Cour d’Appel de Versailles, 11 avril 2018
Cour d’Appel de Versailles, 11 avril 2018

Type de juridiction : Cour d’Appel

Juridiction : Cour d’Appel de Versailles

Thématique : CDD d’usage non écrit : CDI automatique

Résumé

Un CDD d’usage doit être rédigé par écrit. En l’absence de contrat écrit sur près de cinq ans, les juges peuvent requalifier le contrat de travail en CDI. Dans l’affaire Technicolor Network, un salarié a obtenu cette requalification après avoir été employé comme ingénieur pendant dix ans. Selon le code du travail, un CDD ne peut être établi que pour une tâche précise et temporaire, et doit comporter un motif défini. L’absence de contrat écrit entraîne la présomption d’un CDI, ce qui a été confirmé par les juges dans ce cas précis.

Un CDD d’usage doit impérativement être écrit. Dès lors qu’aucun contrat écrit n’a été établi entre les parties sur près de cinq années, les juges peuvent constater qu’à défaut de contrat écrit, le contrat de travail était nécessairement, dès le début de la relation contractuelle, un contrat à durée indéterminée.

Affaire Technicolor Network

Un salarié de la société EBSF (ex Technicolor Network Services France), recruté comme ingénieur de la vision pendant près de dix années, a obtenu la requalification de sa relation en CDI (convention collective nationale des entreprises techniques au service de la création et de l’événement).

Conditions du recours aux CDD d’usage

En vertu des articles L. 1242-1, L. 1242-2 et L. 1242-12 du code du travail, un contrat à durée déterminée, quel que soit son motif, qui ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise, ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans des cas déterminés par la loi et doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif, à défaut de quoi il est réputé conclu pour une durée indéterminée.

S’il résulte de la combinaison des articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1244-1 et D. 1242-1 du code du travail que, dans les secteurs d’activité définis par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, certains des emplois en relevant peuvent être pourvus par des contrats de travail à durée déterminée lorsqu’il est d’usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois, et que des contrats à durée déterminée successifs peuvent, en ce cas, être conclus avec le même salarié, l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 19 mars 1999 et mis en oeuvre par la Directive 1999/70/CE du 28 juin 1999, qui a pour objet, en ses clauses 1 et 5, de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de contrats successifs est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi.

Sanction de l’absence d’écrit

L’activité de la société EBSF consiste en la production, la post-production et la diffusion de programmes audiovisuels pour le compte de chaînes de télévision diffusant principalement sur les réseaux câblés et le satellite, domaine précisément visé par l’article D.1242-1 du code du travail comme faisant partie des secteurs dans lesquels il est d’usage de recourir au contrat de travail à durée déterminée d’usage.

Cette possibilité est prévue, d’ailleurs, expressément dans la convention collective des entreprises techniques au service de la création et de l’événement applicable depuis décembre 2008 complétée par plusieurs accords dont un spécifique aux entreprises techniques du secteur audiovisuel dans le champ duquel se trouve EBSF.

Cependant, le recours au contrat à durée déterminée d’usage ne dispense pas l’employeur d’établir un contrat écrit comportant la définition précise de son motif, sous peine d’être réputé conclu à durée indéterminée. Ce contrat écrit s’impose également quelle que soit la durée du contrat. Il s’agit d’une présomption irréfragable que l’employeur ne peut écarter en apportant la preuve contraire.

Aucun contrat écrit n’avait été établi entre les parties sur près de cinq années. Les juges ont en conséquence, constaté qu’à défaut de contrat écrit, le contrat de travail était nécessairement, dès le début de la relation contractuelle, un contrat à durée indéterminée.

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