Cour de cassation, 7 juin 2017
Cour de cassation, 7 juin 2017

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Valeurs Actuelles : relaxe du directeur de la publication

Résumé

Le directeur de la publication de Valeurs Actuelles a été jugé coupable de provocation à la discrimination en raison d’une couverture controversée évoquant une « invasion cachée » des immigrés. Les titres utilisés, tels que « Naturalisés : L’invasion qu’on cache », ont été interprétés comme incitant à une perception négative des immigrés, notamment musulmans. Cependant, la Cour de cassation a finalement statué en faveur de la liberté d’expression, considérant que les propos, bien que polémiques, ne constituaient pas un appel à la haine ou à la violence. Cette décision souligne l’importance de la liberté d’expression dans le débat public sur l’immigration.

Couverture de magazine délictueuse

Le sujet de l’immigration est l’un des sujets sensibles en France, y compris devant les juridictions : le pendule balance entre délits de presse, liberté d’expression et droit à la caricature, spécialement vis-à-vis de la communauté musulmane. L’une des questions posées dans cette affaire était de déterminer si un journal peut s’exprimer (en termes virulents ou non)  contre l’arrivée d’immigrés sans tomber sous le coup du délit de provocation publique à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes déterminées.

Le directeur de la publication du magazine Valeurs actuelles avait ainsi été jugé coupable du chef de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence nationale, raciale ou religieuse (paiement d’une amende de 2 000 euros). En cause, l’une des couvertures du magazine faisant état d’une « invasion cachée » des immigrés, notamment par le biais de la procédure de naturalisation.

« Invasion des immigrés »

Le délit avait été jugé constitué au regard des titres utilisés : « Naturalisés : L’invasion qu’on cache Deux français sur trois contre les naturalisations massives de Valls Islam, immigration: comment la gauche veut changer le peuple ; Michèle Tribalat : Le poids des musulmans n’a cessé d’augmenter ».   En l’occurrence, la notion d’invasion sous entendait un « envahissement extérieur en relation avec le phénomène massif de personnes non désirées, qui progressivement change la nature démographique du pays ».  Les propos avaient été associés à la reproduction d’un buste de Marianne revêtue d’un voile intégral noir.

L’immigration : un débat d’intérêt général

Saisie de l’affaire et en présence d’une frontière trop ténue, la Cour de cassation a fait primer le principe constitutionnel de liberté d’expression : le délit de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence nationale, raciale ou religieuse n’a pas été jugé constitué. Les propos en cause, portant sur une question d’intérêt public relative à la politique gouvernementale de naturalisation, ne dépassaient pas les limites admissibles de la liberté d’expression. Même si leur formulation pouvait légitimement heurter les personnes de confession musulmane, ils ne contenaient néanmoins pas d’appel ou d’exhortation à la discrimination, à la haine ou à la violence à leur égard.

Piqure de rappel juridique sur les libertés fondamentales : l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme pose que la liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires dans une société démocratique. Au sens de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881, le délit de provocation n‘est   caractérisé que si les propos incriminés tendent à inciter le public à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes déterminées.

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