Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Rouen
Thématique : Vidéosurveillance des salariés : mode de preuve illicite
→ RésuméL’affaire Auchan illustre les limites de la vidéosurveillance des salariés. La société a été condamnée pour licenciement sans cause réelle, car elle avait filmé un agent de sécurité à son insu. Bien que la vidéosurveillance ait été autorisée, l’enregistrement utilisé pour justifier le licenciement a été écarté, car le salarié n’avait pas été informé de ce dispositif. De plus, Auchan n’a pas consulté le comité d’entreprise sur l’extension de la vidéosurveillance au poste de sécurité, ce qui constitue une violation des obligations légales. L’information individuelle des salariés sur ce contrôle a également été jugée insuffisante.
|
Affaire Auchan
L’enseigne Auchan a été condamnée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse de l’un de ses agents de surveillance, dont le PC sécurité avait été filmé à son insu. Suite à la dégradation d’un escalator, l’employeur avait visionné les images du PC sécurité et avait constaté que pendant 30 minutes, le salarié n’était pas à son poste. L’enseigne n’a pu se prévaloir de l’enregistrement de la caméra vidéo placée à l’intérieur du PC sécurité dans le cadre de la procédure de licenciement pour faute grave mis en oeuvre contre l’agent. En effet, l’enregistrement en cause et la transcription qui en a été faite dans le constat d’huissier ont été écartés car contenant des données collectées par un dispositif qui n’avait pas été porté préalablement à la connaissance du salarié.
Article L. 1222-4 du code du travail
L’article L. 1222-4 du code du travail dispose qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. A ce titre, le comité d’entreprise (CE) est informé et consulté, préalablement à tout projet important d’introduction de nouvelles technologies lorsque celles-ci sont susceptibles d’avoir des conséquences sur l’emploi, la qualification, la rémunération, la formation et les conditions de travail. Le comité d’entreprise doit également être informé et consulté, préalablement à la décision de mise en oeuvre dans l’entreprise, sur les moyens ou les techniques permettant un contrôle de l’activité des salariés.
Au cas d’espèce, la société Auchan avait obtenu l’autorisation administrative pour installer son système de vidéo surveillance à l’intérieur et à l’extérieur de son magasin, avait fait la déclaration à la CNIL qui l’a validé et avait averti tous les usagers des lieux, visiteurs, clients et personnel, au moyen d’un affichage, de l’installation de caméras de surveillance destinées à la sécurité du magasin et de ses abords privés.
Distinguo information et consultation du CE
Toutefois, s’agissant de l’information et de la consultation du CE, si la société Auchan avait bien informé les représentants du renouvellement de l’autorisation du périmètre vidéo et du déplacement de certaines caméras, elle n’avait pas soumis ces modifications à leur consultation comme le prévoit l’article L. 2323-13 alinéa 1er du code du travail. En d’autres termes, l’extension de la vidéosurveillance au poste de sécurité aurait dû être validée.
Le CE ne doit pas seulement être informé du renouvellement de l’autorisation du périmètre de la vidéosurveillance et/ou du déplacement de certaines caméras, mais également être consulté sur l’usage du système de surveillance interne du PC sécurité à des fins de contrôle du travail des salariés qui s’y trouvent affectés.
Information individuelle des salariés
S’agissant de l’information individuelle des salariés concernés par le dispositif de vidéosurveillance, l’article L. 1222-4 du code du travail n’en prévoit pas les modalités pratiques (consultez ici nos conseils). En l’occurrence, l’affichage mis en place dans les locaux de l’entreprise a été jugé insuffisant pour assurer une telle information. En effet, le document d’information remis par la société au CE et au CHSCT reproduisait uniquement le modèle d’affiche destinée aux parties privatives du magasin, dont relève le PC sécurité. L’agent de sécurité n’a pas été considéré comme informé individuellement du contrôle de son travail par la vidéosurveillance.
Laisser un commentaire