Cour d’appel de Rennes, 29 janvier 2025, RG n° 21/04826
Cour d’appel de Rennes, 29 janvier 2025, RG n° 21/04826

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Rennes

Thématique : Contrat de travail et conditions d’emploi d’un joueur de football amateur : enjeux de régularité et de reconnaissance.

Résumé

Présentation des Parties

Monsieur [X] [S] [P], né le 20 juin 1999 au Gabon, a été représenté par Me Azilis Becherie Le Coz lors de l’audience. L’intimée, l’Association [Localité 5] Atlantique Football (S.N.A.F.), est représentée par Me Laurence Scetbon-Didi.

Contexte de l’Affaire

M. [S] [P] a intégré le club de football SNAF en tant que gardien de but à la fin août 2017, bénéficiant d’un visa touristique. Une licence de football a été enregistrée pour lui le 4 septembre 2017. Après l’expiration de son visa en novembre 2017, il est retourné au Gabon avant d’obtenir un nouveau visa en février 2018. Le SNAF a tenté d’obtenir une autorisation de travail pour lui, mais la demande a été refusée en août 2018.

Demande d’Asile et Saisine du Conseil de Prud’hommes

En janvier 2019, M. [S] [P] a présenté une demande d’asile. Le 26 décembre 2019, il a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Nazaire pour faire valoir ses droits, demandant la reconnaissance d’une relation de travail avec le SNAF et le paiement de divers rappels de salaire et indemnités.

Jugement du Conseil de Prud’hommes

Le 21 mai 2021, le conseil de prud’hommes a jugé qu’il n’existait pas de relation contractuelle entre M. [S] [P] et le SNAF, déboutant M. [S] [P] de toutes ses demandes et le condamnant à verser des dommages et intérêts pour procédure abusive.

Appel de M. [S] [P]

M. [S] [P] a interjeté appel le 26 juillet 2021, demandant l’infirmation du jugement et la reconnaissance d’un contrat de travail. Il a formulé des demandes de rappels de salaire, d’indemnités et de dommages-intérêts.

Conclusions de l’Intimée

L’association SNAF a conclu en faveur de la confirmation du jugement de première instance, arguant qu’il n’existait pas de relation contractuelle et demandant des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Éléments de Preuve et Analyse

M. [S] [P] a produit un contrat de travail non signé et des preuves de participation à des matchs, mais l’association a contesté l’existence d’un lien de subordination et la nature des paiements reçus. La cour a examiné les éléments de preuve, notamment les échanges de messages et les documents relatifs à son activité au sein du club.

Décision de la Cour

La cour a confirmé le jugement du conseil de prud’hommes, rejetant la demande de M. [S] [P] pour l’absence de preuve d’un contrat de travail. Elle a également infirmé la condamnation pour procédure abusive, considérant que le simple fait de perdre une affaire ne constitue pas un abus de droit.

Conséquences Financières

M. [S] [P] a été condamné aux dépens d’appel, tandis que la demande de l’association pour des dommages-intérêts a été rejetée. La cour a statué sur les frais de justice, confirmant la décision de première instance concernant les dépens.

8ème Ch Prud’homale

ARRÊT N°22

N° RG 21/04826 –

N° Portalis DBVL-V-B7F-R4DV

M. [X] [S] [P]

C/

Association [Localité 5] ATLANTIQUE FOOTBALL (S.N.A.F.)

Sur appel du jugement du C.P.H.de SAINT -NAZAIRE du 21/05/2021

RG : 19/227

Réformation partielle

Copie exécutoire délivrée

le : 30-01-25

à :

-Me Géraldine MARION

-Me Laurence SCETBON-DIDI

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 29 JANVIER 2025

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Nadège BOSSARD, Présidente,

Monsieur Bruno GUINET, Conseiller,

Madame Anne-Laure DELACOUR, Conseillère,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 28 Novembre 2024

devant Madame Nadège BOSSARD, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

En présence de Madame Natacha BONNEAU-RICHARD, médiatrice judiciaire,

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 29 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [X] [S] [P]

né le 20 Juin 1999 à [Localité 4] (GABON)

demeurant [Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Azilis BECHERIE LE COZ substituant à l’audience Me Géraldine MARION de la SELARL CABINET ADVIS,Avocats au Barreau de RENNES

(bénéficiaire d’une aide juridictionnelle totale numéro 2021/007633 du 25/06/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de RENNES)

INTIMÉE :

L’Association [Localité 5] ATLANTIQUE FOOTBALL (S.N.A.F.) prise en la personne de son Président en exercice et ayant son siège :

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Laurence SCETBON-DIDI, Avocat au Barreau de SAINT-NAZAIRE

M. [X] [S] [P], de nationalité gabonaise, s’est présenté fin août 2017 comme joueur de football (gardien de but) afin d’intégrer le club de l’association [Localité 5] Atlantique Football (la SNAF).

L’association [Localité 5] Atlantique Football (la SNAF) est un club de football amateur affilié à la FFF (Fédération Française de Football) qui emploie habituellement moins de dix salariés.

Cette association de loi 1901 est en charge de développer la pratique du football depuis les enfants de moins de 6 ans (U6) jusqu’aux vétérans.

La convention collective applicable est la convention collective du sport, code 2511.

M. [S] [P] bénéficiait d’un visa touristique valable jusqu’au 14 novembre 2017.

Une licence de football a été enregistrée le 04 septembre 2017.

A l’expiration de son visa en novembre 2017, il est retourné au Gabon et a sollicité un nouveau visa qu’il a obtenu le 5 février 2018 jusqu’au 3 juin 2018.

Le 20 avril 2018, le SNAF a effectué les démarches auprès de la DIRECCTE et de la Préfecture de Loire Atlantique en vue d’obtenir une autorisation de travail pour M. [S] [P].

La demande a été refusée le 8 août 2018.

Le 3 octobre 2018, le SNAF a formé un recours gracieux contre ce rejet.

En janvier 2019, M. [S] [P] a présenté une demande d’asile.

Le 26 décembre 2019, M. [S] [P] a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Nazaire aux fins de :

– dire fondées et recevables les demandes formées par M. [S] [P],

– dire et juger que M. [S] [P] devait être classé en groupe 3,

– dire et juger que les salaires applicables sont :

– 2017 soit un salaire de 1 740,35 € brut

– 2018 soit un salaire de 1 761,75 € brut

– 2019 soit un salaire de 1 788,49 € brut

– dire et juger que M. [S] [P] n’a pas été réglé de la totalité de ses salaires,

– dire et juger que l’association SNAF 44 a dissimulé des heures,

– dire et juger que M. [S] [P] a été licencié sans motif et sans procédure,

– dire et juger que l’association SNAF 44 a embauché, conservé à son service ou employé M. [S] [P] non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

Le salaire brut de référence étant de 1 788,49 €.

En conséquence, condamner l’association SNAF 44 à verser à M. [S] [P] :

– 31 793,00 € au titre des rappels de salaire et 3 180 € au titre des congés payés,

– 10 730,00 € au titre du travail dissimulé,

– 15 000,00 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1000,00 € au titre de la procédure irrégulière,

– 3 576,98 € au titre de l’indemnité de préavis et 358 € au titre des congés payés,

– 746,69 € au titre de l’indemnité de licenciement,

– 10 730,00 € au titre de l’emploi d’un salarié non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

– dire et juger que les sommes indemnitaires énoncées ci-dessus devront être fixées nettes de CSG/CRDS toute cotisation toute contribution au profit de M. [S] [P] ;

– ordonner la fixation des sommes mentionnées ci-dessus avec intérêts légaux et anatocisme à compter de la saisine ;

– ordonner l’exécution provisoire sur la totalité de la décision à intervenir nonobstant appel et sans caution ;

– ordonner la délivrance de l’ensemble des bulletins de paie ainsi que des documents de rupture rectifiées sous astreinte de 50,00 € par jour à compter de la décision à intervenir ;

– débouter la SNAF de sa demande au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

– débouter la SNAFde l’ensemb1e de ses demandes, fins et conclusions ;

– condamner l’employeur, la SNAF 44 prise en la personne de son représentant à la somme de 2 000,00 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner la SNAF 44 prise en la personne de son représentant légal aux entiers dépens, ce compris les sommes à devoir dans le cadre d’une éventuelle exécution par voie d’huissier de la décision à intervenir ou pour toute autre cause.

Par jugement en date du 21 mai 2021, le conseil de prud’hommes de Saint-Nazaire a :

– dit et jugé qu’il n’existe pas de relation contractuelle entre M. [S] [P] et l’association [Localité 5] Atlantique Football ;

– débouté M. [S] [P] de l’intégralité de ses demandes ;

– condamné M. [S] [P] à verser à l’association [Localité 5] Atlantique Football la somme de 250,00 € au titre des dommages et intérêts pour procédure abusive ;

– dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’association [Localité 5] Atlantique Football ;

– condamné M. [S] [P] aux dépens.

M. [S] [P] a interjeté appel le 26 juillet 2021.

Il a conclu le 15 octobre 2021.

L’association [Localité 5] Atlantique Football a conclu le 29 octobre 2021.

Les parties ont été avisées le 12 juillet 2024 de la fixation de la clôture au 24 octobre 2024 et de la plaidoirie le 28 novembre 2024.

Selon ses deuxièmes et dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 23 octobre 2024, M. [S] [P], appelant, sollicite :

– juger M. [S] [P] recevable en son appel et bien fondé.

– infirmer le jugement.

Et, statuant à nouveau :

– juger que les parties étaient liées par un contrat de travail,

– juger que M. [S] [P] n’a pas été réglé de la totalité de ses salaires,

– juger que l’association [Localité 5] Atlantique Football a dissimulé des heures de travail,

– juger que M. [S] [P] a été licencié sans motif et sans procédure,

– Juger que l’association [Localité 5] Atlantique Football a embauché, conservé à son service ou employé M. [S] [P] non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

– en conséquence, condamner l’association [Localité 5] Atlantique Football à verser à M.[S] [P] :

– 29.250,68 € bruts à titre de rappels de salaire et 2.925,07 € au titre des congés payés,

– Subsidiairement : 28.369,94 € bruts à titre de rappels de salaire et 2.836,99 € au titre des congés payés,

– 9.398 € à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

-15.000 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1.566,37 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, soit un mois de salaire, et 156,63 € au titre des congés payés,

– 600,25 € au titre de l’indemnité de licenciement,

– Subsidiairement, 1.566 € à titre de dommages-intérêts de la procédure irrégulière,

-4.699,11 € au titre de l’emploi d’un salarié non muni du titre l’autorisant à exercer une activité salariée en France.

– juger que les sommes indemnitaires énoncées ci-dessus devront être fixées nettes de CSG/CRDS et de toute cotisation et toute contribution, au profit de M. [S] [P] ;

– ordonner la délivrance de l’ensemble des bulletins de paie ainsi que des documents de rupture rectifiés sous astreinte de 50,00 € par jour à compter de la signification de la décision à intervenir ;

– condamner l’association [Localité 5] Atlantique Football prise en la personne de son représentant légal aux entiers dépens, ce compris les sommes à devoir dans le cadre d’une éventuelle d’exécution par voie d’huissier de la décision à intervenir ou pour toute autre cause ;

– juger que les sommes à caractère salarial produiront intérêts au taux légal à compter de la saisine de la juridiction (26.12.2019) et se capitaliseront conformément aux articles 1231-7 et 1343-2 du code civil;

– débouter la partie intimée de toutes ses demandes, fins et conclusions.

Selon ses deuxièmes et dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 13 novembre 2024, l’association [Localité 5] Atlantique Football, intimée, sollicite :

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Saint-Nazaire en date du 21 mai 2021 qui a :

– Dit et jugé qu’il n’existe pas de relation contractuelle entre M. [S] [P] et l’association [Localité 5] Atlantique Football,

– Débouté M. [S] [P] de l’intégralité de ses demandes,

– Condamné M. [S] [P] aux dépens.

– réformer le jugement du Conseil de Prud’hommes de Saint-Nazaire en date du 21 mai 2021 sur les points suivants :

– condamner M. [S] [P] à verser à l’association [Localité 5] Atlantique Football la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

– condamner M. [S] [P] à verser à l’association [Localité 5] Atlantique Football la somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture initialement fixée au 24 octobre 2024 a été reportée à la demande de l’appelant qui avait conclu la veille et a été prononcée le 14 novembre 2024.

Par conclusions notifiées le 13 novembre 2024, M. [S] [P] demande à la cour de déclarer irrecevables les pièces et conclusions notifiées le 13 novembre 2024, subsidiairement de reporter la clôture à l’ordonnance de plaidoirie.

Par conclusions notifiées le 18 novembre 2024, l’association demande à la cour de rejeter la demande d’irrecevabilité des conclusions de l’intimée du 13 novembre 2024 et des pièces 15, 16 et 17, de les déclarer recevables et de condamner M. [P] au paiement de la somme de 150 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’audience, la cour a demandé à l’appelant de communiquer l’original du contrat de travail dont il communiquait une copie.

Il a versé aux débats une copie de la copie certifiée par le maire de [Localité 5] le 20 décembre 2017 comme étant conforme à l’original. Cette pièce est identique aux pièces 1 et 11 qui consistaient respectivement dans le verso et le recto initialement communiqués séparément. Elle était elle-même communiquée par l’association intimée en pièce 6.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement, contradictoirement, par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,

Rejette la demande tendant à voir déclarer irrecevables les pièces et conclusions notifiées le 13 novembre 2024, subsidiairement de reporter la clôture à l’ordonnance de plaidoirie,

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a condamné M. [X] [S] [P] pour procédure abusive,

L’infirme de ce chef,

statuant à nouveau,

Rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Rejette la demande formée par l’association [Localité 5] Atlantique Football sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. [X] [S] [P], bénéficiaire de l’aide juridictionnelle totale, aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

 


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