Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Licenciement contesté pour comportement inapproprié lors d’un événement d’entreprise
→ RésuméEngagement et croisière organiséeMme [N] a été engagée par la société SFR distribution en tant que vendeuse le 15 novembre 2010. Dans le cadre d’un concours interne, elle a participé à une croisière en Floride du 26 au 31 mars 2015, organisée par l’entreprise pour récompenser les lauréats. Incident et licenciementUn incident s’est produit lors de la croisière, entraînant le rapatriement de Mme [N] le 30 mars 2015. Le 29 avril suivant, elle a été licenciée, l’employeur lui reprochant d’avoir fumé le narguilé dans sa cabine, en présence d’une collègue enceinte, et d’avoir obstrué le détecteur de fumée, ce qui violait les règles de sécurité à bord. Arguments de l’employeurL’employeur a contesté la décision de la cour d’appel qui l’a condamné à verser des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il a soutenu que les actes de la salariée, bien qu’ayant eu lieu en dehors du lieu de travail, étaient liés à sa vie professionnelle et avaient mis en danger d’autres employés, justifiant ainsi le licenciement. Décision de la cour d’appelLa cour d’appel a jugé que Mme [N] ne se trouvait pas sous un lien de subordination au moment des faits, car ceux-ci avaient eu lieu lors d’un voyage organisé par l’employeur. Elle a également noté que l’employeur n’avait pas prouvé qu’un trouble caractérisé avait été causé à l’entreprise par les actions de la salariée. Conclusion de la courLa cour a conclu que les faits reprochés relevaient de la vie personnelle de la salariée et ne constituaient pas un manquement à ses obligations contractuelles. Par conséquent, le licenciement a été jugé sans cause réelle et sérieuse, et le moyen de l’employeur a été déclaré non fondé. |
SOC.
JL10
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 22 janvier 2025
Rejet
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 63 F-B
Pourvoi n° K 23-10.888
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 22 JANVIER 2025
La société SFR distribution, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 23-10.888 contre l’arrêt rendu le 23 novembre 2022 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l’opposant :
1°/ à Mme [L] [N], domiciliée chez M. [N], [Adresse 3],
2°/ à Pôle emploi, direction régionale Ile-de-France, dont le siège est [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Maitral, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société SFR distribution, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [N], après débats en l’audience publique du 10 décembre 2024 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Maitral, conseiller référendaire rapporteur, M. Seguy, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 23 novembre 2022), Mme [N], engagée en qualité de vendeuse par la société SFR distribution (la société) le 15 novembre 2010, a participé à une croisière en Floride organisée du 26 au 31 mars 2015 par la société pour récompenser les salariés lauréats d’un concours interne à l’entreprise.
2. A la suite d’un incident survenu lors de cette croisière, elle a été rapatriée le 30 mars 2015 et a été licenciée par lettre du 29 avril suivant, son employeur lui reprochant d’avoir, au mépris des règles de sécurité applicables à bord du bateau, fumé le narguilé dans sa cabine, en présence d’une autre salariée de l’entreprise enceinte, et obstrué le détecteur de fumée.
Réponse de la Cour
4. D’abord, un motif tiré de la vie personnelle du salarié ne peut justifier, en principe, un licenciement disciplinaire, sauf s’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail.
5. Ensuite, un trouble objectif dans le fonctionnement de l’entreprise résultant d’un fait tiré de la vie personnelle d’un salarié ne permet pas en lui-même de prononcer une sanction disciplinaire à l’encontre de celui par lequel il est survenu.
6. La cour d’appel, après avoir constaté que le licenciement avait été prononcé pour faute, a d’abord, retenu que, s’agissant d’un voyage touristique quoique payé par l’entreprise à titre de récompense, la salariée ne se trouvait pas au temps du travail lorsqu’elle a commis les agissements dont elle ne conteste d’ailleurs pas la réalité et ne se trouvait donc soumise à aucun lien de subordination et n’était même pas soumise aux règles en vigueur au sein de l’entreprise, puisque les faits s’étaient déroulés en dehors du lieu de travail.
7. Elle a, ensuite, relevé que la société ne démontrait pas un trouble caractérisé causé à l’entreprise, dont le fonctionnement était peu influencé par l’opinion des membres de l’équipage qui avaient pu être informés de l’incident, ni par les commentaires qu’avaient pu en faire les passagers et qu’aucune explication n’était donnée sur les éventuels effets de l’usage du narghilé sur la santé de la personne qui partageait la cabine de la salariée, ni même sur une éventuelle opposition de celle-ci à un tel usage.
8. De ces constatations et énonciations, dont il ressortait que les faits reprochés à la salariée relevaient de sa vie personnelle et ne pouvaient constituer un manquement aux obligations découlant de son contrat de travail, la cour d’appel, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, a exactement déduit que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse.
9. Le moyen n’est donc pas fondé.
Laisser un commentaire