Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Relayer un commentaire diffamant dans la presse
→ RésuméLe Président du conseil départemental de Dordogne a porté plainte pour diffamation après qu’un internaute ait critiqué son utilisation des fonds publics sur un site de presse. Le commentaire, qui évoquait le financement de sa famille et de ses amis, a conduit à des poursuites contre le directeur de publication et l’auteur du commentaire. Cependant, la Cour de cassation a censuré la condamnation, affirmant que l’exception de bonne foi s’appliquait. Les juges ont reconnu que les propos, tenus dans un contexte politique, portaient sur un sujet d’intérêt général et reposaient sur des bases factuelles suffisantes.
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La liberté d’expression joue à plein en matière d’usage, par les élus, des fonds publics et sur la transparence de la vie politique.
Diffamation contre le Président du conseil départemental
Le Président du conseil départemental de Dordogne, a
déposé plainte et s’est constitué partie civile pour diffamation publique, à la
suite de la mise en ligne, sur le site internet d’un quotidien de presse, du commentaire d’un
internaute «Terminal zéro nous oblige même à financer avec notre argent
sa famille, bon nombre de ses amis socialistes, etc., etc. Quand les électeurs
vont-ils enfin comprendre et élire des gens de la société civile compétents et
honnêtes ?». Le juge d’instruction
a renvoyé devant le tribunal correctionnel le directeur de la publication du
quotidien et de son site internet, en qualité d’auteur, et l’auteur du commentaire,
en qualité de complice.
Condamnation censurée
Les juges du fond ont retenu le délit de diffamation
publique envers un fonctionnaire, dépositaire de l’autorité publique ou un
citoyen chargé d’un service public par parole, écrit, image ou moyen de
communication au public par voie électronique, a prononcé sur la peine et sur
les intérêts civils. Cette condamnation a été censurée par la Cour de cassation.
Exception de bonne foi
En effet, l’exception de bonne foi est admise lorsque
les propos diffamatoires, tenus dans un contexte politique, portent sur un
sujet d’intérêt général et reposent sur une base factuelle suffisante. En l’espèce,
les propos poursuivis, tenus dans un contexte électoral, discutent la
compétence et l’honnêteté d’un élu en raison de l’utilisation qu’il fait des
fonds publics en employant de nombreux membres de sa famille et de son parti
politique, et incitent les électeurs à voter pour des candidats issus de la société
civile.
La liberté d’expression prime
La liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où elles constituent des mesures nécessaires ; en matière de diffamation, lorsque l’auteur des propos soutient qu’il était de bonne foi, il appartient aux juges, qui examinent à cette fin si celui-ci s’exprimait dans un but légitime, était dénué d’animosité personnelle, s’est appuyé sur une enquête sérieuse et a conservé prudence et mesure dans l’expression, d’apprécier ces critères d’autant moins strictement qu’ils constatent, en application de ce même texte, tel qu’interprété par la Cour européenne, que les propos s’inscrivaient dans un débat d’intérêt général et reposaient sur une base factuelle suffisante.
Le message incriminé, qui s’inscrivait dans le débat d’intérêt général sur l’usage, par les élus, des fonds publics et sur la transparence de la vie politique et poursuivait en conséquence un but légitime, reposait sur une base factuelle suffisante, de sorte que la bonne foi ne pouvait être refusée au prévenu aux motifs du recours par celui-ci à l’anonymat, pourtant fréquent sur le réseau internet, d’une animosité personnelle qui lui était prêtée de ce seul fait, et du ton affirmatif du propos, et alors que ledit propos n’excédait pas les limites admissibles de la liberté d’expression. Télécharger la décision
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