Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Propriété immobilière et opposabilité des droits : enjeux de la publication des actes
→ RésuméPromesse de vente initialeLe 6 octobre 1981, [T] [V] a promis de vendre à [O] [A] deux parcelles cadastrées. [O] [A] a levé l’option le 4 octobre 1982 en versant le prix convenu. Décès de [T] [V] et héritiers[T] [V] est décédé le 18 juillet 1998, laissant derrière lui M. et Mme [F] ainsi que M. [D] [Y] comme héritiers. Rejet des demandes de nullitéLes demandes de [T] [V] et de ses héritiers visant à annuler la promesse de vente pour vices du consentement et à obtenir une rescision pour lésion ont été rejetées par des arrêts des 24 mai 1994 et 18 avril 2002. Création de la SCI L’EstagnetEn 2007, M. et Mme [F] ont fondé la société civile immobilière L’Estagnet, en y apportant les parcelles litigieuses, qui ont ensuite été transférées à une autre société civile immobilière, la SCI [Localité 6] l’Estagnet. Assignation des héritiers de [T] [V]Après le décès de [O] [A] en 2015, ses héritiers, M. [C] [A] et Mme [G] [A], ont assigné les héritiers de [T] [V] ainsi que les deux SCI et la société Immolab pour obtenir la perfection de la vente et la publication à la conservation des hypothèques. Décision de la cour d’appelLe 24 novembre 2015, la cour a statué que la promesse de vente valait vente depuis la levée d’option, considérant que les cessions postérieures au 4 octobre 1982 étaient inopposables aux droits de [O] [A] et de ses héritiers. Demande de la SCI [Localité 6] l’EstagnetLa SCI [Localité 6] l’Estagnet a assigné les consorts [A] pour faire valoir l’antériorité de la publication de son droit de propriété, soutenant que le droit résultant de l’arrêt de la cour d’appel lui était inopposable. Arguments des SCILes SCI ont contesté le rejet de leurs demandes, arguant que les actes non publiés étaient inopposables aux tiers et que la SCI L’Estagnet devait être considérée comme un tiers par rapport aux héritiers de [T] [V]. Réponse de la CourLa cour a constaté que M. et Mme [F] avaient agi en méconnaissance des engagements pris et des décisions de justice antérieures, concluant que la publication par la SCI L’Estagnet était en fraude des droits de l’acquéreur, justifiant ainsi le rejet des demandes des deux SCI. |
CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 novembre 2024
Rejet
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 622 F-D
Pourvoi n° H 23-15.255
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 21 NOVEMBRE 2024
1°/ la société [Localité 6] l’Estagnet, société civile immobilière,
2°/ la société L’Estagnet, société civile immobilière,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 5],
ont formé le pourvoi n° H 23-15.255 contre l’arrêt rendu le 2 février 2023 par la cour d’appel d’Aix-en-Provence (chambre 1-5), dans le litige les opposant :
1°/ à M. [C] [A], domicilié [Adresse 3],
2°/ à Mme [G] [A], domiciliée [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat des sociétés civiles immobilières [Localité 6] l’Estagnet et L’Estagnet, de Me Bouthors, avocat de M. [C] [A] et de Mme [G] [A], après débats en l’audience publique du 15 octobre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Boyer, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 2 février 2023), le 6 octobre 1981, [T] [V] a promis de vendre à [O] [A] deux parcelles cadastrées section BD n° [Cadastre 2] et [Cadastre 4]. [O] [A] a levé l’option le 4 octobre 1982, en versant le prix.
2. [T] [V] est décédé le 18 juillet 1998, laissant pour lui succéder M. et Mme [F] et M. [D] [Y].
3. Par arrêts des 24 mai 1994 et 18 avril 2002, les demandes de [T] [V], et de ses héritiers, en nullité de la promesse de vente pour vices du consentement et en rescision pour lésion ont été rejetées.
4. En 2007, M. et Mme [F] ont créé la société civile immobilière L’Estagnet (la SCI L’Estagnet), avec apport des parcelles cadastrées section BD n° [Cadastre 2] et [Cadastre 4]. Cette société les a, à son tour, apportées à la société civile immobilière [Localité 6] l’Estagnet (la SCI [Localité 6] l’Estagnet).
5. [O] [A], aux droits duquel sont venus, après son décès en 2015, M. [C] [A] et Mme [G] [A] (les consorts [A]), a assigné les héritiers de [T] [V], la SCI L’Estagnet, la SCI [Localité 6] l’Estagnet et la société Immolab, acquéreurs successifs des parcelles litigieuses, en perfection de la vente et en publication à la conservation des hypothèques.
6. Par arrêt du 24 novembre 2015, il a été jugé que la promesse de vente du 6 octobre 1981 valait vente depuis la levée d’option, que l’arrêt valait titre de propriété et que les cessions postérieures au 4 octobre 1982 se heurtaient aux droits de [O] [A] et lui étaient inopposables ainsi qu’à ses héritiers, la décision étant commune aux SCI L’Estagnet et [Localité 6] l’Estagnet et à la société Immolab.
7. La SCI [Localité 6] l’Estagnet a assigné les consorts [A] pour qu’il soit jugé qu’elle bénéficie de l’antériorité de la publication de son droit de propriété et que le droit de propriété résultant de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix-en-Provence du 24 novembre 2015 lui est inopposable. La SCI L’Estagnet est intervenue volontairement.
Réponse de la Cour
9. Ayant relevé que M. et Mme [F], qui, ayant accepté la succession de [T] [V], étaient tenus de toutes les obligations qui incombaient à celui-ci à l’égard du premier acquéreur, avaient créé la SCI L’Estagnet et lui avaient apporté les parcelles litigieuses en méconnaissance des engagements pris et en faisant fi des décisions de justice ayant notamment rejeté, par un jugement du 7 mars 1986, confirmé par arrêt du 24 mars 1994, la demande de nullité de la promesse de vente consentie à [O] [A], faisant ainsi ressortir que la publication par la SCI L’Estagnet, intervenue en 2007, de l’acte d’apport des parcelles dont elle ne pouvait ignorer qu’elles avaient été antérieurement vendues au bénéficiaire de la promesse, l’avait été en fraude aux droits de l’acquéreur, la cour d’appel en a exactement déduit, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et quatrième branches, que ni la SCI L’Estagnet ni la SCI [Localité 6] l’Estagnet, qui tenait ses droits de celle-ci, n’étaient fondées à se prévaloir du défaut d’antériorité de publication du titre des consorts [A] et a pu, en conséquence, rejeter les demandes des deux SCI.
10. Elle a ainsi, légalement justifié sa décision.
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