Cour de cassation, 14 mars 2017
Cour de cassation, 14 mars 2017

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Marine Le Pen contre SOS Racisme

Résumé

Dans l’affaire opposant Marine Le Pen à SOS Racisme, la question de la bonne foi en matière de diffamation a été centrale. Marine Le Pen a porté plainte suite à des propos du président de SOS Racisme, qualifiant un bal organisé à Vienne de « bal immonde pour nostalgiques du troisième Reich ». En appel, le président a été relaxé, les juges ayant reconnu que ses déclarations, bien que controversées, s’inscrivaient dans un débat d’intérêt général. Ils ont estimé que ses propos reposaient sur des bases factuelles suffisantes, justifiant ainsi l’exercice de la liberté d’expression dans le cadre d’une campagne électorale.

La bonne foi sans périmètre constant

La bonne foi en matière de diffamation s’apprécie différemment selon le statut et les missions des protagonistes en présence. En effet, il est d’usage que les critères de la bonne foi s’apprécient en tenant compte du cadre polémique, à savoir le contexte particulier d’une polémique propre au débat public.

Relax pour SOS Racisme

Dans cette affaire, Marine Le Pen a porté plainte et s’est constituée partie civile du chef de diffamation publique envers un particulier, en raison de la diffusion, sur le site internet de l’association SOS Racisme, d’un communiqué comprenant notamment les termes suivants : « Marine Le Pen à Vienne : Dirty Dancing » ; « Bal immonde pour nostalgiques du troisième Reich (…) » ; « (…) Bal antisémite (…) ».  Déclaré coupable en première instance, le président de SOS Racisme a été relaxé en appel et en cassation. Il était à l’évidence légitime en sa qualité de  président d’une association de lutte contre le racisme, de s’exprimer sur l’attitude d’une présidente d’un parti politique (Marine Le Pen), candidate à l’élection présidentielle, dans la mesure où ce comportement lui apparaissait contraire à l’objet défendu par son association, aucun élément ne permettant de supposer que les termes litigieux employés aient été suscités par une animosité d’ordre personnel.

Références au nazisme

Les juges suprêmes ont considéré que l’imputation de participer à un « bal immonde pour nostalgiques du troisième Reich », et à « un bal antisémite », dans le contexte du communiqué pris dans son ensemble, constitue non pas un jugement de valeur, mais un fait précis contraire à l’honneur et à la considération de Marine Le Pen. L’excuse de bonne foi a néanmoins été retenue en raison du cadre polémique d’une candidature à l’élection présidentielle.

Par ailleurs, il résultait d’articles parus depuis plusieurs années de journalistes spécialisés, l’existence de liens entre la corporation étudiante viennoise Olympia, qualifiée par certains observateurs d’organisation néo-nazie pangermaniste, antisémite et négationniste et le bal, certes organisé par une fédération de corporations, mais dont l’Olympia, la plus controversée, en est devenue la plus emblématique, au point de donner son nom au bal lui-même. En se faisant l’écho de la réprobation politique et militante suscitée chaque année par ce bal, le président de SOS Racisme disposait d’une base factuelle suffisante pour mettre en cause Marine Le Pen.

Les propos publiés, non par un journaliste, mais par le président d’une association militante combattant le racisme et l’antisémitisme, s’inscrivaient donc dans un débat d’intérêt général visant une personnalité politique dans le contexte d’une campagne pour l’élection présidentielle et reposaient sur une base factuelle suffisante de sorte qu’ils n’excédaient pas les limites admissibles de la liberté d’expression.

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