Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Rouen
Thématique : Reconnaissance d’un événement traumatique sur le lieu de travail et ses implications sur la santé mentale du salarié
→ RésuméL’affaire de M. [L] [Z] met en lumière les conséquences d’un événement traumatique sur le lieu de travail. Après une altercation verbale avec son employeur le 5 novembre 2020, M. [Z] a développé un syndrome anxio-dépressif, entraînant un arrêt de travail. Malgré un refus initial de la caisse primaire d’assurance-maladie de reconnaître l’accident, des éléments de preuve, tels que des certificats médicaux et des témoignages, ont établi un lien entre l’incident et la dégradation de sa santé mentale. La cour a finalement reconnu l’accident du travail, soulignant l’importance de la reconnaissance des impacts psychologiques au travail.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel de Rouen
RG n°
22/03120
COUR D’APPEL DE ROUEN
CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE
SECURITE SOCIALE
ARRET DU 15 NOVEMBRE 2024
DÉCISION DÉFÉRÉE :
21/00677
Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DE ROUEN du 25 Août 2022
APPELANT :
Monsieur [L] [Z]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Stéphane PASQUIER de la SELARL PASQUIER, avocat au barreau de ROUEN
INTIMEE :
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE RED
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Me Vincent BOURDON, avocat au barreau de ROUEN
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 19 Septembre 2024 sans opposition des parties devant Madame DE BRIER, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :
Madame BIDEAULT, Présidente
Madame POUGET, Conseillère
Madame DE BRIER, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme WERNER, Greffière
DEBATS :
A l’audience publique du 19 septembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 novembre 2024
ARRET :
CONTRADICTOIRE
Prononcé le 15 Novembre 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure civile,
signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.
* * *
MOTIFS DE L’ARRÊT :
I. Sur la demande de reconnaissance d’un accident du travail
En vertu de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.
Sur le fondement de cet article, il est admis que constitue un accident du travail tout fait précis survenu soudainement au cours ou à l’occasion du travail et qui est à l’origine d’une lésion corporelle.
En l’espèce, il est constant que M. [Z] a été placé en arrêt de travail le 5 novembre 2020, et les éléments produits aux débats mettent en évidence que cet arrêt lui a été prescrit dans la matinée, vers 11 heures, dans le cadre d’une consultation en urgence, et qu’il présentait alors une anxiété importante. Il s’est également vu prescrire à cette occasion de l’Alprazolam, qu’un pharmacien lui a délivré dans la matinée. Il est par ailleurs établi que si l’arrêt de travail a initialement été rédigé dans le cadre d’une maladie simple, son médecin traitant a ultérieurement indiqué qu’ « à [son] sens », cet arrêt pouvait entrer dans le cadre d’un accident du travail, et a alors rédigé le certificat médical initial rectificatif. M. [Z] a par ailleurs déposé une main courante le 6 novembre 2020 concernant un « litige a/s droit du travail ». Son épouse atteste de ce qu’il est rentré à la maison en larmes le 5 novembre 2020, évoque des problèmes de sommeil qui n’existaient pas auparavant et la tension ressentie par la famille dès lors que M. [Z] vivait pas bien les Faits survenus son lieu de travail cette matinée du 5 novembre. Mme [N] [D], présentée par M. [Z] comme une amie, atteste quant à elle avoir reçu un appel téléphonique de celui-ci le 5 novembre vers 10h30, au cours duquel elle a tenté de le calmer et de le rassurer « tellement il était dans un état second ».
M. [Z] justifie en outre avoir rencontré le 24 novembre 2020 le médecin du travail, qui rapporte le stress et l’anxiété ressentis par le salarié depuis le 5 novembre 2020, celui-ci les reliant à un conflit avec son employeur, en évoquant un refus de sa demande de rupture conventionnelle en septembre 2020 et une altercation sur son poste de travail lorsque l’employeur a reçu le courrier envoyé par son avocat.
Ces éléments objectifs établissent une dégradation brutale de son état de santé le 5 novembre 2020 dans la matinée, alors qu’il est constant qu’il était alors au temps et au lieu du travail.
M. [Z] justifie par ailleurs de la réception le 4 novembre 2020 par son employeur d’une lettre de son avocat évoquant une absence de remboursement de frais, l’absence de tickets-restaurant et la privation de jours de congé.
Ces éléments et circonstances corroborent objectivement les allégations du salarié quant à la survenue soudaine d’une altercation avec son employeur dans la matinée du 5 novembre 2020, quand bien même les propos tenus ne seraient pas précisément rapportés, et quant au lien entre cette altercation et la dégradation de son état de santé.
M. [Z] établit donc l’existence d’un accident du travail. Le jugement est infirmé en ce sens.
Pour autant, il n’y a pas lieu d’infirmer les décisions de la caisse et de sa commission de recours amiable, dès lors que la juridiction judiciaire statuant en matière de contentieux de la sécurité sociale n’est pas juge des décisions prises par l’organisme de sécurité sociale ou sa commission de recours amiable, mais bien du litige lui-même.
II. Sur les frais du procès
La caisse, partie perdante, est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
S’agissant spécifiquement des dépens afférents aux actes et Procédures d’exécution, il est rappelé que la présente décision permet le recouvrement des frais de son exécution forcée, que leur charge est régie par les dispositions d’ordre public de l’article L. 111-8 du code des Procédures civiles d’exécution, et que le juge du fond ne peut statuer par avance sur le sort de ces frais.
Par suite, la caisse est condamnée à payer à M. [Z] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure civile.
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement rendu le 25 août 2022 par le tribunal judiciaire de Rouen, pôle social,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Dit que M. [L] [Z] a été victime d’un accident du travail le 5 novembre 2020,
Condamne la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7]-[Localité 6]-[Localité 5] aux dépens de première instance et d’appel,
Condamne la caisse à payer à M. [Z] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de Procédure civile.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
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