Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Rennes
Thématique : Contrat d’assurance : opposabilité des conditions générales et limites de la garantie perte d’exploitation
→ RésuméContexte de l’affaireLe 10 mars 2022, la société L’Homme a interjeté appel d’un jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes le 24 février 2022. Ce jugement avait débouté L’Homme de ses demandes d’indemnisation à l’encontre de la société Hübener Versicherungs-AG, suite à la fermeture de son établissement en raison des mesures gouvernementales liées à la pandémie de Covid-19. Demandes de la société L’HommeDans ses écritures notifiées le 25 novembre 2022, L’Homme a demandé à la cour de débouter Hübener Versicherungs-AG de ses demandes et de juger son appel recevable et fondé. Elle a contesté plusieurs points du jugement initial, notamment l’opposabilité des conditions générales du contrat d’assurance, l’absence de lien entre l’interdiction d’accès aux locaux et des événements matériels, et l’inapplicabilité de la garantie perte d’exploitation. Réclamations spécifiquesL’Homme a également demandé que la cour ordonne une expertise judiciaire pour évaluer les dommages financiers subis depuis le 14 mars 2020, ainsi qu’une provision de 100 000 euros pour pertes d’exploitation. Elle a sollicité le remboursement de frais irrépétibles et la condamnation de Hübener aux dépens. Position de Hübener Versicherungs-AGEn réponse, Hübener Versicherungs-AG a demandé à la cour de confirmer le jugement initial dans son intégralité et de débouter L’Homme de toutes ses demandes. Elle a soutenu que les conditions particulières du contrat avaient été signées par L’Homme et que les conditions générales étaient applicables. Hübener a également précisé que les pertes d’exploitation n’étaient couvertes que si elles résultaient d’un dommage matériel garanti. Arguments des partiesL’Homme a fait valoir que les conditions générales n’étaient pas opposables, tandis que Hübener a affirmé que les conditions particulières faisaient référence aux dispositions générales. Hübener a insisté sur le fait que les pertes d’exploitation n’étaient pas couvertes par le contrat en raison de l’absence de sinistre matériel, et que la fermeture de l’établissement ne pouvait être assimilée à un dommage garanti. Décision de la courLa cour a confirmé le jugement du tribunal de commerce, statuant que les conditions générales étaient opposables à L’Homme et que les pertes d’exploitation ne pouvaient être indemnisées sans un sinistre matériel. Elle a débouté L’Homme de ses demandes d’indemnisation et a condamné cette dernière à payer des frais à Hübener, tout en confirmant les dispositions sur les dépens. |
5ème Chambre
ARRÊT N°-01
N° RG 22/01677 – N° Portalis DBVL-V-B7G-SRXS
(Réf 1ère instance : 2021F00175)
S.A.S. L’HOMME
C/
Société HÜBENER VERSICHERUNGS AG
Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 08 JANVIER 2025
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,
Assesseur : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,
Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,
GREFFIER :
Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 13 Novembre 2024
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 08 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.S. L’HOMME
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Guillaume PRAT de la SELARL GUILLAUME PRAT, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de SAINT-BRIEUC
INTIMÉE :
Société HÜBENER VERSICHERUNGS AG Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 4]
[Localité 1] – ALLEMAGNE
Représentée par Me Marie VERRANDO de la SELARL LX RENNES-ANGERS, Postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Eloïse MARINOS de la SELAS BYRD, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
La société L’Homme exploite un fonds de commerce de club libertin situé à [Adresse 5] à [Localité 2], sous l’enseigne ‘[6]’.
Afin d’assurer son activité, la société L’Homme s’est rapprochée de son courtier M. [B] [Z], qui lui-même a pris contact avec la société Aleade, mandataire en France de la société Hübener Versicherungs-AG.
La société L’Homme a souscrit une police d’assurance multirisque professionnelle auprès de la société Hübener Versicherungs-AG.
Après la parution des mesures gouvernementales pour lutter contre la propagation du Covid-19, la société L’Homme a interrogé la société Aleade sur la possibilité de percevoir une indemnité au titre de ses pertes d’exploitation suite à la fermeture administrative de son établissement.
Par courrier du 28 mai 2020, la société Aleade a répondu par la négative.
La société L’Homme a assigné la société Hübener Versicherungs-AG devant le tribunal de commerce de Rennes.
Par jugement du 24 février 2022, le tribunal de commerce de Rennes a :
– dit et jugé que les conditions générales du contrat d’assurance souscrit par la société L’Homme auprès de la société Hübener Versicherungs-AG lui sont opposables,
– dit et jugé que l’interdiction d’accès aux locaux n’est pas liée à une raison matérielle et que ladite interdiction ne résulte pas d’événements ou de catastrophes naturelles,
– débouté la société L’Homme de ses demandes indemnitaires, au titre de la perte d’exploitation, à l’encontre de la société Hübener Versicherungs-AG,
– condamné la société L’Homme à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté la société Hübener Versicherungs-AG du surplus de ses demandes, fins et conclusions,
– débouté la société L’Homme de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamné la société L’Homme aux entiers dépens,
– liquidé les frais de greffe à la somme de 69,59 euros tels que prévus aux articles 695 et 701 du code de procédure civile.
Le 10 mars 2022, la société L’Homme a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 25 novembre 2022, elle demande à la cour de :
– débouter la société Hübener Versicherungs-AG de ses demandes, fins et conclusions,
– dire et juger recevable et bien fondé son appel interjeté,
– infirmer le jugement du tribunal de commerce de Rennes du 24 février 2022 (RG n°2021F00175) en ce qu’il :
* a dit et jugé que les conditions générales du contrat d’assurance souscrit par elle auprès de la société Hübener Versicherungs-AG lui sont opposables,
* a dit que l’interdiction d’accès aux locaux n’est pas liée une raison matérielle et que ladite interdiction ne résulte pas d’événements ou de catastrophes naturelles,
* a dit et jugé que la garantie perte d’exploitation alléguée par elle ne trouve pas à s’appliquer,
* l’a déboutée de ses demandes indemnitaires au titre de la perte d’exploitation à l’encontre de la société Hübener Versicherungs-AG,
* l’a condamnée à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
* l’a déboutée de toutes ses demandes, fins et conclusions,
* l’a condamnée aux entiers dépens,
Statuant de nouveau
– dire et juger qu’aucune condition générale relative au contrat d’assurance multirisques Lieux et Loisirs de Nuit du contrat police n° HV1304-HOM-35-1777 ne lui est opposable,
– dire et juger que les conditions générales (pièce 1 versée par la société Hübener Versicherungs-AG) ne sont pas les dispositions générales visées dans les conditions particulières du contrat d’assurance multirisques Lieux de Loisirs de Nuit du contrat police n° HV1304-HOM-35-1777, ne lui sont pas opposables et n’ont aucun effet à son égard,
– dire et juger que seules les conditions particulières du contrat d’assurance multirisque Lieux et Loisirs de Nuit du contrat police n° HV1304-HOM-35-1777 lui sont opposables,
– dire et juger que la garantie ‘dommages financiers, 6, pertes de marge brute et/ou de la valeur vénale des éléments incorporels du fonds’ : 200 000 euros, garantie souscrite par elle, est applicable,
– dire et juger qu’elle a subi des dommages financiers/pertes d’exploitation compte tenu de la fermeture imposée de l’établissement ‘[6]’ depuis le 14 mars 2020 par l’arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19,
En conséquence,
– ordonner une expertise judiciaire contradictoire comptable et désigner tel expert qu’il plaira au tribunal avec pour mission de déterminer les dommages financiers/pertes d’exploitation subis à compter du 14 mars 2020,
– condamner la société Hübener Versicherungs-AG à lui payer la somme de 100 000 euros à titre de provisions à valoir sur les dommages financiers/pertes d’exploitation subies,
– condamner la société Hübener Versicherungs-AG à lui payer la somme de 8 000 euros au titre des frais irrépétibles de la procédure de première instance et d’appel sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société Hübener Versicherungs-AG aux entiers dépens
Par dernières conclusions notifiées le 10 octobre 2024, la société Hübener Versicherungs-AG demande à la cour de :
À titre principal
– confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Rennes en toutes ses dispositions,
En conséquence,
– débouter la société L’Homme de toutes ses demandes,
À titre subsidiaire
Si par l’extraordinaire la cour infirmait le jugement et statuait à nouveau :
– débouter la société L’Homme de sa demande de provision à hauteur de 100 000 euros car non seulement l’appelante ne définit pas la période d’indemnisation considérée, mais ne justifie pas d’une quelconque perte financière en l’état d’un seul bilan antérieur à la période d’inactivité,
– débouter la société L’Homme de sa demande d’expertise,
À titre infiniment subsidiaire
Subsidiairement, si la cour infirmait le jugement et statuait à nouveau en ordonnant la désignation d’un expert :
– prendre acte de ce qu’elle émet ses plus expresses protestations et réserves quant à la demande d’expertise judiciaire de la société L’Homme,
– condamner la société L’Homme, demanderesse à la mesure d’expertise, à en supporter les frais,
En tout état de cause
– débouter la société L’Homme de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens,
Et rejetant toutes prétentions contraires, comme irrecevables et en tout cas non fondées,
– condamner la société L’Homme à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens avec distraction au profit de l’avocat soussigné aux offres de droit.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 24 octobre 2024.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe :
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute la SAS L’Homme de sa demande en frais irrépétibles ;
Condamne la SAS L’Homme à payer à la société Hübener Versicherungs-AG la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS L’Homme aux dépens qui pourront être recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
Le greffier, La présidente,
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