Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Riom
Thématique : Responsabilité contractuelle et conséquences financières d’une rupture de contrat non conforme
→ RésuméContexte de l’affaireLa SA Biovitis, maintenant connue sous le nom de Greencel, a entrepris la construction d’un bâtiment pour des bureaux et un laboratoire à [Localité 2] dans le Puy-de-Dôme. Pour ce projet, elle a signé un contrat de « conception-réalisation » le 23 mars 2016 avec un groupement de sociétés, incluant la SARL CDA Architectes et la SAS GA Entreprise, pour un montant total de 2’390’000 euros HT. Conditions contractuellesLe contrat stipulait qu’un acompte de 20 % du montant des travaux des phases 2 et 3, soit 463’000 euros, devait être réglé à l’émission de l’ordre de service pour le démarrage des études d’exécution et des travaux préliminaires. Le permis de construire a été déposé le 1er avril 2016, et les travaux ont débuté en novembre 2016. Interruption des travauxLe 16 décembre 2016, la SAS GA Entreprise a informé Biovitis de l’interruption du chantier en raison du non-paiement total de l’acompte, ayant reçu seulement 10 % de celui-ci. Elle a demandé à Biovitis de communiquer la date de versement du complément d’acompte pour relancer le projet. Un avenant n°1 d’un montant de 1’178’361 euros HT a été proposé, mais non signé par Biovitis. Constatation de l’état d’avancementLe 28 avril 2017, GA Entreprise a fait constater par huissier l’état d’avancement des travaux, qui n’ont pas repris. Le permis de construire a ensuite été transféré à une autre entreprise pour l’achèvement des travaux. Résiliation du contratLe 1er juin 2017, GA Entreprise a notifié à Biovitis la résiliation du contrat, demandant le paiement de 36’260 euros pour les dépenses engagées, ainsi qu’une indemnité de 597’500 euros pour manque à gagner. Le 28 septembre 2017, GA Entreprise a assigné Biovitis devant le tribunal de commerce d’Aurillac pour faire constater la résiliation du marché à ses torts exclusifs. Jugement du tribunal de commerceLe tribunal de commerce d’Aurillac a ordonné une expertise, dont le rapport a été déposé le 12 avril 2021. Par jugement du 9 septembre 2022, le tribunal a condamné Greencel à verser 253’315,30 euros à GA Entreprise pour réparation de préjudices, avec des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 1er juin 2017. Appel de la SA GreencelGreencel a interjeté appel de cette décision le 21 novembre 2022. L’instruction a été clôturée le 13 juin 2024, avec des conclusions échangées entre les parties en 2023. Analyse des prétentionsLa cour a examiné les prétentions des parties, en se basant sur les dispositions du code de procédure civile. Elle a noté que la résiliation du contrat était due à un manquement de Greencel à son obligation de paiement de l’acompte, justifiant ainsi la résiliation aux torts exclusifs de cette dernière. Préjudices subis par GA EntrepriseGA Entreprise a présenté divers préjudices, incluant le manque à gagner et les coûts fixes. L’expert judiciaire a évalué le préjudice total à 253’315,30 euros, en tenant compte des dépenses exposées et des frais liés à l’immobilisation du personnel. Confirmation du jugementLa cour a confirmé le jugement du tribunal de commerce, condamnant Greencel aux dépens d’appel et à verser 5’000 euros à GA Entreprise pour les frais irrépétibles. |
COUR D’APPEL
DE RIOM
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
Du 19 novembre 2024
N° RG 22/02179 – N° Portalis DBVU-V-B7G-F5F5
-LB- Arrêt n° 470
Société GREENCEL anciennement dénommée BIOVITIS / S.A.S. GA ENTREPRISE
Jugement Au fond, origine Tribunal de Commerce d’AURILLAC, décision attaquée en date du 09 Septembre 2022, enregistrée sous le n° 2017J00039
Arrêt rendu le MARDI DIX NEUF NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
M. Philippe VALLEIX, Président
Mme Laurence BEDOS, Conseiller
Mme Clémence CIROTTE, Conseiller
En présence de :
Mme Marlène BERTHET, greffier lors de l’appel des causes et du prononcé
ENTRE :
Société GREENCEL anciennement dénommée BIOVITIS
BIPOLE [Localité 4] LIMAGNE
[Adresse 5]
[Localité 2]
Représentée par Me Charles FRIBOURG de la SELARL POLE AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
Timbre fiscal acquitté
APPELANTE
ET :
S.A.S. GA ENTREPRISE
[Adresse 3]
[Localité 1]
Représentée par Me Barbara GUTTON PERRIN de la SELARL LX RIOM-CLERMONT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
et par Me Eric-Gilbert LANEELLE de la SELAS CLAMENS CONSEIL, avocat au barreau de TOULOUSE
Timbre fiscal acquitté
INTIMEE
DÉBATS :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 23 septembre 2024, en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. VALLEIX et Mme BEDOS, rapporteurs.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 19 novembre 2024 après prorogé du délibéré initialement prévu le 12 novembre 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par M. VALLEIX, président et par Mme BERTHET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES
La SA Biovitis, dont la dénomination sociale est désormais « Greencel », a entrepris la construction d’un bâtiment destiné à abriter des bureaux et un laboratoire sur un terrain situé à [Localité 2] (Puy-de-Dôme). Dans cette perspective, elle a conclu le 23 mars 2016 avec un groupement momentané conjoint de sociétés constitué par la SARL CDA Architectes et la SAS GA Entreprise, cette dernière intervenant également en qualité de mandataire du groupement, un contrat de « conception-réalisation » pour un montant global forfaitaire de 2’390’000 euros HT, soit 75’000 euros HT au titre des études préalables et du dossier de permis de construire (phase 1) et 2’315’000 euros HT au titre des études d’exécution et des travaux préliminaires (phase 2) et des travaux de construction (phase 3).
Le contrat prévoyait le règlement d’un acompte représentant 20 % du montant des travaux des phases 2 et 3 (soit la somme de 463’000 euros ) au plus tard à l’émission de l’ordre de service prescrivant le démarrage des études d’exécution et travaux préliminaires.
Le permis de construire a été déposé le 1er avril 2016, avec une déclaration d’ouverture de chantier demandée le 2 avril 2016. Les travaux ont commencé en novembre 2016.
Par courrier du 16 décembre 2016, la SAS GA Entreprise a signifié à la société Biovitis qu’elle interrompait le cours du chantier en l’absence de règlement total de l’acompte prévu au contrat, précisant n’avoir reçu que 10 % d’acompte (soit la somme de 231’500 euros), ce qui avait permis de réaliser les terrassements et la plate-forme et de lancer les études d’exécution. Dans ce même courrier, elle invitait la société Biovitis à lui communiquer la date de versement du complément d’acompte afin « de relancer la préfabrication et de programmer [son] intervention sur chantier » et d’engager le démarrage de la phase 2 du projet.
Le même jour, la société GA Entreprise a adressé à la société Biovitis un avenant n°1, d’un montant de 1’178’361 euros HT, que celle-ci n’a pas signé.
Le 28 avril 2017, la société GA Entreprise a fait constater par huissier l’état d’avancement du chantier. Les travaux n’ont pas été repris par la suite par cette dernière. Le permis de construire a été transféré au profit d’une autre entreprise qui a réalisé les travaux d’édification du bâtiment.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 1er juin 2017, adressé à la société Biovitis, la société GA Entreprise s’est prévalue de la résiliation du marché à l’initiative du maître d’ouvrage, la mettant en demeure de lui régler au titre des dépenses exposées (charges engagées, règlement des sous-traitants et immobilisation), la somme totale 36’260 euros, après déduction de l’acompte versé à hauteur de 306’500 euros outre celle de 597’500 euros d’indemnité au titre du manque à gagner.
Par acte d’huissier en date du 28 septembre 2017, la SAS GA Entreprise a fait assigner devant le tribunal de commerce d’Aurillac la société Biovitis pour que soit constatée la résiliation du marché de travaux à ses torts exclusifs et pour obtenir sa condamnation au paiement des sommes de 36’960 euros au titre du solde des dépenses exposées et 597’500 euros en réparation de son préjudice constitué par le manque à gagner résultant de la cessation anticipée du marché.
Par jugement du 8 octobre 2019, le tribunal de commerce d’Aurillac a ordonné une mesure d’expertise, qui a été confiée à M. [Z]. L’expert a déposé son rapport le 12 avril 2021.
Par jugement rendu le 9 septembre 2022, le tribunal de commerce a statué en ces termes :
-Condamne la SA Greencel, anciennement dénommée Biovitis, à payer et porter à la SAS GA Entreprise la somme de 253’315,30 euros en réparation de ses préjudices, avec intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 1er juin 2017 ;
-Dit que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produiront intérêts ;
-Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement, nonobstant toutes voies de recours et sans caution, dans la limite de 130’000 euros ;
-Ordonne la mainlevée des différentes cautions souscrites par la SAS GA Entreprise auprès de LCL et de la Banque Européenne du Crédit Mutuel concernant ce chantier ;
-Condamne la SA Greencel, anciennement dénommée Biovitis, à payer et porter à la SAS GA Entreprise la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
-Déboute les parties de leurs autres demandes, fins et conclusions plus amples et contraires ;
-Condamne la SA Greencel, anciennement dénommée Biovitis, aux entiers dépens de la procédure, comprenant les frais d’expertise.
La SA Greencel a relevé appel de cette décision par déclaration électronique enregistrée le 21 novembre 2022.
La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 13 juin 2024.
Vu les conclusions transmises par la SA Greencel le 20 février 2023 ;
Vu les conclusions transmises par la SAS GA Entreprise le 16 mai 2023 ;
En application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées pour l’exposé complet des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Condamne la SA Greencel aux dépens d’appel, cette condamnation étant assortie au profit de maître Gutton du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont elle a fait l’avance sans avoir reçu provision, en application de l’article 699 du code de procédure civile ;
Condamne la SA Greencel à payer à la SAS GA Entreprise la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre irrépétibles exposés pour les besoins de la procédure la cour.
Le Greffier Le Président
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