Cour de cassation, 22 janvier 2025, Pourvoi n° 24-82.364
Cour de cassation, 22 janvier 2025, Pourvoi n° 24-82.364

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Accès limité aux pièces de procédure pour les parties civiles

Résumé

Ouverture de l’information

Une information a été ouverte concernant des faits graves, et M. [P] [B] ainsi que Mme [Y] [B], grands-parents de la victime [X] [B], se sont constitués partie civile dans cette affaire.

Demande de communication de pièces

L’avocat des grands-parents a demandé l’autorisation de communiquer diverses pièces du dossier de la procédure. Cependant, le juge d’instruction a rejeté cette demande par ordonnance du 15 mars 2024.

Appel de la décision

M. et Mme [B] ont décidé de faire appel de la décision du juge d’instruction qui a limité la communication des pièces à certaines cotes, tout en rejetant d’autres demandes de communication.

Critique de l’arrêt attaqué

Le moyen soulevé critique l’arrêt pour avoir accordé la communication de certaines pièces tout en refusant d’autres, en arguant que la liste des pièces demandées par l’avocat ne respectait pas les exigences de la procédure.

Arguments sur la communication des pièces

Il est soutenu que le refus de communication des pièces D1 à D456 est injustifié, car l’avocat avait bien précisé les numéros de cotes dans sa demande. De plus, il est affirmé que le président de la chambre de l’instruction a ajouté des conditions non prévues par la loi.

Motifs de rejet non conformes

Le président de la chambre de l’instruction a été critiqué pour avoir fondé son refus sur des motifs non prévus par la loi, notamment en se basant sur un risque abstrait de pression, sans justifications concrètes.

Erreur matérielle et risque de pression

Une erreur matérielle concernant le numéro de procédure a été relevée, mais cela n’a pas été jugé suffisant pour établir un risque d’excès de pouvoir. Les griefs soulevés à ce sujet n’ont pas été accueillis.

Décision de la Cour

La Cour a statué que le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs en refusant la communication de certaines pièces, sans justifications adéquates liées au risque de pression. L’annulation de la décision est donc encourue, avec renvoi pour la communication des pièces demandées.

N° X 24-82.364 F-D

N° 00061

GM
22 JANVIER 2025

ANNULATION PARTIELLE

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 22 JANVIER 2025

M. [P] [B] et Mme [Y] [B], parties civiles, ont formé un pourvoi contre la décision du président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Bordeaux, en date du 20 mars 2024, qui, dans l’information suivie contre M. [Z] [L] des chefs de viol et agression sexuelle, aggravés, enregistrement et détention d’images pédo-pornographiques, a rejeté leur demande de communication de pièces du dossier.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [P] [B], Mme [Y] [B], et les conclusions de M. Crocq, avocat général, après débats en l’audience publique du 11 décembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Une information a été ouverte des chefs susvisés.

3. M. [P] [B] et Mme [Y] [B], grands-parents de [X] [B], victime des faits poursuivis, se sont constitués partie civile.

4. Leur avocat a sollicité l’autorisation de leur communiquer diverses pièces du dossier de la procédure.

5. Par ordonnance du 15 mars 2024, le juge d’instruction a rejeté cette demande.

6. M. et Mme [B] ont relevé appel de cette décision.

Réponse de la Cour

Sur le moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches

8. Les demandeurs ne sauraient soutenir que le président de la chambre de l’instruction aurait excédé ses pouvoirs en leur refusant la remise, par leur avocat, de la copie des pièces de la cote relative à la détention provisoire et au contrôle judiciaire de la personne poursuivie, dès lors que ce refus est fondé sur l’existence d’un risque de pression, motif prévu par l’article 114, alinéa 9, du code de procédure pénale.

9. Ainsi, les griefs ne peuvent être accueillis.

Sur le moyen, pris en ses sixième et septième branches

10. Une erreur matérielle, portant sur le numéro d’enregistrement d’une procédure, et la teneur d’une décision prise sur une demande de communication de copies de pièces dans une procédure distincte ne peuvent caractériser un risque d’excès de pouvoir qui entacherait la décision attaquée.

11. Ainsi, les griefs ne peuvent être accueillis.

Mais sur le moyen, pris en ses trois premières branches

Vu l’article 114, alinéas 8 à 10, du code de procédure pénale :

12. Selon ce texte, l’avocat qui souhaite communiquer à son client une reproduction de la copie de la procédure d’information doit en informer le juge d’instruction et lui indiquer la liste des pièces concernées. Le juge d’instruction peut s’opposer à cette communication par une ordonnance spécialement motivée au regard des risques de pression sur les victimes, les parties à la procédure ou les personnes qui y concourent. Sa décision est susceptible de recours devant le président de la chambre de l’instruction qui statue par une ordonnance non susceptible de recours, sauf si elle fait apparaître un risque d’excès de pouvoir. Tel est le cas lorsque le président de la chambre de l’instruction ne justifie pas le refus de communication d’une pièce de la procédure par un risque de pression qu’il doit caractériser.

13. Pour rejeter la demande de l’avocat tendant à la communication à ses clients, parties civiles, de la reproduction de pièces de la procédure figurant à la cote des pièces de fond, intitulée cote D, la décision attaquée énonce qu’une telle demande doit comporter la liste des pièces concernées et ne peut porter, sans distinction, sur l’intégralité de la cote de fond de la procédure.

14. Pour rejeter cette même demande en ce qu’elle vise certaines pièces de procédure, figurant à la cote des pièces de renseignements de personnalité, intitulée cote B, le juge ajoute que seules certaines des pièces figurant à cette cote présentent un intérêt pour les parties civiles.

15. En refusant ainsi la communication de pièces de la procédure aux parties civiles, pour des motifs étrangers au risque de pression sur les témoins, les victimes, les personnes qui sont parties à la procédure ou qui y concourent, le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs.

16. L’annulation est, dès lors, encourue. Elle interviendra avec renvoi et portera sur le seul refus de communication des pièces des cotes B et D dont la copie a été sollicitée.

 


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