Type de juridiction : Cour de cassation
Juridiction : Cour de cassation
Thématique : Médicament présenté comme un poison
→ RésuméLe Laboratoire Crinex, fabricant de l’Uvestérol, a été débouté dans sa demande de condamnation pour dénigrement après qu’un article en ligne l’ait qualifié de « poison pour vos enfants ». La cour a souligné que même des critiques sévères peuvent être justifiées dans le cadre d’un débat d’intérêt général, surtout lorsque des préoccupations de santé publique sont en jeu. L’affirmation de la dangerosité du produit, bien que péremptoire, ne dépassait pas les limites de la liberté d’expression, d’autant plus que des décisions de suspension avaient été prises par l’Agence française de sécurité sanitaire.
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Atteinte à la réputation d’un laboratoire
Publier en ligne un article qualifiant un médicament de poison n’expose pas systématiquement à une condamnation pour dénigrement. Le Laboratoire Crinex qui fabrique et commercialise l’« Uvestérol », un complément en vitamine D destiné aux nourrissons, a été débouté de sa demande de condamnation de l’éditeur du site « Alternative Santé ». L’« Uvestérol avait été présenté comme « un complément empoisonné pour vos enfants », « un complément inquiétant pour vos enfants », « un poison pour vos enfants ».
La Liberté d’expression prime
Même en l’absence d’une situation de concurrence directe et effective entre les personnes concernées, la divulgation, par l’une, d’une information de nature à jeter le discrédit sur un produit commercialisé par l’autre, peut constituer un acte de dénigrement. Cependant, lorsque l’information en cause se rapporte à un sujet d’intérêt général et repose sur une base factuelle suffisante, cette divulgation relève du droit à la liberté d’expression, qui inclut le droit de libre critique, et ne saurait, dès lors, être regardée comme fautive, sous réserve qu’elle soit exprimée avec une certaine mesure.
Dénigrement : la base factuelle suffisante est prise en considération
Pour accueillir à tort les demandes du Laboratoire Crinex, les juges du fond avaient considéré qu’en matière de dénigrement, il importe peu que l’éditeur ait ou non disposé d’une base factuelle suffisante pour s’exprimer. Or, en statuant ainsi, la cour d’appel a violé les articles 10 de la Convention de sauvegarde des droits de et 1240 du code civil. Le dénigrement consiste à porter atteinte à l’image de marque d’une entreprise ou d’un produit identifiable afin de détourner la clientèle en usant de propos ou d’argument répréhensibles ayant ou non une base exacte, diffusés ou émis en tout cas de manière à toucher les clients de l’entreprise visée, concurrente ou non de celle qui en est l’auteur. Le produit dénigré doit être identifié ou identifiable.
Degré de virulence admis
D’aucuns pensaient que la publication de critiques sévères étaient admissible, uniquement sous réserve que les propos tenus ne soient pas outranciers et que le traitement des informations soit fait avec la prudence nécessaire. En l’occurrence, l’affirmation de la dangerosité du produit de façon péremptoire et sans nuance, n’excédait pas le droit d’exercice normal d’une critique dès lors que i) les écrits s’inscrivaient dans un débat d’intérêt général portant sur la santé publique et que ii) l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé avait, à la suite de malaises de nourrissons, pris des décisions de suspension de l’Uvestérol, puis émis une note d’information de pharmacovigilance relative à ce médicament. Conséquence : les critiques en cause, même sévères, ne dépassaient pas les limites admissibles de la liberté d’expression.
Statut de l’auteur des critiques virulentes
A noter que le statut de l’auteur des articles n’a pas eu d’impact significatif. L’auteur n’était ni médecin, ni pharmacien et avait fondé son analyse sur un ouvrage titré « danger additifs alimentaires ».
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