Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Versailles
Thématique : Inopposabilité et transmission des éléments médicaux : enjeux de la responsabilité en matière de reconnaissance d’incapacité.
→ RésuméContexte de l’affaireM. [W] [B] [S], employé en tant que coffreur boiseur par la Société [5], a déclaré une maladie professionnelle le 8 février 2019, liée à une rupture du tendon supra-épineux de l’épaule droite. La caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine a reconnu cette maladie et a pris en charge la déclaration selon le tableau n° 57 des maladies professionnelles, par une décision du 7 août 2019. Évaluation de l’incapacitéL’état de santé de M. [S] a été déclaré consolidé le 29 octobre 2019, avec un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) initialement fixé à 15 % par décision du 10 décembre 2019. Cependant, la société a contesté ce taux, entraînant une réévaluation par la commission médicale de recours amiable, qui a réduit le taux à 10 %. Procédures judiciairesLa société a ensuite saisi le tribunal judiciaire de Nanterre, qui a rejeté sa demande de diminution du taux d’incapacité à 8 % et sa demande d’expertise médicale par jugement du 27 juin 2022. La société a fait appel de cette décision, et la cour a ordonné une consultation médicale sur pièces, confiée au docteur [X], le 6 juillet 2023. Arguments de la sociétéDans ses conclusions, la société a demandé l’infirmation du jugement et a soutenu que la caisse n’avait pas respecté ses obligations en matière de transmission des documents médicaux à l’expert. Elle a également demandé que le taux d’incapacité soit fixé à 8 % en se basant sur les conclusions de son médecin conseil. Arguments de la caisseLa caisse a demandé la confirmation du jugement initial et a affirmé avoir transmis tous les documents nécessaires à l’expert dans les délais impartis. Elle a soutenu que le taux d’incapacité de 10 % était justifié, en raison des séquelles de la victime. Décision de la courLa cour a examiné la question de l’inopposabilité de la décision de la caisse, concluant que le défaut de transmission des documents médicaux à l’expert ne justifiait pas l’inopposabilité de la décision de prise en charge. Concernant le taux d’incapacité, la cour a fixé le taux d’IPP à 8 % en raison des éléments médicaux et des carences de la caisse dans la transmission des informations. Conséquences financièresLa cour a également condamné la caisse aux dépens de l’instance, considérant qu’elle était la partie succombante dans cette affaire. Les frais de consultation médicale resteront à la charge de la Caisse nationale de l’assurance maladie, conformément à la législation en vigueur. |
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 88G
Ch.protection sociale 4-7
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 09 JANVIER 2025
N° RG 24/00101 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WI5E
AFFAIRE :
S.A.S.U. [6]
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Juin 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre
N° RG : 20/01740
Copies exécutoires délivrées à :
Me Michael RUIMY
CPAM DES HAUTS-DE-SEINE
Copies certifiées conformes délivrées à :
S.A.S.U. [6]
CPAM DES HAUTS-DE-SEINE
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.S.U. [6]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Michaël RUIMY de la SELARL R & K AVOCATS, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 1309 substituée par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1215
APPELANTE
****************
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DES HAUTS DE SEINE
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Mme [H] [M], en vertu d’un pouvoir spécial
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Octobre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Charlotte MASQUART, conseillère chargée d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente,
Madame Aurélie PRACHE, présidente de chambre,
Madame Charlotte MASQUART, conseillère,
Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Juliette DUPONT,
EXPOSÉ DU LITIGE
Employé par la Société [5] (la société) en qualité de coffreur boiseur, M. [W] [B] [S] (la victime) a souscrit, le 8 février 2019, une déclaration de maladie professionnelle au titre d’une ‘rupture tendon supra épineux. Coiffe des rotateurs épaule droite tableau 57’, que la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse) a pris en charge sur le fondement du tableau n° 57 des maladies professionnelles, par décision du 7 août 2019.
L’état de santé de la victime a été déclaré consolidé le 29 octobre 2019 et un taux d’incapacité permanente partielle de 15 % lui a été attribué, par décision du 10 décembre 2019.
La société a saisi la commission médicale de recours amiable, qui a ramené le taux d’incapacité permanente partielle de la victime à 10 %.
La société a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre, qui, par jugement rendu le 27 juin 2022 l’a déboutée de sa demande principale de diminution du taux médical à 08% ainsi que de sa demande subsidiaire d’expertise médicale.
La société a relevé appel de cette décision.
Par ordonnance du 6 juillet 2023, la cour a, avant dire droit, ordonné une consultation médicale sur pièces, confiée au docteur [X].
Après dépôt du rapport du docteur [X], les parties ont été convoquées à l’audience du 23 octobre 2024.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société demande à la cour :
– d’infirmer le jugement entrepris dans ses entières dispositions,
Statuant à nouveau:
– de juger que la caisse n’a pas accompli les diligences qui lui incombaient afin d’apporter son concours à la mission impartie à l’expert par la Cour dans son ordonnance du 6 juillet 2023,
En conséquence:
-de juger inopposable à son encontre le taux d’incapacité de 10%,
Subsidiairement elle demande la fixation du taux d’incapacité à 8%.
En tout état de cause, elle demande la condamnation de la caisse aux entiers dépens de l’instance, dont les frais de consultation médicale.
Au soutien de ses prétentions, la société fait valoir que la caisse a délibérément violé les dispositions de l’article R.142-16-3 du code de la sécurité sociale en ne transmettant pas au médecin expert l’intégralité de éléments médicaux ayant contribué à l’attribution du taux.
Elle soutient que la sanction de la violation du principe du contradictoire est l’inopposabilité de la décision de la caisse.
A l’appui de sa demande subsidiaire elle met en avant les conclusions de son médecin conseil qui préconise la fixation du taux d’incapacité permanente partielle à 08%.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la caisse demande à la cour de confirmer le jugement déféré et de condamner la société aux dépens.
Elle se défend en indiquant que le service administratif de la caisse a adressé l’ensemble des pièces en sa possession au docteur [X] par courrier et par courriel le 25 juillet 2023.
Elle soutient que le service médical a adressé par voie postale le 28 juillet 2023 le rapport d’incapacité tant à l’expert qu’au médecin conseil de l’employeur.
Elle indique avoir respecté le délai de 10 jours exposant n’avoir réceptionné l’ordonnance de la cour d’appel que le 19 juillet et rappelle qu’aucune disposition légale n’impose l’envoi des pièces par courrier recommandé.
La Caisse soutient en tout état de cause que le défaut de transmission du rapport n’est pas sanctionné par l’inopposabilité de la décision.
Enfin elle fait valoir que le taux de 10 % retenu par la CMRA est justifié, que la victime présentait des séquelles, que s’agissant d’une limitation légère des mouvements de l’épaule le barème prévoit un taux d’incapacité de 10 % à 15 %.
PAR CES MOTIFS
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
Rejette la demande d’inopposabilité formée par la société [5] ;
Dit que les séquelles de la maladie professionnelle, ‘rupture tendon supra épineux. Coiffe des rotateurs épaule droite tableau 57’, dont est atteint M. [W] [B] [S], justifient, dans les rapports entre la société [5] et la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine, l’attribution d’un taux d’incapacité permanente partielle de 8 % à la date de consolidation du 29 octobre 2019 ;
Condamne la caisse primaire d’assurance maladie des Hauts-de-Seine aux dépens exposés tant devant le tribunal judiciaire de Nanterre que devant la cour de céans ;
Rappelle que les frais de consultation restent à la charge de la Caisse nationale de l’assurance maladie en application de l’article L. 142-11 du code de la sécurité sociale.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.
La greffière La conseillère
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