Cour d’appel de Toulouse, 17 janvier 2025, RG n° 23/01668
Cour d’appel de Toulouse, 17 janvier 2025, RG n° 23/01668

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Toulouse

Thématique : Licenciement contesté pour négligence dans le contrôle des paiements en espèces

Résumé

Embauche et Contexte de l’Affaire

M. [S] [B] a été embauché par la Sas Milca en tant que serveur à compter du 24 août 2016, sous un contrat de travail à durée indéterminée. La convention collective applicable est celle des hôtels, cafés et restaurants, et l’entreprise emploie moins de 11 salariés.

Découverte des Faux Billets

Le 28 septembre 2020, la société Milca a découvert des faux billets utilisés pour le règlement d’additions de repas, ce qui a conduit à une plainte. M. [B] a été entendu par la police judiciaire et a subi une garde à vue le 15 octobre 2020. Le 20 novembre 2020, quatre clients ont été déclarés coupables de mise en circulation et détention de fausse monnaie.

Procédure de Licenciement

Suite à la découverte des faux billets, la Sas Milca a convoqué M. [B] à un entretien préalable le 19 octobre 2020, suivi d’une mise à pied conservatoire. Un second entretien a eu lieu le 5 janvier 2021, après quoi M. [B] a été licencié pour faute grave le 12 janvier 2021.

Contestation du Licenciement

M. [B] a contesté son licenciement devant le conseil de prud’hommes de Toulouse le 21 juillet 2021. Par jugement du 11 avril 2023, le conseil a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la Sas Milca à verser plusieurs indemnités à M. [B].

Appel de la Sas Milca

La Sas Milca a interjeté appel le 9 mai 2023, contestant les conclusions du jugement de première instance. Dans ses écritures, elle a demandé la réforme de la décision, arguant que le licenciement était justifié.

Arguments de M. [B]

Dans ses dernières écritures, M. [B] a demandé la confirmation du jugement de première instance, soutenant que les faits fautifs étaient prescrits et que son licenciement était sans cause réelle et sérieuse. Il a également demandé des indemnités pour préjudice moral.

Analyse de la Prescription des Faits

La cour a examiné la question de la prescription des faits fautifs, concluant que la procédure disciplinaire avait été engagée dans le délai légal. L’employeur a eu connaissance des faits reprochés le 30 septembre 2020, et la prescription a été interrompue par la plainte déposée.

Évaluation de la Faute Grave

La cour a analysé la qualification de faute grave retenue par l’employeur. Bien que M. [B] ait reconnu avoir encaissé des faux billets, la cour a estimé que la négligence ne justifiait pas un licenciement pour faute grave, concluant que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.

Conséquences du Licenciement

La cour a confirmé que M. [B] avait droit à des indemnités de licenciement et à un rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire. Cependant, elle a débouté M. [B] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Documents Sociaux et Frais de Justice

La cour a ordonné à la Sas Milca de délivrer à M. [B] les documents sociaux rectifiés. Elle a également condamné la société à verser des frais de justice à M. [B] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conclusion de la Décision

La cour a confirmé en partie le jugement du conseil de prud’hommes, en infirmant la qualification de licenciement sans cause réelle et sérieuse, tout en maintenant certaines indemnités dues à M. [B]. La société Milca a été condamnée aux dépens d’appel.

17/01/2025

ARRÊT N°25/19

N° RG 23/01668

N° Portalis DBVI-V-B7H-PNU6

AFR/ND

Décision déférée du 11 Avril 2023

Conseil de Prud’hommes

Formation paritaire de Toulouse

(21/01071)

MME FARRE

SECTION COMMERCE

S.A.S. MILCA

C/

[S], [W] [B]

CONFIRMATION PARTIELLE

Grosse délivrée

le

à

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ

***

APPELANTE

S.A.S. MILCA

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Laurent DUCHARLET de la SELARL LAURENT DUCHARLET, avocat au barreau de TOULOUSE

INTIME

Monsieur [S], [W] [B]

[Adresse 1]

[Localité 2]

représenté par M.[C] [Y], défenseur syndical

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant AF. RIBEYRON, chargée du rapport. Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

AF. RIBEYRON, conseillère

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

Greffière, lors des débats : M. TACHON

Greffière, lors du prononcé : C. DELVER

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. BRISSET, présidente, et par C.DELVER, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [S] [B] a été embauché selon un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de serveur par la Sas Milca à compter du 24 août 2016.

La convention collective applicable est celle des hôtels, cafés et restaurant. La société emploie moins de 11 salariés.

Suite à la découverte de faux billets utilisés pour le règlement d’additions de repas et à la plainte de la société Milca le 28 septembre 2020, M. [B] a été entendu à diverses reprises par la police judiciaire et a fait l’objet d’une mesure de garde-à-vue le 15 octobre 2020.

Le 20 novembre 2020, le tribunal correctionnel de Toulouse a déclaré coupables des chefs de mise en circulation et détention de fausse monnaie, à savoir des faux billets de 100 euros, quatre clients de la société Milca et les a condamnés le 7 décembre 2021 à indemniser celle-ci de son préjudice financier fixé à hauteur de 850 euros.

Par courrier du 30 septembre 2020, la Sas Milca a convoqué M. [B] à un entretien préalable fixé au 19 octobre 2020 et prononcé une mise à pied à titre conservatoire. Cet entretien a eu lieu en présence de M. [Y] en qualité de conseiller du salarié.

Le 15 décembre 2020, la Sas Milca a convoqué à nouveau M. [B] à un entretien préalable fixé au 5 janvier 2021, qui a également eu lieu en présence de M. [Y].

Le 12 janvier 2021, la Sas Milca a notifié à M. [B] son licenciement pour faute grave.

M. [B] a saisi le 21 juillet 2021 le conseil de prud’hommes de Toulouse afin de contester son licenciement pour faute.

Par jugement du 11 avril 2023, le conseil de prud’hommes de Toulouse section commerce chambre 1 a :

– dit que le licenciement de M. [B] est sans cause réelle et sérieuse ;

– condamné la Sas Milca à verser à M. [B] :

la somme de 1 119,75 euros (mille cent dix-neuf euros soixante-quinze centimes) bruts

la somme de 111,97 euros (cent onze euros quatre-vingt-dix-sept centimes) bruts au titre des congés payés sur rappel de salaire ;

la somme de 3 465,88 euros (trois mille quatre cent soixante-cinq euros quatre-vingt-huit centimes) bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;

la somme de 346,58 euros (trois cent quarante-six euros trente-huit centimes) bruts au titre des congés payés sur l’indemnité compensatrice de préavis ;

la somme de 1 953,26 euros (mille neuf cent cinquante-trois euros vingt-six centimes) au titre de l’indemnité de licenciement ;

la somme de 4 000 euros (quatre mille euros) à titre de dommages et intérêts ;

-condamné la Sas Milca à verser à M. [B] la somme de 500 euros (cinq cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-ordonné à la Sas Milca la délivrance des documents sociaux et des bulletins de salaire des mois de septembre et octobre 2020, ainsi que le bulletin de salaire du mois de janvier 2021 conformes à la décision ;

-débouté M. [B] du surplus de ses demandes ;

-débouté la Sas Milca de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

-condamné la Sas Milca aux dépens.

La Sas Milca a interjeté appel de ce jugement le 9 mai 2023, en énonçant dans sa déclaration d’appel les chefs critiqués.

Dans ses dernières écritures en date du 27 juillet 2023, auxquelles il est fait expressément référence, la Sas Milca demande à la cour de :

Rejetant toutes les conclusions adverses comme injustes et mal fondées,

– la recevoir en son appel et ses écritures ;

– l’y déclarer bien fondée ;

-réformer la décision du 11 juillet 2023 du conseil de prud’hommes de Toulouse en ce

qu’elle a :

-dit que le licenciement de M. [B] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

-condamné la Sas Milca à verser à M. [B]

la somme de 1 119,75 euros bruts à titre de rappel de salaire,

la somme de 111,97 euros bruts au titre des congés payés sur rappel de salaire,

la somme de 3 465,88 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

la somme de 346,58 euros bruts au titre des congés payés sur l’indemnité compensatrice de préavis,

la somme de 1 953,26 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

la somme de 4 000 euros au titre de dommages et intérêts

– condamné la Sas Milca à payer à M.[B] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

-ordonné la Sas Milca de délivrer des documents sociaux et des bulletins de salaires des mois de septembre et octobre 2020, ainsi que le bulletin de salaire du mois de janvier 2021 conformes à la décision,

-condamné la Sas Milca aux dépens,

-débouter M. [B] de ses demandes, fins et prétentions,

-condamner M. [B] à régler la somme de 2.500 euros à la Sas Milca sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

-condamner M. [B] aux entiers dépens

Dans ses dernières écritures en date du 2 octobre 2023, auxquelles il est fait expressément référence, M. [B] demande à la cour de :

Rejetant toutes les conclusions contraires comme injustes et mal fondées.

A titre liminaire :

-constater que les salaires correspondant à la mise à pied à titre conservatoire n’ont pas été versés pour la période du 30 septembre au 20 octobre 2020 à la suite de la reprise de son emploi le 21 octobre 2020.

A titre principal :

-constater la prescription des faits fautifs selon les dispositions de l’article L1332-4 du code du travail.

A titre subsidiaire :

-dire et juger que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse en l’absence de faute

-condamner la Sas Milca aux entiers dépens

En conséquence,

-confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 11 avril 2023 en ce qu’il a :

-dit et jugé que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

-condamné la société Milca au versement des sommes suivantes :

-dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 4 000,00 euros nets

-indemnité légale de licenciement : 1 953,26 euros nets

-indemnité compensatrice de préavis : 3 465,88 euros bruts

-congés payés afférents au préavis : 346,58 euros bruts

-paiement de la mise à pied conservatoire : 1 119,75 euros bruts

– indemnité compensatrice de congés payés sur mise à pied conservatoire : 111,97 euros bruts

– article 700 du code de procédure civile : 500,00 euros

– condamné le société Milca aux entiers dépens

Y ajoutant :

-condamner la société Milca au paiement de le somme de 4 664,70 euros au titre des dommages et intérêts pour le préjudice moral subi.

-condamner la société Milca au paiement de la somme de 500,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en appel.

La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 08 octobre 2024.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme la décision du conseil des prud’hommes de Toulouse du 11 avril 2023 sauf en ce qu’il a dit sans cause réelle et sérieuse le licenciement de M.[S] [B] et lui a accordé des dommages-intérêts à ce titre,

Statuant des chefs infirmés et à nouveau,

Dit que le licenciement de M.[S] [B] repose sur une cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [B] de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Y ajoutant,

Déboute M.[B] de sa demande au titre de l’indemnité pour licenciement vexatoire,

Ordonne la remise par la société Milca à M.[S] [B] des documents sociaux conformément aux termes du présent arrêt,

Condamne la société Milca à payer à M.[S] [B] la somme de 500 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel,

La condamne aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par C. BRISSET, présidente, et par C.DELVER, greffière.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

C.DELVER C. BRISSET

.

 


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