Cour de cassation, 8 août 2018
Cour de cassation, 8 août 2018

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Apologie de terrorisme au bureau

Résumé

Le délit d’apologie d’actes de terrorisme, selon l’article 421-2-5 du code pénal, requiert un élément de publicité. Ce dernier peut être établi même dans un bureau fermé, si les propos sont tenus à haute voix. Un fonctionnaire a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour avoir justifié les actions de Daesh, déclarant que « Daesh c’était bien » et que la mort d’un prêtre était « une bonne chose ». La Cour de cassation a confirmé que ces propos, tenus dans un cadre professionnel, traduisaient une volonté de les rendre publics, constituant ainsi les éléments du délit.

Publicité du délit

Le délit d’apologie d’un acte de terrorisme au sens de l’article 421-2-5 du code pénal (« Le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l’apologie de ces actes est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende ») exige un élément préalable de publicité, lequel peut être constitué quand les propos sont prononcés à très haute voix y compris dans un bureau fermé au public (en l’occurrence à des collègues fonctionnaires liés avec le prévenu,  par une « communauté d’intérêts »).

Un fonctionnaire renvoyé en correctionnel

La chambre de l’instruction de la Cour de cassation, a confirmé le renvoi d’un fonctionnaire devant le tribunal correctionnel du chef d’apologie publique d’actes de terrorisme. Ce dernier avait tenu des propos justifiant les méthodes et actions criminelles de l’organisation terroriste Daesh, dans le bureau, fermé au public, de ses collègues appartenant, comme lui, à l’administration : « Daesh c’était bien », « le père  [prêtre à St Etienne du Rouvray] allait rejoindre son Dieu » ; cela était « une bonne chose » ; « tout le monde pense la même chose et je n’aurais de pitié que pour moi et mes enfants ».

Notion de publicité des propos

L’article 421 2-5 du code pénal, issu de la loi du 13 novembre 2014 ne se réfère pas à la notion de lieu, contrairement à l’infraction de provocation prévue et réprimée par les articles 23 et 24 de la loi de 1881, cette disposition incriminant le fait de « faire publiquement l’apologie » des actes de terrorisme. Si la détermination du caractère public du lieu n’est donc pas une condition nécessaire à la caractérisation du délit, elle constitue un des critères permettant d’apprécier le caractère public des propos tenus, à côté des critères liés à la recherche de la volonté de rendre public, les propos ou au contraire de l’existence d’une communauté d’intérêt exclusive du caractère public.

La jurisprudence de la haute cour s’attache à rechercher si l’auteur a une volonté de rendre public les propos, et considère le délit d’apologie de crime de guerre ou de crime contre l’humanité non constitué lorsque les circonstances sont exclusives de toute volonté de rendre les propos tenus publics (Crim. ,15 novembre 2015 ; Crim., 27 novembre 2012). Concernant le délit d’apologie du terrorisme, la Cour de cassation a récemment cassé une décision qui avait retenu que l’auteur de propos faisant l’apologie d’actes de terrorisme « se trouvait en présence des seuls gendarmes qui l’escortaient, dans un fourgon cellulaire ou dans les geôles du tribunal devant lequel il devait comparaître, circonstances exclusives de toute volonté de rendre lesdits propos publics » en considérant que de tels propos ont été tenus publiquement.

En l’occurrence, les propos du fonctionnaire ont été tenus à haute voix dans des circonstances traduisant une volonté de les rendre publics. Les éléments constitutifs du délit d’apologie publique d’actes de terrorisme apparaissaient ainsi suffisamment réunis et il existait des charges suffisantes justifiant le renvoi de l’intéressé devant une juridiction de jugement.

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