Délai de contestation et charge de la preuve en matière de droits à pension de retraite

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Délai de contestation et charge de la preuve en matière de droits à pension de retraite

L’Essentiel : M. [F] [O] a demandé la liquidation de sa pension de retraite, effective au 1er octobre 2008. La Caisse nationale d’assurance vieillesse a notifié une retraite de base, rectifiée en mars 2009. En octobre 2018, il a contesté cette décision, mais la commission a rejeté sa demande pour tardivité. M. [F] [O] a alors introduit un recours en mai 2019, arguant que le délai de deux mois pour saisir la commission ne commençait qu’à partir de la notification. La Cour a rappelé que le délai de prescription de cinq ans avait débuté en mars 2009, rendant son recours irrecevable.

Demande de liquidation de pension

L’assuré, M. [F] [O], a demandé la liquidation de ses droits à pension de retraite avec effet au 1er octobre 2008. La Caisse nationale d’assurance vieillesse lui a notifié, par une décision du 21 février 2009, une retraite de base d’un montant déterminé, rectifiée le 1er mars 2009.

Contestation de la décision

Le 24 octobre 2018, M. [F] [O] a saisi la commission de recours amiable de la caisse, alléguant des anomalies dans le calcul de ses droits à pension. Cependant, la commission a rejeté sa contestation, la considérant comme tardive.

Recours en justice

L’assuré a introduit un recours le 15 mai 2019 devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale, contestant la décision de la commission de recours amiable.

Arguments de l’assuré

M. [F] [O] a soutenu que la cour d’appel n’avait pas vérifié la date de notification de la décision de la caisse, ce qui aurait dû être fait pour établir la légitimité de son recours. Il a également affirmé que le délai de deux mois pour saisir la commission ne commençait qu’à partir de la notification de la décision, et non de la date à laquelle il a commencé à percevoir sa pension.

Réponse de la Cour

La Cour a rappelé que, selon l’article 2224 du code civil, les actions personnelles se prescrivent par cinq ans à compter du moment où le titulaire a eu connaissance des faits lui permettant d’exercer son droit. Elle a constaté que M. [F] [O] avait eu connaissance du montant de ses droits à pension au plus tard le 1er mars 2009, date à laquelle il a commencé à recevoir un rattrapage de sa pension.

Conclusion sur la prescription

La Cour a conclu que le délai de prescription avait commencé à courir à partir du 1er mars 2009 et qu’il était expiré lors de l’introduction du recours par l’assuré. Par conséquent, l’action de M. [F] [O] était prescrite, justifiant ainsi la décision de la cour d’appel de déclarer son recours irrecevable.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la durée de prescription applicable aux actions personnelles ou mobilières selon le code civil ?

La durée de prescription applicable aux actions personnelles ou mobilières est régie par l’article 2224 du code civil. Cet article stipule que :

« Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. »

Ainsi, dans le cadre de la présente affaire, il est essentiel de déterminer à quel moment l’assuré a eu connaissance des faits lui permettant d’exercer son droit à pension de retraite.

En l’espèce, il est établi que l’assuré a reçu un rattrapage de sa pension à compter du 1er mars 2009. Cela signifie qu’à cette date, il avait nécessairement connaissance du montant de ses droits à pension, ce qui déclenche le délai de prescription de cinq ans.

Quelles sont les conséquences de la notification de la décision de la caisse sur le délai de recours ?

La notification de la décision de la caisse est déterminante pour le déclenchement du délai de recours. Selon l’article R. 142-1 du code de la sécurité sociale :

« La commission de recours amiable des organismes de sécurité sociale doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle est formée la réclamation. »

Il est important de noter que la charge de la preuve de la date de notification incombe à la caisse. Dans le cas présent, l’assuré a contesté avoir reçu la notification de la décision de la caisse du 21 février 2009.

La cour d’appel a estimé que le délai avait couru à compter du 1er mars 2009, date à laquelle l’assuré a commencé à percevoir le rattrapage de sa pension. Cependant, cette interprétation soulève des questions sur la validité de la notification et sur le moment où l’assuré a réellement eu connaissance de la décision.

Comment la cour d’appel a-t-elle justifié l’irrecevabilité du recours de l’assuré ?

La cour d’appel a justifié l’irrecevabilité du recours de l’assuré en se fondant sur le fait que le délai de prescription de cinq ans, prévu par l’article 2224 du code civil, avait expiré.

En effet, l’assuré avait connaissance de ses droits à pension au plus tard le 1er mars 2009, date à laquelle il a reçu le rattrapage de sa pension.

Ainsi, le délai de prescription a commencé à courir à partir de cette date, et l’assuré n’a pas introduit son recours avant l’expiration de ce délai.

La cour a également fait référence à l’article 620, alinéa 1er, du code de procédure civile, qui permet de substituer un motif de pur droit à un motif critiqué, renforçant ainsi la légitimité de sa décision.

En conclusion, l’arrêt de la cour d’appel, déclarant le recours de l’assuré irrecevable, est légalement justifié par l’expiration du délai de prescription.

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 janvier 2025

Rejet

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 30 F-D

Pourvoi n° D 23-10.422

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [F] [O].
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 20 octobre 2022.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2025

M. [C] [F] [O], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° D 23-10.422 contre l’arrêt rendu le 18 mars 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 12), dans le litige l’opposant à la Caisse nationale d’assurance vieillesse, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Reveneau, conseiller, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de M. [F] [O], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la Caisse nationale d’assurance vieillesse, et l’avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Reveneau, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2022) et les productions, M. [F] [O] (l’assuré) ayant sollicité la liquidation de ses droits à pension de retraite avec effet au 1er octobre 2008, la Caisse nationale d’assurance vieillesse (la caisse) lui a notifié, par décision du 21 février 2009 rectifiée le 1er mars 2009, une retraite de base d’un certain montant.

2. Par un courrier du 24 octobre 2018, l’assuré, invoquant des anomalies dans le calcul de ses droits à pension de retraite, a saisi la commission de recours amiable de la caisse qui a rejeté sa contestation comme tardive.

3. L’assuré a saisi d’un recours, le 15 mai 2019, une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

4. L’assuré fait grief à l’arrêt de le déclarer irrecevable en sa demande, alors :

« 1°/ que la commission de recours amiable des organismes de sécurité sociale doit être saisie dans le délai de deux mois à compter de la notification de la décision contre laquelle est formée la réclamation ; que la
charge de la preuve de la date à laquelle l’assuré social a eu notification de la décision incombe à la caisse ; qu’au cas d’espèce, en s’abstenant de vérifier à quelle date l’assuré avait eu notification de la décision de la caisse du 21 février 2009 objet de la réclamation, après avoir portant rouvert les débats pour permettre à la caisse de justifier de cette date, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles R. 142-1 du code de la sécurité sociale et 668 du code de procédure civile ;

2°/ que seule la notification de la décision de la caisse déclenche le délai de deux mois pour saisir la commission de recours amiable, la circonstance que l’assuré ait perçu sa pension étant indifférente ; qu’au cas d’espèce, en estimant que le délai avait couru à compter du 1er mars 2009 dès lors que la décision de la caisse du 21 février 2009, notifiée par lettre simple, ne mentionnait les voies et délais de recours et que l’assuré ne contestait pas avoir reçu le « rattrapage de retraite » correspondant, quand ce dernier contestait avoir reçu la notification litigieuse, la cour d’appel a violé les articles R. 142-1 du code de la sécurité sociale et 668 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

5. Selon l’article 2224 du code civil, dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, applicable au litige, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

6. Il ressort des énonciations de l’arrêt et des productions qu’après une première liquidation de ses droits à pension au 1er octobre 2008, l’assuré a adressé à la caisse, les 22 octobre 2008 et 1er décembre 2008, divers bulletins de salaire relatifs aux années 1990, 1991, 1996, 1997 et 2000. Il a reçu à compter du 1er mars 2009 le versement d’un rattrapage du montant de sa pension de retraite versée à compter du 1er octobre 2008.

7. Il en résulte qu’à la date du 1er mars 2009, au plus tard, l’assuré avait nécessairement connaissance du montant de ses droits à pension en fonction de ces derniers bulletins de salaire.

8. Il s’ensuit que le délai instauré par l’article 2224 précité ayant ainsi couru à compter de cette date, était expiré lors de l’introduction par l’assuré de son recours, de sorte que son action était prescrite.

9. Par ce moyen de pur droit, suggéré par la défense, et substitué au motif critiqué, dans les conditions prévues par l’article 620, alinéa 1er, du code de procédure civile, l’arrêt qui déclare le recours de l’assuré irrecevable, se trouve légalement justifié.


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