Cour de cassation, 29 janvier 2025, Pourvoi n° 23-20.730
Cour de cassation, 29 janvier 2025, Pourvoi n° 23-20.730

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Prolongation de rétention et irrecevabilité d’appel : enjeux de motivation et de compréhension.

Résumé

Contexte de la rétention administrative

M. [Z], de nationalité malienne et en situation irrégulière en France, a été placé en rétention administrative le 3 avril 2023. Le préfet de Seine-Saint-Denis a demandé le 5 avril 2023 au juge des libertés et de la détention de prolonger cette rétention conformément à la législation en vigueur.

Décision du juge des libertés

Le 6 avril 2023, le juge des libertés a prolongé la rétention administrative de M. [Z] pour une durée de vingt-huit jours. En réponse à cette décision, M. [Z] a interjeté appel.

Argumentation de M. [Z]

M. [Z] conteste l’irrecevabilité de son appel, arguant que le délégué du premier président ne peut déclarer une déclaration d’appel irrecevable que si celle-ci est tardive ou non motivée. Il soutient que sa déclaration était motivée, car elle exprimait son incompréhension face à son éloignement, ce qui ne devrait pas être interprété comme une contestation de la prolongation de sa rétention.

Réponse de la Cour

La Cour a rappelé que le premier président ou son délégué peut rejeter des déclarations d’appel manifestement irrecevables, mais que le caractère non fondé d’une contestation ne constitue pas une cause d’irrecevabilité. En déclarant l’appel de M. [Z] irrecevable, le premier président a mal interprété la nature de la contestation.

Conséquences de la cassation

La cassation prononcée ne nécessite pas un nouvel examen du fond de l’affaire, car les délais légaux pour statuer sur la mesure ont expiré, laissant ainsi la situation sans objet à juger.

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 janvier 2025

Cassation sans renvoi

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 65 F-D

Pourvoi n° G 23-20.730

Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [Z].
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 11 juillet 2023.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 29 JANVIER 2025

M. [S] [Z], domicilié chez M. [E] [Z], [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 23-20.730 contre l’ordonnance rendue le 8 avril 2023 par le premier président de la cour d’appel de Paris, dans le litige l’opposant au préfet de la Seine-Saint-Denis, domicilié [Adresse 3], défendeur à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. [Z], et l’avis de M. Aparisi, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 3 décembre 2024 où étaient présentes Mme Champalaune, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Ben Belkacem, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’ordonnance attaquée, rendue par le premier président d’une cour d’appel (Paris, 8 avril 2023), M. [Z], de nationalité malienne, en situation irrégulière sur le territoire français, a été placé en rétention administrative le 3 avril 2023.

2. Le 5 avril 2023, le préfet de Seine-Saint-Denis a saisi un juge des libertés et de la détention d’une demande de prolongation de la rétention en application de l’article L. 742-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

3. Par une ordonnance du 6 avril 2023, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative pour une durée de vingt-huit jours. M. [Z] a relevé appel de cette décision.

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 743-23 et R. 743-14 du CESEDA :

5. Selon le premier de ces textes, le premier président de la cour d’appel ou son délégué peut, par ordonnance motivée et sans avoir préalablement convoqué les parties, rejeter les déclarations d’appel manifestement irrecevables.

6. Selon le second, sont manifestement irrecevables au sens du premier notamment les déclarations d’appel non motivées ou formées tardivement.

7. Il s’en déduit que le caractère non fondé de la contestation ayant motivé l’appel ne constitue pas une cause d’irrecevabilité de la déclaration d’appel.

8. Pour déclarer irrecevable l’appel formé par M. [Z], le premier président retient que sa déclaration d’appel manifeste son incompréhension d’un éloignement dès lors qu’il est né à [Localité 2] et indique avoir saisi la cour administrative d’appel de [Localité 2], ce qui, en l’absence de détention d’un passeport, s’interprète comme une contestation de la décision d’éloignement dont il fait l’objet et non de la décision prolongeant la rétention, cependant que le juge administratif est seul compétent pour connaître de la légalité des décisions relatives au séjour et à l’éloignement.

9. En statuant ainsi, le premier président a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

10. Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

11. La cassation prononcée n’implique pas, en effet, qu’il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger.

 


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