Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Versailles
Thématique : Limites à la liberté d’expression du salarié
→ RésuméLa liberté d’expression du salarié est un droit fondamental, mais elle connaît des limites. En effet, un licenciement ne peut être justifié que si l’expression dégénère en abus, comme des propos injurieux ou diffamatoires. Par exemple, un salarié a critiqué la politique de son entreprise en l’accusant de fraude fiscale, ce qui a été jugé excessif et nuisible à l’image de la société. Malgré un débat public sur la situation fiscale, le licenciement a été requalifié en cause réelle et sérieuse, soulignant l’importance de l’obligation de loyauté dans le cadre professionnel.
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Principe de la liberté d’expression du salarié
Il est de jurisprudence constante que la liberté d’expression du salarié est un droit qui ne peut être sanctionné qu’en cas d’abus ; l’exercice de la liberté d’expression ne peut justifier un licenciement que s’il dégénère en abus par la tenue de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs.
Exemple d’abus de la liberté d’expression du salarié
Un salarié a fait circuler via la messagerie électronique de la société, des emails critiques au sujet des choix et de la politique de l’entreprise, lui imputant notamment de « se transformer en spécialiste de la fraude et de l’évasion fiscale, ce qui ne plaît pas forcément, même aux investisseurs ». Un litige opposait la société à ses salariés à la suite d’un emprunt important souscrit auprès de la société mère et qui avait privés les salariés d’un intéressement.
Le contenu du mail ne présentait aucun caractère humoristique et mettait en cause l’honnêteté du groupe. Si le terme « évasion fiscale » peut correspondre à une critique de la notion d’ « optimisation fiscale » que la société pratique en hébergeant de nombreuses sociétés étrangères dans un bâtiment du Delaware, le terme de « fraude » accolé au nom de la société portait bien atteinte à son image en ce qu’il comportait une notion de malhonnêteté. Le salarié n’avait pas de mandat syndical et le message a été jugé excessif et dépassait la liberté d’expression.
Licenciement pour cause réelle et sérieuse
L’employeur a pris la décision de licencier le salarié à la suite de l’envoi de ce message qui constituait un abus du droit d’expression et un manquement professionnel. Ce manquement à l’obligation de loyauté avait été précédé d’une mise en garde de la supérieure hiérarchique du salarié et à deux avertissements pour insubordination. Le licenciement du salarié a été confirmé mais requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse (et non pour faute grave). Dès lors que le débat sur la situation fiscale de l’entreprise était public et largement médiatisé, les faits ne rendaient pas impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
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