Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Rennes
Thématique : Rupture abusive de pourparlers publicitaires
→ RésuméUn refus de devis de campagne publicitaire à la dernière minute entre deux sociétés habituées à collaborer peut être considéré comme une rupture abusive de pourparlers. Dans une affaire, une agence de communication a obtenu 75 000 euros de dommages et intérêts après que son client ait mis fin à des discussions de plusieurs mois sans l’informer d’une mise en concurrence. Le client a agi de manière déloyale, laissant croire à l’agence que ses propositions étaient sur le point d’être validées, ce qui a conduit à une rupture soudaine et injustifiée de leur relation professionnelle.
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Un refus de devis de campagne publicitaire formulé à la dernière minute, entre deux sociétés ayant pris l’habitude de travailler ensemble, peut être sanctionné au titre de la rupture abusive de pourparlers. Une agence de communication a obtenu la condamnation de son client à 75 000 euros de dommages et intérêts.
Rupture soudaine fautive
Le client avait mis fin aux pourparlers qui
étaient en cours depuis plusieurs mois déjà avec l’agence de communication, faisant
preuve de légèreté blâmable en l’ayant fait travailler pendant une aussi longue
période, à ses frais avancés, à l’élaboration d’une campagne de communication
complexe et ambitieuse, avant de rompre subitement toute collaboration au
moment même où elle venait de valider, au moins dans leur principe, l’essentiel
des propositions de l’agence et ce, sans l’avoir jamais informée préalablement
qu’elle était mise en concurrence avec d’autres agences.
Prémices de rupture inexistants
En l’espèce, ce n’est
qu’à l’extrême fin du processus que l’agence de communication a été informée de
sa mise en concurrence avec d’autres agences. Le client de l’agence de communication ne
rapportait aucun commencement de preuve de ce qu’il aurait prévenu l’agence, antérieurement,
d’une mise en compétition avec d’autres agences concurrentes et ce, alors même
que l’agence travaillait depuis plus de cinq mois sur la campagne
promotionnelle.
Mise en concurrence inconnue de l’Agence
Le procédé, consistant
à prévenir au dernier moment une agence, qui pouvait dès lors légitimement se
croire seule à travailler sur le projet – qu’elle était mise en concurrence,
est des plus déloyaux, ce d’autant plus que le client n’ignorait pas que l’agence
avait déjà consacré beaucoup de temps et de moyens à l’élaboration du projet.
La déloyauté était d’autant plus grande que jusqu’à ce message de
mise en concurrence, tout dans l’attitude du client laissait augurer de la très
probable validation des propositions et devis de l’agence. Par ailleurs, a aucun
moment, les messages échangés à cette occasion entre les parties n’ont traduit
une quelconque dégradation de leur relations, ni même l’expression du moindre
désaccord du client face aux propositions de l’agence, tout portant à croire au
contraire que celles-ci remportaient l’adhésion.
Responsabilité extracontractuelle du client
Pour rappel, la liberté
de rompre des pourparlers trouve sa limite dans l’abus de son usage ou encore
dans la légèreté blâmable avec laquelle, à l’issue d’un long processus au cours
duquel une agence s’est employée à satisfaire toutes les exigences de l’autre
partie, le client met fin à ces relations, subitement, de manière déloyale et
pour des raisons au demeurant peu compréhensibles. Abusive et par là même
fautive, cette rupture justifie la mise en cause de la responsabilité
extra-contractuelle du client.
Calcul du préjudice
Les circonstances constitutives d’une faute commise dans l’exercice du droit de rupture unilatérale des pourparlers pré-contractuels ne sont pas la cause du préjudice consistant dans la perte d’une chance de réaliser les gains que permettait d’espérer la conclusion du contrat. La victime n’est pas fondée à réclamer, dans le cadre de son action en responsabilité extra-contractuelle, le paiement d’une indemnité correspondant au montant cumulé des frais qu’elle a engagés en pure perte et des honoraires dont elle a été privée. La partie lésée ne peut réclamer que le remboursement des seuls frais vainement exposés par elle pour les besoins de la négociation qui ont tourné court. Téléchargez la décision
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