Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Toulouse
Thématique : Contrat de travail et conséquences du décès de l’employeur : enjeux de rémunération et de procédure.
→ RésuméEmbauche et ContexteMme [N] [J] a été engagée par M. [T] [O] en tant qu’aide à la personne à partir du 15 mai 2019. Les relations de travail étaient régies par la convention collective des salariés du particulier employeur, qui a été remplacée par une nouvelle convention en mars 2021. Accident du Travail et Décès de l’EmployeurLe 28 juillet 2019, Mme [J] a subi un accident du travail, entraînant son arrêt de travail. M. [O] est décédé le 25 octobre 2019, sans que Mme [J] ait pu reprendre son emploi après l’accident. Demandes de Remboursement et Saisine des Prud’hommesLe 26 février 2020, Mme [J] a demandé le paiement de rappels de salaires et de frais non remboursés. Elle a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 4 février 2021 pour réclamer diverses sommes, y compris des rappels de salaires et un préjudice moral. Jugement du Conseil de Prud’hommesLe 21 décembre 2022, le conseil de prud’hommes a condamné Mme [E], héritière de M. [O], à verser à Mme [J] plusieurs sommes, notamment 4 800 euros pour des rappels de salaires et 1 267 euros pour des heures non réglées. Mme [J] a été déboutée de certaines de ses demandes, y compris celles concernant des frais non remboursés. Appel de Mme [E]Mme [E] a interjeté appel du jugement le 23 janvier 2023, contesté par Mme [J]. Le magistrat a rejeté la demande de caducité de l’appel. Conclusions de l’AppelDans ses conclusions du 8 mars 2023, Mme [E] a demandé la réformation du jugement, arguant que Mme [J] avait été embauchée par contrat à durée déterminée et que toutes ses obligations avaient été remplies. Réponse de Mme [J]Mme [J] a demandé la confirmation du jugement initial, soutenant qu’en l’absence de contrat écrit, son contrat était réputé à durée indéterminée. Elle a également souligné le préjudice moral qu’elle subit. Décision de la CourLa cour a infirmé plusieurs points du jugement initial, notamment en ce qui concerne les rappels de salaires pour les mois d’août, septembre et octobre 2019, et a statué que le décès de l’employeur mettait fin au contrat de travail. Elle a ordonné la délivrance de documents de fin de contrat sans astreinte. Conclusion et DépensesLa cour a confirmé certaines condamnations, notamment le paiement de 1 267 euros pour les heures travaillées et 1 500 euros au titre des dépens. Mme [E] a été condamnée aux dépens de l’appel, sans application de l’article 700 du code de procédure civile. |
17/01/2025
ARRÊT N°2025/12
N° RG 23/00253 – N° Portalis DBVI-V-B7H-PGZM
NB/CD
Décision déférée du 21 Décembre 2022 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE (21/00174)
J.QUARIN
Section Activités Diverses
[C] [E] VENANT AUX DROITS DE M. [T] [O]
C/
[N] [J]
INFIRMATION PARTIELLE
Grosse délivrée
le
à
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
***
COUR D’APPEL DE TOULOUSE
4eme Chambre Section 1
***
ARRÊT DU DIX SEPT JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ
***
APPELANTE
Madame [C] [E] VENANT AUX DROITS DE
M. [T] [O]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Rémy CRUDO de la SELEURL REMY CRUDO, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE
INTIM »E
Madame [N] [J]
[Adresse 2]
[Adresse 2] / FRANCE
Représentée par Me Christine BRUNIQUEL-LABATUT, avocat au barreau de TOULOUSE
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 31555/2023/005022 du 27/03/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de TOULOUSE)
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 22 Octobre 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant N. BERGOUNIOU, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport. Cette magistrate a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
C. BRISSET, présidente
M. DARIES, conseillère
N. BERGOUNIOU, magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
Greffière, lors des débats : C. DELVER
ARRET :
– CONTRADICTOIRE
– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties
– signé par C. BRISSET, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre
FAITS – PROCÉDURE – PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [N] [J] a été embauchée à compter du 15 mai 2019 par M. [T] [O] en qualité d’aide à la personne.
Les relations contractuelles entre les parties étaient régies par la convention collective des salariés du particulier employeur du 24 novembre 1999 aujourd’hui abrogée et remplacée par la convention collective nationale des particuliers employeurs et de l’emploi à domicile du 15 mars 2021.
Mme [J] a été victime d’un accident du travail le 28 juillet 2019, pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne au titre de la législation sur les risques professionnels. Elle n’a jamais repris son emploi à la suite de cet accident.
M. [O] est décédé le 25 octobre 2019.
Par courrier du 26 février 2020, Mme [J] a sollicité le paiement de rappels d’heures réalisées et non réglées, des frais non pris en charge ainsi que ses salaires des mois d’août, septembre et octobre 2019.
Mme [J] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse le 4 février 2021 pour demander le versement de diverses sommes, notamment à titre de rappel de salaires, heures travaillées non réglées, remboursement de frais restés à charge et préjudice moral.
Mme [C] [E] est venue aux droits de M. [O] en sa qualité d’unique fille et héritière.
Par jugement du 21 décembre 2022, le conseil de prud’hommes de Toulouse, section activités diverses, a :
– condamné Mme [E], en sa qualité d’ayant droit de M. [O] décédé, à payer à Mme [J] les sommes suivantes :
* au titre de rappel de salaires des mois d’août 2019, septembre 2019 et octobre 2019 la somme de 1 600 euros x 3, soit 4 800 euros,
* au titre des heures travaillées, non réglées des mois de juin 2019 et juillet 2019 la somme de 1 267 euros,
– débouté Mme [J] de sa demande de condamnation de Mme [E] à lui payer au titre des remboursements de frais restés à charge la somme de 49,41 euros + 199,75 euros = 249,16 euros,
– débouté Mme [J] de sa demande de condamnation de Mme [E] à lui payer au titre des salaires dus à ce jour (d’octobre 2019 à juin 2022) : 32 mois x 1 600 euros sauf à parfaire au jour de la décision, le contrat étant rompu de plein droit à compter de la date de décès de l’employeur,
– condamné Mme [E] à délivrer à Mme [J] sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de 15 jours après le prononcé du jugement et pour une durée de deux mois :
* la lettre de licenciement,
* le reçu de solde de tout compte,
* le certificat de travail,
* l’attestation Pôle Emploi dernier employeur.
– condamné Mme [E] à payer à Mme [J] la somme de 1 600 euros pour non respect de la procédure de licenciement,
– condamné Mme [E] à payer à Mme [J] la somme de 1 600 euros pour préjudice moral,
– condamné Mme [E] à payer à Mme [J] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de l’instance,
– débouté Mme [E] de sa demande de condamnation de Mme [J] à lui payer une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de préjudice moral,
– débouté Mme [E] de sa demande reconventionnelle de condamnation de Mme [J] à lui payer une somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
***
Par déclaration du 23 janvier 2023, Mme [E], venant aux droits de M. [O], a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 12 janvier 2023, dans des conditions de délai et de forme qui ne sont pas contestées.
Par ordonnance du 10 octobre 2023, le magistrat chargé de la mise en état a rejeté la demande de caducité de l’appel sollicitée par Mme [J].
***
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 8 mars 2023, Mme [C] [E], venant aux droits de M. [T] [O], demande à la cour de :
– juger son appel recevable et bien fondé,
– réformer le jugement déféré en ce qu’il a jugé que Mme [J] avait été employée dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée par M. [O],
– réformer le jugement en ce qu’il a jugé que M. [O] et Mme [J] n’étaient pas liés par un contrat à durée déterminée dont le terme était prévu le 31 juillet 2019,
– réformer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [E] à payer à Mme [J]:
* au titre de rappel de salaires des mois d’août 2019, septembre 2019 et octobre 2019 la somme de 1 600 euros x 3, soit 4 800 euros,
* au titre des heures travaillées, non réglées des mois de juin 2019 et juillet 2019 la somme de 1 267 euros,
* la somme de 1 600 euros pour non-respect de la procédure de licenciement.
* la somme de 1 600 euros pour préjudice moral
* la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et est condamnée aux entiers dépens de l’instance.
– réformer le jugement en ce qu’il a condamné Mme [E] à délivrer à Mme [J] sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de 15 jours après le prononcé du jugement et pour une durée de deux mois :
* la lettre de licenciement,
* le reçu de solde de tout compte,
* le certificat de travail,
* l’attestation Pôle Emploi dernier employeur.
Statuant à nouveau,
– débouter Mme [J] de ses demandes liées au rappel de salaires des mois d’août 2019, septembre 2019 et octobre 2019,
– débouter Mme [J] de ses demandes formulées au titre du rappel des heures travaillées et non réglées de juin 2019 et juillet 2019,
– débouter Mme [J] de sa demande de condamnation sous astreinte à délivrer les documents de fin de contrat,
– débouter Mme [J] de sa demande de condamnation pour non-respect de la procédure de licenciement,
– débouter Mme [J] de sa demande de condamnation au titre d’un quelconque préjudice moral,
– débouter Mme [J] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des entiers dépens,
– débouter Mme [J] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
– condamner Mme [J] à verser à Mme [E] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– condamner Mme [J] à verser à Mme [E] une somme de 3 000 euros au visa de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ainsi qu’une somme équivalente pour la procédure de première instance,
– le condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel.
Mme [E] fait valoir, pour l’essentiel, que c’est son neveu qui a embauché Mme [J], et qu’elle-même n’a été au courant de l’existence de cette dernière que lorsqu’elle a été assignée en justice ; que Mme [J], qui ne communique pas son contrat de travail, a en réalité été embauchée par contrat à durée déterminée pour une période de deux mois et demi se terminant le 31 juillet 2019 ; que la salariée a été remplie de l’intégralité de ses droits et ne justifie pas de l’existence d’un quelconque préjudice.
***
Par ses dernières conclusions communiquées au greffe par voie électronique le 26 septembre 2024, Mme [N] [J] demande à la cour de :
– confirmer le jugement qui a :
* condamné Mme [E] au paiement au titre de rappel de salaires des mois d’août 2019, septembre 2019 et octobre 2019 la somme de 1 600 euros x 3, soit 4 800 euros,
* condamné Mme [E] au paiement au titre des heures travaillées, non réglées des mois de juin 2019 et juillet 2019 la somme de 1 267 euros,
* condamné Mme [E] à délivrer à Mme [J] sous astreinte de 150 euros par jour après le prononcé du jugement et pour une durée de deux mois : la lettre de licenciement, le reçu de solde de tout compte, le certificat de travail, l’attestation Pôle Emploi dernier employeur,
* condamné Mme [E] au paiement de la somme de 1 600 euros pour non-respect de la procédure de licenciement,
* condamné Mme [E] au paiement de la somme de 1 600 euros pour préjudice moral,
* condamné Mme [E] au paiement de la somme de 1 500 euros au titre des dépens de l’instance.
– débouter Mme [E] sur sa demande de paiement de la somme de 1 600 euros au titre du préjudice moral,
– condamner Mme [E] à régler au titre des frais non remboursés une somme de 249,16 euros,
– condamner Mme [E] à régler une somme de 2 500 euros au titre du préjudice moral,
– condamner Mme [E] à une somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700-2 du code de procédure civile.
Mme [J] soutient qu’en l’absence de contrat écrit, celui ci est réputé conclu pour une durée indéterminée et à temps complet ; qu’étant âgée de 69 ans lors de la rupture de son contrat de travail, elle supporte mal la pression d’une nouvelle procédure et subit un préjudice moral incontestable.
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La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance en date du 11 octobre 2024.
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Il est fait renvoi aux écritures pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 21 décembre 2022, sauf en ce qu’il a condamné Mme [C] [E] à payer à Mme [N] [J] les sommes de 1267 euros bruts à titre de rappel de salaire pour les mois de juin et juillet 2019, 1500 euros au titre de l’article 700-2 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance.
Statuant de nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,
Ordonne la délivrance par Mme [E] à Mme [J] d’un bulletin de salaire récapitulant l’ensemble des condamnations prononcées, du certificat de travail et de l’attestation destinée à Pôle Emploi, dans un délai de soixante jours suivant la notification du présent arrêt, sans astreinte.
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.
Dit n’y avoir lieu, en cause d’appel, de faire application de l’article 700 du code de procédure au profit de quiconque.
Condamne Mme [C] [E] aux dépens de l’appel.
Le présent arrêt a été signé par C. BRISSET, présidente, et par C. DELVER, greffière.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE
C. DELVER C. BRISSET
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