Cour d’Appel de Versailles, 1er décembre 2017
Cour d’Appel de Versailles, 1er décembre 2017

Type de juridiction : Cour d’Appel

Juridiction : Cour d’Appel de Versailles

Thématique : Sonorisation de feuilleton : l’écrit obligatoire    

Résumé

L’affaire Zodiaque a ravivé des questions sur les droits d’auteur après que TF1 a coproduit un feuilleton avec une chanson, « Angel », devenue son générique. Les auteurs compositeurs, affirmant ne pas avoir consenti à son exploitation, ont assigné la société. Les juges ont souligné l’absence d’un écrit formel, utile selon le code de la propriété intellectuelle. De plus, ils ont constaté un abus de droit de la part des auteurs, qui avaient laissé entendre qu’ils acceptaient l’exploitation de la chanson sans protester durant la diffusion. Cette situation a conduit à des dommages-intérêts de 9 000 euros pour TF1.

Affaire Zodiaque

L’affaire est revenu après cassation : la société TF1 a coproduit le feuilleton télévisé Zodiaque et a confié la composition de la musique à un auteur qui a cédé ses droits à une société d’édition musicale. Une chanson (« Angel ») a été composée par deux auteurs compositeurs sur la base de ladite musique. Cette chanson est par la suite devenue le générique du feuilleton. Les auteurs de l’œuvre composite soutenant ne pas avoir consenti à l’exploitation de la chanson et de son interprétation, ont assigné la société TF1.

Chanson de générique : l’écrit impératif

La difficulté de l’affaire est née du comportement ambiguë des auteurs compositeurs qui avaient laissé croire à la société TF1 qu’elle pouvait exploiter la chanson sous forme de générique et concéder une licence de phonogramme sur celle-ci. Il résultait d’un entretien accordé à un magazine par les auteurs compositeurs, qu’ils avaient œuvré en étroite collaboration avec le réalisateur et n’avaient à ce moment et pendant la diffusion de la série, émis aucune protestation.

Sur ce volet, les juges se sont trouvés liés par l’article L 131-2 du code de la propriété intellectuelle (CPI).  En effet, sont impérativement soumis à l’exigence d’un écrit, les contrats de représentation, d’édition et de production audiovisuelle (y compris la cession des droits d’adaptation télévisuelle portant sur une chanson). Il en va de même des autorisations gratuites d’exécution.

Pour rappel, selon l’article L131-3 du CPI, la transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.  En application de l’article L132-7 du même code, le consentement personnel et donné par écrit de l’auteur est obligatoire au contrat d’édition.

Au passage, la juridiction a qualifié la musique du feuilleton Zodiaque d’oeuvre composite. Au sens de l’article L113-2 du CPI, est dite composite l’oeuvre nouvelle à laquelle est incorporée une oeuvre préexistante sans la collaboration de l’auteur de cette dernière. Une bande-son d’œuvre audiovisuelle peut donc être qualifiée d’œuvre composite.

Abus de droit des auteurs compositeurs

Sur l’autre volet de l’affaire, les juges ont retenu un abus de droit par les auteurs compositeurs. En effet, tout donnait l’impression que les auteurs compositeurs avaient tenté de « battre monnaie ». Outre l’interview donnée, l’un des auteurs compositeurs avait également été photographié avec l’acteur principal de la série. Ni la communication autour de la série à laquelle les auteurs compositeurs ont activement participé, ni la diffusion de la chanson au générique de fin n’ont fait l’objet de protestations de leur part. C’était donc à bon droit que la société TF1 Production pouvait légitimement se croire autorisées à exploiter l’oeuvre musicale « Angel ».

Dès lors, intenter une action en justice alors que le comportement des auteurs compositeurs démontrait à l’évidence que les relations entre les différents partenaires se déroulaient en parfaite intelligence, est constitutif d’une faute lourde équipollente au dol qui fait dégénérer en abus l’action des auteurs compositeurs (9 000 euros de dommages-intérêts).

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