Cour d’appel de Rouen, 31 janvier 2025, RG n° 22/01979
Cour d’appel de Rouen, 31 janvier 2025, RG n° 22/01979

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rouen

Thématique : Reconnaissance de la faute inexcusable liée à l’exposition à l’amiante dans le milieu professionnel

Résumé

Contexte de l’affaire

La caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 29] a reconnu un mésothéliome comme maladie professionnelle pour [R] [U], déclaré le 10 novembre 2015. Ce dernier est décédé le 2 mars 2017, et la caisse a établi que son décès était imputable à cette pathologie, fixant son taux d’incapacité permanente à 100 % à partir du 11 novembre 2015.

Indemnisation des ayants droit

Les ayants droit de [R] [U] ont été indemnisés par le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) pour les préjudices moraux et ceux subis par la victime. Ils ont également engagé une procédure devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de [Localité 29] pour obtenir la reconnaissance de la faute inexcusable de ses employeurs.

Jugement du tribunal

Le 30 mai 2022, le tribunal a débouté les ayants droit et le Fiva de leur demande de reconnaissance de la faute inexcusable des employeurs de [R] [U]. Les sociétés concernées ont également été déboutées de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Appel des consorts [U]

Les consorts [U], comprenant la veuve et les enfants de la victime, ont interjeté appel de cette décision le 13 juin 2022, demandant l’infirmation du jugement et la reconnaissance de la faute inexcusable de leurs anciens employeurs.

Prétentions des parties

Les consorts [U] ont formulé plusieurs demandes, incluant la reconnaissance de la faute inexcusable, la majoration de la rente pour la veuve, et des indemnités pour les préjudices subis. Le Fiva a également demandé l’infirmation du jugement et la reconnaissance de la faute inexcusable des employeurs.

Réponses des sociétés intimées

Les sociétés intimées ont contesté les demandes des consorts [U] et du Fiva, demandant la confirmation du jugement initial et leur mise hors de cause. Elles ont également soulevé des arguments concernant l’absence de lien contractuel avec [R] [U] et la non-exposition à l’amiante.

Éléments de preuve

Les consorts [U] ont présenté des attestations d’anciens collègues de [R] [U] confirmant son exposition à l’amiante lors de son travail sur le port de [Localité 29]. Ces témoignages ont été cruciaux pour établir la réalité de l’exposition et la responsabilité des employeurs.

Reconnaissance de la faute inexcusable

La cour a conclu que les sociétés [32], [24], [39] et [43] avaient commis une faute inexcusable, en ne protégeant pas [R] [U] des risques liés à l’amiante, malgré leur connaissance des dangers associés à cette substance.

Indemnisation des préjudices

La cour a fixé les indemnités pour les souffrances physiques et morales de [R] [U], ainsi que pour le préjudice moral des ayants droit. Les montants ont été déterminés en fonction de la gravité des souffrances et de l’impact sur la vie des proches.

Action récursoire de la caisse

La caisse a été reconnue comme responsable de verser les indemnités, avec possibilité de recours contre les sociétés reconnues coupables de faute inexcusable pour récupérer les sommes versées.

Frais de justice

Les sociétés condamnées ont été tenues de payer les dépens et des sommes au titre de l’article 700 du code de procédure civile aux consorts [U] et au Fiva, en raison de leur perte dans le procès.

N° RG 22/01979 – N° Portalis DBV2-V-B7G-JDII

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 31 JANVIER 2025

DÉCISION DÉFÉRÉE :

18/00217

Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DU HAVRE du 30 Mai 2022

APPELANTS :

Madame [H] [X] veuve [U]

[Adresse 9]

[Localité 15]

Madame [E] [U]

[Adresse 5]

[Localité 16]

Monsieur [Y] [U]

[Adresse 9]

[Localité 15]

Madame [J] [U] épouse [B]

[Adresse 9]

[Localité 15]

représentés par Me Frédéric QUINQUIS de la SELARL Ledoux & Associés, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES :

S.A.S. [32]

[Adresse 4]

[Localité 29]

représentée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me François MAZOT, avocat au barreau du HAVRE

S.A. [26] ([24])

[Adresse 10]

[Localité 14]

représentée par Me Samuel ROTHOUX de la SELARL LHJ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

S.A.S [21] venant aux droits de la société [38]

[Adresse 6]

[Localité 17]

représentée par Me Frédéric MARCOUYEUX de la SELARL MARCOUYEUX ET ASSOCIEES, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A.S. [42] [43]

[Adresse 7]

[Localité 29]

représentée par Me Caroline SCOLAN de la SELARL GRAY SCOLAN, avocat au barreau de ROUEN substituée par Me François MAZOT, avocat au barreau du HAVRE

S.A [23]

[Adresse 22]

[Localité 2]

représentée par Me Olivier GRIMALDI de la SELARL SELARL GRIMALDI ET ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Louis DUBECQ, avocat au barreau de MARSEILLE

S.A. [39] venant aux droits de la société [40]

[Adresse 18]

[Localité 11]

représentée par Me Laura JOUSSELIN de la SELARL Littler France, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Cyril CAPACCI, avocat au barreau de ROUEN

S.A. [30]

[Adresse 3]

[Localité 12]

représentée par Me Julie VERDON de l’ASSOCIATION HASCOET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS substituée par Me Elsa GASIOREK, avocat au barreau de PARIS

S.A [45]

[Adresse 1]

[Localité 13]

représentée par Me Elodie KONG de la SELARL QUADRIGE AVOCATS, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Raphaëlle POIGNY, avocat au barreau de ROUEN

CPAM [Localité 29]

[Adresse 8]

[Localité 29]

dispensée de comparaître

FONDS D INDEMNISATION DES VICTIMES DE L AMIANTE (FIVA)

[Adresse 44]

[Localité 19]

représentée par Me Carole BONVOISIN de la SELARL BESTAUX BONVOISIN MATRAY, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 12 Décembre 2024 sans opposition des parties devant Madame ROGER-MINNE, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame DE BRIER, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. GUYOT, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 12 décembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 31 janvier 2025

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 31 Janvier 2025, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

* * *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La caisse primaire d’assurance maladie [Localité 29] (la caisse) a pris en charge au titre du tableau n° 30D des maladies professionnelles un mésothéliome, déclaré le 10 novembre 2015 par [R] [U], qui est décédé le 2 mars 2017.

La caisse a reconnu l’imputabilité du décès à la pathologie professionnelle et a fixé le taux d’IPP d'[R] [U] à 100 % à compter du 11 novembre 2015.

Les ayants droit de la victime ont été indemnisés par le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) de leurs préjudices moraux ainsi que des préjudices subis par [R] [U], au titre de l’action successorale, en application d’un arrêt de la présente cour du 30 avril 2019.

Ils ont par ailleurs saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale [Localité 29] d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable des employeurs d'[R] [U].

Par jugement du 30 mai 2022, le pôle social du tribunal judiciaire du Havre, devenu compétent pour statuer, a :

– débouté les ayants droit et le Fiva de leur demande de reconnaissance de la faute inexcusable des sociétés [42] ([43]), [23], [32], [26] ([24]), [21] et [39], ainsi que de leurs demandes,

– débouté les sociétés [39], [42], [23], [32] et [45] de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [H] [X] veuve de la victime, Mme [E] [U], M. [Y] [U] et Mme [J] [U] épouse [B], enfants de la victime, (les consorts [U]), ont interjeté appel de cette décision le 13 juin 2022.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions remises le 11 juin 2024, soutenues oralement, les consorts [U] demandent à la cour de :

– infirmer le jugement,

– déclarer recevable le recours,

– rejeter toutes fins et exceptions de non-recevoir invoquées par les sociétés intimées, la caisse et le Fiva,

– juger que la maladie professionnelle dont est décédé [R] [U] est due à une faute inexcusable de ses anciens employeurs, les sociétés [32], [24], [21] venant aux droits de la société [34], elle-même venant aux droits de la [36] ([38]) ou la société [42] venant aux droits de la société [38], [23] venant aux droits de la société [28], elle-même venant aux droits de la société [35], elle-même venant aux droits de la société [31], [39] venant aux droits de la [41] elle-même venant aux droits de la [37] ([40]),

– fixer au maximum la majoration de la rente due à la veuve de la victime,

– allouer à la succession d'[R] [U] l’indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation à laquelle il aurait pu prétendre avant son décès,

– juger que l’ensemble des sommes dues portera intérêt au taux légal à compter de la date de l’arrêt à intervenir,

– condamner toute partie succombant au paiement des dépens,

– condamner en cause d’appel toute partie succombant à leur verser la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 20 juin 24, soutenues oralement, le Fiva demande à la cour de :

– infirmer le jugement,

– déclarer recevables la demande des consorts [U] ainsi que sa demande, en tant que subrogé dans les droits des ayants droit d'[R] [U],

– dire que la maladie professionnelle de la victime est la conséquence de la faute inexcusable de ses employeurs,

– accorder le bénéfice de l’indemnité forfaitaire de l’article L. 452-3 alinéa 1er du code de la sécurité sociale et dire qu’elle sera versée par la caisse à la succession d'[R] [U],

– fixer au maximum la majoration de la rente servie au conjoint survivant de la victime, qui sera directement versée à celui-ci par l’organisme de sécurité sociale,

– fixer l’indemnisation des préjudices personnels d'[R] [U] comme suit :

‘ 45’000 euros au titre des souffrances morales,

‘ 27’800 euros au titre des souffrances physiques,

‘ 10’500 euros au titre du préjudice d’agrément,

‘ 1 500 euros au titre du préjudice esthétique,

– fixer l’indemnisation des préjudices moraux des ayants droit comme suit :

‘ 38’000 euros pour Mme [H] [U],

‘ 18’000 euros pour M. [Y] [U],

‘ 16’000 euros pour Mme [E] [U],

‘ 7 500 euros pour chacun des trois petits-enfants,

– dire que la caisse devra lui verser ces sommes, en sa qualité de créancier subrogé,

– condamner in solidum les sociétés [32], [24], [21], [42], [23] et [39] à lui payer une somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la partie succombant aux dépens.

Par conclusions remises le 12 septembre 2024, soutenues oralement, la société [32] demande la cour de :

– confirmer le jugement,

– débouter les consorts [U] et le Fiva de leurs demandes de reconnaissance d’un lien contractuel entre [R] [U] et elle-même, de reconnaissance d’une exposition à l’amiante et d’une faute inexcusable à son encontre, de reconnaissance de l’opposabilité de la décision de prise en charge de la maladie professionnelle par la caisse à son encontre,

– condamner les consorts [U] aux dépens et au paiement d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 16 septembre 2024, soutenues oralement, la société [24] demande à la cour de :

– la mettre hors de cause,

– confirmer le jugement en ses dispositions déboutant les consorts [U] et le Fiva de leur demande de reconnaissance d’une faute inexcusable à son encontre,

– juger que les consorts [U] sont irrecevables et mal fondés en leur action et en leurs prétentions à son encontre,

– les débouter de l’intégralité de leurs demandes,

– débouter le Fiva de l’intégralité de ses prétentions dirigées à son encontre,

– en tout état de cause, juger qu’aucune faute inexcusable ne saurait lui être reprochée,

– à titre subsidiaire, ramener à de plus justes proportions les prétentions formulées au titre des souffrances physiques et morales endurées par [R] [U], ainsi qu’au titre du préjudice esthétique et des préjudices moraux des ayants droit, et débouter le Fiva de sa demande au titre de l’indemnisation du préjudice d’agrément,

– en tout état de cause, condamner solidairement les consorts [U] aux dépens et à lui verser la somme de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 1er août 2024, soutenues oralement, la société [21], venant aux droits de la société [34], elle-même venant aux droits de la [38], demande à la cour de :

– confirmer le jugement,

– débouter les ayants droit d'[R] [U] de leurs demandes à son encontre,

– prononcer sa mise hors de cause,

– en tout état de cause, juger que la décision de reconnaissance de maladie professionnelle d'[R] [U] et ses conséquences ainsi que celles d’une éventuelle faute inexcusable lui sont inopposables,

– en tout état de cause, débouter les ayants droit d'[R] [U] et le Fiva de leur demande d’indemnisation,

– juger que toute condamnation prononcée à l’encontre des employeurs sera affectée au compte spécial disposé par la loi.

Par conclusions remises le 12 septembre 2024, soutenues oralement, la société [43] demande à la cour de :

– confirmer le jugement,

– condamner les consorts [U] et le Fiva solidairement au paiement d’une somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– les condamner aux dépens.

Par conclusions remises le 19 août 2024, soutenues oralement, la société [23] demande à la cour de :

– la mettre hors de cause,

– débouter les demandeurs de leurs demandes,

– réformer le jugement en ce qu’il a estimé que la société [31] avait la qualité d’employeur d'[R] [U],

– réformer le jugement en ce qu’il n’a pas considéré qu’elle n’avait pas la qualité d’employeur d'[R] [U],

– à titre subsidiaire, confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les ayants droit d'[R] [U] et le Fiva de leur demande de reconnaissance de la faute inexcusable des différentes sociétés,

– à titre infiniment subsidiaire, juger que la décision de prise en charge de la maladie d'[R] [U] au titre de la législation sur les maladies professionnelles par la caisse lui est inopposable et que la caisse est irrecevable et mal fondée à récupérer auprès d’elle les compléments de rente et indemnités qui seront éventuellement versés par elle aux consorts [U],

– en tout état de cause, dire que les assureurs [45] et [30] seront condamnés à la relever et garantir de toute condamnation en principal, intérêts, dommages-intérêts, frais de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens qui viendraient à être prononcés à son encontre,

– condamner les demandeurs ou tout succombant à lui verser la somme de 3 500 euros au titre des frais exposés pour assurer sa défense ainsi qu’aux entiers dépens.

Par conclusions remises le 16 septembre 2024, soutenues oralement, la société [45] demande à la cour de :

– confirmer le jugement,

à titre subsidiaire :

– à titre principal, déclarer irrecevables les demandes des consorts [U] dirigées à l’encontre de la société [23] et les en débouter,

– à titre subsidiaire, déclarer infondées les demandes des consorts [U] et du Fiva dirigées à l’encontre de la société [23] et les en débouter,

– à titre infiniment subsidiaire, déclarer inopposable à cette société la décision de prise en charge de la maladie d'[R] [U] et juger que la caisse est irrecevable, et à défaut infondée, à récupérer auprès de cette société les compléments de rentes et indemnités qui seraient versés aux consorts [U],

en tout état de cause :

– déclarer irrecevable ou à défaut infondée la demande de la société [23] de condamnation dirigée à son encontre, la débouter de sa demande de condamnation,

– débouter toute partie de toute demande présentée contre elle,

– la mettre hors de cause ou lui déclarer la décision à intervenir uniquement commune et opposable,

– condamner la société [23] aux dépens et à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 4 septembre 2024, soutenues oralement, la société [30] demande à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il a considéré qu’il était démontré l’existence d’un lien contractuel entre [R] [U] et la société [31], aux droits de laquelle serait venue la société [23],

– débouter les consorts [U] et le Fiva de leurs demandes à l’encontre de cette société,

– débouter la société [23] de l’ensemble de ses demandes formées à son encontre,

– à titre subsidiaire, confirmer le jugement et débouter les consorts [U], le Fiva et la société [23] de leurs demandes,

– à titre subsidiaire, débouter le Fiva de ses demandes au titre du préjudice d’agrément et du préjudice moral des enfants et petits-enfants des consorts [U] ou, à défaut, réduire à de plus justes proportions l’évaluation des préjudices,

– en toute hypothèse, déclarer l’arrêt à intervenir commun et opposable à son égard.

Par conclusions remises le 12 septembre 2024, soutenues oralement, la société [39], venant aux droits de la [41] ([40]), demande à la cour de :

– la mettre hors de cause,

– débouter les consorts [U] de leurs demandes,

– à titre subsidiaire, débouter les consorts [U] de leur demande de reconnaissance de l’existence d’une faute inexcusable et des conséquences y afférentes, et débouter le Fiva de ses demandes,

– à titre infiniment subsidiaire, juger que la décision de prise en charge de la maladie d'[R] [U] lui est inopposable,

– en tout état de cause, condamner les consorts [U] aux dépens et à lui verser la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 16 septembre 2024, la caisse, qui a été dispensée de comparution à l’audience, demande à la cour de :

– constater l’absence d’intérêt à agir des sociétés [23] et [21], s’agissant de l’inopposabilité soulevée,

– à titre subsidiaire, constater que l’inopposabilité ne pourrait en aucun cas remettre en cause son action récursoire ou, à défaut, constater que ces sociétés ne peuvent prétendre à la fois ne pas avoir été l’employeur de l’assuré et soulever l’inopposabilité,

– s’agissant de la demande de reconnaissance d’une faute inexcusable, lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à justice,

en cas de reconnaissance d’une telle faute :

– constater qu’elle s’en rapporte à justice en ce qui concerne l’attribution d’une indemnité forfaitaire,

– rejeter la demande formulée au titre du préjudice d’agrément d'[R] [U] et la demande d’indemnisation du préjudice sollicitée par les petits-enfants,

– condamner solidairement les employeurs à lui rembourser le montant de l’ensemble des réparations qu’elle pourrait avancer au titre de la faute inexcusable.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé détaillé de leurs moyens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par décision contradictoire et en dernier ressort :

Infirme le jugement du pôle social [Localité 29] du 30 mai 2022 sauf en ce qu’il a débouté les sociétés [39], [43], [23], [32] et [45] de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et ajoutant :

Déclare l’arrêt commun et opposable aux sociétés [45] et [30] ;

Met hors de cause les sociétés [21] et [23] 

Déclare sans objet les demandes de la société [23] à l’égard de ses assureurs, celles de la société [45] à l’égard de la société [23], la demande d’irrecevabilité de la caisse en son action récursoire, formée par la société [45], les demandes d’inopposabilité de la décision de prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels de la maladie d'[R] [U] des sociétés [23], [21] et [45], la fin de non-recevoir tirée d’un défaut d’intérêt des sociétés [23] et [21] à solliciter l’inopposabilité de la décision de prise en charge de la maladie d'[R] [U], soulevée par la caisse ;

Dit que les sociétés [32], [24], [43] venant aux droits de la société [38], et [39], venant aux droits de la société [40], ont commis une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle d'[R] [U] dont il est décédé ;

Dit que la caisse primaire d’assurance maladie [Localité 29] devra verser à Mme [H] [X] veuve [U] la majoration, à son maximum, de sa rente ;

Dit que la caisse devra verser l’indemnité forfaitaire de l’article L. 452-3 alinéa 1er du code de la sécurité sociale à la succession d'[R] [U] ;

Dit que les sommes correspondantes porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision ;

Fixe l’indemnisation des préjudices d'[R] [U] aux sommes de :

– 27 800 euros pour les souffrances physiques,

– 45 000 euros pour les souffrances morales,

– 1 500 euros pour le préjudice esthétique ;

Fixe l’indemnisation des préjudices moraux des ayants droit de la victime aux sommes suivantes :

– 38 000 euros au titre du préjudice de Mme [H] [U],

– 18 000 euros au titre du préjudice de M. [Y] [U],

– 15 000 euros au titre du préjudice de Mme [E] [U],

– 3 000 euros, chacune, au titre du préjudice de Mmes [G] et [A] [U] et [D] [Z],

Dit que ces sommes porteront intérêt au taux légal à compter de la présente décision ;

Dit que la caisse devra verser ces sommes au Fiva ;

Condamne les sociétés [32], [24], [43] venant aux droits de la société [38], et [39], venant aux droits de la société [40], à lui rembourser le capital représentatif de la majoration de rente, l’indemnité forfaitaire ainsi que les sommes payées au Fiva ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

Condamne in solidum les sociétés [32], [24], [43] venant aux droits de la société [38], et [39], venant aux droits de la société [40], aux dépens ;

Les condamne in solidum à payer au Fiva la somme de 2 000 euros et aux consorts [U] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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