiration du délai de 12 jours soit depuis le 20 janvier 2025. [B] [K] a été admis en soins le 9 janvier 2025, or le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Pontoise a rendu sa décision le 21 janvier 2025 alors qu’il devait la rendre le 20 janvier 2025 au plus tard, jour de l’expiration du délai de 12 jours prévu par l’article L 3211-12-1 du code de la santé publique.

A titre subsidiaire, elle demande l’infirmation de l’ordonnance querellée et soulève finalement deux irrégularités en précisant qu’elle renonce à celle tirée de l’absence de notification de l’arrêté de maintien en soins psychiatriques sans consentement :

Irrégularité résultant de l’absence de jonction du certificat médical initial à l’arrêté d’admission

Irrégularité résultant de l’absence de recueil des observations du patient dans le certificat médical des 72 heures

[B] [K] a été entendu en dernier et a dit qu’il était handicapé, reconnu par la MDPH depuis 1976 suite à un accident de la voie publique. Un automobiliste a grillé un feu rouge. Il aimerait être chez lui. Le personnel à l’hôpital est gentil. Il ne sait pas ce qu’il prend comme médicaments, on lui dit les choses mais il ne s’en souvient pas forcément, ça peut lui revenir plus tard. Le soir, il prend un médicament mais pas le matin ni le midi.

L’affaire a été mise en délibéré.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de [B] [K] a été interjeté dans les délais légaux. Il doit être déclaré recevable.

Sur la demande de levée de la mesure de soins sans consentement

Selon les dispositions de l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique :

« I.-L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l’Etat dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L. 3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure :

1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 du même code. Le juge est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission ;

2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3. Le juge est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette décision ;

3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge en application du présent I ou des articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Toute décision du juge prise avant l’expiration de ce délai en application du 2° du présent I ou de l’un des mêmes articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1, ou toute nouvelle décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale fait courir à nouveau ce délai. Le juge est alors saisi quinze jours au moins avant l’expiration du délai de six mois prévu au présent 3°.

Toutefois, lorsque le juge a ordonné, avant l’expiration de l’un des délais mentionnés aux 1° à 3° du présent I, une expertise soit en application du III du présent article, soit, à titre exceptionnel, en considération de l’avis mentionné au II, ce délai est prolongé d’une durée qui ne peut excéder quatorze jours à compter de la date de cette ordonnance. L’hospitalisation complète du patient est alors maintenue jusqu’à la décision du juge, sauf s’il y est mis fin en application des chapitres II ou III du présent titre. L’ordonnance mentionnée au présent alinéa peut être prise sans audience préalable.

Le juge fixe les délais dans lesquels l’expertise mentionnée à l’avant-dernier alinéa du présent I doit être produite, dans une limite maximale fixée par décret en Conseil d’Etat. Passés ces délais, il statue immédiatement.

II.-La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l’avis motivé d’un psychiatre de l’établissement d’accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l’hospitalisation complète.

Lorsque le patient relève de l’un des cas mentionnés au II de l’article L. 3211-12, l’avis prévu au premier alinéa du présent II est rendu par le collège mentionné à l’article L. 3211-9.

III.-Le juge ordonne, s’il y a lieu, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète.

Lorsqu’il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures, afin qu’un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l’article L. 3211-2-1. Dès l’établissement de ce programme ou à l’issue du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa, la mesure d’hospitalisation complète prend fin.

Toutefois, lorsque le patient relève de l’un des cas mentionnés au II de l’article L. 3211-12, le juge ne peut décider la mainlevée de la mesure qu’après avoir recueilli deux expertises établies par les psychiatres inscrits sur les listes mentionnées à l’article L. 3213-5-1.

IV.-Lorsque le juge n’ordonne pas la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète, il statue, le cas échéant, y compris d’office, sur le maintien de la mesure d’isolement ou de contention.

V.-Lorsque le juge n’a pas statué avant l’expiration du délai de douze jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de six mois prévu au 3° du même I, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète est acquise à l’issue de chacun de ces délais.

Si le juge est saisi après l’expiration du délai de huit jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de quinze jours prévu au 3° du même I, il constate sans débat que la mainlevée de l’hospitalisation complète est acquise, à moins qu’il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l’origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense ».

En l’espèce, il est constant que [B] [K] a été admis en soins psychiatriques sans consentement à la demande du préfet du Val d’Oise le 9 janvier 2025.

Saisi le 13 janvier 2025, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Pontoise a rendu sa décision le 21 janvier 2025 soit au-delà du délai de 12 jours fixé par l’article L. 3211-12-1 I 1° du code de la santé publique ci-dessus rappelé, ce délai commençant à se computer « à compter de l’admission » soit dès le 9 janvier 2025 en sorte que la décision aurait dû être rendue le 20 janvier 2025 au plus tard.

En application des dispositions de l’article L. 3211-12-1 V du code de la santé publique, la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète de [B] [K] est acquise à l’issue du délai de 12 jours soit au 20 janvier 2025.

Il sera par conséquent fait droit au moyen soulevé et ordonné la mainlevée immédiate de l’hospitalisation complète de [B] [K].

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance réputée contradictoire,

Déclarons l’appel de [B] [K] recevable,

Faisons droit au moyen soulevé,

Ordonnons la mainlevée immédiate de l’hospitalisation complète de [B] [K], acquise au 20 janvier 2025,

Laissons les dépens à la charge du Trésor public.

Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Fait à VERSAILLES le 05 février 2025 à h

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


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