Cour d’appel de Toulouse, 29 janvier 2025, RG n° 23/00565
Cour d’appel de Toulouse, 29 janvier 2025, RG n° 23/00565

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Toulouse

Thématique : Responsabilité et garanties en matière de travaux de construction : enjeux et conséquences

Résumé

Contexte de l’affaire

M. et Mme [V] et [J] [Z] ont engagé M. [B] [E] pour réaliser des travaux d’isolation par l’extérieur et de reprise de toiture de leur chalet à [Localité 5], selon un devis daté du 22 mai 2016, pour un montant de 39.911,07 euros. M. [B] [E] a sous-traité une partie des travaux à son frère, M. [N] [E], qui a facturé 5.000 euros pour ses services.

Constatation des malfaçons

Au cours des travaux, M. et Mme [Z] ont signalé des malfaçons, lesquelles ont été constatées par un huissier le 19 septembre 2016. Suite à l’échec des tentatives de résolution amiable, un juge des référés a désigné un expert pour évaluer les désordres.

Procédure judiciaire

Le rapport de l’expert a été déposé le 5 novembre 2018. M. et Mme [Z] ont ensuite assigné M. [B] [E], M. [N] [E], son assureur QBE Insurance Europe Limited, ainsi que la société Leclerc, devant le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens pour obtenir réparation.

Jugement du tribunal

Le 12 novembre 2020, le tribunal a mis hors de cause la société QBE Insurance Europe Limited et a débouté M. et Mme [Z] de leurs demandes contre la société Leclerc et son assureur. M. [B] [E] et M. [N] [E] ont été condamnés à verser 36.697,62 euros pour les travaux de remise en état et 1.000 euros pour préjudice moral.

Appel de M. [N] [E]

M. [N] [E] a interjeté appel partiel de cette décision le 30 décembre 2020. Le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation de l’appel, stipulant que l’affaire pourrait être réinscrite après que M. [N] [E] ait justifié l’exécution du jugement.

Prétentions des parties

M. [N] [E] a demandé la réforme partielle du jugement, souhaitant être débouté de l’intégralité des demandes à son encontre et que sa part de responsabilité soit limitée à 10%. M. et Mme [Z] ont demandé la confirmation du jugement et la condamnation de M. [N] [E] aux dépens d’appel.

Responsabilité du sous-traitant

Le tribunal a confirmé la responsabilité de M. [N] [E] à hauteur de 12,5% des dommages, considérant qu’il avait participé à la réalisation des travaux affectés de malfaçons. M. [N] [E] a contesté cette évaluation, affirmant qu’il n’avait pas réalisé les travaux litigieux.

Garantie de l’assureur

La garantie de la société QBE Europe a été exclue, le tribunal ayant constaté que les travaux réalisés par M. [N] [E] ne correspondaient pas aux activités couvertes par son contrat d’assurance.

Demandes accessoires

Les demandes de M. [N] [E] concernant la perte d’une chance d’obtenir un crédit d’impôt et un préjudice moral ont été jugées sans objet, le tribunal ayant déjà rejeté ces demandes.

Décision finale

La cour a confirmé le jugement du 12 novembre 2020, condamnant M. [N] [E] aux dépens d’appel et à verser des indemnités à M. et Mme [Z] ainsi qu’à la société QBE Europe pour les frais irrépétibles d’appel.

29/01/2025

ARRÊT N° 34/25

N° RG 23/00565

N° Portalis DBVI-V-B7H-PIIR

NA – SC

Décision déférée du 12 Novembre 2020

TJ de SAINT-GAUDENS

C. VANNIER

[N] [E]

C/

[B] [E]

[V] [Z]

[J] [O] épouse [Z]

Société QBE EUROPE SA/NV

CONFIRMATION

Grosse délivrée

le 29/01/2025

à

Me Erick BOYADJIAN

Me Valérie PONS-TOMASELLO

Me Olivier PIQUEMAL

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

1ere Chambre Section 1

***

ARRÊT DU VINGT NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANT

Monsieur [N] [E]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté par Me Erick BOYADJIAN, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIMES

Monsieur [B] [E]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Sans avocat constitué

Monsieur [V] [Z]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Madame [J] [O] épouse [Z]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentés par Me Valérie PONS-TOMASELLO de la SELARL MESSAUD & PONS-TOMASELLO, avocat au barreau de TOULOUSE

Société QBE EUROPE SA/NV

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Olivier PIQUEMAL de la SCP PIQUEMAL & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant)

Représentée par Me Alain DE ANGELIS de la SCP DE ANGELIS-SEMIDEI-VUILLQUEZ-HABART-MELKI-BARDON, avocat au barreau de MARSEILLE (plaidant)

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue le 25 novembre 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

M. DEFIX, président

S. LECLERCQ, conseillère

N. ASSELAIN, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière : lors des débats M. POZZOBON

ARRET :

– PAR DEFAUT

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après avis aux parties

– signé par M. DEFIX, président et par M. POZZOBON, greffière

EXPOSE DU LITIGE ET PROCEDURE

M.et Mme [V] et [J] [Z] ont confié à M.[B] [E] la réalisation de l’isolation par l’extérieur et la reprise de la toiture de leur chalet situé à [Localité 5], suivant devis du 22 mai 2016, pour un montant de 39.911,07 euros.

M.[B] [E] a sous-traité partie des travaux à son frère, M.[N] [E], assuré auprès de la société QBE Insurance Europe Limited. M.[N] [E] a établi le 25 juin 2016 une facture de ‘travaux de sous-traitance, isolation par l’extérieur, manutention et montage échafaudage’, pour une somme forfaitaire de 5.000 euros.

En cours de travaux, M.et Mme [Z] ont dénoncé des malfaçons apparentes, qu’ils ont fait constater par huissier le 19 septembre 2016.

Par ordonnance du 27 mars 2017, le juge des référés, saisi par M.et Mme [Z] après échec des démarches amiables, a désigné M.[K] [F] pour rechercher la cause des désordres et les moyens d’y remédier.

L’expert a déposé son rapport le 5 novembre 2018.

Par actes d’huissier des 31 mai, 3 et 6 juin 2019, M.et Mme [Z] ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Saint-Gaudens M.[B] [E], M.[N] [E] et son assureur la société QBE Insurance Europe Limited, ainsi que la société Leclerc, en sa qualité supposée de co-traitant de M.[B] [E], et son assureur la SMABTP, pour obtenir réparation de leurs préjudices.

Par jugement du 12 novembre 2020, le tribunal judiciaire de Saint-Gaudens, succédant au tribunal de grande instance, a:

– prononcé la mise hors de cause de la société QBE Insurance Europe Limited,

– déclaré recevable l’intervention volontaire de la société QBE Europe venant aux droits et obligations de la société QBE Insurance Europe Limited,

– débouté M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z] de leurs demandes à l’encontre de la société entreprise Leclerc et de la compagnie d’assurance de cette dernière, la SMABTP,

– débouté M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z] de leurs demandes à l’encontre de la société QBE Europe venant aux droits et obligations de la société QBE Insurance Europe Limited,

– condamné in solidum M. [B] [E] et M. [N] [E] à hauteur de 12,5% à payer à M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z] la somme de 36.697,62 euros au titre des travaux de remise en état,

– condamné M. [B] [E] à payer à M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z] la somme de 1.000 euros au titre du préjudice moral,

– débouté M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z] de leurs demandes au titre de la perte de chance d’avoir pu bénéficier du crédit d’impôt pour la transition énergétique,

– ordonné l’exécution provisoire de la décision,

– condamné in solidum M. [B] [E] et M. [N] [E] à hauteur de 12,5% aux dépens lesquels comprendront les frais d’expertise judiciaire,

– condamné in solidum M. [B] [E] et M. [N] [E] à hauteur de 12,5% à payer à M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z] la somme de 2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum M. [B] [E] et M. [N] [E] à hauteur de 12,5% à payer à la société Leclerc la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum M. [B] [E] et M. [N] [E] à hauteur de 12,5% à payer à la société SMABTP la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné in solidum M. [B] [E] et M. [N] [E] à hauteur de 12,5% à payer à la société QBE la somme de 600 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par acte du 30 décembre 2020, M. [N] [E] a relevé appel partiel de cette décision, en intimant M.et Mme [Z], M.[B] [E] et la société QBE Europe.

Par ordonnance du 20 janvier 2022, le conseiller de la mise en état a ordonné la radiation du rôle de l’appel interjeté le 30 décembre 2020 par M. [N] [E], et dit que, sauf péremption de l’instance, l’affaire pourra être réinscrite après que M. [N] [E] aura justifié avoir exécuté la décision du 12 novembre 2020.

Le jugement ayant été exécuté, M.et Mme [Z] ont sollicité la réinscription de l’affaire au rôle.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 24 mars 2021, M. [N] [E], appelant, demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1193 du code civil, de

– réformer partiellement le jugement,

En conséquence,

A titre principal,

– débouter Mme [J] [O] épouse [Z] et M. [V] [Z] de l’intégralité de leurs demandes à l’encontre de M. [N] [E],

A titre subsidiaire,

– débouter Mme [J] [O] épouse [Z] et M. [V] [Z] de leur demande de condamnation in solidum à l’égard de M. [N] [E],

– fixer la part de responsabilité de M. [N] [E] qui ne saurait être supérieure à 10% du coût des travaux de reprise,

– débouter Mme [J] [O] épouse [Z] et M. [V] [Z] de leurs demandes au titre de la perte de chance d’obtenir un crédit d’impôt et d’un préjudice moral,

– condamner la société QBE Europe venant aux droits et obligations de la société QBE Insurance Europe Limited à relever et garantir M. [N] [E] de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge,

En tout état de cause,

– condamner toute partie succombante à verser à M. [N] [E] la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 23 juin 2021, M. [V] [Z] et Mme [J] [O] épouse [Z], intimés, demandent à la cour, au visa des articles 1231-1, 1240 (anc. 1382) du code civil, de :

– confirmer en toutes ses dispositions le jugement,

– condamner M. [N] [E] au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [N] [E] aux entiers dépens d’appel.

Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 18 octobre 2024, la société QBE Europe SA/NV, intimée, succédant à la société QBE Insurance Europe Limited, demande à la cour, au visa des articles 1147 du code civil devenu 1231-1 du code civil et 1382 du code civil devenu 1240 du code civil, de :

A titre principal,

– réformer le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité de M. [N] [E],

– juger qu’il n’est pas rapporté la preuve d’une faute imputable à M. [N] [E] qui serait en relation directe et certaine avec les préjudices allégués par les consorts [Z],

– prononcer la mise hors de cause de M. [N] [E],

– déclarer sans objet l’appel en garantie, au demeurant non motivé, dirigé à l’encontre de la société QBE Europe,

A titre subsidiaire,

– confirmer le jugement en ce qu’il a mis hors de cause la société QBE Europe SA/NV du chef de l’inapplication du contrat d’assurances souscrit,

– juger que les activités exercées sur le chantier par M. [N] [E] ne sont pas conformes aux activités souscrites auprès de la société QBE Europe,

En conséquence,

– juger que la société QBE Europe SA/NV est bien fondée à opposer une non assurance du chef des réclamations présentées à son encontre,

– prononcer purement et simplement la mise hors de cause de la société QBE Europe SA/NV venant aux droits de la société QBE Insurance Europe Limited,

Surabondamment,

– juger que la garantie responsabilité civile décennale n’a pas vocation à s’appliquer en l’absence de réception et de dommage de nature décennale,

– juger que les garanties responsabilités civiles ne sont pas susceptibles d’être mobilisées compte tenu de leur objet même tel qu’il est défini aux termes des conditions générales, celles-ci n’ayant pas vocation à garantir les malfaçons affectant les propres travaux exécutés par l’assuré,

– juger que la garantie ‘dommages à l’ouvrage en cours de travaux’ n’est pas susceptible d’être mobilisée dès lors que les dommages ne résultent pas d’un événement soudain, imprévu, survenant de façon fortuite,

– juger que le préjudice moral sollicité ne rentre pas dans la définition du préjudice immatériel contractuellement garanti aux termes du contrat d’assurance souscrit,

En tout état de cause,

– juger que les garanties facultatives gérées en base réclamation ont cessé de produire leurs effets à la date de la résiliation intervenue le 31 août 2017, soit antérieurement à la date de la réclamation intervenue le 22 septembre 2017 par l’assignation en référé délivrée à M. [N] [E] et à la société QBE,

En conséquence,

– prononcer la mise hors de cause pure et simple de la société QBE Europe venant aux droits et obligations de la société QBE Insurance Europe Limited,

A titre très subsidiaire,

– juger que la part de responsabilité imputable à M. [N] [E] doit être limitée à 10% des travaux de reprise compte tenu de la nature de son intervention extrêmement limitée sur le chantier pour le compte de M. [B] [E],

– condamner M. [B] [E] à supporter une part prépondérante de responsabilité dans la survenance des désordres allégués compte tenu des manquements commis dans l’exécution de leur contrat et à relever et garantir la société QBE Europe venant aux droits et obligations de la société QBE Insurance Europe Limited des condamnations éventuellement prononcées à son encontre en principal, frais et accessoires,

– faire application des franchises contractuelles telles qu’elles ressortent des conditions particulières du contrat d’assurance souscrit opposable :

à son assuré M. [N] [E] d’un montant de 1.000 euros,

aux tiers s’agissant des garanties facultatives d’un montant de 1.000 euros,

– rejeter toutes autres demandes plus amples ou contraires qui seraient dirigées à l’encontre de la société QBE,

– condamner M. [N] [E] et/ou tout succombant à payer à la société QBE Europe SA/NV la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens distraits au profit de la SCP Malet.

M. [B] [E], intimé, n’a pas constitué avocat. La déclaration d’appel lui a été régulièrement signifiée par acte d’huissier du 6 juillet 2021, par dépôt en l’étude.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 13 novembre 2024 et l’affaire a été examinée à l’audience du 25 novembre 2024.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition, par défaut et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de sa saisine,

Confirme le jugement rendu le 12 novembre 2020,

Y ajoutant,

Condamne M.[N] [E] aux dépens d’appel, et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par la SCP Piquemal et associés qui en fait la demande ;

Condamne M.[N] [E] à payer à M.et Mme [Z] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;

Condamne M.[N] [E] à payer à la société QBE Europe la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

La greffière Le président

M. POZZOBON M. DEFIX

.

 


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