Cour d’appel de Rennes, 29 janvier 2025, RG n° 25/00062
Cour d’appel de Rennes, 29 janvier 2025, RG n° 25/00062

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Prolongation de la rétention administrative : conditions et enjeux de sécurité publique.

Résumé

Contexte de l’affaire

Monsieur [R] [V], de nationalité tunisienne, a été placé en rétention administrative par le Préfet d’Ille-et-Vilaine en raison d’une obligation de quitter le territoire français. Cette décision a été notifiée le 4 juin 2024, suivie d’une série de prolongations de sa rétention administrative, en raison de son comportement et de son statut.

Prolongations de rétention

Après plusieurs décisions judiciaires, la rétention de Monsieur [R] [V] a été prolongée à plusieurs reprises, notamment pour des périodes de 26 jours, 30 jours, et 15 jours, en raison de son comportement délictueux et de l’absence de documents d’identité valides. Les autorités ont justifié ces prolongations par des préoccupations liées à l’ordre public.

Appel de la décision

Le 28 janvier 2025, Monsieur [R] [V] a formé appel contre une ordonnance du 27 janvier 2025 qui prolongeait sa rétention administrative pour 15 jours supplémentaires. Son avocat a contesté la recevabilité de la requête du Préfet, arguant que les conditions pour une nouvelle prolongation n’étaient pas remplies.

Arguments des parties

Le procureur général a soutenu que l’appel était irrecevable, car déposé après le délai légal. En revanche, l’avocat de Monsieur [R] [V] a affirmé que l’appel était recevable et a contesté la légitimité de la prolongation de la rétention, en soulignant l’absence de menace à l’ordre public.

Décision de la Cour

La Cour a jugé que l’appel était recevable, car déposé dans les délais après notification de la décision initiale. Elle a ensuite examiné la légitimité de la prolongation de la rétention, concluant que les conditions étaient remplies, notamment en raison des antécédents judiciaires de Monsieur [R] [V] et de son comportement.

Conclusion

La Cour a confirmé l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes, ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [R] [V] pour une période maximale de 15 jours, en raison de la menace qu’il représentait pour l’ordre public.

COUR D’APPEL DE RENNES

N° 25/39

N° RG 25/00062 – N° Portalis DBVL-V-B7J-VTCG

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

O R D O N N A N C E

articles L 741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Nous, Sébastien PLANTADE, conseiller à la cour d’appel de RENNES, délégué par ordonnance du premier président pour statuer sur les recours fondés sur les articles L.741-10 et suivants du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, assisté de Eric LOISELEUR, greffier placé,

Statuant sur l’appel formé le 28 Janvier 2025 à 11H58 par la CIMADE pour :

M. [R] [V]

né le 23 Juin 1995 à [Localité 3] (TUNISIE)

de nationalité Tunisienne

ayant pour avocat Me Samuel MOULIN, avocat au barreau de RENNES

d’une ordonnance rendue le 27 Janvier 2025 à 11H52 par le magistrat en charge des rétentions administratives du Tribunal judiciaire de RENNES qui a ordonné la prolongation du maintien de M. [R] [V] dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée maximale de quinze jours à compter du 27 Janvier 2025 à 24H00;

En présence de M. [C] [G], membre du Pôle Régional Contentieux de la Préfecture d’Ille et Vilaine, représentant le préfet d’Ille et Vilaine, dûment convoqué,

En l’absence du procureur général régulièrement avisé, Monsieur FICHOT, avocat général, ayant fait connaître son avis par écrit déposé le 28 Janvier 2025 lequel a été mis à disposition des parties.

En l’absence de [R] [V], représenté par Me Samuel MOULIN, avocat,

Après avoir entendu en audience publique le 29 Janvier 2025 à 10H00 l’avocat et le représentant du préfet en leurs observations,

Avons mis l’affaire en délibéré et ce jour, avons statué comme suit :

Monsieur [R] [V] a fait l’objet d’un arrêté du Préfet d’Ille-et-Vilaine en date du 03 juin 2024, notifié le 04 juin 2024, portant obligation d’avoir à quitter le territoire français sans délai.

Le 13 novembre 2024, Monsieur [R] [V] s’est vu notifier par le Préfet d’Ille-et-Vilaine une décision de placement en rétention administrative, au centre de rétention administrative (CRA) de [Localité 1] pour une durée de quatre jours. A l’appui de sa décision, le Préfet a retenu que faisant l’objet d’une obligation de quitter sans délai le territoire français par arrêté préfectoral du 03 juin 2024, ayant fait l’objet d’une décision portant assignation à résidence par arrêté notifié le 04 juin 2024, Monsieur [R] [V] déclarait être célibataire, sans enfant à charge, indiquait avoir de la famille en Tunisie et non en France, ne démontrant pas avoir noué en France des liens dont l’intensité serait exclusive de tous autres qu’il conservait dans son pays d’origine, de sorte que la mesure opposée ne portait pas une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale au sens des dispositions de l’article 8 de la convention européenne de sauvegardes des droits de l’homme et des libertés fondamentales, tandis que l’intéressé ne faisait état d’aucun problème de santé, ne produisait aucun élément de nature à considérer que son éloignement du territoire portât une atteinte grave à sa santé et n’invoquait aucun élément de nature à établir une vulnérabilité ou un handicap quelconque qui fissent obstacle à un placement en rétention. Il a été ajouté que l’intéressé était dépourvu de tout document d’identité ou de voyage valide, ne justifiait d’aucun domicile en France, ayant déclaré être hébergé par un ami depuis deux jours sans en attester, qu’il avait déclaré refuser de retourner dans son pays d’origine, qu’il n’avait pas déféré à la mesure d’éloignement notifiée le 04 juin 2024, était connu pour plusieurs faits délictueux, notamment des délits routiers commis entre 2023 et 2024, avait de nouveau été placé en garde à vue pour des délits routiers, de sorte que la multiplicité des faits et leur fréquence étaient constitutifs d’un comportement représentant une menace à l’ordre public. Le Préfet en avait conclu que Monsieur [R] [V] ne présentait pas de garanties de représentation effectives suffisantes propres à prévenir le risque de fuite.

Par requête du 14 novembre 2024, Monsieur [R] [V] a contesté l’arrêté de placement en rétention administrative. Par requête motivée en date du 16 novembre 2024, reçue le 17 novembre 2024 à 18h 09 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 26 jours de la rétention administrative de Monsieur [R] [V].

Par ordonnance rendue le 18 novembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a rejeté le recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative et ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [R] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 26 jours. Cette décision a été confirmée par la Cour d’Appel de Rennes le 20 novembre 2024.

Par requête motivée en date du 12 décembre 2024, reçue le 12 décembre 2024 à 14 h 32 au greffe du tribunal de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes d’une nouvelle demande de prolongation pour une durée de 30 jours de la rétention administrative de Monsieur [R] [V].

Par ordonnance rendue le 13 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [R] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 30 jours.

Par requête motivée en date du 11 décembre 2024, reçue le 11 janvier 2025 à 16h 29 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du Préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 15 jours de la rétention administrative de Monsieur [R] [V].

Par ordonnance rendue le 12 janvier 2025, le magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [R] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 15 jours. Cette décision a été confirmée par la Cour d’Appel de Rennes le 14 janvier 2025.

Par requête motivée en date du 25 janvier 2025, reçue le 26 janvier 2025 à 11h 53 au greffe du tribunal judiciaire de Rennes, le représentant du préfet d’Ille-et-Vilaine a saisi le tribunal judiciaire de Rennes d’une demande de prolongation pour une durée de 15 jours de la rétention administrative de Monsieur [R] [V].

Par ordonnance rendue le 27 janvier 2025, le magistrat du siège du Tribunal judiciaire de Rennes a ordonné la prolongation du maintien de Monsieur [R] [V] en rétention dans les locaux non pénitentiaires pour un délai maximum de 15 jours à compter du 27 janvier 2025.

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 28 janvier 2025 à 11h58, Monsieur [R] [V] a formé appel de cette ordonnance. L’appelant fait valoir, au soutien de sa demande d’infirmation de la décision entreprise, que la requête du Préfet est irrecevable en raison de mentions incomplètes sur le registre, s’agissant de la décision de la Cour d’Appel de Rennes faisant suite à la décision du juge ayant autorisé une troisième prolongation de la rétention administrative et que par ailleurs, les conditions pour prétendre à une quatrième prolongation de la rétention administrative ne sont aucunement remplies, l’intéressé n’ayant pas fait obstruction à la mise en ‘uvre de la mesure d’éloignement, n’ayant pas formé de demande de protection qualifiée de dilatoire, ne constituant pas une menace à l’ordre public alors qu’aucun élément ne vient établir la délivrance prochaine du laissez-passer consulaire.

Le procureur général, suivant avis écrit du 28 janvier 2025, sollicite que soit constatée l’irrecevabilité de la déclaration d’appel parvenue à 11h 58, au-delà du délai de 24 heures prévu par l’article R 743-10 puisque la décision du premier juge a été rendue le 27 janvier 2025 à 11h 52 et demande subsidiairement la confirmation de la décision entreprise.

Monsieur [R] [V] n’a pas comparu à l’audience, au motif qu’il était retenu simultanément par une consultation médicale. Développant les termes de la déclaration d’appel, son conseil constate que l’appel est recevable, s’en rapporte à l’appréciation de la Cour quant à la recevabilité de la requête du Préfet, en fonction des vérifications des mentions figurant sur le registre du centre de rétention administrative et estime que le critère de la menace pour l’ordre public ne peut être suffisamment établi.

Comparant à l’audience, le représentant de la Préfecture d’Ille-et-Vilaine demande la confirmation de la décision entreprise, faisant observer que la copie du registre jointe est bien actualisée, comprenant notamment la date de la décision de la Cour d’Appel ayant statué sur la demande de troisième prolongation de la rétention administrative et que le critère de la menace à l’ordre public a déjà été retenu dès la décision de placement en rétention administrative et confirmé par les décisions judiciaires, de sorte que les conditions pour obtenir une quatrième prolongation de la rétention sont satisfaites.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement,

Déclarons l’appel recevable,

Confirmons l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Rennes en date du 27 janvier 2025,

Laissons les dépens à la charge du trésor public,

Fait à Rennes, le 29 Janvier 2025 à 12H00

LE GREFFIER, PAR DÉLÉGATION, LE CONSEILLER,

Notification de la présente ordonnance a été faite ce jour à [R] [V], à son avocat et au préfet

Le Greffier,

Cette ordonnance est susceptible d’un pourvoi en cassation dans les deux mois suivant la présente notification et dans les conditions fixées par les articles 973 et suivants du code de procédure civile.

Communication de la présente ordonnance a été faite ce même jour au procureur général.

Le Greffier

 


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