Cour de cassation, 10 novembre 2017
Cour de cassation, 10 novembre 2017

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Extorsion de fonds : deux journalistes poursuivis  

Résumé

Deux journalistes, Eric Laurent et Catherine Graciet, sont poursuivis pour extorsion de fonds après avoir été accusés d’avoir demandé de l’argent en échange de la non-publication d’un livre compromettant sur le Roi du Maroc. L’avocat du Royaume a déposé une plainte, accompagnée d’enregistrements d’une conversation où l’un des journalistes aurait sollicité un paiement. La Cour de cassation a jugé recevables ces enregistrements clandestins, affirmant qu’il était légitime pour une victime de chantage d’informer les enquêteurs. L’absence de collusion entre les enquêteurs et le représentant de l’État marocain a également été soulignée, laissant l’affaire ouverte pour de futures décisions.

Roi du Maroc : le silence contre des fonds

L’affaire avait fait grand bruit dans les médias : les journalistes Eric Laurent et Catherine Graciet avaient interpellés dans le cadre d’une enquête judiciaire d’extorsion de fonds. Ces derniers auraient reçu de l’argent en échange de la non-publication d’un livre contenant des informations compromettantes sur le Roi du Maroc.

L’avocat, agissant au nom du Royaume du Maroc, avait dénoncé au procureur de la République des faits de chantage et d’extorsion de fonds en joignant à sa plainte l’enregistrement d’une conversation qui s’était déroulée entre le représentant de l’État marocain et les auteurs du livre paru sous le titre « Le Roi prédateur », conversation au cours de laquelle l’un des auteurs aurait sollicité le paiement d’une somme d’argent contre la promesse de ne pas publier un nouvel ouvrage consacré au souverain marocain.

Enregistrements clandestins recevables

La Cour de cassation, sur deuxième renvoi, a de nouveau confirmé la recevabilité des enregistrements clandestins.  Il apparaît légitime, de la part d’une victime ayant déposé plainte pour chantage et extorsion de fonds, d’informer les enquêteurs de l’avancement des démarches de ceux auxquels elle prête des agissements répréhensibles. Les services de police et les magistrats, saisis d’une telle plainte, se devaient d’intervenir pour organiser les surveillances de nature à confirmer ou infirmer les dires du plaignant et, si nécessaire, interpeller les auteurs.

Pas de collusion fautive avec les enquêteurs

Par ailleurs, on ne saurait déduire de l’existence d’une présence policière aux abords de l’hôtel où ont eu lieu les rencontres, un accord préalable et concerté des enquêteurs avec le représentant de l’État marocain. Au demeurant, lors de ces surveillances, les policiers se trouvaient à l’extérieur de l’établissement et n’étaient pas à même de constater les manoeuvres du  représentant de l’État marocain tendant aux enregistrements clandestins avec son téléphone portable.

Le représentant de l’État marocain avait mis à profit les suspensions des négociations intervenues, pour se faire apporter les sommes d’argent nécessaires et pouvait de manière tout à fait légitime, en profiter pour informer les enquêteurs de l’avancement des pourparlers. En conséquence, la preuve n’était pas rapportée de l’existence d’une collusion entre le représentant de l’État marocain et les services enquêteurs tendant à faire prendre en charge par le premier les enregistrements litigieux. Le seul reproche d’un  » laisser faire  » des policiers, dont le rôle n’a été que passif, ne peut suffire à caractériser un acte constitutif d’une véritable implication. La  chambre de l’instruction a pu en déduire l’absence de participation directe ou indirecte de l’autorité publique à l’obtention des enregistrements litigieux, ce dont il résultait que le principe de la loyauté de la preuve n’avait pas été méconnu. Affaire au fond à suivre …

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