Cour d’appel de Toulouse, 19 mars 2024
Cour d’appel de Toulouse, 19 mars 2024

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Toulouse

Thématique : Dysfonctionnements de logiciel : faire jouter l’exception d’inexécution

Résumé

Dans le cadre d’un litige entre la société Pf [C] et les sociétés [W] et [H], la question de l’exception d’inexécution a été soulevée. La société Pf [C] a invoqué des dysfonctionnements du logiciel pour justifier son non-paiement des loyers. Cependant, la cour a souligné que ces allégations, basées sur des courriers électroniques, n’étaient pas étayées par une analyse technique contradictoire. En conséquence, la société Pf [C] n’a pas réussi à prouver que les dysfonctionnements étaient suffisamment graves pour justifier l’exception d’inexécution, ce qui a conduit à la confirmation du jugement initial.

Des courriers électroniques adressés au prestataire informatique et qui font état de dysfonctionnements d’un logiciel relèvent de simples affirmations, et doivent être étayées par une analyse technique contradictoire pour constituer un moyen sérieux pour se prévaloir de l’exception d’inexécution.

Le fait que le fournisseur de logiciel informatique soit débiteur d’une obligation de résultat n’autorise pas son client à cesser toute exécution contractuelle lorsqu’un dysfonctionnement se présente.

En l’espèce, les difficultés invoquées, qui ne relèvent que des simples déclarations de la société Pf [C], n’ont pas fait obstacle à l’exploitation du logiciel.

Il ressort des dispositions de l’article 1219 du code civil qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

L’exception d’inexécution ne peut être invoquée qu’à propos d’obligations nées d’une même convention ; il est toutefois constant que l’inexécution d’une convention peut être justifiée si le contractant n’a pas lui-même satisfait à une obligation contractuelle, même découlant d’une convention distincte, dès lors que l’exécution de cette dernière est liée à celle de la première.

Il appartient donc à la société Pf [C], qui invoque l’inexécution des obligations de la société [H], pour justifier du défaut de paiement des loyers exigés par la société [W], de rapporter la preuve des dysfonctionnements dont elle se prévaut.

L’affaire concerne un litige entre la société Pf [C] et les sociétés [W] et [H] concernant un contrat de location de logiciel. La société Pf [C] a repris le fonds de commerce de la société Pompes Funèbres [L], incluant un contrat de location de logiciel avec la société [W]. Des problèmes d’utilisation du logiciel ont conduit la société Pf [C] à ne pas régler les factures dues. La société [W] a résilié le contrat et réclamé le paiement des sommes dues. Le tribunal de commerce de Toulouse a condamné la société Pf [C] à payer les sommes dues à [W]. En appel, la société Pf [C] conteste la validité du contrat de location et demande la nullité de l’avenant de transfert. La société [W] et la société [H] demandent la confirmation du jugement de première instance.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

19 mars 2024
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
22/00971
19/03/2024

ARRÊT N° 96

N° RG 22/00971 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OVD2

SM AC

Décision déférée du 24 Janvier 2022 – Tribunal de Commerce de TOULOUSE ( 2020J00666)

M [M]

S.A.R.L. PF [C]

C/

S.A.S. [W]

S.A.S. [H]

INFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

*

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

2ème chambre

*

ARRÊT DU DIX NEUF MARS DEUX MILLE VINGT QUATRE

*

APPELANTE

S.A.R.L. PF [C]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Jacques SAMUEL, avocat postulant au barreau de TOULOUSE et par Me Victor DAVID, avocat plaidant au barreau de STRASBOURG

INTIMEES

S.A.S. [W] prise en la personne de son représentant légal domicilié es qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Patricia CARRIO, avocat au barreau de TOULOUSE

S.A.S. [H], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Jean-damien CAZANAVE de l’AARPI R.C.C. ASSOCIÉS, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 805 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 17 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant S.MOULAYES, Conseillère, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

V. SALMERON, présidente

M. NORGUET, conseillère

S.MOULAYES, conseillère

Greffier, lors des débats : N.DIABY

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par V. SALMERON, présidente, et par A. CAVAN, greffier de chambre
Faits et procédure

Le 13 juin 2018, la société Pompes Funèbres [L] a signé un bon de commande auprès de la société [H] pour la fourniture d’un logiciel pour une durée de 36 mois ainsi qu’un contrat de location de ce logiciel auprès de la société [W], signé par le bailleur le 2 juillet 2018, pour la même durée.

Le 27 septembre 2019, la société Pompes Funèbres [L] a cédé son fonds de commerce à la société Pf [C].

Un avenant de transfert du contrat de la société Pompes Funèbres [L] à la société Pf [C] a été signé le 14 octobre 2019, avec effet au 2 octobre 2019.

[W] a adressé les factures correspondantes au contrat à Pf [C] le 16 octobre 2019.

Se plaignant de mauvaises conditions d’utilisation du logiciel, la société Pf [C] n’a réglé ni ces factures ni les suivantes.

[W] a adressé le 29 janvier 2020 une mise en demeure d’avoir à régler les sommes dues faute de quoi le contrat serait résilié en application de son article 9, en vain.

Le 2 mars 2020, [W] a résilié le contrat de Pf [C], et a sollicité le paiement des factures échues et de celles à venir jusqu’au terme du contrat, majorées par les autres clauses pénales insérées au contrat.

Par acte du 17 novembre 2020, la société [W] a fait délivrer assignation à la société Pf [C] devant le tribunal de commerce de Toulouse, afin d’obtenir le paiement des loyers échus et à échoir, outre plusieurs indemnités.

Par acte du 10 février 2021 la société Pf [C] a fait assigner en intervention forcée la société [H].

Par jugement du 24 janvier 2022, le tribunal de commerce de Toulouse a :

– joint les instances enrôlées sous les n° 2020J00666, et n° 2021J00138 et rendu un seul et même jugement ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de nullité du contrat de location avec la Sas [W] ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de résolution judiciaire du contrat de fourniture et de maintenance conclu avec la Société de Location de Matériel Comptable et de sa demande de caducité du contrat signé avec la Sas [W] ;

– condamné la Sarl Pf [C] à régler la somme de 1 974 € à la Sas [W] assortie des intérêts de retard au taux BCE + 10 à compter des dates suivantes :

– le 25 octobre 2019 pour 358,80 € ;

– le 30 octobre 2019 pour 180 € ;

– le 25 novembre 2019 pour 358,80 € ;

– le 25 décembre 2019 pour 358,80 € ;

– le 25 janvier 2020 pour 358,80 € ;

– le 25 février 2020 pour 358,80 € ;

– débouté la Sas [W] de sa demande d’application d’intérêts au taux BCE + 10 sur la somme de 1 974 € à compter du 25 octobre 2019 ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] Ia Somme de 5 776,80 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2020 ;

– débouté la Sas [W] de sa demande d’application d’intérêts au taux BCE + 10 sur la somme de 5 776,80 € à compter du 1er mars 2020 ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 14,40 € au titre des frais annexes;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 1 € à titre de clause pénale ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 320 € au titre de frais de recouvrement ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de dommages et intérêts ;

– condamné la Sarl Pf [C] au versement de la somme de 1 000 € à la Sas [W] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sarl Pf [C] au versement de la somme de 1 000 € à la Société de Location de Matériel Comptable au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sarl Pf [C] aux entiers dépens de l’instance.

Par déclaration du 8 mars 2022, la Sarl Pf [C] a formé appel des chefs du jugement qui ont :

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de nullité du contrat de location avec la Sas [W] ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de résolution judiciaire du contrat conclu avec la Société de Location de Matériel Comptable et de sa demande de caducité du contrat signé avec la Sas [W] ;

– condamné la Sarl Pf [C] à régler la somme de 1 974 € à la Sas [W] assortie des intérêts de retard au taux BCE + 10 à compter des dates suivantes :

– le 25 octobre 2019 pour 358,80 € ;

– le 30 octobre 2019 pour 180 € ;

– le 25 novembre 2019 pour 358,80 € ;

– le 25 décembre 2019 pour 358,80 € ;

– le 25 janvier 2020 pour 358,80 € ;

– le 25 février 2020 pour 358,80 € ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] Ia Somme de 5 776,80 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2020 ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 14,40 € au titre des frais annexes ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] Ia somme de 1 € à titre de clause pénale ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 320 € au titre de frais de recouvrement ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de dommages et intérêts ;

– condamné la Sarl Pf [C] au versement de la somme de 1 000 € à la Sas [W] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sarl Pf [C] au versement de la somme de 1 000 € à la Société de Location de Matériel Comptable au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sarl Pf [C] aux entiers dépens de l’instance.

La clôture de la procédure est intervenue le 11 décembre 2023, et l’affaire a été évoquée à l’audience du 17 janvier 2024.

Prétentions et moyens

Vu les conclusions d’appelant n°4 notifiées le 11 décembre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de la Sarl Pf [C] demandant, aux visas des articles 1128, 1178, 1200, 1217, 1224, 1227, 1229, 1231-5 du Code civil et des articles 564 et 700 du Code de procédure civile, de :

– réformer le jugement du Tribunal de Commerce de Toulouse du 24 janvier 2022 en ce qu’il a :

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de nullité du contrat de location avec la Sas [W] ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de résolution judiciaire du contrat conclu avec la Société de Location de Matériel Comptable et de sa demande de caducité du contrat signé avec la Sas [W] ;

– condamné la Sarl Pf [C] à régler la somme de 1 974 € à la Sas [W] assortie des intérêts de retard au taux BCE + 10 à compter des dates suivantes :

– le 25 octobre 2019 pour 358,80 € ;

– le 30 octobre 2019 pour 180 € ;

– le 25 novembre 2019 pour 358,80 € ;

– le 25 décembre 2019 pour 358,80 € ;

– le 25 janvier 2020 pour 358,80 € ;

– le 25 février 2020 pour 358,80 € ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] Ia Somme de 5 776,80 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2020 ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 14,40 € au titre des frais annexes ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] Ia somme de 1 € à titre de clause pénale ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 320 € au titre de frais de recouvrement ;

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de dommages et intérêts ;

– condamné la Sarl Pf [C] au versement de la somme de 1 000 € à la Sas [W] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sarl Pf [C] au versement de la somme de 1 000 € à la Société de Location de Matériel Comptable au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la Sarl Pf [C] aux entiers dépens de l’instance.

Statuant à nouveau,

– à titre principal,

– constater la cessation d’activité de la Société Pompes Funèbres [L] en date du 27 septembre 2019 ;

– constater la résiliation de plein droit et automatique du contrat tripartite de location du PGI [H] ONLINE en date du 27 septembre 2019 ;

– constater qu’aucun contrat écrit ne lie les Sociétés Pf [C], [W] et [H] ;

– constater l’existence d’un contrat tacite à durée indéterminée qui s’est formé entre les Sociétés Pf [C], [W] et [H] à compter du 22 octobre 2019 ;

– constater l’absence de toutes clause pénale ou exonérative de responsabilité ;

En conséquence,

– prononcer la nullité de l’avenant du 14 octobre 2019 ;

– débouter la Société [W] de toutes ses demandes conséquentes à sa résiliation du contrat, notamment concernant les loyers à échoir, les frais ou les intérêts ;

– débouter l’ensemble des demandes des sociétés [W] et [H] fondées sur les contrats signés avec la société Pompes Funèbres [L] ;

– débouter l’ensemble des demandes des Sociétés [W] et [H] fondée sur les contrats

– constater que les Sociétés [W] et [H] sont des sociétés s’urs;

– constater le caractère frauduleux de la location financière mise en place entre les deux sociétés ;

– déclarer que toutes les exceptions opposables à la Société [H], le sont également à la Société [W], notamment l’exception d’inexécution ;

– dire et juger que la Société [H] s’était engagée à une obligation de résultat concernant l’accès et l’utilisation du PGI [H] ONLINE ;

– constater que la Société [H] a commis de nombreux manquements à son obligation de résultats dans la délivrance et l’accès d’un PGI conforme;

– dire et juger que la Société Pf [C] était bien fondée à se prévaloir de l’exception d’inexécution du 2 octobre 2019 au 1er mars 2020 ;

En conséquence,

– débouter la Société [W] de ses demandes de paiement de « loyer», frais intérêts et accessoires, et ;

– débouter plus généralement les Sociétés [W] et [H] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions.

– à titre reconventionnel,

– condamner la Société [H] à verser à la Société Pf [C] la somme de 3 000 € au titre du préjudice subi par les dysfonctionnements dans l’accès et l’usage de PGI [H] ONLINE ;

– condamner solidairement sa société s’ur faisant partie du montage, la société [W], à payer cette somme de 3 000 euros, et ;

– décider que ces montants produiront intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;

– à titre de nouvelles demandes (article 564 du cpc),

– condamner la Société [H] à remettre sous une forme exploitable par un PGI tiers les bases de données RIVA01 et GERA05, sous 8 jours calendaires à compter du jugement à intervenir, et sous une astreinte de 30 € par jour de retard ;

– condamner la Société [H] à verser à la Société Pf [C] la somme de 5.000 € au titre de la privation illégale des bases de données dont elle a la propriété ;

– condamner solidairement sa société s’ur faisant partie du montage, la Société [W], à payer cette somme de 5.000 €, et ;

– décider que ces montants produiront intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir ;

– à titre subsidiaire,

– constater que les contrats entre les Société Pf [C], [W] et [H] sont interdépendant et faisant partie d’un ensemble contractuel ;

– dire que les manquements de la Société [H] à son obligation de résultat sont suffisamment graves et persistants pour justifier la résolution judiciaire du contrat ;

En conséquence,

– prononcer la résolution judiciaire du contrat entre les Sociétés Pf [C] et [H];

– prononcer la caducité du contrat entre les Sociétés Pf [C] et [W], et;

– débouter les Sociétés [W] et [H] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions.

– à titre infiniment subsidiaire,

– constater le montage frauduleux organisé par les Société [W] et [H];

– constater l’absence de préjudice subi par les Sociétés [W] et [H];

En conséquence,

– réduire les montants demandés par la Société [W] en application de ses clauses pénales à la somme de 1€

– en tout état de cause,

– condamner solidairement les Sociétés [W] et [H] à verser à la Société Pf [C] la somme de 4 000 € au titre de l’Article 700 du Code de Procédure Civile, et ;

– condamner les Sociétés [W] et [H] à supporter les entiers frais et dépens exposés par la Société Pf [C] à l’instance, en ce compris de tous ceux effectués pour parvenir au présent jugement ainsi que ceux d’un éventuel recouvrement forcé, tarifs spécifiques pratiqués par les Huissiers de Justice inclus.

La société Pf [C] conteste la reprise du contrat de location du Pgi [H] Online lors de la cession partielle de son fonds de commerce par la Société Pompes Funèbres [L] ; en l’état des dispositions contractuelles liant les parties, ce contrat a ainsi pris fin de plein droit le 27 septembre 2019.

L’avenant daté du 14 octobre 2019 établi par la Société [W] doit donc être déclaré nul, ne pouvant transférer un contrat qui n’existait plus.

Il en résulte que la relation entre les sociétés qui s’est noué à compter du début de la relation, soit la remise des identifiants au 22 octobre 2019, s’est faite sous un contrat tacite à durée indéterminé, résiliable à tout moment et ne comprenant aucune clause pénale

Elle ajoute que la mise à disposition d’un Pgi est soumise à une obligation de résultat, et que les nombreuses difficultés rencontrées avec le logiciel dès l’origine lui permettent d’invoquer une exception d’inexécution pour s’opposer au paiement des loyers.

Elle invoque de ce chef l’interdépendance des relations entre elle-même, [W] et [H], pour affirmer que c’est l’ensemble contractuel qui doit être pris en considération s’agissant de la bonne exécution des obligations de chacun.

Sur sa demande nouvelle, elle affirme n’avoir jamais eu accès à la base de données constituée par la société Pompes Funèbres [L] ; en cause d’appel, la société [H] a produit des états des bases de données RIVA01 et GERA05, lui permettant ainsi de découvrir que la base de données RIVA01 ne lui a jamais été rendue accessible, et que les éléments composant les dossiers réalisés, notamment les factures et les avoirs, ne lui ont jamais été transférées.

A titre subsidiaire, elle sollicite la résolution judiciaire de l’ensemble contractuel, en invoquant le manquement de la société [H] à son obligation de résultat.

Enfin, à titre infiniment subsidiaire, elle demande à la Cour de réduire la clause pénale à 1 euros, au regard de son caractère manifestement excessif.

Vu les conclusions responsives notifiées le 13 novembre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de la Sas [W] demandant, aux visas des articles 1212 et 1224 et suivants du code civil, et des articles L.441-10 et suivants et D.441-5 et suivants du Code de Commerce, de :

– Confirmant le jugement dont appel en ce qu’il a :

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de nullité du contrat de location avec la Sas [W]

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de résolution judiciaire du contrat de fourniture et de maintenance conclu avec la société [H] et de sa demande de caducité du contrat signé avec la Sas [W]

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 14,40€ au titre des frais annexes

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 320 € au titre des frais de recouvrement

– débouté la Sarl Pf [C] de sa demande de dommages et intérêts

– condamné la Sarl Pf [C] aux entiers dépens de l’instance

– Réformant le jugement dont appel en ce qu’il a :

– condamné la Sarl Pf [C] à régler la somme de 1 974€ à la Sas [W] assortie d’intérêts de retard au taux BCE+10 à compter des dates suivantes:

– le 25/10/2019 pour 358,80€

– le 30/10/2019 pour 180€

– le 25/11/2019 pour 358,80€

– le 25/12/2019 pour 358,80€

– le 25/01/2020 pour 358,80€

– le 25/02/2020 pour 358,80€

– débouté la Sas [W] de sa demande d’application d’intérêts au taux BCE+10 sur la somme de 1974€ à compter du 25/10/2019

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 5776,80€ assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2020

– débouté la Sas [W] de sa demande d’application d’intérêts au taux BCE+10 sur la somme de 5776,80€ à compter du 01/03/2020

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 1€ au titre de la clause pénale

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 1000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Statuant à nouveau

– Confirmant le jugement dont appel

– débouter la Sarl Pf [C] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

– constater la résiliation du contrat conclu entre la Sas [W] et la Sarl Pf [C] en date du 01/03/2020 du fait du manquement de la Sarl Pf [C] à ses obligations contractuelles ;

– condamner la Sarl Pf [C] à payer à la société Sas [W] les sommes suivantes :

– 14,40 € de frais de courrier recommandé au titre des frais annexes contractuellement prévus à l’article 5 des conditions générales

– 320 € au titre des frais de recouvrement pour les échéances impayées (8 factures x 40€) conformément à l’article 3 des conditions générales et de l’article D.441-5 du code de commerce

– Réformant partiellement le jugement dont appel et y ajoutant

– condamner la Sarl Pf [C] à payer à la société Sas [W] les sommes suivantes :

– 1 974 € euros au titre des échéances impayées jusqu’à la résiliation du 01/03/2020 au taux d’intérêt contractuel de 10% à compter du 25/10/2019

– 5 776,80 € au titre des loyers à échoir au jour de la résiliation au taux d’intérêt contractuel de 10% à compter du 01/03/2020

– 776,52 € au titre de la clause pénale conformément à l’article 3 des conditions générales

– En tout état de cause

– condamner la Sarl Pf [C] à payer à la société Sas [W] la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du Code de Procédure Civile outre les entiers dépens, pour la présente procédure d’appel, en sus des sommes déjà allouées pour la procédure de première instance.

La Sas [W] conclut à la confirmation du principe des condamnations prononcées à l’encontre de la société Pf [C], et ne sollicite la réformation qu’en ce qui concerne le montant des intérêts à appliquer auxdites sommes et au montant de la clause pénale accordée.

Elle estime qu’en rachetant le fonds de commerce, la société Pf [C] a racheté l’ensemble des contrats qui y étaient attachés, et rappelle au surplus qu’elle a signé un avenant lui transférant le contrat litigieux. L’intention des parties était donc bien de poursuivre l’exécution de ce contrat en dépit de la cession intervenue.

Elle ajoute que la société Pf [C] n’est pas fondée à invoquer les dispositions de l’article 9 du contrat, mettant fin à celui-ci en cas de cessation d’activité, dans la mesure où à cette date elle n’était qu’un tiers au contrat.

L’avenant est donc valable, et il lui appartenait de s’enquérir des conditions du contrat auprès du cédant, avant d’accepter de le signer.

La Sas [W] s’oppose par ailleurs à la demande de la société Pf [C], fondée sur l’interdépendance des contrats, tendant à obtenir la résolution du contrat avec [H] et par voie de conséquence la caducité du contrat la liant à [W] ; elle estime que l’exception d’inexécution ne peut pas s’appliquer entre deux contrats distincts.

En tout état de cause elle rappelle avoir satisfait à ses obligations de bailleur, et affirme que l’appelant ne démontre pas la carence de [H].

Elle indique que les demandes indemnitaires qu’elle formule sont conformes aux conditions contractuellement fixées en cas de défaillance dans le paiement des loyers.

Vu les conclusions responsives notifiées le 8 décembre 2023 auxquelles il est fait expressément référence pour l’énoncé du détail de l’argumentation, de la Sas [H] (Société de Location de Matériel Comptable) demandant, aux visas des articles 1186, 1187, 1219, 1224 et 1225 du code civil, de :

– confirmer le jugement dont appel ;

– débouter la société Pf [C] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

– condamner la société Pf [C], partie perdante, aux entiers dépens ;

– la condamner à payer à la société [H] la somme de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en sus des sommes allouées en première instance.

Elle estime que la société Pf Gérard ne rapporte pas la preuve des dysfonctionnements du logiciel et de l’absence de transfert de la base de données [L], dont elle se prévaut.

Elle relève également des contradictions dans l’argumentaire de la société appelante qui invoque l’inexistence de tout lien contractuel ou à tout le moins la résolution judiciaire du contrat, tout en sollicitant son application.
MOTIFS

Sur les relations contractuelles entre les parties

La société Pf [C] conteste toute relation contractuelle écrite entre les parties estimant que le contrat tripartite qui liait son prédécesseur à [H] et [W] n’a pas fait l’objet d’une reprise dans l’acte de cession du fonds de commerce ; elle invoque par ailleurs la nullité de l’avenant du 14 octobre 2019 qu’elle n’a pas signé de manière éclairée.

Sur l’absence de reprise du contrat litigieux

Au soutien de ses prétentions la société Pf [C] verse aux débats une attestation notariée de cession du fonds de commerce, et un court extrait de l’acte de cession en lui-même, reprenant uniquement une clause contenue en page 4, et une autre en page 15 ; l’absence de communication de l’intégralité de l’acte ne permet pas à la Cour de vérifier si les contrats liant la société [L] aux sociétés [H] et [W] étaient intégrés à la cession.

En tout état de cause la simple mention selon laquelle le cédant atteste ne pas avoir souscrit de contrat toujours en cours, est insuffisante pour rapporter la preuve d’une exclusion expresse de ces contrats de l’opération de cession ; force est de constater que ces contrats existaient et étaient en cours, ce que ne contestent pas les parties, et que cette mention était donc erronée.

Par ailleurs, il ressort des éléments de la procédure qu’informée de la cession, la société [W] a donné à la société [L] les informations nécessaires pour procéder à un transfert du contrat, dans l’hypothèse où les parties le souhaiteraient.

Ce transfert a été sollicité par les parties, et la société Pf [C] a signé un avenant actant les conditions du transfert.

Cet avenant a également été signé par la société [L] et la société [W], qui a indiqué que la société [H] en serait destinataire.

Si effectivement les conditions contractuelles du contrat souscrit par la société [L] prévoyaient que sa cessation d’activité, totale ou partielle, était une cause susceptible de provoquer la résiliation anticipée du contrat, la manifestation expresse de la volonté tant de la société [L] que de la société Pf [C] de procéder au transfert de ce contrat, de manière contemporaine à la cession du fonds de commerce, permet de constater qu’aucune des parties n’a sollicité de résiliation anticipée.

Dès lors, les contrats liant la société [L] aux sociétés [W] et [H] ont fait l’objet d’un transfert au bénéfice de la société Pf [C], transfert pour lequel un avenant a été signé entre l’ensemble des parties.

La société Pf [C] ne peut donc pas sérieusement soutenir que les contrats ne se sont pas poursuivis à son bénéfice.

Sur l’avenant du 14 octobre 2019

La société Pf [C] affirme avoir signé l’avenant du 14 octobre 2019 sans avoir eu connaissance des contrats initiaux ; elle reproche ainsi un défaut d’information aux sociétés [W] et [H], et invoque la nullité de l’avenant.

La Cour constate toutefois que la société Pf [C] a apposé sa signature sur l’avenant, et a expressément consenti au transfert des contrats antérieurement souscrits par la société [L] ; il lui appartenait, avant de signer le document présenté, de procéder à toute vérification utile quant au contenu des contrats transférés.

Elle ne démontre pas avoir sollicité en vain la copie de ces contrats avant d’accepter leur transfert, que ce soit auprès de la société [L] dont elle rachetait le fonds de commerce, ou des société [W] et [H].

La société Pf [C] n’est pas fondée à se prévaloir de sa propre carence ; elle ne peut pas opposer aux sociétés intimées une man’uvre volontaire destinée à la priver du contenu des contrats transférés, alors qu’elle a accepté ce transfert sans solliciter de prendre connaissance de ceux-ci.

Dans ces conditions c’est à bon droit que les premiers juges ont débouté la société Pf [C] de sa demande en nullité du contrat de location conclu avec la société [W] ; si en appel la société Pf [C] précise sa demande en sollicitant le prononcé de la nullité de l’avenant du 14 octobre 2019, cette demande procède de la même prétention présentée en première instance.

Il conviendra donc de confirmer le premier jugement de ce chef.

Sur le sort des contrats

La société Pf [C] affirme avoir rencontré plusieurs difficultés dans l’utilisation du logiciel, constituant des dysfonctionnements sérieux ne lui ayant jamais permis une utilisation correcte.

Elle justifie ainsi du défaut du paiement des loyers sollicités par la société [W], par une exception d’inexécution.

A titre subsidiaire, elle sollicite le prononcé de la résolution judiciaire du contrat la liant à la société [H] du fait des manquements de cette dernière, et en conséquence de la caducité du contrat de location financière la liant à [W], du fait de leur interdépendance.

Sur l’exception d’inexécution

La société Pf [C] invoque l’exception d’inexécution pour justifier du défaut de paiement des loyers sollicités par la société [W] ; dans un dispositif quelque peu confus, la société appelante semble relier la question de l’exception d’inexécution à des demandes de « constater que les Sociétés [W] et [H] sont des sociétés s’urs » et « constater le caractère frauduleux de la location financière mise en place entre les deux sociétés ».

Au-delà du fait que les demandes de constats ne contenant pas de demande juridique ne relèvent pas de la compétence de la Cour, il convient de relever à titre liminaire que la possibilité d’opposer l’exception d’inexécution résulte de l’interdépendance des contrats, et non d’un quelconque montage frauduleux que la Cour devrait constater.

Dès lors, le moyen tiré de l’exception d’inexécution sera évoqué uniquement à l’aune des arguments présentés quant au respect des obligations contractuelles de chacun.

Il ressort des dispositions de l’article 1219 du code civil qu’une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

L’exception d’inexécution ne peut être invoquée qu’à propos d’obligations nées d’une même convention ; il est toutefois constant que l’inexécution d’une convention peut être justifiée si le contractant n’a pas lui-même satisfait à une obligation contractuelle, même découlant d’une convention distincte, dès lors que l’exécution de cette dernière est liée à celle de la première.

C’est donc en vain que la société [W] soutient qu’une inexécution contractuelle de la société [H] serait sans effet sur l’obligation de Pf [C] de payer les loyers, dans la mesure où le contrat de fourniture et le contrat de location financière repris par le nouveau propriétaire du fonds de commerce sont interdépendants.

Par ailleurs, selon l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Il appartient donc à la société Pf [C], qui invoque l’inexécution des obligations de la société [H], pour justifier du défaut de paiement des loyers exigés par la société [W], de rapporter la preuve des dysfonctionnements dont elle se prévaut.

Or, la Cour relève qu’elle échoue à rapporter cette preuve ; au soutien de ses prétentions, elle verse aux débats des messages électroniques adressés à la société [W], dans laquelle la société Pf [C] évoque des dysfonctionnements, qui sont contestés tant par la société [W], que par la société [H].

Ces courriers électroniques relèvent de simples affirmations, qui ne sont étayées par aucune analyse technique contradictoire.

Les sociétés [H] et [W] ne contestent pas que la société Pf [C] n’ait pas eu accès dès le 2 octobre 2019 au logiciel ; il convient toutefois de rappeler que cette dernière a consenti, en signant l’avenant du 14 octobre 2019 à faire rétroagir le contrat à cette date ; la fourniture de codes d’accès ne pouvait donc pas intervenir avant la signature de l’avenant.

Les opérations techniques nécessaires ont permis à Pf [C] de disposer de cet accès quelques jours après la signature de l’avenant, et il n’est pas démontré que les dysfonctionnements évoqués ensuite aient présenté une telle gravité qu’ils aient bloqué l’accès au système informatique.

Au contraire, il ressort des éléments versés aux débats, et en particulière du relevé d’activité relatif à la base de données « GERA05 », créée suite à la signature de l’avenant, que la société Pf [C] a enregistré 898 dossiers depuis son ouverture, et a généré 118 factures et 11 avoirs, jusqu’à la clôture de l’accès au mois de mars 2020.

Elle n’est donc pas fondée à affirmer qu’elle n’a pas eu accès au logiciel, ou qu’elle se serait heurtée durablement à des blocages dans la connexion ou à des coupures d’accès ; les difficultés occasionnelles rencontrées par la société Pf [C], lors du transfert de contrat, ne constituent pas des inexécutions suffisamment graves pour invoquer les dispositions de l’article 1219 du code civil.

La société Pf [C] ajoute dans un message électronique du 2 mars 2020 qu’une erreur d’enregistrement de son RIB dans le logiciel par la société [H] serait venue la priver du paiement de certaines factures ; toutefois, elle ne rapporte pas la preuve de ce défaut de paiement.

Au contraire, elle produit un message électronique du client ayant fait erreur dans le paiement, manifestant la volonté de régulariser la situation, et appelant ses employés à bien distinguer le RIB de la société [L] de celui de la société Pf [C].

Ces éléments sont insuffisants à démontrer que tout paiement à Pf [C] était rendu impossible par le logiciel, le client lui-même visant un manque d’attention de ses employés.

Le fait que le fournisseur de logiciel informatique soit débiteur d’une obligation de résultat n’autorise pas son client à cesser toute exécution contractuelle lorsqu’un dysfonctionnement se présente.

En l’espèce, les difficultés invoquées, qui ne relèvent que des simples déclarations de la société Pf [C], n’ont pas fait obstacle à l’exploitation du logiciel.

La société Pf [C] n’est donc pas fondée à invoquer une exception d’inexécution au motif des manquements contractuels de la société [H], pour justifier du défaut de paiement des loyers dont le paiement était sollicité par [W].

C’est à bon droit que le tribunal de commerce a rejeté les moyens tirés de l’exception d’inexécution dans sa motivation ; il a toutefois omis ce chef de jugement dans le dispositif de sa décision.

Il conviendra en conséquence de débouter la société Pf [C] de ses demandes indemnitaires relatives à l’exception d’inexécution.

Sur la privation d’une base de données

En cause d’appel, la société Pf [C] présente une demande nouvelle liée à l’impossibilité d’accéder à la base de données créée par la société [L] dans le logiciel litigieux ; elle affirme que lors du transfert de contrat, au lieu de lui transférer simplement les droits sur la base de données nommée « RIVA01 », la société [H] est venue créer une nouvelle base « GERA05 », sans y inclure notamment les factures et avoirs de son prédécesseur.

Elle affirme avoir découvert cette carence lorsque les sociétés intimées ont fait état de la base de données « RIVA01 » dans leurs conclusions.

Il ne peut pourtant qu’être relevé que la société Pf [C], parmi les divers dysfonctionnements dont elle a fait état auprès des sociétés [W] et [H] par courriers électroniques, n’a jamais mentionné l’impossibilité d’accéder aux données précédemment enregistrées par la société [L].

Pourtant, il est établi qu’elle a utilisé le logiciel pour éditer elle-même des factures et avoirs ; à cette occasion, elle n’a pu que constater que seules les données enregistrées par sa société étaient intégrées au logiciel.

La société [H] conteste les affirmations de la société Pf [C], et indique que la base de données du logiciel a été transférée à la société [C], en dépit de la création d’une nouvelle base de données à son nom.

Il a été précédemment rappelé que la société Pf [C] supporte la charge de la preuve des manquements qu’elle invoque.

Elle ne produit à l’appui de ses allégations aucun élément tendant à démontrer qu’elle a été privée de l’utilisation de la base de données du précédent titulaire du contrat, tel qu’un constat d’huissier.

Dans ces conditions, elle ne pourra qu’être déboutée de sa demande de remise sous astreinte de la base de données, et de sa demande d’indemnisation de ce chef.

Sur la résolution judiciaire et la caducité

Il ressort des dispositions de l’article 1217 du code civil que la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut provoquer la résolution du contrat.

La société Pf [C], rappelant l’obligation de résultat à laquelle était soumise la société [H], demande à la Cour de prononcer la résolution judiciaire du contrat de fourniture de logiciel ; du fait de l’interdépendance de ce contrat avec celui relatif à la location financière, elle sollicite que soit prononcée la caducité du contrat signé avec [W].

Elle fonde cette demande sur les mêmes dysfonctionnements que ceux invoqués au titre de l’exception d’inexécution.

Or, il a été précédemment rappelé que les courriers électroniques rédigés par la société Pf [C] elle-même, invoquant des dysfonctionnements, étayés par aucun autre élément tel qu’une analyse technique, constituent des éléments de preuve insuffisants, et ce d’autant plus que ces dysfonctionnements n’ont pas bloqué l’utilisation du logiciel.

La société Pf [C] ne peut donc pas légitimement invoquer une faute ou une inexécution de son co-contractant, pour solliciter la résolution judiciaire du contrat.

Le jugement du tribunal de commerce sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la société Pf [C] de sa demande de résolution judiciaire du contrat conclu avec [H], et de caducité du contrat avec [W], et en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages et intérêts fondée sur les inexécutions alléguées.

Sur les demandes indemnitaires de la Sas [W]

Selon l’article 9 des conditions générales du contrat de location financière conclu entre les sociétés [L] et [W], transféré ensuite à la société Pf [C] : « le contrat est un contrat à durée déterminée et ne peut en conséquence être résilié avant le terme de la période initiale de location sauf les cas exposés ci-dessous et avec les conséquences énoncées ci-après à l’article 10 :

a) en cas de non-respect du présent contrat et notamment de non-paiement du loyer à bonne échéance, déclarations incorrectes ou incomplète, ledit contrat sera résilié de plein droit par le bailleur 8 jours après mise en demeure demeurée sans effet ».

La Cour constate donc que la société [W], qui a sollicité en vain le paiement des loyers après de la société Pf [C], et lui a adressé une mise en demeure infructueuse par courrier recommandé avec accusé de réception le 29 janvier 2020, se prévaut à bon droit de la résiliation du contrat aux torts de la société appelante.

Aux termes de l’article 10 des conditions générales, en cas de résiliation anticipée du contrat :

« Outre la restitution des biens et droits, le locataire sera redevable d’une somme équivalente au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorés des intérêts et pénalités dûment prévus au « 3. Conditions financières » des présentes conditions générales ainsi que d’une somme équivalente à la totalité des loyers restant à échoir jusqu’au terme du contrat majorée de 10% à titre de clause pénale, sans préjudice d’éventuels dommages et intérêts. »

L’article 3 est ainsi rédigé :

« Toute échéance impayée donnera lieu au versement par le locataire d’un intérêt de retard correspondant au taux d’intérêt appliqué par la banque centrale européenne (BCE) à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10% outre le versement d’une indemnité forfaitaire d’un montant de 40 euros pour frais de recouvrement conformément aux dispositions des articles L441-6 et D441-5 du code de commerce. Dans l’hypothèse où les frais de recouvrement seraient supérieurs au montant de l’indemnité forfaitaire, une indemnité complémentaire sera réclamée au locataire, sur justificatifs.

Une indemnité complémentaire d’un montant équivalent à 10% des sommes dues sera exigée à titre de clause pénale. »

Enfin l’article 5 liste une série de frais annexes qui seront facturés au locataire le cas échéant, comprenant une indemnité forfaitaire de 40 euros par échéance impayée, ainsi que des frais de courrier de relance.

Sur le fondement de ces dispositions contractuelles, la société [W] réclame :

– le montant des échéances impayées outre les intérêts au taux BCE majoré de 10% à compter du premier impayé du 25 octobre 2019 ;

– le montant des loyers à échoir au jour de la résiliation, au taux d’intérêts contractuel de 10% à compter du 1er mars 2020 ;

– des frais de courrier recommandé ;

– le montant de la clause pénale ;

– des indemnités de recouvrement pour 8 échéances impayées.

La société [W] est fondée à réclamer le paiement des échéances impayées majorées chacune des intérêts au taux BCE + 10%, ainsi que l’a justement rappelé le tribunal de commerce de Toulouse.

Ce taux d’intérêts s’applique à chaque échéance impayée conformément aux dispositions de l’article 3 ci-dessus visé, et non de manière générale à compter du premier impayé ainsi que le sollicite la société [W].

Il conviendra en conséquence de confirmer le premier jugement de ce chef.

Ainsi la société Pf Gérard sera redevable de la somme de 1 974 euros à la société [W] au titre des factures impayées, avec intérêts au taux BCE majoré de 10% pour chacune des 6 échéances impayées.

En application de l’article 5 des conditions générales, reprenant les dispositions de l’article D441-5 du code de commerce, la société [W] est fondée à réclamer la somme de 40 euros par facture impayée ; dans la mesure où elle ne justifie que de 6 factures impayées (5 échéances + 1 facture pour frais de transfert des contrats) le premier jugement sera infirmé en ce qu’il a accordé le paiement de cette indemnité pour 8 factures.

La société Pf [C] devra payer la somme de 240 euros de ce chef.

Au titre des frais annexes, la société [W] est fondée à obtenir le paiement de la somme de 12 euros ht au titre des courriers de relance ; le premier jugement sera confirmé en ce qu’il lui a alloué la somme de 14,40 euros ttc de ce chef.

Les dispositions contractuelles prévoyant le paiement par le locataire défaillant des loyers restant à échoir ne s’analyse pas en une clause pénale dans la mesure où elle consiste pour la société [W] à compenser le manque à gagner découlant du défaut de paiement des loyers jusqu’au terme du contrat, et ce alors qu’elle a elle-même versé l’intégralité de la somme correspondant à l’achat du logiciel, à la société [H].

Cette somme est donc due par la société Pf [C] en application des dispositions contractuelles liant les parties, ainsi que l’a relevé le premier jugement ; toutefois, le tribunal de commerce retient une somme de 5 776,80 euros au titre des loyers à échoir, alors que les 16 mensualités restant à payer s’élèvent à la somme de 5 740,80 euros (16 x 358,80 euros ttc).

Le différentiel de 36 euros contenu dans la facture du 31 mars 2020 correspond aux frais de décompte définitif, qui ne constituent pas des loyers à échoir au sens de l’article 10 des conditions générales.

Le premier jugement sera donc infirmé sur le quantum, et la société Pf [C] sera condamnée à payer la somme de 5 740,80 euros au titre des loyers à échoir.

En revanche, la majoration de 10% sur les loyers à échoir prévue dans l’article 10, et celle de 10% de l’intégralité des sommes dues visée dans l’article 3, constituent des clauses pénales en ce qu’elles viennent sanctionner le défaut de respect par une partie de ses obligations, et vont bien au-delà de la simple compensation du manque à gagner.

Le premier juge a procédé à la réduction de ces clauses, en appliquant les intérêts légaux au total des loyers à échoir à compter de l’assignation, plutôt que des intérêts contractuels à 10% ; par ailleurs, il a réduit à 1 euro la clause pénale résultant de l’article 3 des conditions générales.

Selon l’article 1231-5 du code civil, lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre.

Néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l’espèce le cumul entre ces deux indemnités est manifestement excessif, en ce qu’il vient faire peser une majoration d’intérêts de 10% au montant des loyers à échoir, et ajoute une nouvelle majoration de 10% du total des sommes dues.

Le contrat a initialement été conclu pour une durée de 36 mois par la société [L] ; il n’a connu aucun incident de paiement jusqu’au transfert de contrat à la société Pf [C].

L’application d’une double clause pénale vient sanctionner de manière excessive l’inexécution de la société Pf [C], qui en application de la présente décision relative au paiement des loyers échus et à échoir, viendra compenser dans son intégralité le manque à gagner de la société [W].

Dès lors, seule la clause pénale venant majorer le montant des loyers à échoir d’intérêts contractuels de 10% sera maintenue en l’état ; la Cour infirmera donc le premier jugement de ce chef.

En revanche, il conviendra de confirmer la décision du tribunal de commerce de faire usage de son pouvoir modérateur sur la clause pénale contenue à l’article 3 des conditions générales, en la réduisant à la somme de 1 euros.

Sur les demandes accessoires

En l’état de la présente décision, il convient de confirmer le premier jugement en ce qu’il a condamné la société Pf [C] à payer à chacune des sociétés adverses la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La société Pf [C], qui succombe en ses prétentions, sera également condamnée aux entiers dépens d’appel.

En revanche, l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ; les parties seront déboutées de leurs demandes sur ce fondement.
PAR CES MOTIFS

La Cour statuant dans les limites de sa saisine, en dernier ressort, de manière contradictoire, et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu’il a :

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] la somme de 320 € au titre de frais de recouvrement ;

– condamné la Sarl Pf [C] à verser à la Sas [W] Ia Somme de 5 776,80 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 novembre 2020 ;

Statuant à nouveau,

Condamne la Sarl Pf [C] à payer à la Sas [W] la somme de 240 euros au titre des frais de recouvrement ;

Condamne la Sarl Pf [C] à payer la somme de 5 740,80 euros à la Sas [W] au titre des loyers à échoir, majorée du taux d’intérêts contractuels de 10% à compter du 1er mars 2020 ;

Y ajoutant,

Déboute la société Pf [C] de ses demandes indemnitaires fondées sur l’exception d’inexécution ;

Déboute la Sarl Pf [C] de sa demande de remise d’une base de données sous astreinte, et de dommages et intérêts sur le fondement de la privation d’une base de données ;

Déboute la Sarl Pf [C], la Sas [W] et la Sas [H] de leurs demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles d’appel ;

Condamne la Sarl Pf [C] aux entiers dépens d’appel ;

Le Greffier La présidente.

 


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